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BDIDU Blog Actualités juridiques Droit Immobilier et Droit de l'Urbanisme par Christophe Buffet Avocat Spécialiste en Droit Immobilier et Droit Public Tél. 02 41 81 16 16 - Page 2225

  • Bail commercial, obligation de délivrance et fermeture au nom de la sécurité publique

    Un mois après la prise d'effet d'un bail commercial, le maire de la commune ordonne la fermeture de ce commerce, pour des raisons de sécurité. Le locataire obtient la résolution du bail, au nom de la violation de son obligation de délivrance par le bailleur.

     

     

    On notera que le bailleur s'était expressément engagé à garantir « la commercialité des lieux », mais la solution n'aurait probablement pas été différente si une telle stipulation n'avait pas été prévue dans le bail.

     

     

    « Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 18 mai 2006), que la société civile immobilière Glinp II (la SCI) a, par acte conclu le 28 janvier 2002, devant M.X... de la SCP X... Y..., notaire, donné à bail à la société Nord France distribution, un local à usage commercial d'une superficie de 540 mètres carrés dont 290 mètres carrés en surface de vente et le reste en stockage ; que, par arrêté du 26 mars 2002, le maire de la commune a ordonné la fermeture au public du magasin à l'enseigne " Literie diffusion " exploité dans les lieux loués ; que la société Nord France diffusion a fait assigner la bailleresse en résiliation du bail et en paiement de dommages-intérêts, in solidum avec le notaire ;

     

     

    Sur le moyen unique du pourvoi principal :

     

     

    Attendu que la société Glinp II fait grief à l'arrêt de la déclarer responsable du préjudice subi par la société Nord France diffusion, de la condamner in solidum avec le notaire au paiement d'une provision et de prononcer la résolution du bail, alors, selon le moyen :

     

     

    1° / qu'après avoir énoncé en son article 1er que le " magasin " Literie diffusion", sis à Harnes, route nationale 17, repéré sur le plan ci-annexé, sera fermé au public à compter de la réception du présent arrêté par l'exploitant, l'arrêté pris par le maire de la commune de Harnes le 26 mars 2002 prévoyait en son article 2 que " la réouverture des locaux au public ne pourra intervenir qu'après délivrance d'un permis de construire et la réalisation de l'ensemble des travaux ayant fait l'objet de la demande de permis de construire, et le cas échéant des prescriptions figurant dans cette autorisation " ; qu'en affirmant que cet arrêté interdisait définitivement tout usage commercial des locaux loués pour en déduire que la société Glinp II avait manqué à son obligation de délivrance, la cour d'appel a violé ledit arrêté, ensemble les articles 1719 et 1720 du code civil;

     

     

    2° / qu'au titre de l'obligation de délivrance lui incombant, le bailleur n'est tenu de fournir au preneur que les autorisations nécessaires à son activité ; qu'en imputant à faute à la société Glinp II de n'avoir pas sollicité d'autorisation de la commission départementale d'équipement commercial, tout en constatant qu'en sa qualité de juge-judiciaire, il ne lui appartenait pas de se prononcer sur la nécessité d'une telle autorisation, ce dont il résultait qu'elle reprochait à la bailleresse de n'avoir pas délivré à son preneur des autorisations superfétatoires, la cour d'appel a violé les articles 1719 et 1720 du code civil ;

     

     

    3° / que l'événement irrésistible dans son exécution et imprévisible lors de la conclusion du contrat est constitutif d'un cas de force

     

    majeure de nature à exonérer le débiteur de ses obligations ; qu'en considérant que l'arrêté du maire de Harnes du 26 mars 2002 interdisant l'ouverture au public du magasin " Literie diffusion " ne constituait pas un cas de force majeure de nature à constituer un obstacle à l'exécution de délivrance de l'immeuble loué sans rechercher si lors de la conclusion du contrat la société Glinp II pouvait raisonnablement prévoir qu'en raison de la modification " à court terme " des périmètres de protection Z1 et Z2 du plan local d'urbanisme, le maire de la commune de Harnes renforcerait les prescriptions applicables aux immeubles ouverts au public, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1148 du code civil ;

     

     

    4° / qu'en écartant la responsabilité de la société Nord France distribution dans la perte d'exploitation subie par son établissement situé à Harnes par un motif tiré de l'impossibilité de se soustraire à l'exécution de l'arrêté municipal sans rechercher si l'exploitant des locaux loués ne disposait pas de la faculté d'exercer un recours provoquée par la fermeture de son établissement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

     

     

    Mais attendu qu'ayant constaté, d'une part, que la bailleresse s'engageait expressément dans le bail à garantir la commercialité des lieux, qu'un mois après la prise d'effet du bail, les locaux ne pouvaient être affectés à un usage commercial puisqu'ils ne pouvaient pas être ouverts au public et que l'arrêté du maire motivé par des raisons de sécurité publique ne pouvait pas constituer un cas de force majeure dès lors que la bailleresse pouvait vérifier auprès des services de la mairie s'il n'existait aucun obstacle à l'opération projetée, et d'autre part, relevé que la locataire n'avait commis aucune faute en s'abstenant d'exercer un recours contre l'arrêté municipal, la société locataire étant tenue de reprendre son activité dans les plus brefs délais et ne pouvant surseoir à toute exploitation dans l'attente de la décision administrative, la cour d'appel qui n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a pu en déduire que la société Glinp II avait manqué à son obligation de délivrance ».

     

     

    (Cour de Cassation 28 novembre 2007)

     

     

  • Un cas intéressant de responsabilité de l'agent immobilier

    Voici le cas d'un agent immobilier qui choisissant entre deux propositions faites par des acquéreurs potentiels avait choisi de rejeter, sans en informer ses mandants la première proposition en date pour privilégier la seconde, alors que la première répondait aux conditions de la vente posées par les vendeurs.

    On notera que compte tenu de la gravité de cette faute et de la volonté délibérée de créer le dommage subi par les premiers acquéreurs, le recours en garantie contre sa compagnie d'assurances par l'agent immobilier a été rejeté.

    « Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que, par acte sous seing privé du 13 mai 1986, les époux B... ont donné à M. Z..., agent immobilier, mandat de vendre une villa leur appartenant moyennant le versement d'une somme de 300 000 francs et le service d'une rente mensuelle et viagère de 5 500 francs ; qu'aux termes de l'article 7 de ce mandat, les époux B... s'engageaient à ratifier la vente à tout preneur acceptant ces conditions ; que le 23 mai 1986 les époux A... ont signé une promesse d'achat de la villa aux conditions requises par les vendeurs et ont versé des arrhes à l'agent immobilier ; que, cependant, celui-ci a établi le 30 mai un compromis de vente au profit d'autres acquéreurs ; qu'assigné en paiement de dommages-intérêts par les époux A..., il a appelé en garantie son assureur, la Mutuelle générale française accidents, aux droits de laquelle se trouvent les Mutuelles du Mans ;

    Sur le premier moyen :

    Attendu que M. Z... fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 19 février 1991) de l'avoir condamné à verser aux époux A... une indemnité de 120 000 francs alors, selon le moyen, que le mandat de vente lui donnait seulement le pouvoir de signer et de retirer toutes pièces nécessaires auprès des services compétents en vue de vendre l'immeuble, "d'établir tous actes sous seing privé aux clauses et conditions nécessaires à l'accomplissement des présentes" et de recueillir la signature de l'acquéreur ; qu'il résultait clairement de ce mandat que l'agent immobilier n'avait aucun pouvoir pour signer lui-même la promesse de vente au lieu et place des époux Lauredi ; qu'en estimant au contraire que M. Z... avait le pouvoir de signer lui-même l'acte de vente pour en déduire qu'il avait commis une faute en ne le faisant pas, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du mandat de vente et violé l'article 1134 du Code civil ;

    Mais attendu qu'après avoir rappelé que les vendeurs s'étaient engagés à ratifier la vente à tout acquéreur acceptant les prix et conditions fixés, l'arrêt relève que, le 23 mai 1986, les époux A... avaient accepté l'ensemble des conditions exigées ; qu'il ajoute qu'au lieu de faire toutes diligences auprès des époux B... pour leur faire régulariser la vente, l'agent immobilier leur a indiqué mensongèrement que les époux A... ne donnaient pas suite à leur proposition d'achat, manifestant ainsi la volonté d'évincer ces acquéreurs malgré leur acceptation des conditions de la vente ; que par ces seuls motifs, elle a légalement justifié sa décision de ce chef ; d'où il suit que le moyen tiré de la portée du mandat est inopérant ;

    Sur le second moyen :

    Attendu que M. Z... reproche encore à l'arrêt de l'avoir débouté du recours en garantie dirigé contre son assureur alors, selon le moyen, qu'en matière d'assurance la faute intentionnelle est caractérisée par la volonté de réaliser le dommage et de le provoquer sciemment ; qu'en estimant que l'agent immobilier avait commis une faute intentionnelle en écartant les époux A... de la conclusion effective d'une acquisition immobilière et en ayant nécessairement conscience du dommage ainsi provoqué, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la volonté délibérée de M. Z... de provoquer le dommage, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;

    Mais attendu que la juridiction d'appel a souverainement estimé, non seulement que M. Z... avait eu conscience du dommage causé aux époux A..., mais encore qu'il avait fallacieusement indiqué aux vendeurs que les intéressés renonçaient à leur projet ; qu'elle a ajouté que cette contrevérité "s'expliquait à l'évidence par la volonté délibérée d'évincer, sans motif légitime, les époux A... dont l'accord de volonté restait pourtant alors entier" ; qu'en l'état de ces motifs, d'où il résulte que l'agent immobilier avait intentionnellement provoqué le dommage, le second moyen ne peut davantage être accueilli ».

    (Cour de Cassation 7 juillet 1993)