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  • Présomption d'urgence et permis de construire

    En matière de référé administratif, l'urgence, qui est l'une des conditions de suspension d'un acte administratif est présumée en matière de permis de construire, de sorte que le requérant à la suspension n'a pas à prouver cette urgence qui est acquise à défaut d'éléments contraires :

     

     

    « Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision » ;

    Considérant que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le demandeur, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ;

    Considérant que si, en règle générale, l'urgence s'apprécie compte tenu des justifications fournies par le demandeur quant au caractère suffisamment grave et immédiat de l'atteinte que porterait un acte administratif à sa situation ou aux intérêts qu'il entend défendre, il en va différemment de la demande de suspension d'un permis de construire pour laquelle, eu égard au caractère difficilement réversible de la construction d'un bâtiment, la condition d'urgence doit en principe être constatée lorsque les travaux vont commencer ou ont déjà commencé sans être pour autant achevés ; qu'il ne peut en aller autrement que dans le cas où le pétitionnaire ou l'autorité qui a délivré le permis justifient de circonstances particulières, tenant, notamment, à l'intérêt s'attachant à ce que la construction soit édifiée sans délai ;

    Considérant que, pour estimer que la condition d'urgence n'était pas remplie et refuser en conséquence de suspendre l'exécution de l'arrêté du 13 septembre 2006 autorisant M. A et Mme B à réaliser des travaux d'extension et d'aménagement de leur maison d'habitation, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur ce que, d'une part, M. C n'aurait pas de vue directe sur la construction projetée et, d'autre part, il n'établirait pas que le projet autorisé porterait une atteinte suffisamment grave et immédiate à sa situation ; que l'un et l'autre de ces deux motifs sont entachés d'erreur de droit, dès lors que le premier procède d'une appréciation erronée de l'intérêt pour agir du requérant, et que le second, en faisant peser sur lui la charge d'établir l'urgence à suspendre l'exécution du permis litigieux, procède d'une erreur sur la charge de la preuve en cette matière, où, ainsi qu'il a été dit, cette urgence est présumée à défaut d'éléments contraires ; que l'ordonnance attaquée doit, pour ce motif, être annulée ;

    Considérant qu'il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

    Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir soulevée par la commune de Châteauneuf-du-Rhône et par M. Oziol et Mme Bremond :

    Considérant qu'à l'appui de sa demande de suspension de l'exécution du permis de construire contesté, M. C soutient que celui-ci méconnaît les dispositions des articles L. 4213 et R. 4212 du code de l'urbanisme et de l'article N 13 du plan local d'urbanisme de la commune de Châteauneuf-du-Rhône ;que le plan local d'urbanisme de la commune, sur le fondement duquel est intervenu l'arrêté litigieux, est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, d'erreur de droit et de contrariété avec les principes du rapport de présentation en ce qu'il classe les parcelles litigieuses dans une « micro-zone » N, et non en zone agricole ; que l'arrêté attaqué méconnaît l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement du 23 novembre 2005 du tribunal administratif de Grenoble annulant un permis de construire portant sur une parcelle voisine de celle de M. A et de Mme B ; que cet arrêté a été pris en méconnaissance des règles d'urbanisme applicables sous l'ancien plan d'occupation des sols de la commune »

     

    (Conseil d'État 15 juin 2007)

  • Servitude d'inconstructibilité des 100 mètres à partir du rivage et absence d'indemnisation

    Il est pratiquement impossible d'obtenir l'indemnisation du fait d'une servitude d'inconstructibilité, comme le démontre cet arrêt rendu à l'occasion d'une demande d'indemnisation faite par un propriétaire pourtant bénéficiaire d'une autorisation de lotissement délivrée en 1964 et dont les terrains étaient devenus inconstructibles du fait de la création de la servitude d'inconstructibilité des 100 mètres à partir du rivage :

     

    « Considérant que M. A demande l'annulation de l'arrêt du 3 mars 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 22 mars 2001 du tribunal administratif de Marseille rejetant sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 279 501 francs en réparation du préjudice subi du fait de l'atteinte aux droits acquis qu'il tenait d'une autorisation de lotissement délivrée le 14 mai 1964 , résultant de ce que les terrains en cause étaient devenus inconstructibles, ainsi qu'une indemnité de 1 128 988 francs au titre de la perte de valeur vénale des terrains, outre les intérêts au taux légal à compter du 22 février 1999 ;

    Considérant que si M. A avait, dans ses écritures devant les juges du fond, mentionné l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'invoquait pas expressément la méconnaissance de ces stipulations ; que la cour administrative d'appel n'avait dès lors pas à y répondre ;

    Considérant qu'aux termes de l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme : « N'ouvrent droit à aucune indemnité les servitudes instituées par application du présent code en matière de voirie, d'hygiène et d'esthétique ou pour d'autres objets et concernant, notamment, l'utilisation du sol, la hauteur des constructions, la proportion des surfaces bâties et non bâties dans chaque propriété, l'interdiction de construire dans certaines zones et en bordure de certaines voies, la répartition des immeubles entre diverses zones. / Toutefois, une indemnité est due s'il résulte de ces servitudes une atteinte à des droits acquis ou une modification à l'état antérieur des lieux déterminant un dommage direct, matériel et certain ; cette indemnité, à défaut d'accord amiable, est fixée par le tribunal administratif, qui doit tenir compte de la plus-value donnée aux immeubles par la réalisation du plan d'occupation des sols rendu public ou du plan local d'urbanisme approuvé ou du document qui en tient lieu » ;

    Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A n'a acquis que le 22 décembre 1978 le lot dont il est propriétaire dans le lotissement de l'Anthénor à Ensuès-la-Redonne, autorisé le 14 mai 1964 par le préfet des Bouches-du-Rhône au profit de M. Henri Malfatto, qui a supporté les travaux d'équipement et de desserte ; qu'ainsi la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas dénaturé les pièces du dossier en jugeant que M. A n'a pas supporté personnellement les impenses relatives à l'équipement du lotissement ; qu'en jugeant que les dispositions de l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme faisaient obstacle à l'indemnisation de la perte de valeur vénale du terrain, cette valeur comprenant notamment la part des dépenses d'équipement supportée par le vendeur du lot et répercutée dans le prix de vente du terrain, la cour administrative d'appel, dont l'arrêt est suffisamment motivé sur ce point, n'a ni commis d'erreur de droit ni d'erreur de qualification juridique ;

    Considérant que l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme ne fait pas obstacle à ce que le propriétaire dont le bien est frappé d'une servitude prétende à une indemnisation dans le cas exceptionnel où il résulte de l'ensemble des conditions et circonstances dans lesquelles la servitude a été instituée et mise en oeuvre, ainsi que de son contenu, que ce propriétaire supporte une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi ; qu'en jugeant que la servitude en cause, résultant de la directive sur la protection et l'aménagement du littoral approuvée par le décret du 25 août 1979 et de la loi du 3 janvier 1986, est applicable à l'ensemble des terrains situés dans la bande de cent mètres du rivage pour en conclure que l'intéressé ne pouvait faire valoir que l'institution de cette servitude avait fait peser sur lui une charge spéciale et exorbitante, la cour administrative d'appel n'a entaché son arrêt ni d'erreur de droit ni d'erreur de qualification juridique ;

    Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt du 5 mars 2005 de la cour administrative d'appel de Marseille ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence »

     (Conseil d'État 27 juin 2007)