Charge de la preuve du caractère tardif du recours contre les permis de construire (samedi, 26 janvier 2008)

C’est le bénéficiaire du permis contre lequel le recours est dirigé qui doit apporter cette preuve :

« Vu °1 sous le °n 64 218 la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 30 novembre 1984 et 26 mars 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean Y..., demeurant ... 16000 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :

1- annule le jugement du 3 octobre 1984 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé à la demande de Mme X... l'arrêté du 1er septembre 1981 par lequel le préfet de la Charente a accordé à M. Y... un permis de construire concernant la construction d'une passerelle ;

2- rejette la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Poitiers ;

Vu °2 sous le °n 64 472 le recours enregistré le 11 décembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'URBANISME, DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :

1- annule le jugement du 4 octobre 1984 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé, à la demande de Mme X..., l'arrêté du préfet de la Charente en date du 1er septembre 1981 accordant un permis de construire à M. Y... ;

2- rejette la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Poitiers ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de l'urbanisme et notamment son article R.421-42 ;

Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;

Vu la loi du 30 décembre 1977 ;

Après avoir entendu :

- le rapport de M. Vistel, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de M.CHAILLOU et de la SCP Desaché, Gatineau, avocat de Mme X...,

- les conclusions de Mme Hubac, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la requête de M. Y... et le recours du MINISTRE DE L'URBANISME, DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS présentent à juger la même question ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur la recevabilité de la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif :

Considérant que M. Y... soutient que le recours gracieux adressé par Z... Bernard le 19 juillet 1982 au maire d'Angoulême n'était pas susceptible d'interrompre à son profit le délai du recours contentieux dès lors que ce recours aurait été adressé à une autorité incompétente et aurait été tardif ;

Considérant, en premier lieu, que le maire d'Angoulême, eu égard aux compétences qu'il exerçait au nom de l'Etat en matière d'octroi des permis de construire, était tenu de transmettre, ainsi qu'il l'a fait, la lettre de Mme X... au directeur départemental de l'équipement qui avait délivré le permis contesté par délégation du Commissaire de la République ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article R.421-42 du code de l'urbanisme, qui prévoit l'affichage du permis de construire sur le terrain du bénéficiaire et en mairie, que le délai de recours contentieux court à compter de l'expiration d'un délai de deux mois suivant la date à laquelle le dernier des deux affichages prévus par l'article R.421-42 a été réalisé ; que pour établir que le recours gracieux présenté le 19 juillet 1982 par Mme X... était tardif, M. Y... devait apporter la preuve que le permis litigieux avait été affiché sur le terrain avant le 19 mars 1982 ; que deux témoignages établis au mois de novembre 1982 affirment que le permis n'a pas été affiché avant le mois de juin, lors du commencement des travaux ; qu'en produisant en appel des témoignages établis en octobre 1984 dont le contenu est à la fois imprécis et contradictoire, M. Y... n'établit pas que la formalité exigée par l'article R.421-42 du code de l'urbanisme ait été remplie avant le 19 mars 1982 et que le recours gracieux de Mme X... ait été tardif et, par suite, irrecevable ;

Sur la légalité du permis :

Considérant qu'aux termes de l'article UD 11-2-c du plan d'occupation des sols de la ville d'Angoulême, relatif aux façades des constructions faisant l'objet d'un permis : "Les bardages en tôle ... sont interdits s'ils peuvent être vus depuis les voies et emprises publiques ou depuis les fonds voisins" ; que cette disposition était, contrairement à ce que soutient le ministre, applicable à la construction constituée par la passerelle couverte édifiée par M. Y... pour la réunion de deux bâtiments, ouvrage d'environ neuf mètres de longueur et de près de trois mètres de hauteur ; qu'il n'est pas contesté que les façades de la passerelle étaient revêtues de bardages en tôle visibles des fonds voisins interdits par les prescriptions de l'article UD 11-2-c du plan d'occupation des sols ; que si l'article UD 11-4 du plan d'occupation des sols permettait de déroger aux dispositions de l'article UD 11-2-c lorsque le concepteur est amené à choisir une "structure de construction originale", la passerelle édifiée par M. Y..., d'un type industriel courant, ne pouvait être regardée comme une "structure de construction originale" et faire l'objet de la dérogation prévue à l'article UD 11-4 ;

Article 1er : La requête de M. Y..., ensemble le recours du MINISTRE DE L'URBANISME, DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS sont rejetés.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Y..., à Mme X... et au ministre de l'équipement, du logement, de l'aménagement du territoire et des transports. »

 

(Conseil d'Etat 30 octobre 1987)