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  • La publication d'un acte constatant l'accomplissement d'une condition suspensive n'est pas prévue par le 1° de l'article 28 du décret du 4 janvier 1955

    Ainsi jugé par cet arrêt :

    "Vu les articles 28 et 30 du décret n 55-22 du 4 janvier 1955 ;

    Attendu qu'en vertu de ces textes, le défaut de publicité des actes constatant l'accomplissement d'une condition suspensive n'a pas pour sanction leur inopposabilité aux tiers ;

    Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 2 mars 2010), que, par acte de partage du 4 janvier 1985, deux parcelles numérotées 1029 et 1030 ont été attribuées respectivement à Alfred X... et à Marcel X..., une clause de l'acte prévoyant que la cour située sur la parcelle 1029 serait attribuée à Marcel X... si Alfred X... n'avait pas enlevé un bassin en pierre situé sur la parcelle 1030 dans le délai d'une année de l'acte ; que le bassin est demeuré sur la parcelle 1030 ; que, par donation-partage du 3 mars 1993, la parcelle 1029 a été divisée, la partie 1142 comportant la cour étant attribuée en nue-propriété à Maurice X..., fils d'Alfred X..., ce dernier s'en réservant l'usufruit, puis a été vendue par acte du 12 novembre 1996 aux époux Y... qui l'ont eux-mêmes cédée aux époux Z... par acte des 28 et 30 janvier 2004 reçu par M. A..., notaire ; que Marcel X... a assigné les époux Z... en revendication de propriété de la cour, démolition du mur de clôture de leur fonds édifié par ceux-ci, paiement d'une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de la construction de ce mur, et, à titre subsidiaire, indemnisation par les notaires du préjudice subi en raison de la perte de son droit de propriété sur la cour ; que les époux Z... ont assigné en intervention forcée les époux Y... ainsi que M. A... et la SCP Pignard-Exbrayat et A... ;

    Attendu que, pour rejeter les demandes de Marcel X..., l'arrêt, qui relève qu'Alfred X... a successivement cédé la cour litigieuse d'abord à son frère Marcel par l'effet de l'acte de partage du 4 janvier 1985 et de la réalisation de la condition suspensive contenue dans cet acte du fait du non-enlèvement du bassin puis en nue-propriété à son fils par l'effet d'une donation partage puis par l'effet des ventes de l'usufruit par lui même et de la nue-propriété par son fils à M. et Mme Y... lesquels l'ont cédée aux époux Z..., que Marcel X... n'a pas fait publier son acquisition résultant de la réalisation de la condition suspensive contenue dans l'acte de partage du 4 janvier 1985 et que les autres mutations ont été publiées, retient que les actes et décisions judiciaires soumis à publicité par application du 1° de l'article 28 du décret du 4 janvier 1955 étant, en vertu de l'article 30 de ce décret, s'ils n'ont pas été publiés, inopposables aux tiers qui, sur le même immeuble, ont acquis, du même auteur, des droits concurrents en vertu d'actes ou de décisions soumis à publicité et publiés, les droits de Marcel X... sont inopposables aux autres acquéreurs successifs ;

    Qu'en statuant ainsi, alors que la publication d'un acte constatant l'accomplissement d'une condition suspensive n'est pas prévue par le 1° de l'article 28 du décret du 4 janvier 1955, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

    PAR CES MOTIFS :

    CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry, autrement composée ;

    Condamne les époux Z... et les époux Y... aux dépens ;

    Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne in solidum les époux Z... et les époux Y... à payer à Marcel X... la somme de 2 500 euros ; rejette les autres demandes ;

    Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

    Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille onze.

     

    MOYEN ANNEXE au présent arrêt

    Moyen produit par Me Foussard, avocat aux Conseils pour M. X...

    L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

    EN CE QU'il a débouté M. X... de toutes ses prétentions ;

    AUX MOTIFS QU'« un moyen nouveau peut toujours être soulevé en cause d'appel et qu'une partie ne peut pas être privée du double degré de juridiction de ce fait ; que la clause litigieuse de l'acte de partage du 4 janvier 1985 est ainsi rédigée : " La parcelle n° 1029 attribuée à monsieur Alfred X... sera grevée d'un droit de passage à tous usages, de la manière indiquée au plan ci-annexé, au profit des immeubles cadastrés sous les numéros 1030 et 1024, attribués à monsieur Marcel X..., mais uniquement pendant le délai d'un an ci-dessus stipulé pour l'enlèvement du bassin. Au cas où ce délai d'un an ne serait pas respecté par monsieur Alfred X..., le bassin, à l'expiration de ce délai, deviendrait la propriété de monsieur Marcel X..., de même que la portion de cour grevée pendant ce délai du droit de passage ci-dessus prévu " ; qu'il en résulte que la servitude de passage n'avait qu'une durée annuelle, qu'Alfred X... devenait propriétaire de la cour par l'effet du partage et que le transfert de la propriété de la portion de cour grevée qu'il consentait au profit de Marcel X... était soumis à la condition du non enlèvement du bassin par lui-même dans le délai d'un an ; que, selon l'article 28 du décret n055-22 du janvier 1955, " Sont obligatoirement publiés au bureau des hypothèques de la situation des immeubles : 1° Tous actes, même assortis d'une condition suspensive, et toutes décisions judiciaires, portant ou constatant entre vifs : a) mutation ou constitution de droits réels immobiliers... 4° les actes ou décisions judiciaires, énumérés ci-après, lorsqu'ils portent sur les droits soumis à publicité en vertu du 1° :... b) Les actes constatant l'accomplissement d'une condition suspensive ; qu'il résulte des éléments ci-dessus qu'Alfred X... a successivement cédé la portion de cour litigieuse d'abord à son frère Marcel, par l'effet de l'acte de partage et de la réalisation de la condition suspensive du fait du non enlèvement du bassin, puis en nue-propriété à son fils Maurice par la donation-partage du 3 mars 1993, puis à monsieur et madame Y..., par l'effet des ventes du 12 novembre 1996 de l'usufruit par lui-même et de la nue-propriété par son fils Maurice, et que ces derniers l'ont ensuite revendue aux époux Z... ; que, Marcel X... n'a pas fait publier son acquisition résultant de la réalisation de la condition suspensive, mais que les autres mutations ont été régulièrement publiées ; que, en vertu de l'article 30 du même décret de 1955, " les actes et décisions judiciaires soumis à publicité par application du 1° de l'article 28 sont, s'ils n'ont pas été publiés, inopposables aux tiers qui, sur le même immeuble, ont acquis, du même auteur, des droits concurrents en vertu d'actes ou de décisions soumis à la même publicité et publiés " ; que les droits de Marcel X... sont donc inopposables aux autres acquéreurs successifs, que le jugement doit être réformé et que monsieur Marcel X... doit être débouté de ses prétentions contre les époux Z... ; que monsieur Marcel X... ne peut faire aucun reproche à maître A... qui n'avait aucune obligation de conseil à son endroit et qui n'a commis envers lui aucune faute quasi délictuelle, n'ayant pu que constater lors de la vente Y...- Z... que monsieur Marcel X... n'était en droit de faire aucune revendication sur le bien cédé » ;

    ALORS QUE, premièrement, il résulte des articles 28. 4° et 30. 4° du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 que le défaut de publicité des actes déclaratifs portant sur des immeubles n'a pas pour sanction leur inopposabilité aux tiers ; qu'en décidant que le défaut de publicité par M. Marcel X... d'un acte constatant la réalisation de la condition suspensive à laquelle était subordonné son droit sur la cour litigieuse rendait la réalisation de cette condition inopposable et le droit qui en découlait inopposables aux tiers, la cour d'appel a violé les articles 28. 4° et 30. 4° du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 ;

    ALORS QUE, deuxièmement et subsidiairement, chaque indivisaire est censé avoir succédé seul et immédiatement à tous les effets compris dans son lot ou à lui échus sur licitation et n'avoir jamais eu la propriétés des autres effets de l'indivision ; que la condition accomplie a un effet rétroactif au jour auquel l'engagement a été contracté ; qu'en considérant que Marcel X... tenait son droit sur la portion de cour litigieuse d'Alfred X..., lorsque Marcel X... était devenu propriétaire de cette portion à la suite de l'accomplissement d'une condition suspensive figurant dans l'acte de partage du 4 janvier 1985 passé entre Alfred X... et Marcel X..., de sorte que ce dernier tenait son droit de la convention de partage et donc du défunt dont la succession était partagée et non d'Alfred X..., la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 30 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955, ensemble des articles 883 et 1179 du code civil ;

    ALORS QUE, troisièmement et subsidiairement, en qualité d'officier public, le notaire est responsable même envers les tiers de toute faute préjudiciable commise par lui dans l'exercice de ses fonctions et ne peut, dès lors, prêter son ministère pour conférer le caractère authentique à une convention dont il sait qu'elle méconnaît les droits d'un tiers ; qu'en jugeant que Maître A..., qui a reçu l'acte de vente sur la cour litigieuse passé entre les époux Y... et Z... en janvier 2004, n'avait pas commis de faute à l'égard de Marcel X..., lorsque cet officier ministériel avait omis de reproduire dans l'acte de vente la clause de l'acte de partage du 4 janvier 1985 qui subordonnait le droit de propriété de Marcel X... sur la cour à la réalisation d'une condition suspensive, ce qui aurait pourtant rendu le droit de Marcel X... opposable, en toute hypothèse, aux époux Y... et Z..., la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil."


  • Préemption et discrimination

    La Cour de Cassation annule la condamnation d'un Maire :

     

    La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 24 mai 2011 où étaient présents : M. Louvel président, Mme Palisse conseiller rapporteur, M. Blondet, Mmes Koering-Joulin, Guirimand, MM. Beauvais, Guérin, Straehli, Finidori, Raybaud conseillers de la chambre, Mme Divialle, M. Maziau conseillers référendaires ;

    Avocat général : Mme Magliano ;

    Greffier de chambre : M. Bétron ;

    Sur le rapport de Mme le conseiller PALISSE, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, de Me SPINOSI et de la société civile professionnelle BARADUC et DUHAMEL, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général MAGLIANO, Me LYON-CAEN, avocat du demandeur ayant eu la parole en dernier ;

    Vu les mémoires produits en demande, en défense et les observations de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE) ;

    Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 111-4 et 432- 7 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

    "en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de discrimination raciale et l'a condamné pénalement et civilement ;

    "aux motifs que les faits reprochés au prévenu sont fondés sur les dispositions des articles 432-7, alinéa 1er, 225-1, alinéa 2, du code pénal et réprimés par les articles 432-7, alinéa 1, et 432-17 du code pénal ; que la discrimination consiste pour un maire soit dans le refus d'un bénéfice d'un droit accordé par la loi, soit dans l'entrave à l'exercice normal d'une activité économique quelconque ; qu'en l'espèce, il est reproché à M. X... dépositaire de l'autorité publique, un exercice abusif du droit de préemption pour refuser le bénéfice d'un droit accordé par la loi, en l'espèce le droit d'acquérir la propriété d'un immeuble à des personnes ayant un nom à consonance étrangère faisant supposer leur origine étrangère ou leur appartenance ou non, vraie ou supposée à une ethnie ou une nationalité déterminée ; que si la loi pénale est d'interprétation stricte, le bénéfice d'un droit accordé par la loi prévu à l'article 432-7 1° doit s'analyser au regard de l'ensemble des textes et des conventions, qu'il ne peut être tiré de ce texte que seul celui qui peut refuser le bénéfice d'un droit et celui qui a le pouvoir de l'accorder ; que dans les quatre cas visés à la prévention, les acheteurs avaient signés un compromis de vente chez le notaire pour l'achat d'un bien immobilier ; qu'ils étaient donc titulaires d'un droit qui leur avait été conféré par l'acte et tel que prévu par le code civil, donc par la loi puisque la promesse de vente vaut vente ; qu'ils ne se trouvaient pas dans l'expectative d'acquérir un bien immobilier quelconque mais qu'ils avaient obtenu un droit sur un bien particulièrement établi et désigné dans l'acte et qu'ils allaient en devenir propriétaires au termes et aux conditions prévues dans le compromis ; qu'ils avaient obtenu le droit d'être propriétaires ; que la propriété au sens des droits fondamentaux énumérés par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 est « un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique légalement constatée l'exige évidemment et sous la condition d'une juste et préalable indemnité » ; que tout projet d'aliénation à titre onéreux d'un bien soumis au droit de préemption doit faire l'objet d'une déclaration d'intention d'aliéner adressée par le propriétaire ou son mandataire à la mairie de la commune où est situé le bien afin que celle-ci puisse être en mesure d'apprécier si le bien concerné l'intéresse pour la réalisation d'un projet ou d'opérations d'aménagement ; que le droit de préemption doit être justifié par l'existence d'opérations d'aménagement suffisamment précis et certain et s'exercer dans un délai de deux mois ; que le code de l'urbanisme en son article L. 213-1 prévoit que sont soumis au droit de préemption institué … tout immeuble ou ensemble de droits sociaux donnant vocation à l'attribution en propriété ou en jouissance d'un immeuble ou d'une partie d'un immeuble, bâtis ou non bâtis lorsqu'ils sont aliénés à titre onéreux, sous quelque forme que ce soit ; qu'il ressort des pièces de la procédure et des débats que le maire de la commune de Pont-de-Chéruy a dans les quatre cas ci-dessus rappelés, usé de son droit de préemption de façon abusive pour un motif de politique municipale de réhabilitation urbaine de certains immeubles ou quartiers alors qu'aucun projet n'était arrêté, précis et certain et ce dans le seul but d'évincer les futurs acquéreurs au nom à consonance étrangère de l'opération d'acquisition d'un bien immobilier pour lequel ils s'étaient engagés ; qu'en effet, s'agissant du bien devant être acquis par M. Z..., le maire a pris un arrêté de préemption pour des motifs vagues deux mois après la signature du compromis, qui a fait l'objet d'un recours devant le tribunal administratif, que le maire a proposé de son propre chef un prix de 150 000 francs, sans saisine du service des domaines et alors que la promesse de vente avait été signée pour un prix de 600 000 francs ; que le maire a exercé des pressions importantes par avocat interposé afin que le vendeur se désiste de son recours intenté devant le tribunal en échange de quoi il accepterait une vente au profit d'un propriétaire dont il donnait le nom ; que s'agissant du bien devant être acquis par M. A..., le maire a pris un arrêté en date du 20 juin 2000 pour exercer le droit de préemption de la commune dans le cadre de la réhabilitation du centre ville et notamment de la tour du Constantin alors que les époux A... avaient signé le compromis en mai 2000 ; que le maire après avoir téléphoné personnellement à l'acheteur à son domicile dans une autre ville que celle de Pont-de-Chéruy, avait également fait des pressions sur le vendeur qu'il avait convoqué à la mairie pour lui proposer un autre acheteur, un fils d'un des copropriétaires de l'immeuble ; qu'il a rapporté son arrêté lorsque M. A... l'a contraint fortement de le recevoir pour lui faire part de sa situation familiale ; que s'agissant du bien devant être acquis par M. B... et vendu par les époux C..., ces derniers qui s'étaient engagés à vendre en février 2000 à un premier acquéreur ont finalement pu vendre leur immeuble plus d'un an plus tard, le maire s'étant opposé à la vente au premier acheteur puis avait usé du droit de préemption de la commune dans le cadre de la réhabilitation du centre ville, à trois reprises dont le 5 mars 2001 après la signature du compromis du 13 février avec M. B..., arrêté qui sera par la suite annulé le 3 juillet 2001 par la sous-préfecture de Vienne postérieurement au refus opposé par les époux C... à l'offre d'achat faite par la mairie ; que s'agissant du bien devant être acquis par Mme D..., le maire par arrêté du 10 septembre 2001, a exercé le droit de préemption de la mairie soit deux jours avant le délai d'expiration de ce droit au motif de la restructuration du quartier et de l'aménagement du carrefour formé par la RD 517 et la rue Neyret ; qu'il a été averti neuf jours plus tard de l'illégalité de cet arrêté par la sous-préfecture de Vienne mais il a cependant, le 5 novembre 2001 adressé un courrier à la sous-préfecture par lequel il faisait état des modifications apportées à son arrêté du 10 septembre alors que la mairie n'avait pas manifesté auparavant contrairement à ce qu'il prétend, son intention d'acquérir cet immeuble qui était en vente depuis plusieurs mois ; que le motif invoqué par le maire pour l'exercice du droit de préemption a été déclaré non fondé dans trois cas sur quatre Démirbilek, Ait B... et D... ; que chaque fois, il s'est exercé lorsque les acquéreurs avaient un nom à consonance étrangère à tel point que la vente par les époux C..., ceux-ci ne se sont pas vus opposer ce droit lorsque leur cinquième acquéreur portait un nom à consonance européenne, que neuf ventes ont été réalisées sans difficulté au 10 bd Gonthier à l'adresse même où les époux C... se sont vus opposés les préemptions répétées ; que les acquéreurs desdites ventes avaient un patronyme européen ; que le prévenu a reconnu lors de l'audience devant le tribunal avoir demander à connaître les noms des acquéreurs avant leur acquisition ce qui corrobore le témoignage de M. E... qui avait dit que le notaire Me F... lui avait conseillé de mettre dans le compromis de vente le nom de son épouse de patronyme français pour éviter l'exercice du droit de préemption par le maire ; qu'enfin, celui-ci a reconnu qu'il ne respectait pas lorsqu'il exerçait le droit de préemption les règles de droit public ; qu'il est établi que le prévenu a eu la volonté bien qu'arguant avoir agi au nom d'une politique de mixité sociale, de réhabilitation de certains immeubles insalubres et de relogement de certaines familles issues de l'immigration, commis le délit de discrimination qui lui est reproché en refusant par le biais de l'exercice abusif et non fondé du droit de préemption la possibilité à certaines personnes dont les noms avaient une consonance étrangère d'user du droit qu'elle avaient acquis en signant un compromis de vente d'être propriétaire d'un bien immobilier sur la commune de Pont-de-Chéruy ;

    "1) alors que la loi pénale est d'interprétation stricte ; que, d'autre part, la discrimination prévue par l'article 432-7 du code pénal suppose, dans le premier cas visé par ce texte, le refus du bénéfice d'un droit accordé par la loi ; que, la cour d'appel a déclaré le prévenu coupable de discrimination par refus d'un droit accordé par la loi en faisant usage de son droit de préemption sur des biens immobiliers ayant fait l'objet de compromis de vente, aux motifs que dès lors qu'il existait un accord sur la chose et sur le prix, la promesse de vente valait vente, si bien qu'en exerçant le droit de préemption, le maire avait privé l'acquéreur de son droit de propriété ; qu'en se déterminant ainsi, alors que l'exercice d'un droit de préemption, fût-il abusif, ne saurait constituer le refus du bénéfice d'un droit accordé par la loi au sens de l'article 432-7 du code pénal, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés les principes ci-dessus énoncés ;

    "2) alors qu'à tout le moins, le refus d'un droit doit empêcher la jouissance effective de ce droit, le législateur n'ayant pas prévu d'incriminer la tentative de discrimination ; que dès lors qu'il résulte des termes de l'arrêt et du jugement que les ventes aux époux Z... et A... ont finalement été réalisées, la cour d'appel ne pouvait retenir à l'encontre du prévenu la discrimination par refus d'un droit dont les acquéreurs avaient finalement bénéficié ;

    "3) alors que, dans les conclusions déposées pour le prévenu, il était soutenu que le droit de préemption n'était pas utilisé systématiquement utilisé à l'encontre des personnes ayant des patronymes à consonance étrangère, que s'il était exercé majoritairement à l'égard de telles personnes dans les biens de la Tour du Constantin, en cause en l'espèce, cela tenait au fait qu'elles se portaient seules acquéreurs dans cet ensemble immobilier et qu'à l'inverse, le droit de préemption n'avait pas été exercé à l'égard de très nombreuses personnes portant également un nom à consonance étrangère, ce qui était exclusif de toute intention discriminatoire ; qu'il était en outre observé que le maire était intervenu en faveur de différentes personnes portant des noms à consonance étrangère afin qu'elles puissent obtenir une location ou acquière un bien immobilier dans la commune ; que faute d'avoir répondu à ces conclusions, en s'en tenant aux seuls cas des quatre acquéreurs visés à la prévention, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;

    Vu les articles 111-4 et 432-7 du code pénal ;

    Attendu que, d'une part, la loi pénale est d'interprétation stricte ;

    Attendu que, d'autre part, la discrimination prévue par l'article 432-7 du code pénal suppose, dans le premier cas visé par ce texte, le refus du bénéfice d'un droit accordé par la loi ;

    Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure, que M. X... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel, sur le fondement de l'article 432-7 du code pénal, pour avoir en sa qualité de maire de la commune de Pont-de-Cheruy (Isère), étant dépositaire de l'autorité publique, refusé à MM. Z..., A..., Nait B... et Mme D..., le bénéfice d'un droit accordé par la loi, en l'espèce celui d'acquérir la propriété d'un immeuble, à raison de la consonance de leurs noms faisant supposer leur origine étrangère ou leur appartenance ou non, vraie ou supposée, à une ethnie ou à une nationalité déterminée ; qu'il lui est reproché, pour ce faire, un exercice abusif du droit de préemption ; que le tribunal l'a déclaré coupable ;

    Attendu que, sur appel du prévenu, du ministère public, des parties civiles, et sur les observations de la HALDE, pour confirmer le jugement, l'arrêt énonce que les acquéreurs qui avaient signé une promesse de vente étaient titulaires d'un droit que leur confère cet acte de par le code civil ; que les juges ajoutent que le prévenu en sa qualité de maire a usé de son droit de préemption de manière abusive dans le seul but d'évincer les futurs acquéreurs au nom à consonance étrangère de l'opération d'acquisition d'un bien immobilier pour laquelle ils s'étaient contractuellement engagés ;

    Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que l'exercice d'un droit de préemption, fût-il abusif, ne saurait constituer le refus du bénéfice d'un droit accordé par la loi au sens de l'article 432-7 du code pénal, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés ;

    D'où il suit que la cassation est encourue ;

    Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de cassation proposés :

    CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Grenoble, en date du 16 juin 2010, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

    RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

    ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Grenoble et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

    DIT n'y avoir lieu à application, au profit de l'Association SOS racisme - touche pas à mon pote, de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

    Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt et un juin deux mille onze ;

    En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ."