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BDIDU Blog Actualités juridiques Droit Immobilier et Droit de l'Urbanisme par Christophe Buffet Avocat Spécialiste en Droit Immobilier et Droit Public Tél. 02 41 81 16 16 - Page 2351

  • Défaut d’entretien d’un terrain et pouvoir de police du maire

    Une voisine se plaignait du fait que le terrain jouxtant le sien n’était pas entretenu et reprochait au maire de n’avoir pas usé de ses pouvoirs de police pour enjoindre ce voisin de procéder à la remise en état de sa parcelle.

     

    Les juges administratifs ont considéré qu’en l’absence d’atteinte à l’environnement d’une part et en l’absence de danger grave et imminent d’autre part, c’est légalement que le maire avait refusé d’intervenir.

     

    « Considérant que, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Nantes, saisie par la commune de Perros-Guirrec, a annulé le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 26 mars 2003 qui avait annulé, à la demande de Mme A, la décision en date du 16 février 2001 du maire de cette commune, refusant de mettre en œuvre ses pouvoirs de police pour imposer la remise en état de la parcelle cadastrée AD 274 jouxtant la propriété de Mme A et a rejeté ses conclusions contre cette décision ; que la cour administrative d'appel, qui était saisie par l'effet dévolutif de l'appel de l'ensemble des moyens soulevés en première instance par Mme A, a omis de statuer sur les moyens qui n'étaient pas inopérants, tirés de ce que la décision attaquée était contraire aux arrêtés du préfet des Côtes du Nord en dates du 16 avril 1984 et du 1er février 1990 ; que, dès lors, Mme A est fondée à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes en date du 31 mars 2005 ;

    Considérant qu'en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond ;

    Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

    Considérant qu'aux termes de l'article L. 2213-25 du code général des collectivités territoriales, dans la rédaction que lui a donnée l'article 94 de la loi du 2 février 1995 relative à l'amélioration de l'environnement : Faute pour le propriétaire ou ses ayants droit d'entretenir un terrain non bâti situé à l'intérieur d'une zone d'habitation ou à une distance maximum de 50 m des habitations, dépendances, chantiers, ateliers ou usines lui appartenant, le maire peut, pour des motifs d'environnement, lui notifier, par arrêté, l'obligation d'exécuter, à ses frais, les travaux de remise en état de ce terrain après mise en demeure. / Si, au jour indiqué par l'arrêté de mise en demeure, les travaux de remise en état du terrain prescrits n'ont pas été effectués, le maire peut procéder d'office à leur exécution aux frais du propriétaire ou de ses ayants droit. / Si le propriétaire ou, en cas d'indivision, un ou plusieurs des indivisaires n'ont pu être identifiés, la notification les concernant est valablement faite à la mairie. / Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. ;

    Considérant que l'application de l'article L. 2213-25 du code général des collectivités territoriales n'est pas rendue impossible par l'absence du décret prévu en son dernier alinéa ; que le refus opposé par un maire à une demande tendant à ce qu'il fasse usage des pouvoirs que lui confère cet article n'est entaché d'illégalité que lorsque l'état d'un terrain non bâti, porte à l'environnement une atteinte d'une gravité telle qu'un refus serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant de faire usage des pouvoirs que lui confère l'article L. 2213-25 du code général des collectivités territoriales pour faire entretenir la parcelle AD 274, le maire de Perros-Guirec aurait entaché d'erreur manifeste son appréciation sur les atteintes que l'état de cette parcelle, envahie par une végétation en friche et par des broussailles, était susceptible de porter à l'environnement ; que la commune de Perros-Guirrec est par suite fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes s'est fondé sur l'état de cette parcelle pour annuler le refus du maire de mettre en œuvre la procédure prévue à l'article L. 2213-25 du code général des collectivités territoriales ;

    Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens invoqués par Mme A devant le tribunal administratif à l'encontre de cette décision ;

    Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : « La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique. Elle comprend notamment : ( ) 4°) le soin de prévenir par des précautions convenables ( ) les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature ( ) » et qu'aux termes de l'article L. 2214-4 du même code, « En cas de danger grave ou imminent, tels que les accidents naturels prévus au 5° de l'article L. 2212-2, le maire prescrit l'exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances » ; que si ces dispositions autorisent le maire en cas de danger grave et imminent à faire usage des pouvoirs que lui confèrent les dispositions de l'article L. 2212-4 du code, si besoin est par des mesures d'exécution sur des propriétés privées exécutées par les soins de la commune et à ses frais, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de non-entretien de la parcelle AD 274 jouxtant la propriété de Mme A ait constitué un danger grave et imminent requérant que le maire de Perros-Guirrec fasse usage desdits pouvoirs ;

    Considérant, en deuxième lieu, ainsi qu'il a été dit ci-dessus que le maire a pu sans entacher sa décision d'illégalité refuser de mettre en œuvre les pouvoirs qu'il tient des dispositions de l'article L. 2213-25 du code général des collectivités territoriales ;

    Considérant que le refus opposé par le maire n'est contraire ni aux dispositions de l'arrêté du préfet des Côtes du Nord en date du 16 avril 1984 relatif à la destruction des chardons, ni à celles de l'arrêté préfectoral du 1er février 1990 relatif à la réglementation des feux forestiers, agricoles et domestiques de plein air ;

    Considérant enfin que Mme A ne saurait invoquer utilement les dispositions de l'article L. 2243-1 du code général des collectivités territoriales relatives à la procédure de déclaration de parcelles en état d'abandon, dont le but n'est pas de faire face à un péril mais de permettre à une collectivité publique d'engager des opérations d'utilité collective sur des parcelles abandonnées ;

    Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du maire de Perros-Guirec en date du 16 février 2001 ». 

     

     

    (Conseil d’État 11 mai 2007)

  • Perte de constructibilité et absence d’indemnisation

    Cette décision rappelle classiquement que la perte de constructibilité d’une parcelle, du fait d’une règle d’urbanisme, n’est pas indemnisable, sauf exception :

     

    « Considérant que M. A demande l'annulation de l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande en réparation du préjudice subi du fait de la perte de constructibilité d'une parcelle lui appartenant située à Rueil-Malmaison ;

    Sur la régularité de l'arrêt attaqué :

    Considérant qu'il résulte de l'examen de la minute de l'arrêt attaqué que le moyen tiré de ce que celle-ci aurait omis de viser les mémoires du requérant des 25 octobre 2002 et 17 mai 2004 manque en fait ;

    Considérant que si M. A a demandé, la veille de l'audience, le renvoi de l'affaire, la cour administrative d'appel de Paris n'était tenue ni d'accéder à la demande du requérant, ni de l'aviser de ce refus ;

    Considérant que pour écarter les moyens tirés par M. A de ce que la commune aurait commis à son encontre les fautes invoquées dans le présent litige, la cour s'est fondée sur l'autorité de la chose jugée de la décision du 11 juillet 1990 du Conseil d'Etat, statuant au contentieux, qui imputait la responsabilité de ces fautes à l'Etat ; qu'ainsi, elle a suffisamment motivé son arrêt à ce premier titre ;

    Considérant que, pour écarter la responsabilité sans faute de la commune, la cour administrative d'appel a notamment jugé que la servitude instaurée en zone ND ne faisait pas supporter à M. A une charge spéciale et exorbitante ; qu'un tel motif répondait au moyen du requérant tiré de ce que sa parcelle avait subi un préjudice spécifique ; que M. A n'est donc pas fondé à soutenir que la cour aurait insuffisamment motivé son arrêt à ce second titre ;

    Sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué :

    Sur la responsabilité pour faute de la commune :

    Considérant qu'en jugeant que les faits, invoqués par le requérant, constitués par le défaut de notification du permis de construire du 19 juillet 1971 et l'attitude hostile de l'administration à son égard, étaient, ainsi qu'il a été jugé par la décision du Conseil d'Etat du 11 juillet 1990, constitutifs de fautes de l'Etat, et ne pouvaient donc être qualifiés de fautes de la commune de Rueil Malmaison, la cour administrative d'appel n'a pas entaché son arrêt d'une erreur de droit ;

    Sur la responsabilité sans faute de la commune :

    Considérant qu'aux termes de l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme : « n'ouvrent droit à aucune indemnité les servitudes instituées par application du présent code en matière de voirie, d'hygiène et d'esthétique ou pour d'autres objets et concernant, notamment, l'utilisation du sol, la hauteur des constructions, la proportion des surfaces bâties et non bâties dans chaque propriété, l'interdiction de construire dans certaines zones et en bordure de certaines voies, la répartition des immeubles entre diverses zones. Toutefois, une indemnité est due s'il résulte de ces servitudes une atteinte à des droits acquis ou une modification à l'état antérieur des lieux déterminant un dommage direct, matériel et certain ; cette indemnité, à défaut d'accord amiable, est fixée par le tribunal administratif, qui doit tenir compte de la plus-value donnée aux immeubles par la réalisation du plan d'occupation des sols rendu public ou du plan local d'urbanisme approuvé ou du document qui en tient lieu » ; que cet article ne pose pas un principe général et absolu, mais l'assortit expressément de deux exceptions touchant aux droits acquis par les propriétaires et à la modification de l'état antérieur des lieux ; qu'il ne fait pas obstacle à ce que le propriétaire dont le bien est frappé d'une servitude prétende à une indemnisation dans le cas exceptionnel où il résulte de l'ensemble des conditions et circonstances dans lesquelles la servitude a été instituée et mise en oeuvre, ainsi que de son contenu, que ce propriétaire supporte une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi ; que, dans ces conditions, M. A n'est pas fondé à soutenir que l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme serait incompatible avec les stipulations de l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

    Considérant qu'en estimant que le jugement attaqué était suffisamment motivé sur le moyen tiré de la violation de l'article L. 160-5, dès lors que M. A invoquait en première instance exclusivement le caractère spécial et exorbitant du préjudice subi, sans invoquer l'atteinte portée à un droit acquis, la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier ;

    Considérant qu'en jugeant que M. A ne pouvait se prévaloir, au titre des dispositions de l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme, du permis de construire délivré le 19 juillet 1971, dès lors que celui-ci était assorti d'une réserve portant sur l'accord du ministère des affaires culturelles quant aux façades et au plan masse du projet, alors même que ce permis ne lui avait pas été notifié, la cour administrative d'appel n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit ; que si l'arrêt attaqué mentionne en outre que la modification des règles d'urbanisme qui a rendu inconstructible la parcelle de M. A est intervenue alors que le permis de construire du 19 juillet 1971 était périmé, ce motif avait dans l'argumentation de la cour un caractère surabondant ; que dès lors le moyen tiré de ce que ce motif reposerait sur des erreurs de fait et de droit ne peut qu'être écarté ;

    Considérant qu'en jugeant que le classement de la parcelle appartenant à M. A en zone ND avec protection d'espace boisé classé n'avait, compte tenu de l'intérêt général qui s'attache à la préservation des abords du château et du parc de la Malmaison et alors que le terrain en cause accueille déjà une construction, pas fait supporter à l'intéressé une charge spéciale et exorbitante hors de proportion avec cet objectif d'intérêt général, et qu'il en résultait que le requérant ne remplissait pas les conditions fixées par l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme pour obtenir une réparation, la cour n'a entaché son arrêt ni d'une erreur de qualification juridique ni d'une erreur de droit ;

    Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête ;

    Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Rueil-Malmaison qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante le versement de la somme que réclame M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par la commune de Rueil-Malmaison »

     

    (Conseil d’État 10 mai 2007)