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  • Reconstruction à l'identique et risques courus par les occupants

    Si l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme autorise sous certaines conditions la reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit par un sinistre, l'administration peut cependant s'opposer à cette reconstruction s'il apparaît que les occupants du bâtiment reconstruit restent cependant soumis à un risque certain et prévisible de nature à mettre gravement en danger leur sécurité.

    C'est ce qui a été jugé par cet arrêt du conseil d'État du 23 novembre 2005.

    (Pour une analyse détaillée de cet article du code de l'urbanisme, voyez ce mémoire de Charlotte Paoli).

    « Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 avril et 3 mai 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE BAGNERES-DE-BIGORRE, représentée par son maire ; la COMMUNE DE BAGNERES-DE-BIGORRE demande au Conseil d'Etat :

    1°) d'annuler l'ordonnance du 1er avril 2005 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Pau a, d'une part, suspendu l'exécution du refus de permis de construire opposé par le maire de la commune requérante le 7 décembre 2004 à la demande de M. Gilbert Y et, d'autre part, lui a prescrit sous astreinte de statuer sur la demande de M. Y dans un délai de vingt jours à compter de la notification de cette ordonnance ;

    2°) statuant en référé, de rejeter la demande de suspension présentée par M. Y ;

    3°) de mettre à la charge de M. Y la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

    Vu les autres pièces du dossier ;

    Vu le code de l'urbanisme ;

    Vu le code du patrimoine ;

    Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

    Vu le code de justice administrative ;

    Après avoir entendu en séance publique :

    - le rapport de M. Luc Derepas, Maître des Requêtes,

    - les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la COMMUNE DE BAGNERES-DE-BIGORRE et de Me Le Prado, avocat M. Y,

    - les conclusions de M. Christophe Devys, Commissaire du gouvernement ;

    Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) ;

    Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme : La reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit par un sinistre est autorisée nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale ou le plan local d'urbanisme en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié ; que l'article L. 642-1 du code du patrimoine dispose que sur proposition ou après accord du conseil municipal des communes intéressées, des zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager peuvent être instituées autour des monuments historiques et dans les quartiers, sites et espaces à protéger ou à mettre en valeur pour des motifs d'ordre esthétique, historique ou culturel ;

    Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme que seuls la carte communale ou le plan local d'urbanisme d'une commune peuvent faire obstacle, par des dispositions expresses, à la reconstruction à l'identique des bâtiments après sinistre ; qu'en revanche, alors même qu'une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager constitue une servitude d'utilité publique devant être annexée au plan local d'urbanisme en application de l'article L. 642-2 du code du patrimoine, un tel document, dont les prescriptions ne peuvent, en tout état de cause, faire obstacle à une reconstruction à l'identique, ne peut légalement contenir des dispositions interdisant de telles reconstructions ; que, par suite, en jugeant que l'adoption imminente d'une telle zone ferait obstacle à la reconstruction à l'identique du chalet de M. Y, et que cette circonstance caractérisait une situation d'urgence justifiant la suspension de la décision attaquée, le juge des référés a entaché son ordonnance d'une erreur de droit ;

    Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond au titre de la procédure de référé ;

    Considérant, d'une part, que M. Y soutient que la décision attaquée est entachée d'un vice de forme au regard des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ; que cette décision n'est pas suffisamment motivée ; qu'en s'estimant lié par les avis de l'architecte des bâtiments de France et de l'Office national des forêts, le maire a méconnu sa compétence ; que la décision est entachée d'un détournement de pouvoir ;

    Considérant qu'aucun de ces moyens ne paraît, en l'état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ;

    Considérant, d'autre part, que le maire de Bagnères-de-Bigorre a indiqué dans sa décision que le refus de permis de construire était fondé sur les dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, la construction projetée portant selon son appréciation une atteinte excessive au caractère du site environnant ; que les moyens tirés de ce que, d'une part, le maire de Bagnères-de-Bigorre ne pouvait légalement opposer les dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme à une demande de reconstruction à l'identique présentée sur le fondement de l'article L. 111-3 du même code, d'autre part, le maire aurait porté une appréciation erronée en estimant que la construction projetée était de nature à porter atteinte au caractère du site environnant sont propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ; que, toutefois, cette décision est également fondée sur un autre motif, tenant à ce que, l'emplacement du projet restant exposé au risque d'avalanche, la reconstruction du chalet ferait courir un risque grave à ses occupants ; que ce second motif est opposable à M. Y nonobstant les dispositions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, qui ne sauraient conférer le droit de reconstruire un bâtiment dont les occupants seraient exposés à un risque certain et prévisible de nature à mettre gravement en danger leur sécurité ; que ce motif paraît, en l'état de l'instruction, de nature à justifier légalement l'arrêté litigieux ; qu'il résulte de l'instruction que le maire aurait pris la même décision s'il n'avait retenu que ce seul motif ; que le doute sérieux entachant la légalité du premier motif mentionné ci-dessus ne saurait, par suite, justifier la suspension de l'exécution de la décision litigieuse ;

    Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter la demande de suspension présentée par M. Y ;

    Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la COMMUNE DE BAGNERES-DE-BIGORRE, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. Y demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. Y la somme demandée par la COMMUNE DE BAGNERES-DE-BIGORRE en application des mêmes dispositions ».

    L’article L111-3 du code de l'urbanisme :

    La reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit par un sinistre est autorisée nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale ou le plan local d'urbanisme en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié.

    Peut également être autorisée, sauf dispositions contraires des documents d'urbanisme et sous réserve des dispositions de l'article L. 421-5, la restauration d'un bâtiment dont il reste l'essentiel des murs porteurs lorsque son intérêt architectural ou patrimonial en justifie le maintien et sous réserve de respecter les principales caractéristiques de ce bâtiment.

  • Charge de la preuve du caractère tardif du recours contre les permis de construire

    C’est le bénéficiaire du permis contre lequel le recours est dirigé qui doit apporter cette preuve :

    « Vu °1 sous le °n 64 218 la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 30 novembre 1984 et 26 mars 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean Y..., demeurant ... 16000 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :

    1- annule le jugement du 3 octobre 1984 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé à la demande de Mme X... l'arrêté du 1er septembre 1981 par lequel le préfet de la Charente a accordé à M. Y... un permis de construire concernant la construction d'une passerelle ;

    2- rejette la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Poitiers ;

    Vu °2 sous le °n 64 472 le recours enregistré le 11 décembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'URBANISME, DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :

    1- annule le jugement du 4 octobre 1984 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé, à la demande de Mme X..., l'arrêté du préfet de la Charente en date du 1er septembre 1981 accordant un permis de construire à M. Y... ;

    2- rejette la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Poitiers ;

    Vu les autres pièces des dossiers ;

    Vu le code de l'urbanisme et notamment son article R.421-42 ;

    Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;

    Vu la loi du 30 décembre 1977 ;

    Après avoir entendu :

    - le rapport de M. Vistel, Conseiller d'Etat,

    - les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de M.CHAILLOU et de la SCP Desaché, Gatineau, avocat de Mme X...,

    - les conclusions de Mme Hubac, Commissaire du gouvernement ;

    Considérant que la requête de M. Y... et le recours du MINISTRE DE L'URBANISME, DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS présentent à juger la même question ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

    Sur la recevabilité de la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif :

    Considérant que M. Y... soutient que le recours gracieux adressé par Z... Bernard le 19 juillet 1982 au maire d'Angoulême n'était pas susceptible d'interrompre à son profit le délai du recours contentieux dès lors que ce recours aurait été adressé à une autorité incompétente et aurait été tardif ;

    Considérant, en premier lieu, que le maire d'Angoulême, eu égard aux compétences qu'il exerçait au nom de l'Etat en matière d'octroi des permis de construire, était tenu de transmettre, ainsi qu'il l'a fait, la lettre de Mme X... au directeur départemental de l'équipement qui avait délivré le permis contesté par délégation du Commissaire de la République ;

    Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article R.421-42 du code de l'urbanisme, qui prévoit l'affichage du permis de construire sur le terrain du bénéficiaire et en mairie, que le délai de recours contentieux court à compter de l'expiration d'un délai de deux mois suivant la date à laquelle le dernier des deux affichages prévus par l'article R.421-42 a été réalisé ; que pour établir que le recours gracieux présenté le 19 juillet 1982 par Mme X... était tardif, M. Y... devait apporter la preuve que le permis litigieux avait été affiché sur le terrain avant le 19 mars 1982 ; que deux témoignages établis au mois de novembre 1982 affirment que le permis n'a pas été affiché avant le mois de juin, lors du commencement des travaux ; qu'en produisant en appel des témoignages établis en octobre 1984 dont le contenu est à la fois imprécis et contradictoire, M. Y... n'établit pas que la formalité exigée par l'article R.421-42 du code de l'urbanisme ait été remplie avant le 19 mars 1982 et que le recours gracieux de Mme X... ait été tardif et, par suite, irrecevable ;

    Sur la légalité du permis :

    Considérant qu'aux termes de l'article UD 11-2-c du plan d'occupation des sols de la ville d'Angoulême, relatif aux façades des constructions faisant l'objet d'un permis : "Les bardages en tôle ... sont interdits s'ils peuvent être vus depuis les voies et emprises publiques ou depuis les fonds voisins" ; que cette disposition était, contrairement à ce que soutient le ministre, applicable à la construction constituée par la passerelle couverte édifiée par M. Y... pour la réunion de deux bâtiments, ouvrage d'environ neuf mètres de longueur et de près de trois mètres de hauteur ; qu'il n'est pas contesté que les façades de la passerelle étaient revêtues de bardages en tôle visibles des fonds voisins interdits par les prescriptions de l'article UD 11-2-c du plan d'occupation des sols ; que si l'article UD 11-4 du plan d'occupation des sols permettait de déroger aux dispositions de l'article UD 11-2-c lorsque le concepteur est amené à choisir une "structure de construction originale", la passerelle édifiée par M. Y..., d'un type industriel courant, ne pouvait être regardée comme une "structure de construction originale" et faire l'objet de la dérogation prévue à l'article UD 11-4 ;

    Article 1er : La requête de M. Y..., ensemble le recours du MINISTRE DE L'URBANISME, DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS sont rejetés.

    Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Y..., à Mme X... et au ministre de l'équipement, du logement, de l'aménagement du territoire et des transports. »

     

    (Conseil d'Etat 30 octobre 1987)