La loi nᵒ 2025-532 du 13 juin 2025 "visant à sortir la France du piège du narcotrafic" (sic) comporte des dispositions relatives à la résiliation du bail d'habitation en cas de trafic de drogue.
La résiliation du bail soumis à la loi du 6 juillet 1989 en cas de trafic de drogue
La loi n° 2025-532 du 13 juin 2025 "visant à sortir la France du piège du narcotrafic" a modifié le cadre juridique de la résiliation des baux d'habitation.
Ces évolutions législatives, d'ailleurs validées par le Conseil constitutionnel dans sa décision nᵒ 2025-885 DC du 12 juin 2025, introduisent des mécanismes inédits permettant une expulsion facilitée des locataires impliqués dans des activités de trafic de stupéfiants.
Le renforcement des obligations du locataire
L'article 62 de la loi narcotrafic modifie l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989 en élargissant considérablement les obligations du locataire.
Désormais, au-delà de l'obligation de jouir raisonnablement du logement, le locataire doit également "user paisiblement des locaux loués suivant la destination qui leur a été donnée par le contrat de location et de s'abstenir de tout comportement ou de toute activité qui, aux abords de ces locaux ou dans le même ensemble immobilier, porte atteinte aux équipements collectifs utilisés par les résidents, à la sécurité des personnes ou à leur liberté d'aller et venir".
Cette extension de responsabilité couvre les activités liées au trafic de stupéfiants et permet de sanctionner des comportements se déroulant non seulement dans le logement lui-même, mais aussi dans ses abords.
Création d'une procédure d'injonction préfectorale
L'innovation majeure de cette réforme réside dans la création de l'article L.442-4-3 du Code de la construction et de l'habitation, qui confère au préfet un pouvoir d'injonction directe. Lorsqu'il constate que les agissements en lien avec des activités de trafic de stupéfiants de l'occupant habituel d'un logement troublent l'ordre public de manière grave ou répétée, le représentant de l'État peut enjoindre au bailleur de saisir le juge aux fins de résiliation du bail.
La procédure de résiliation pour trafic de drogue
Conditions d'application
La procédure ne peut être déclenchée que sous certaines conditions strictement définies:
Agissements en lien avec des activités de trafic de stupéfiants de l'occupant habituel du logement
Troubles à l'ordre public de manière grave ou répétée
Méconnaissance des obligations définies à l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989
Cette procédure s'applique aussi bien aux bailleurs sociaux qu'aux propriétaires privés.
Déroulement de la procédure
La procédure se déroule selon un calendrier précis et contraignant pour les différents acteurs :
1. Constatation par le préfet
Le préfet constate les agissements liés au trafic de stupéfiants qui troublent l'ordre public de manière grave ou répétée.
2. Injonction au bailleur
Le préfet enjoint au bailleur de saisir le juge aux fins de résiliation du bail.
3. Réponse du bailleur
Le bailleur dispose d'un délai de 15 jours pour faire connaître au préfet la suite qu'il entend réserver à l'injonction.
4. Action judiciaire
Si le bailleur accepte, il doit saisir le juge dans un délai d'un mois à compter de sa réponse.
5. Substitution préfectorale
En cas de refus du bailleur, d'absence de réponse ou de non-saisine du juge dans les délais, le préfet peut se substituer à lui et saisir directement le juge aux fins de résiliation du bail.
La jurisprudence avait déjà admis la possibilité de résilier un bail pour trafic de stupéfiants avant cette réforme.
La Cour d'appel de Paris avait ainsi jugé qu'il convient de prononcer la résiliation judiciaire du bail d'habitation, pour manquement des locataires à leur obligation de jouissance paisible, étant précisé que les locataires sont responsables des agissements des occupants de leur chef.
Dans cette affaire, le fils majeur des locataires avait été condamné pour trafic de stupéfiants, les faits s'étant déroulés dans les parties communes de l'immeuble, le logement loué servant de lieu de repli aux trafiquants.
Cette décision :
"FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Suivant acte sous seing privé en date du 18 mars 1987, la Société d'économie mixe Régie immobilière de la Ville de Paris (RIVP) a donné à bail à Monsieur Mallé D. et Madame Goundo D. épouse D. un appartement situé [...], moyennant un loyer mensuel de 1 754,64 euros hors charges payables à terme échu, et ce pour une durée de trois ans renouvelables par tacite reconduction.
Par jugement du 5 décembre 2013, la 14ème chambre correctionnelle 2 du tribunal de grande instance de Paris , a déclaré Monsieur D. Kissima coupable de transport non autorisé de stupéfiants en récidive, détention non autorisée de stupéfiants en récidive, offre ou cession et acquisition non autorisées de stupéfiants en récidive, et l'a condamné à une peine d'emprisonnement de deux ans dont six mois assortis d'un sursis avec mise à l'épreuve pendant deux ans.
Par exploit d'huissier en date du 19 août 2014, la société RIVP a assigné Monsieur D. et Madame D., devant le tribunal d'instance de Paris 20ème, aux fins de voir :
' Prononcer la résiliation judiciaire du bail, faute pour Monsieur D. et Madame D. de respecter leur obligation de jouissance paisible des lieux ;
' Ordonner l'expulsion de Monsieur D. et Madame D. ainsi que celle de tous occupants de leur chef et notamment de Monsieur Kissima D. avec, si besoin est, le concours de la force publique, sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du prononcé, ou à défaut, de la signification du jugement à intervenir ; dire et juger que l'astreinte courra pendant un délai de trois mois et que, passé ce délai, elle sera liquidée et qu'il sera à nouveau fait droit ; réserver la compétence du tribunal pour liquider l'astreinte;
' Dire que le sort des meubles se trouvant dans les lieux sera régi conformément aux dispositions des articles L.433-1 et L.433-2 du Code des procédures civiles d'exécution ;
' Supprimer le délai de deux mois pour la mise en 'uvre de l'expulsion ;
' Condamner solidairement ou à défaut in solidum Monsieur D. et Madame D. à lui payer le montant du loyer majoré de 50% et augmenté des charges à titre d'indemnité d'occupation mensuelle à compter de la date du prononcé ou, à défaut, de la signification du jugement, et jusqu'à la libération effective des lieux ;
' Condamner solidairement ou à défaut in solidum Monsieur D. et Madame D. au paiement de la somme de 1 700 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;
' Ordonner l'exécution provisoire ;
' Condamner solidairement ou à défaut in solidum Monsieur D. et Madame D. aux dépens.
Par jugement en date du 31 juillet 2015, le tribunal d'instance de Paris 20ème a :
' Déclaré recevable la demande de résiliation de la société RIVP ;
' Rejeté les demandes formées par la société RIVP ;
' Rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur Mallé D. et Madame Goundo D. ;
' Condamné la société RIVP à payer la somme de 1 500 € au profit de Maître Sylvie F. N. en application des dispositions de l'article 37 du décret du 19 décembre 1991 ;
' Ordonné l'exécution provisoire de la décision ;
' Condamné la société RIVP aux dépens.
Par conclusions signifiées le 25 juillet 2016, la Société Régie immobilière de la Ville de Paris , appelante, demande à la Cour de :
' Dire et juger la Société d'Economie Mixte Locale Régie Immobilière de la Ville de Paris
(RIVP) recevable et bien fondée en son appel ;
' Infirmer le jugement du 31 juillet 2015 dont appel en ce qu'il a débouté la RIVP de ses
demandes dirigées à l'encontre de Monsieur Mallé D. et de Madame Goundo D., son épouse, et l'a condamnée à verser à leur Conseil une somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 37 du décret du 19 décembre 1991 ainsi qu'aux dépens de l'instance ;
Statuant à nouveau de ces chefs,
' Prononcer la résiliation du bail du 18 mars 1987 qui lie la Régie Immobilière de la Ville de Paris (RIVP) à Monsieur Mallé D. et de Madame Goundo D., née D., aux torts exclusifs de ces derniers, pour manquements à leur obligation de se comporter en bon père de famille et d'user paisiblement de la chose louée, conformément à sa destination ;
' Ordonner en conséquence l'expulsion de Monsieur Mallé D. et de Madame Goundo D., née D., ainsi que celle de tous occupants de leur chef, dont Monsieur Kissima D., du logement sis [...], local 22 avec l'assistance du Commissaire de Police du quartier et de la force armée s'il échet, et ce, sous astreinte, pour les contraindre à s'exécuter, de 50 € par jour de retard à compter du prononcé ou, à défaut, de la signification de l'arrêt de la Cour à intervenir ;
' Dire et juger que l'astreinte courra pendant un délai de trois mois et que, passé ce délai, elle sera liquidée et qu'il sera à nouveau fait droit ;
' Dire et juger que le sort des biens mobiliers trouvés dans les lieux sera régi par les dispositions des articles L.433-1 et L.433-2 et R.433-1 à R.433-7 du Code des Procédures Civiles d'exécution ;
' Supprimer le délai de deux mois prévu par l'article L.412-1 du Code des Procédures Civiles d'exécution ;
' Condamner solidairement ou, à défaut, in solidum Monsieur Mallé D. et de Madame Goundo D., née D., à verser à la Régie Immobilière de la Ville de Paris (RIVP), à compter de la date du prononcé ou, à défaut, de la signification de l'arrêt de la Cour à intervenir, une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer applicable si le contrat de bail était resté en vigueur, majoré de 50 % et des charges locatives récupérables ;
' Débouter Monsieur Mallé D. et Madame Goundo D., née D., de leur demandes reconventionnelles ;
' Condamner solidairement ou, à défaut, in solidum Monsieur Mallé D. et de Madame Goundo D., née D., à verser à la Régie Immobilière de la Ville de Paris (RIVP) une indemnité de 3.500 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
' Condamner solidairement ou, à défaut, in solidum Monsieur Mallé D. et de Madame Goundo D., née D., aux dépens de première instance et d' appel .
Par conclusions en date du 18 janvier 2016, Monsieur Mallé D. et Madame Goundo D., née D., intimés, demandent à la Cour de :
' Déclarer la RIVP irrecevable en son action;
' Confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
A titre subsidiaire,
' L'en déclarer mal fondée ;
' Constater que le logement des époux D. ne se situe pas dans l' ensemble immobilier sujet au Trafic, mais à des kilomètres ;
' Constater que la demanderesse n'apporte pas la preuve certaine de troubles anormaux de voisinage imputables aux locataires ou aux occupants de son chef, au [...] ;
En toute hypothèse,
' Constater que le fils ne réside plus chez ses parents depuis plusieurs années ;
' Débouter la RIVP de ses demandes, fin et conclusions ;
' Condamner la RIVP à verser aux époux D. la somme de 3000 euros en réparation de leur préjudice moral ;
' Condamner la demanderesse au paiement d'une somme de 2.500 euros au profit de Maître F., sous réserve de sa renonciation expresse à la rétribution due au titre de l'aide juridictionnelle, et ce en application des dispositions de l'article 37 du décret du 19 décembre 1991 ainsi qu'aux entiers dépens.
MOTIFS
Sur la recevabilité de l'action introduite par la RIVP
Considérant qu'aux termes de l'article 6-1 de la loi du 6 juillet 1989, les propriétaires des locaux à usage d'habitation, après mise en demeure dûment motivée doivent, sauf motif légitime, utiliser les droits dont ils disposent en propre afin de faire cesser les troubles de voisinage causés à des tiers par les personnes qui occupent ces locaux;
Considérant que le défaut de mise en demeure préalable n'étant sanctionné par aucune irrecevabilité, le moyen tiré de l'irrecevabilité de l'action de la Régie Immobilière de la Ville de Paris n'est pas fondé, et ce d'autant que l'existence d'un trafic durable de stupéfiants en lien avec le domicile des locataires invoquée par la bailleresse au soutien de sa demande de résiliation du bail pour manquement des locataires à leur obligation d'usage paisible des lieux loués, constitue, par sa gravité, par l'urgence à le faire cesser et par le trouble à l'ordre public qu'il suppose, un motif légitime justifiant de déroger à l'obligation de mise en demeure préalable; que l'action introduite par la la Régie Immobilière de la Ville de Paris sera donc déclarée recevable;
Sur le trouble de jouissance et la résiliation du bail
Considérant que la Régie Immobilière de la Ville de Paris soutient que les époux D. se sont engagés, par contrat, à user paisiblement des lieux loués, et que bien que cette obligation s'impose à l'ensemble des occupants du chef du locataire, leur fils, Kissima D., a organisé un trafic de diverses drogues (cannabis et cocaïne) aux abords et dans les parties communes de l'immeuble sis à proximité [...], et qu'une somme en espèces de 12 250 euros provenant de la vente de stupéfiants a été découverte lors de la perquisition effectuée à leur domicile; que la la Régie Immobilière de la Ville de Paris considère que ces infractions pénales justifient la résiliation de leur contrat de bail souscrit le 18 mars 1987;
Considérant que les époux D. répliquent que les faits de trafic de stupéfiants n'ont pas été commis dans l'immeuble situé [...] où ils résident, mais dans un autre quartier, qu'il n'existe donc aucun lien entre les troubles constatés et un manquement à leur l'obligation d'user paisiblement de la chose louée et de ses accessoires, que la Régie Immobilière de la Ville de Paris ne démontre aucune nuisance, ni aucun trouble au sein de leur résidence, qu'une pétition de tous les locataires atteste du caractère paisible de l'occupation qu'ils font des lieux loués, et que leur fils ne réside plus à leur domicile ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1728 du code civil, le preneur est tenu d'user de la chose louée en bon père de famille et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail ; que l'article 7b) de la loi du 6 juillet 1989 prévoit que le locataire est obligé d'user paisiblement des locaux loués ;
Considérant que les locataires sont responsables des personnes qu'ils introduisent dans les lieux loués ;
Considérant qu'il résulte du jugement du 5 décembre 2013 que Monsieur D. Kissima a été condamné par le tribunal correctionnel de Paris à une peine d'emprisonnement de deux ans dont six mois assortis d'un sursis avec mise à l'épreuve pendant deux ans, pour avoir, du 21 au 27 février 2013, transporté, détenu, acquis, offert ou cédé de la résine et de l'herbe de cannabis, et ce, en état de récidive légale pour avoir été définitivement condamné pour des faits identiques ou assimilés par le tribunal correctionnel de Paris le 20 janvier 2010;
Considérant qu'il résulte des constatations effectuées par les services de police et par leurs surveillances policières que Monsieur D. Kissima s'est livré à des transactions de produits stupéfiants à proximité de son domicile, soit au [...], en compagnie de MM.D., D. et D.;
Considérant que les perquisitions ont permis de découvrir:
- 1,6 grammes d'herbe et 44 grammes de résine chez D. et dans les partie communes de l'immeuble ;
-10 grammes de résine et 1,5 gramme d'herbe chez Diawara ;
- 12 550 euros en espèces chez D. ;
- 5,1 grammes de résine chez D., les policiers notant que 350 euros et une pochette renfermant 61 grammes d'herbe conditionnée en sachets et 53 grammes de résine en barrettes avaient été jetés de son balcon avant l'entrée des forces de l'ordre dans son appartement ;
- 313 grammes de résine en trois plaquettes chez Cissoko;
Considérant que s'il est exact que le trafic de stupéfiants se déroulait devant et dans les parties communes de l'immeuble situé [...], pour autant cet immeuble n'est distant que de 271 mètres de celui situé [...]où résidait alors Monsieur D. Kissima ainsi qu'il résulte des mains-courantes et du rapport de police du 27 février 2013 versés aux débats, l'un des protagonistes du trafic, Monsieur Jérémie D. étant d'ailleurs également domicilié [...] ; que le rapport de police du 11 décembre 2015 indique par ailleurs que les principaux points de vente se trouvaient au niveau de la [...] et du hall du [...] mais que le trafic de stupéfiants se situait sur le secteur comprenant la [...], et d'autres rues dont la [...];
Considérant que l'attestation du 28 janvier 2015 de Madame Elodie A., selon laquelle Monsieur Kissima D. est hébergé à son domicile, [...] ( 94 600), depuis le 26 septembre 2013 ' et jusqu'à nos jours' laisse planer un doute sur la sincérité de ce témoignage; qu'en effet, non seulement, l'adresse prétendue de Monsieur Kissima D. est contredite par celle qui figure sur le jugement du tribunal correctionnel de Paris du 5 décembre 2013 ' ...chez Madame Aminata M. , [...]' , mais encore, elle n'est corroborée par aucun élément matériel et par aucun document administratif susceptible de confirmer ce domicile;
Considérant qu'il ressort des éléments de l'enquête qu'une importante somme d'argent ( 12 550 euros) a été découverte au domicile des époux D. et que les traces de stupéfiants qui ont été découvertes sur les billets analysés permettent d'établir que cette somme provient du trafic dont leur fils, Monsieur D. Kissima , déjà condamné en 2010 pour des faits similaires par le tribunal correctionnel de Paris le 20 janvier 2010, est l'un des principaux acteurs, en assurant le rôle de vendeur, mais aussi celui du guetteur, et aussi en collectant et en entreposant le produit des ventes de stupéfiants au domicile de ses parents ;
Considérant qu'il est également établi par le rapport du commissaire de police du 11 décembre 2015 que, depuis le jugement du tribunal correctionnel du 5 décembre 2013, et malgré l'état de récidive légale qu'il avait retenu, Monsieur D. Kissima, le 2 juillet 2014, a été à nouveau interpellé pour les mêmes faits, toujours à proximité de son lieu de résidence, et à l'issue de sa garde à vue, déféré et écroué jusqu'au 9 février 2015, le commissaire précisant: ' ... l'inquiétude reste vive chez les riverains, la famille D. résidant toujours sur place. La crainte de la reprise d'un trafic organisé sur ce secteur impose à mon commissariat un coûteux et constant effort de sécurisation ...;
Considérant que ces constatations contredisent la pétition de locataires, dactylographiée, rédigée en termes généraux et non datée, attestant du caractère paisible de l'occupation que la famille D. fait des lieux loués ;
Que dans une note du 23 octobre 2015, le maire du 20ème arrondissement témoigne de la situation particulièrement difficile et dégradée à laquelle sont confrontés les habitants de la [...], dont il est précisé qu'elle constitue l'un des seuls points de deal du 20 ème arrondissement où du crack est vendu, en raison de l'important trafic de stupéfiants qui s'y déroule, et que la domiciliation sur place des personnes participant au trafic de stupéfiants qui peuvent cacher stupéfiants et argent dans leur domicile, contribue au climat anxiogène pour les habitants qui n'osent déposer plainte ou interpeller les institutions de peur d'être identifiés et subir des représailles; que le climat anxiogène est également renforcé par la crainte que suscite l'organisation du trafic en lui-même avec la présence des dealers et guetteurs sur la voie publique, particulièrement au croisement [...] /[...];
Qu'il s'ensuit que le trafic organisé et structuré dans le quartier englobant l'immeuble où résident les époux D. , dont le logement, dans lequel a été retrouvée une importante somme d'argent provenant du trafic de stupéfiants, a été utilisé à l'occasion de ce trafic de stupéfiants, fait régner un climat d'insécurité constitutif d'un trouble grave à la jouissance paisible à laquelle peuvent prétendre les autres locataires;
Considérant que les troubles graves liés au trafic de stupéfiants, en relation avec le manquement des locataires, qui ne pouvaient ignorer les risques encourus eu égard aux antécédents de leur fils, condamné en état de récidive légale, et eu égard à la poursuite de ses activités délictueuses après le jugement du tribunal correctionnel du 5 décembre 2013, à leur obligation de se comporter en bon père de famille et d'user des lieux paisiblement, sont de nature à justifier la résiliation du bail portant sur le logement dans lequel était réuni le produit de la vente des stupéfiants;
Considérant que doit être ordonnée en conséquence l'expulsion de Monsieur Mallé D. et Madame Goundo D., née D., ainsi que celle de tous occupants de leur chef, de l'appartement sis [...], avec l'assistance de la force publique, s'il échet; qu'il n'est pas nécessaire de prononcer une astreinte pour contraindre les locataires à quitter les lieux si l'expulsion était poursuivie, le recours à la force publique étant suffisant pour exercer cette contrainte;
Considérant que la suppression du délai légal de deux mois pour quitter les lieux à compter du commandement en ce sens, n'est pas davantage justifiée ;
Considérant, s'agissant de l'indemnité d'occupation, qu'en raison de sa nature mixte, indemnitaire et compensatoire, l'indemnité d'occupation constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des lieux et assure, en outre, la réparation du préjudice résultant d'une occupation sans bail;
Qu'en l'espèce, la bailleresse ne démontrant pas que la valeur équitable des lieux et la réparation du préjudice résultant d'une occupation sans bail, nécessiteraient que le montant de l'indemnité d'occupation soit fixé au montant du loyer applicable si le contrat de bail était resté en vigueur, majoré de 50% , il y a lieu de fixer l'indemnité d'occupation à une somme égale au montant du loyer, majoré des charges, qui aurait été dû si le bail s'était poursuivi jusqu'à la libération effective des lieux;
Considérant qu' eu égard au sens du présent arrêt, la demande des époux D., qui n'est pas fondée, sera rejetée;
Considérant qu'il est équitable de laisser à la charge de chaque partie les frais non compris dans les dépens supportés en première instance et en appel ;
Considérant que les époux D. devront supporter solidairement les dépens de première instance et d' appel , les dépens d' appel pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS,
La cour , statuant publiquement et contradictoirement;
- infirme le jugement du tribunal d'instance de Paris 20ème arrondissement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau :
- prononce la résiliation du bail du 18 mars 1987 qui lie la Régie Immobilière de la Ville de Paris (RIVP) aux époux D. aux torts de ces derniers ;
- ordonne en conséquence l'expulsion de Monsieur Mallé D. et Madame Goundo D., née D., ainsi que celle de tous occupants de leur chef, de l'appartement sis [...], porte droite, avec l'assistance du commissaire de police du quartier et de la force armée s'il échet;
- dit que le sort des meubles sera régi conformément aux articles L 433-1 et L 433-2 du Code des procédures civiles d'exécution,
- condamne solidairement les époux D. à verser à la Régie Immobilière de la Ville de Paris (RIVP), à compter de la signification de l'arrêt de la cour , une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer applicable si le contrat de bail était resté en vigueur, majoré des charges locatives récupérables ;
- déboute les parties de leurs autres prétentions ;
- dit n'y avoir lieu à condamnation de l'une ou l'autre partie sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamne solidairement les époux D. à supporter les dépens de première instance et d' appel , avec possibilité pour les dépens d' appel d'être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE"