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  • Responsabilité de la commune en raison de l'entretien d'un chemin rural

    Elle n'est pas retenue dans ce cas :


    "Vu l'ordonnance n° 11MA00008 du 21 février 2011, enregistrée le 25 février 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté à cette cour par M. Jackie B ;

    Vu le pourvoi, enregistré le 3 janvier 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, présenté par M. B, demeurant ... et le nouveau mémoire, enregistré le 22 juillet 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. B ; il demande au Conseil d'Etat :

    1°) d'annuler le jugement n° 0902526 du 5 novembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à ce que la commune de Pontevès soit condamnée à lui verser la somme de 2 500 euros ainsi que les intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la demande indemnitaire préalable, en réparation du préjudice que lui a causé le mauvais entretien du chemin desservant sa propriété ;

    2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

    3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à la SCP Coutard, Mayer, Munier-Apaire, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;



    Vu les autres pièces du dossier ;

    Vu le code général des collectivités territoriales ;

    Vu le code rural ;

    Vu le code de la voirie routière ;

    Vu la loi du 20 août 1881 relative au code rural ;

    Vu l'ordonnance n° 59-115 du 7 janvier 1959 ;

    Vu le code de justice administrative ; 

    Après avoir entendu en séance publique :

    - le rapport de M. Maxime Boutron, Auditeur, 

    - les observations de la SCP Coutard, Mayer, Munier-Apaire avocat de M. B et de la SCP Hémery, Thomas-Raquin avocat de la commune de Pontevès,

    - les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;

    La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Coutard, Mayer, Munier-Apaire avocat de M. B et à la SCP Hémery, Thomas-Raquin avocat de la commune de Pontevès ;




    1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B est propriétaire d'une parcelle située sur la commune de Pontevès, dans le quartier du Puits Fangon ; que la parcelle n'est desservie que par un chemin ouvert à la circulation comportant des nids de poule et des nappes d'eau stagnante ; qu'il a demandé à la commune de Pontevès de réparer les dommages qu'il estimait avoir subis du fait de l'usure prématurée de son véhicule et du risque encouru pour sa santé ; que par un courrier du 22 septembre 2009, la commune a rejeté cette demande au motif que le chemin était un chemin rural dont l'entretien n'était pas à sa charge ; que M. B se pourvoit en cassation contre le jugement du 5 novembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande indemnitaire ;

    2. Considérant qu'au soutien de son moyen tiré de ce que la commune devait être regardée comme assurant l'entretien du chemin desservant sa propriété, M. B se prévalait d'une lettre que lui avait adressée le maire le 8 août 2008 ; que le tribunal administratif de Toulon n'a pas répondu à ce moyen ; que, par suite, M. B et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, est fondé à en demander l'annulation ;

    3. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

    4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2321-1 du code général des collectivités territoriales : " Sont obligatoires pour la commune les dépenses mises à sa charge par la loi. " ; qu'aux termes de l'article L. 2321-2 du même code : " Les dépenses obligatoires comprennent notamment : / (...) 20° Les dépenses d'entretien des voies communales (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 141-3 du code de la voirie routière : " Le classement et le déclassement des voies communales sont prononcés par le conseil municipal " ; qu'aux termes de l'article L. 161-1 du code rural, alors en vigueur : " Les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune. " ; qu'aux termes de l'article 9 de l'ordonnance du 7 janvier 1959 relative à la voirie des collectivités locales, dans sa rédaction alors applicable : " Deviennent voies communales les voies qui, conformément à la législation en vigueur à la date de la présente ordonnance, appartiennent aux catégories ci-après : / 1° Les voies urbaines ; / 2° Les chemins vicinaux à l'état d'entretien ; le préfet établira, à cet effet, dans un délai de six mois, la liste par commune des chemins vicinaux à l'état d'entretien ; / 3° Ceux des chemins ruraux reconnus, dont le conseil municipal aura, dans un délai de six mois, décidé l'incorporation ; cette délibération pourra être prise sans enquête publique. " ; qu'aux termes de l'article 12 de la même ordonnance : " Les chemins vicinaux et les chemins ruraux reconnus autres que ceux visés à l'article 9 sont incorporés de plein droit à la voirie rurale de la commune. " ; qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 20 août 1881 relative au code rural, applicable jusqu'à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 7 janvier 1959 : " Les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage public, qui n'ont pas été classés comme chemins vicinaux " ; qu'aux termes de l'article 4 de cette loi : " Le conseil municipal peut, sur la proposition du maire, déterminer ceux des chemins ruraux qui devront être l'objet des arrêtés de reconnaissance (...) " ; 

    5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le chemin rural desservant la propriété de M. B ait fait l'objet, antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 7 janvier 1959, d'un arrêté de reconnaissance en vertu des dispositions précitées de la loi du 20 août 1881 ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que ce chemin, qui n'est pas situé en agglomération, ait fait l'objet de l'une des procédures de classement prévues par l'article 9 de l'ordonnance du 7 janvier 1959 ; qu'il s'ensuit que ce chemin est demeuré dans la voirie rurale de la commune de Pontevès, en application de l'article 12 de l'ordonnance du 7 janvier 1959 ; 

    6. Considérant que la responsabilité d'une commune en raison des dommages trouvant leur origine dans un chemin rural n'est pas, en principe, susceptible d'être engagée sur le fondement du défaut d'entretien normal ; qu'il en va différemment dans le cas où la commune a exécuté, postérieurement à l'incorporation du chemin dans la voirie rurale, des travaux destinés à en assurer ou à en améliorer la viabilité et a ainsi accepté d'en assumer, en fait, l'entretien ; 

    7. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la commune ait effectué des travaux d'entretien de ce chemin et qu'elle ait ainsi accepté d'en assumer, en fait, l'entretien ; que si, par un courrier du 8 août 2008, le maire a indiqué à M. B faire " au mieux pour résoudre le problème posé par le mauvais état de ce chemin ", cette indication ne traduisait aucun accomplissement de travaux d'entretien par la commune ; que, par suite, M. B n'est pas fondé à soutenir que la responsabilité de cette personne publique était engagée en raison du défaut d'entretien normal de ce chemin rural ;

    8. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 161-5 du code rural: " L'autorité municipale est chargée de la police et de la conservation des chemins ruraux. " ;

    9. Considérant, d'une part, que, s'il appartient au maire de faire usage de son pouvoir de police afin de réglementer et, au besoin, d'interdire la circulation sur les chemins ruraux et s'il lui incombe de prendre les mesures propres à assurer leur conservation, ces dispositions n'ont, par elles-mêmes, ni pour objet ni pour effet de mettre à la charge des communes une obligation d'entretien de ces voies ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la commune aurait manqué à son obligation, qui découlerait de cette disposition, d'assurer l'entretien du chemin rural ne peut qu'être écarté ;

    10. Considérant, d'autre part, que si le requérant soutient que les préjudices dont il se prévaut sont la conséquence du mauvais état du chemin, il n'établit pas que ces préjudices, à les supposer établis, seraient la conséquence du défaut d'adoption par le maire des mesures de police ou de conservation relevant de sa compétence en application des dispositions de l'article L. 161-5 du code rural ;

    11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande de M. B doit être rejetée ;

    12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la commune de Pontevès, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Pontevès au titre des mêmes dispositions ;



    D E C I D E :



    Article 1er : Le jugement du 5 novembre 2010 du tribunal administratif de Toulon est annulé.

    Article 2 : La demande présentée par M. B devant le tribunal administratif de Toulon et le surplus de ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat sont rejetés.

    Article 3 : Les conclusions de la commune de Pontevès, présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

    Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jackie B et à la commune de Pontevès."

  • L'article L. 13-8 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique est conforme à la Constitution

    C'est l'avis du Conseil Constitutionnel :

     

    Le Conseil constitutionnel a été saisi le 10 juillet 2012 par la Cour de cassation (troisième chambre civile, arrêt n° 1030 du 10 juillet 2012), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par Messieurs Daniel J. et Georges J. et Mesdames Michelle J. épouse M. et Odile J. épouse F., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 13-8 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. 

    LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, 

    Vu la Constitution ; 

    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; 

    Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; 

    Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; 

    Vu les observations produites pour les requérants par Me Étienne Tête, avocat au barreau de Lyon, enregistrées les 25 juillet et 29 août 2012 ; 

    Vu les observations produites pour la Communauté urbaine de Lyon par Me Patrice Spinosi, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées les 1er et 29 août 2012 ; 

    Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 1er août 2012 ; 

    Vu les pièces produites et jointes au dossier ; 

    Me Tête, pour les requérants, Me Spinosi pour la Communauté urbaine de Lyon et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 18 septembre 2012 ; 

    Le rapporteur ayant été entendu ; 

    1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 13-8 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : « Lorsqu'il existe une contestation sérieuse sur le fond du droit ou sur la qualité des réclamants et toutes les fois qu'il s'élève des difficultés étrangères à la fixation du montant de l'indemnité et à l'application des articles L. 13-10, L. 13-11, L. 13-20 et L. 14-3, le juge règle l'indemnité indépendamment de ces contestations et difficultés sur lesquelles les parties sont renvoyées à se pourvoir devant qui de droit » ; 

    2. Considérant que, selon les requérants, en obligeant le juge de l'expropriation à fixer le montant de l'indemnité indépendamment des contestations et difficultés sur lesquelles les parties sont renvoyées devant le juge compétent, ces dispositions s'opposent en particulier à ce que l'exproprié présente une question préjudicielle portant sur la légalité d'un plan local d'urbanisme ; qu'elles porteraient une atteinte excessive au droit à un recours juridictionnel effectif résultant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ainsi qu'au droit de propriété proclamé par son article 17 ; 

    3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution » ; qu'est garanti par cette disposition le droit des personnes intéressées à exercer un recours juridictionnel effectif ; 

    4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 17 de la Déclaration de 1789 : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité » ; qu'afin de se conformer à ces exigences constitutionnelles, la loi ne peut autoriser l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers que pour la réalisation d'une opération dont l'utilité publique est légalement constatée ; que la prise de possession par l'expropriant doit être subordonnée au versement préalable d'une indemnité ; que, pour être juste, l'indemnité doit couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain, causé par l'expropriation ; qu'en cas de désaccord sur la fixation du montant de l'indemnité, l'exproprié doit disposer d'une voie de recours appropriée ; 

    5. Considérant qu'en vertu des dispositions contestées le juge de l'expropriation fixe le montant de l'indemnité d'expropriation indépendamment des contestations sérieuses sur le fond du droit ou la qualité des réclamants ; que si les parties présentent de telles contestations, elles sont renvoyées à se pourvoir « devant qui de droit » ; qu'il en va de même lorsque s'élèvent des difficultés étrangères à la fixation du montant de l'indemnité et à l'application des articles L. 13-10 et L. 13-11 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique relatifs aux demandes de réquisition d'emprise totale ainsi qu'à celle des articles L. 13-20 et L. 14-3 du même code portant sur les litiges relatifs au relogement des locataires et occupants ; 

    6. Considérant que, si le juge de l'expropriation fixe le montant de l'indemnité, il lui appartient de renvoyer les parties à se pourvoir devant le juge compétent si celles-ci soulèvent des contestations ou difficultés ; qu'il doit tenir compte de l'existence de celles-ci lorsqu'il fixe l'indemnité et au besoin prévoir plusieurs indemnités correspondant aux diverses hypothèses envisagées ; que, pour chacune de ces hypothèses, l'indemnité fixée doit couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ; que l'ordonnance par laquelle le juge de l'expropriation fixe les indemnités est prise au terme d'une procédure contradictoire et peut faire l'objet de recours ; que les dispositions contestées ne font pas obstacle, si la décision rendue par le juge saisi de la contestation ou de la difficulté ne correspond pas à l'une des hypothèses prévues par le juge de l'expropriation, à ce que ce dernier soit à nouveau saisi par les parties ; 

    7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les dispositions contestées ne méconnaissent ni les exigences de l'article 16 ni celles de l'article 17 de la Déclaration de 1789 ; 

    8. Considérant que les dispositions de l'article L. 13-8 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit ; qu'elles doivent être déclarées conformes à la Constitution, 

    D É C I D E : 

    Article 1er.- L'article L. 13-8 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique est conforme à la Constitution. 

    Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. 

    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 27 septembre 2012, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Hubert HAENEL, Nicolas SARKOZY et Pierre STEINMETZ.