Cette décision de la Cour de Cassation rappelle que la consignation vaut paiement. L'acquéreur avait été autorisé judiciairement par le juge des référés à consigner le solde du prix de vente.
"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 26 mars 2009), que par actes du 7 juin 2001, la société civile immobilière Parc de Fontainieu (la SCI) à vendu à Mme X... et à Melle X... (Mmes X...) deux appartements en l'état futur d'achèvement ; que Mmes X..., arguant de désordres et non finitions ont refusé de payer le solde du prix de vente et ont obtenu, par ordonnance de référé du 4 mars 2002, la désignation d'un expert et l'autorisation de consigner le solde du prix de vente entre les mains du bâtonnier de l'ordre des avocats ; qu'après dépôt du rapport d'expertise, la SCI a fait assigner Mme X... en paiement d'une certaine somme correspondant au solde du prix de vente après déduction du coût de reprise des désordres et en dommages et intérêts ainsi que la société Harribey, intervenue en qualité d'entreprise générale afin d'obtenir sa garantie ; que Mmes X... ont demandé la condamnation de la SCI à leur remettre les clés des appartements, à l'indemnisation des désordres et non façons ainsi qu'à la réparation de leur préjudice économique ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article R. 261-14 du code de la construction et de l'habitation ;
Attendu que le solde du prix de vente est payable lors de la mise du local à la disposition de l'acquéreur ; que toutefois il peut être consigné en cas de contestation sur la conformité avec les prévisions du contrat ;
Attendu que pour débouter Mmes X... de leur demande tendant à obtenir la remise des clés des appartements sous astreinte, l'arrêt retient que cette remise ne peut intervenir qu'après le règlement du solde du prix de vente ainsi que les parties en ont convenu et que le paiement effectif n'étant pas intervenu, c'est à bon droit que la SCI retient les clés ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que Mmes X... avaient été autorisées à consigner le solde du prix de vente et alors que la consignation vaut paiement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mmes X... de leur demande tendant à la condamnation de la SCI à leur remettre les clés et de celle tendant à l'indemnisation de leur préjudice économique, l'arrêt rendu le 26 mars 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée ;
Condamne la société Parc de Fontainieu aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Parc de Fontainieu à payer à Mmes X..., ensemble, la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils pour Mmes X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué :
D'avoir débouté les consorts X... de leurs demandes tendant à obtenir la remise des clés sous astreinte ;
Aux motifs qu'en ce qui concerne la remise des clés, cette remise ainsi que les parties en ont convenu contractuellement dans les actes de vente ne peut intervenir qu'après le règlement du solde du prix. A ce jour ce paiement effectif n'est pas intervenu et en conséquence c'est à bon droit que la SCI retient ces clés, que la décision déférée doit donc être confirmée de ce chef ;
Et aux motifs du jugement confirmé qu'en vertu des contrats de vente signés entre les parties, l'acquéreur a la jouissance des biens vendus dès l'achèvement de ceux-ci au sens de l'article R 261-1 du Code précité, mais ne peut exiger cette jouissance qu'après s'être libéré vis à vis du vendeur de toute somme pouvant être due à celui-ci ; qu'il est constant en l'espèce que MME X... et MLLE X... n'ont pas acquitté le solde du prix de vente, ayant au demeurant été autorisées par ordonnance de référé du 4 mars 2002 à consigner ce solde entre les mains d'un séquestre ; qu'elles ne peuvent donc faire grief à la venderesse de ne pas avoir mis les lieux à leur disposition, dans la mesure où le prix n'était pas intégralement payé ; que la SCI est fondée à leur opposer les dispositions de l'article R. 261-1 précité aux termes desquelles ne sont pas pris en considération, pour l'appréciation de l'achèvement, les défauts de conformité n'ayant pas un caractère substantiel et les malfaçons ne rendant pas l'ouvrage impropre à sa destination, dans la mesure où les désordres et les non conformités établis par l'expert judiciaire ne présentaient pas un caractère de gravité tel qu'ils permettaient de considérer que l'immeuble n'était pas achevé, et partant, de justifier le non règlement du solde du prix de vente ; … que Mme et Mlle X... ne peuvent demander la condamnation sous astreinte de la demanderesse à leur remettre les clefs des appartements, alors que cette remise ne peut avoir lieu qu'après règlement du solde du prix de vente, ainsi qu'il est précisé aux actes de vente du 7 juin 2001 ;
Alors que le solde de 5 % du prix d'un immeuble vendu en l'état futur d'achèvement, payable lors de la mise du local à la disposition de l'acquéreur, peut être consigné en cas de contestation sur la conformité avec les prévisions du contrat ; qu'il en résulte que lorsque l'acquéreur d'un immeuble vendu en l'état futur d'achèvement a, sur autorisation judiciaire, consigné le solde du prix payable lors de la mise du local à sa disposition, le vendeur est tenu de lui en remettre les clés et permettre la jouissance effective ; que les juges du fond, pour rejeter la demande de Mme Danièle X... et de Mlle Virginie X..., tendant à voir condamner la SCI Le Parc de Fontainieu à leur remettre sous astreinte les clés des appartements qu'elles avaient respectivement acquis en l'état futur d'achèvement, se sont fondés sur les stipulations des contrat de vente selon lesquelles la remise des clés ne pouvait intervenir qu'après le règlement du solde du prix, qui n'était pas intervenu ; qu'en statuant ainsi, tout en constatant que les acquéreurs avaient été autorisées par le juge des référés à consigner le solde du prix entre les mains du bâtonnier, et en admettant que la consignation avait eu pour effet de libérer les débitrices, les juges du fond ont violé l'article R. 261-14 du Code de la construction et de l'habitation.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué :
D'avoir rejeté la demande de condamnation de la société venderesse en réparation de préjudice économique, formée par les consorts X..., qui demandaient à ce titre la condamnation conjointe et solidaire de la SCI Le Parc de Fontainieu et de la société Harribey Construction ;
Aux motifs qu'en ce qui concerne les préjudices économiques et les frais d'huissiers des consorts X.... Pour les frais d'huissiers, ceux-ci ne sont pas contestés et la décision doit être confirmée de ce chef. Le préjudice économique avancé résulte du défaut de remise de clés. Or il est constant que les consorts X... n'ont pas réglé au vendeur l'ensemble des sommes qu'elles pouvaient lui devoir et ce en raison non de défauts de conformité ayant un caractère substantiel et de malfaçons rendant l'immeuble impropre à sa destination mais en raison de défauts qui ne permettaient pas de considérer que l'immeuble n'était pas achevé étant relevé que depuis le dépôt du rapport d'expertise les consorts X... auraient pu demander à être autorisées à réaliser les travaux à leurs frais avancés ou avec l'aide d'une provision fixée par une décision de justice, ce qui aurait eu pour effet de réduire le préjudice dont elles font état aujourd'hui, même si cette possibilité aurait pu entraîner la remise à la SCI des fonds consignés, remise des fonds qui aurait entraîné la remise des clés. Dans ces conditions la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle concerne tant le préjudice économique par lui même que les charges de copropriétés ;
Et aux motifs du jugement confirmé qu'en vertu des contrats de vente signés entre les parties, l'acquéreur a la jouissance des biens vendus dès l'achèvement de ceux-ci au sens de l'article R 261-1 du Code précité, mais ne peut exiger cette jouissance qu'après s'être libéré vis à vis du vendeur de toute somme pouvant être due à celui-ci ; qu'il est constant en l'espèce que Madame X... et Mademoiselle X... n'ont pas acquitté le solde du prix de vente, ayant au demeurant été autorisées par ordonnance de référé du 4 mars 2002 à consigner ce solde entre les mains d'un séquestre ; qu'elles ne peuvent donc faire grief à la venderesse de ne pas avoir mis les lieux à leur disposition, dans la mesure où le prix n'était pas intégralement payé ; que la SCI est fondée à leur opposer les dispositions de l'article R. 261-1 précité aux termes desquelles ne sont pas pris en considération, pour l'appréciation de l'achèvement, les défauts de conformité n'ayant pas un caractère substantiel et les malfaçons ne rendant pas l'ouvrage impropre à sa destination, dans la mesure où les désordres et les non conformités établis par l'expert judiciaire ne présentaient pas un caractère de gravité tel qu'ils permettaient de considérer que l'immeuble n'était pas achevé, et partant, de justifier le non règlement du solde du prix de vente ;
1° Alors que la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation des dispositions rejetant la demande d'indemnisation formée par les consorts X..., en réparation du préjudice résultant du défaut de remise des clés, s'impose donc par voie de conséquence de la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation, par application des dispositions de l'article 625, alinéa 2, du Code de procédure civile ;
2° Alors que tout jugement doit, à peine de nullité, être motivé ; que la cour d'appel, pour débouter Mme Danièle X... et Mlle Virginie X... de leur demande d'indemnisation au titre du préjudice économique, a retenu que le défaut de règlement du solde du prix n'était pas motivé par des défauts de conformité ayant un caractère substantiel ni permettant de considérer que l'immeuble comme non achevé ; qu'en statuant ainsi, tout en relevant la non conformité des carrelages extérieurs, glissants, et les défauts des carrelages intérieurs, susceptibles de générer des coupures, en condamnant la SCI Le Parc de Fontainieu en paiement de sommes absorbant en grande partie le solde du prix consigné, et sans rechercher, comme elle y était invitée, si ces défauts ne rendaient pas les appartements impropres à leur destination, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
3° Alors que toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages-intérêts, en cas d'inexécution de la part du débiteur ; que le créancier peut, en cas d'inexécution, être autorisé à faire exécuter lui-même l'obligation, aux dépens du débiteur ; que celui-ci peut être condamné à faire l'avance des sommes nécessaires à cette exécution ; que la cour d'appel, pour débouter Mme Danièle X... et Mlle Virginie X... de leur demande d'indemnisation au titre du préjudice économique, retient qu'elles auraient pu demander à être autorisées à réaliser les travaux à leurs frais avancés ou avec l'aide d'une provision fixée par une décision de justice, ce qui aurait eu pour effet de réduire le préjudice invoqué ; qu'en statuant ainsi, tout en constatant que les acquéreurs avaient été autorisées par le juge des référés à consigner le solde du prix, et en leur imputant l'absence d'exercice d'une faculté, la cour d'appel a violé les articles 1142 et 1144 du Code civil ;
4° Alors que le débiteur est tenu de réparer toutes les conséquences dommageables de sa défaillance, et le créancier victime n'est pas tenu de limiter son préjudice dans l'intérêt du responsable ; que la cour d'appel qui, pour débouter Mme Danièle X... et Mlle Virginie X... de leur demande d'indemnisation au titre du préjudice économique, retient qu'elles auraient pu demander à être autorisées à réaliser les travaux à leurs frais avancés ou avec l'aide d'une provision fixée par une décision de justice, ce qui aurait eu pour effet de réduire le préjudice invoqué, a violé les articles 1142 et 1147 du Code civil ;