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  • Responsabilité de la commune en raison d'un refus de permis de construire

    "Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 19 mars, 31 mars et 25 juillet 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE CANNES, représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE DE CANNES demande au Conseil d'Etat :

     

    1°) d'annuler l'arrêt du 19 décembre 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, d'une part, a annulé l'ordonnance du 11 octobre 2001 du juge des référés du tribunal administratif de Nice rejetant la demande de la SNC Cannes Esterel tendant à sa condamnation à lui verser une provision de 180 millions de francs à raison des préjudices subis à la suite du refus illégal et tardif opposé par le maire de Cannes à sa demande de permis de construire modificatif et, d'autre part, l'a condamnée à verser à cette société une provision de 100 000 euros ;

     

    2°) de mettre à la charge de la SNC Cannes Esterel une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

     

     

    Vu les autres pièces du dossier ;

     

    Vu le code de l'urbanisme ;

     

    Vu le code de justice administrative ;

     

    Après avoir entendu en séance publique :

     

    - le rapport de Mlle Courrèges, Auditeur,

     

    - les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de la COMMUNE DE CANNES et de la SCP Garaud-Gaschignard, avocat de la SNC Cannes Esterel,

     

    - les conclusions de M. Devys, Commissaire du gouvernement ;

     

     

     

    Considérant qu'aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ;

     

    Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par arrêté du 13 juin 1989, le maire de Cannes a accordé à M. X... le permis de construire trois immeubles à usage commercial, industriel, artisanal et de bureaux ; que, par arrêté du 9 janvier 1991, le maire a transféré ce permis au bénéfice de la SNC Cannes Esterel ; que le maire de Cannes, se fondant sur le défaut de conformité d'un des immeubles en cours de réalisation, a ordonné la suspension des travaux le 9 juin 1992 ; que la SNC Cannes Esterel a alors déposé une demande de permis de construire modificatif, qui a été rejetée par le maire de Cannes le 28 juillet 1994 ; que ce refus a été annulé par une décision du Conseil d'Etat, statuant au contentieux en date du 28 juillet 2000 ; que, dans ces conditions, la SNC Cannes Esterel a présenté devant le tribunal administratif de Nice une demande tendant à ce que la ville de Cannes soit condamnée à lui verser une provision à raison des préjudices qu'elle estime avoir subis à la suite de ce refus illégal de lui délivrer le permis de construire modificatif sollicité ; que, par une ordonnance en date du 11 octobre 2001, le vice-président du tribunal administratif de Nice, juge des référés, a rejeté sa demande ; que, toutefois, par un arrêt en date du 19 décembre 2002, la cour administrative d'appel de Marseille a, d'une part, annulé cette ordonnance et, d'autre part, accordé à la SNC Cannes Esterel une provision de 100 000 euros ;

     

    Considérant que, pour reconnaître l'existence d'une obligation non sérieusement contestable de la ville de Cannes à l'égard de la SNC Cannes Esterel, la cour a relevé que le refus illégal de délivrer le permis modificatif sollicité entre le 28 juillet 1994 et le 9 septembre 2002 était constitutif d'une faute qui devait être regardée comme établie ; qu'en se prononçant ainsi, sans répondre au moyen soulevé devant elle par la ville de Cannes et tiré du caractère exonératoire de responsabilité de l'infraction commise par ladite société en réalisant certains travaux non conformes au permis de construire initialement délivré, rendant ainsi nécessaire l'obtention d'un permis de régularisation, la cour a insuffisamment motivé son arrêt ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, l'arrêt attaqué doit être annulé ;

     

    Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

     

    Sur les fins de non-recevoir opposées en défense par la COMMUNE DE CANNES :

     

    Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'ordonnance en date du 11 octobre 2001 du juge des référés du tribunal administratif de Nice a été notifiée à la SNC Cannes Esterel le 30 octobre 2001 ; que, par suite, la requête d'appel de cette société, enregistrée le 12 novembre 2001, soit dans le délai de quinze jours prévu à l'article R. 541-3 du code de justice administrative, n'était pas tardive ;

     

    Considérant que, contrairement à ce que soutient la COMMUNE DE CANNES, la requête d'appel de la SNC Cannes Esterel était accompagnée de la décision attaquée ;

     

    Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

     

    Considérant qu'aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : L'instruction est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence ;

     

    Considérant que l'ordonnance de référé accordant ou refusant une provision en application de l'article R. 541-1 du code de justice administrative est rendue à la suite d'une procédure particulière, adaptée à la nature de la demande et à la nécessité d'une décision rapide ; qu'il résulte de l'instruction que plusieurs mémoires ont été échangés entre les parties et qu'en particulier, la SNC Cannes Esterel a eu la possibilité de répliquer au premier mémoire en défense présenté par la COMMUNE DE CANNES ; que, dans les circonstances de l'espèce, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a pu, sans méconnaître le principe du caractère contradictoire de l'instruction, statuer par l'ordonnance attaquée trois jours après l'enregistrement au greffe du tribunal d'un nouveau mémoire en défense présenté par la ville de Cannes et le lendemain de sa transmission à la société ;

     

    Sur la demande de provision :

     

    Considérant qu'en l'état de l'instruction, l'existence de lenteurs abusives dans l'instruction de la demande de permis de construire modificatif présentée par la SNC Cannes Esterel ne saurait être regardée comme n'étant pas sérieusement contestable ; qu'en revanche, par la décision susmentionnée en date du 28 juillet 2000, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêté en date du 28 juillet 1994 du maire de Cannes refusant à la SNC Cannes Esterel la délivrance du permis modificatif sollicité ; que l'illégalité ainsi commise constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la ville de Cannes ; que si l'infraction commise par la SNC Cannes Esterel en réalisant des travaux non conformes au permis de construire initialement délivré est établie, comme l'a d'ailleurs constaté la cour d'appel d'Aix-en-Provence par un arrêt en date du 1er avril 2003 revêtu de l'autorité de la chose jugée sur ce point, cette circonstance, qui est sans incidence sur le traitement de la demande de permis modificatif sollicité et donc sans lien avec le préjudice subi par la société à raison du retard dans la réalisation de son projet immobilier du fait de la non-délivrance de ce permis, n'est pas susceptible d'exonérer la COMMUNE DE CANNES de sa responsabilité ; que, dès lors, il n'est pas sérieusement contestable que le refus illégal de cette dernière d'accorder, avant le 9 septembre 2002, à la SNC Cannes Esterel le permis demandé aux fins de régulariser sa situation ouvre à celle-ci droit à réparation ; qu'ainsi la SNC Cannes Esterel est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté pour ce motif sa demande de provision ;

     

    Considérant que si l'invocation, d'une part, de frais financiers à raison de retards dans le remboursement d'un prêt hypothécaire contracté pour la réalisation du projet immobilier litigieux, d'autre part, de manques à gagner concernant les deux bâtiments dont la réalisation a été différée et, enfin, d'un préjudice moral serait de nature à ouvrir éventuellement droit à indemnisation, la SNC Cannes Esterel n'apporte pas, en l'état de l'instruction, de justifications suffisantes à ce titre ; qu'en revanche, l'immobilisation pendant plus de huit ans du capital constitué par le bâtiment B et le terrain d'assiette du projet immobilier est à l'origine d'un préjudice indemnisable dont la SNC Cannes Esterel justifie l'existence, notamment par ses productions devant le Conseil d'Etat ; que ce préjudice doit être apprécié en fonction du taux d'intérêt légal et des coûts d'achat et de construction de ces biens ; que, de même, la société fait état de frais certains de remise en état du bâtiment B, eu égard aux dépenses engagées au moment de sa réalisation et des dégradations subies depuis l'arrêt du chantier ; qu'en l'état de l'instruction et au regard des justificatifs produits par la SNC Cannes Esterel, l'obligation non sérieusement contestable qui incombe à la ville de Cannes doit être évaluée à 1 500 000 euros ; qu'il y a lieu en conséquence d'accorder une provision de ce montant à la SNC Cannes Esterel, sans qu'il y ait lieu de subordonner le versement de cette provision à la constitution d'une garantie ;

     

    Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

     

    Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SNC Cannes Esterel, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que la COMMUNE DE CANNES demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstance de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière une somme de 6 000 euros à verser à la SNC Cannes Esterel au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;

     

     

     

    D E C I D E :

     

     

    Article 1er : L'arrêt en date du 19 décembre 2002 de la cour administrative d'appel de Marseille et l'ordonnance en date du 11 octobre 2001 du juge des référés du tribunal administratif de Nice sont annulés.

     

    Article 2 : La COMMUNE DE CANNES versera à la SNC Cannes Esterel, à titre de provision, une somme de 1 500 000 euros.

     

    Article 3 : La COMMUNE DE CANNES versera à la SNC Cannes Esterel une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

     

    Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par la COMMUNE DE CANNES et par la SNC Cannes Esterel devant le Conseil d'Etat et la cour administrative d'appel de Marseille est rejeté.

     

    Article 5 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE CANNES, à la SNC Cannes Esterel et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer."

  • Injonction à la suite de l'annulation d'un refus de permis de construire

    Un exemple :

     

    "Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 30 décembre 2004 et 14 janvier 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE SAINT-MITRE-LES-REMPARTS, représentée par son maire ; la COMMUNE DE SAINT-MITRE-LES-REMPARTS demande au Conseil d'Etat :

    1°) d'annuler l'ordonnance du 14 décembre 2004 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, d'une part, a suspendu l'exécution de la décision du 2 novembre 2004 du maire refusant d'accorder un permis de construire à la SCI Saint-Blaise et, d'autre part, lui a enjoint d'instruire la demande de la SCI Saint-Blaise dans un délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

    2°) statuant en référé, de rejeter la demande de suspension présentée par la SCI Saint-Blaise ;

    3°) de mettre une somme de 3 000 euros à la charge de la SCI Saint-Blaise en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


    Vu les autres pièces du dossier ;

    Vu le code de l'urbanisme ;

    Vu le code de justice administrative ;

    Après avoir entendu en séance publique :

    - le rapport de Mme Catherine de Salins, Maître des Requêtes, 

    - les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la COMMUNE DE SAINT-MITRE-LES-REMPARTS et de Me Le Prado, avocat de la SCI Saint-Blaise, 

    - les conclusions de M. Christophe Devys, Commissaire du gouvernement ;




    Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision » ;

    Considérant qu'il appartient au juge des référés de faire apparaître dans sa décision tous les éléments qui, eu égard notamment à l'argumentation des parties, l'ont conduit à estimer que la suspension demandée revêtait un caractère d'urgence ; que si, pour prononcer la suspension de la décision du 2 novembre 2004 par laquelle le maire de la COMMUNE DE SAINT-MITRE-LES-REMPARTS a refusé de délivrer un permis de construire à la SCI Saint-Blaise, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a relevé que la SCI Saint-Blaise était titulaire d'une promesse de vente d'une durée de six mois et qu'elle avait contracté un emprunt pour réaliser son projet, il s'est abstenu de répondre au moyen de défense de la COMMUNE DE SAINT-MITRE-LES-REMPARTS, tiré de ce que la SCI Saint-Blaise n'était pas fondée à se prévaloir de cette promesse de vente, dès lors que le délai de caducité de six mois prévu par ce document était expiré ; que l'ordonnance attaquée est ainsi entachée d'une insuffisance de motivation et doit, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, être annulée ;

    Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de statuer sur la demande de la SCI Saint-Blaise au titre de la procédure de référé engagée ;

    Sur les conclusions à fin de suspension :

    Considérant que M. X, nommé co-gérant de la SCI Saint-Blaise par une délibération en date du 17 novembre 2004 de l'assemblée générale de cette société, a qualité pour la représenter dans la présente instance ; qu'ainsi, la fin de non-recevoir opposée par la COMMUNE DE SAINT-MITRE-LES-REMPARTS doit être écartée ;

    Considérant qu'il est constant que la SCI Saint-Blaise a conclu, le 5 mai 2004, une promesse de vente relative au terrain d'assiette du projet, assortie d'un délai de caducité de six mois et d'une condition suspensive tenant à la délivrance d'un permis de construire « purgé du recours des tiers » ; qu'il ressort des pièces du dossier que, nonobstant l'expiration du délai prévu par cette convention et l'existence de la condition suspensive qu'elle comporte, le vendeur de la parcelle a indiqué attendre l'issue de la procédure de référé pour décider ou non de poursuivre la vente ; que, dans ces conditions, et eu égard aux frais déjà engagés par la SCI pour réaliser l'opération, cette société justifie de l'urgence à obtenir la suspension de la décision contestée ;

    Considérant que le moyen tiré de l'erreur d'appréciation commise par la commune à propos de l'insertion de la construction envisagée dans le site est de nature à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ; que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est de nature à créer un tel doute ;

    Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCI Saint-Blaise est fondée à demander la suspension de l'exécution de cette décision ;

    Sur les conclusions à fin d'injonction :

    Considérant que la présente décision implique nécessairement que la commune procède à une nouvelle instruction de la demande de la SCI Saint-Blaise ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre au maire de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

    Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

    Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SCI Saint-Blaise, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la COMMUNE DE SAINT-MITRE-LES-REMPARTS demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune le versement à la SCI Saint-Blaise la somme de 2 000 euros ;



    D E C I D E :

    Article 1er : L'ordonnance du 14 décembre 2004 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille est annulée.
    Article 2 : L'exécution de la décision du 2 novembre 2004 du maire de Saint-Mitre-les-Remparts est suspendue.
    Article 3 : Il est enjoint à la COMMUNE DE SAINT-MITRE-LES-REMPARTS d'instruire la demande de la SCI Saint-Blaise dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
    Article 4 : La COMMUNE DE SAINT-MITRE-LES-REMPARTS versera une somme de 2 000 euros à la SCI Saint-Blaise en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
    Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNE DE SAINT-MITRE-LES-REMPARTS est rejeté.
    Article 6 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE SAINT-MITRE-LES-REMPARTS, à la SCI Saint-Blaise et au ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer."