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  • L'article L. 112-16 du Code de la construction est conforme à la Constitution

    Voici la décision rendue le 8 avril dernier  à propos de l'article L. 112-16 du Code de la construction et de l'habitation.

     

     

    "LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 

     

    Vu la Constitution ; 

    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; 

    Vu le code de la construction et de l'habitation ; 

    Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; 

    Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 11 février 2011 ; 

    Vu les observations produites pour les requérants par Me Caroline Lemeland, avocat au barreau de Troyes, enregistrées le 24 février 2011 ; 

    Vu les pièces produites et jointes au dossier ; 

    Me Lemeland, pour les requérants, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendu à l'audience publique du 22 mars 2011 ; 

    Le rapporteur ayant été entendu ; 

     

    1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation : « Les dommages causés aux occupants d'un bâtiment par des nuisances dues à des activités agricoles, industrielles, artisanales, commerciales ou aéronautiques, n'entraînent pas droit à réparation lorsque le permis de construire afférent au bâtiment exposé à ces nuisances a été demandé ou l'acte authentique constatant l'aliénation ou la prise de bail établi postérieurement à l'existence des activités les occasionnant dès lors que ces activités s'exercent en conformité avec les dispositions législatives ou réglementaires en vigueur et qu'elles se sont poursuivies dans les mêmes conditions » ; 

    2. Considérant que, selon les requérants, cette disposition exonère l'auteur de nuisances dues à une activité agricole, industrielle, artisanale, commerciale ou aéronautique de toute obligation de réparer le dommage causé par ces nuisances aux personnes installées après que l'activité dont il s'agit a commencé à être exercée et méconnaissent, dès lors, les articles 1er à 4 de la Charte de l'environnement ; 

    3. Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la Constitution : « La loi détermine les principes fondamentaux... du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales » ainsi que « de la préservation de l'environnement » ; qu'il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, d'adopter des dispositions nouvelles dont il lui appartient d'apprécier l'opportunité et de modifier des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d'autres dispositions, dès lors que, dans l'exercice de ce pouvoir, il ne prive pas de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel ; 

    4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 4 de la Déclaration de 1789 : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui » ; qu'il résulte de ces dispositions qu'en principe, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; que la faculté d'agir en responsabilité met en œuvre cette exigence constitutionnelle ; que, toutefois, cette dernière ne fait pas obstacle à ce que le législateur aménage, pour un motif d'intérêt général, les conditions dans lesquelles la responsabilité peut être engagée ; qu'il peut ainsi, pour un tel motif, apporter à ce principe des exclusions ou des limitations à condition qu'il n'en résulte une atteinte disproportionnée ni aux droits des victimes d'actes fautifs ni au droit à un recours juridictionnel effectif qui découle de l'article 16 de la Déclaration de 1789 ; 

    5. Considérant, en deuxième lieu, que les articles 1er et 2 de la Charte de l'environnement disposent : « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé. ° Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l'amélioration de l'environnement » ; que le respect des droits et devoirs énoncés en termes généraux par ces articles s'impose non seulement aux pouvoirs publics et aux autorités administratives dans leur domaine de compétence respectif mais également à l'ensemble des personnes ; qu'il résulte de ces dispositions que chacun est tenu à une obligation de vigilance à l'égard des atteintes à l'environnement qui pourraient résulter de son activité ; qu'il est loisible au législateur de définir les conditions dans lesquelles une action en responsabilité peut être engagée sur le fondement de la violation de cette obligation ; que, toutefois, il ne saurait, dans l'exercice de cette compétence, restreindre le droit d'agir en responsabilité dans des conditions qui en dénaturent la portée ; 

    6. Considérant, en troisième lieu, que les articles 3 et 4 de la Charte de l'environnement disposent : « Toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu'elle est susceptible de porter à l'environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences. 
    ° Toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu'elle cause à l'environnement, dans les conditions définies par la loi » ; qu'il incombe au législateur et, dans le cadre défini par la loi, aux autorités administratives de déterminer, dans le respect des principes ainsi énoncés, les modalités de la mise en œuvre de ces dispositions ; 

    7. Considérant que l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation interdit à une personne s'estimant victime d'un trouble anormal de voisinage d'engager, sur ce fondement, la responsabilité de l'auteur des nuisances dues à une activité agricole, industrielle, artisanale, commerciale ou aéronautique lorsque cette activité, antérieure à sa propre installation, a été créée et se poursuit dans le respect des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur et, en particulier, de celles qui tendent à la préservation et à la protection de l'environnement ; que cette même disposition ne fait pas obstacle à une action en responsabilité fondée sur la faute ; que, dans ces conditions, l'article L. 112 16 du code de la construction et de l'habitation ne méconnaît ni le principe de responsabilité ni les droits et obligations qui résultent des articles 1er à 4 de la Charte de l'environnement ; 

    8. Considérant que la disposition contestée n'est contraire à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, 

     

    D É C I D E : 

    Article 1er.° L'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation est conforme à la Constitution. 

    Article 2.° La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23 11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. 

    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 7 avril 2011, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Hubert HAENEL et Pierre STEINMETZ."

  • Bail dérogatoire devenu bail commercial

    Quand le bail dérogatoire devient un bail commercial le congé doit être un acte extra judiciaire :

     

    "Attendu selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 30 novembre 2009) que par acte du 2 décembre 1999, M. X... a donné à bail, à compter du 1er janvier 2000, à la société Vout's un local à usage commercial ; que ce bail était consenti pour une durée d'un an renouvelable par tacite reconduction sauf dénonciation par lettre recommandée avec avis de réception 3 mois avant l'échéance ; que par lettre recommandée du 24 mars 2005, la locataire a donné congé pour le 30 avril 2005 ; que le bailleur a assigné la société Vout's en nullité du congé ;

    Attendu que la société Vout's fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande alors, selon le moyen, que la clause d'un contrat de bail contraire au statut des baux commerciaux qui n'a pas fait l'objet d'une action en nullité intentée dans les deux ans de la conclusion du bail doit être appliquée ; qu'en constatant la nullité de la clause du bail selon laquelle le congé pouvait être donné par simple lettre recommandée avec accusé de réception dans les trois mois de l'échéance annuelle du contrat et en déclarant en conséquence le congé délivré le 24 mars 2005 selon ces modalités nul au regard de l'article L. 145-9 du code de commerce sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant expressément invitée, si cette action, introduite plus de quatre ans après la conclusion du contrat n'était pas prescrite, ce qui aurait pourtant été de nature à rendre applicable ladite clause, et valable le congé délivré le 24 mars 2005, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 145-9, L. 145-15 et L. 145-60 du code de commerce ;

    Mais attendu qu'ayant retenu, par motifs propres et adoptés, qu'à l'expiration du bail dérogatoire initial la locataire était restée dans les lieux, qu'elle y exploitait son fonds de commerce et était inscrite au registre du commerce, et qu'en application de l'article L. 145-5 du code de commerce un nouveau bail, soumis au statut des baux commerciaux, s'était opéré, la cour d'appel en a justement déduit, sans être tenue de procéder à une recherche inopérante, que le congé devait, conformément aux dispositions impératives de l'article L. 145-9 du code précité, être donné par acte extrajudiciaire et que le congé délivré par la société Vout's était nul ;

    D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

    PAR CES MOTIFS :

    REJETTE le pourvoi ; 

    Condamne la société Vout's aux dépens ;

    Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne société Vout's à payer à M. X... la somme de 2 500 euros, rejette la demande de la société Vout's ;

    Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt trois mars deux mille onze.



    MOYEN ANNEXE au présent arrêt

    Moyen produit par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils pour la société Vout's.

    Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir annulé le congé du 24 mars 2005 et, en conséquence, condamné la société Vout's à payer au bailleur la somme de 130.025,39 € au titre des loyers dus jusqu'à décembre 2006.

    AUX MOTIFS PROPRES QUE c'est à juste titre que les premiers juges ont requalifié le bail liant M. X... à la société Vout's, inscrite au registre du commerce et exploitant son fonds dans les lieux loués, en bail commercial avec effet à dater du 1er janvier 2001 et annulé le congé délivré par courrier le 24 mars 2005 ; que les parties ne remettent pas en cause cette qualification ; qu'aux termes de l'article L. 145-4 du code de commerce « la durée du contrat de location en peut être inférieure à neuf ans ; toutefois à défaut de convention contraire, le preneur a la faculté de donner congé à l'expiration d'une période triennale, dans les formes et délai de l'article L. 145-9… » ; que l'article L. 145-9 dudit code précise que « par dérogation aux articles 1736 et 1737 du code civil, les baux de locaux soumis aux dispositions du présent chapitre ne cessent que par l'effet d'un congé donné suivant les usages locaux et au moins six mois à l'avance… le congé doit être donné par acte extra-judiciaire… » ; le congé ne peut donc être donné que par acte extra-judiciaire et six mois avant l'expiration d'une période triennale ; que le congé délivré le 24 mars 2005 par la société Vout's est nul, n'ayant pas été délivré par acte d'huissier ; cependant, dans la mesure où le propriétaire demande que les effets du congé soient reportés au 31 décembre 2006, date de la deuxième échéance triennale, il sera fait droit à cette demande ; que la société Vout's est tenue du paiement des loyers jusqu'à cette date ; qu'elle n'a fait valoir aucune observation sur le montant mensuel des loyers réclamés ; qu'au vu des photocopies des pièces produites le loyer mensuel pour l'ensemble des locaux loué s'élevait à 6.373,22 € ; que la société Vout's sera par conséquent condamnée à payer à M. X... la somme de 13.026,39 € correspondant aux loyers dus sur 21 mois, de mai 2005 à décembre 2006, déduction faite du montant du dépôt de garantie (3.811,23 €) ;

    ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE selon l'article L. 145-4 du code de commerce, la durée du contrat de location ne peut être inférieure à neuf ans ; toutefois, à défaut de convention contraire, le preneur a la faculté de donner congé à l'expiration d'une période triennale, dans les formes et délais de l'article L. 145-9 du code de commerce ; selon l'article L. 145-9 dernier alinéa du code de commerce, le congé doit être donné par acte extra-judiciaire ; il est de jurisprudence constante que le congé est nul s'il a été donné par un acte autre qu'extra-judiciaire, les parties ne pouvant convenir qu'il sera donné par lettre recommandée avec accusé de réception ; il résulte de la requalification opérée par le tribunal que le statut des baux commerciaux prévu par la code de commerce régit les rapports entre les parties depuis le 1er janvier 2001, sauf en ce qui concerne la durée de ce bail, laquelle demeure soumise à la loi des parties telle qu'elle résulte du contrat requalifié ; dès lors le congé donné par courrier recommandé en date du 24 mars 2005, par la locataire à la bailleresse doit être annulé ;

    ALORS QUE la clause d'un contrat de bail contraire au statut des baux commerciaux qui n'a pas fait l'objet d'une action en nullité intentée dans les deux ans de la conclusion du bail doit être appliquée ; qu'en constatant la nullité de la clause du bail selon laquelle le congé pouvait être donné par simple lettre recommandée avec accusé de réception dans les trois mois de l'échéance annuelle du contrat et en déclarant en conséquence le congé délivré le 24 mars 2005 selon ces modalités nul au regard de l'article L. 145-9 du code de commerce sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant expressément invitée, si cette action, introduite plus de quatre ans après la conclusion du contrat n'était pas prescrite, ce qui aurait pourtant été de nature à rendre applicable ladite clause, et valable le congé délivré le 24 mars 2005, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 145-9, L. 145-15 et L. 145-60 du code de commerce."