"Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 août et 9 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE RD MACHINES OUTILS, dont le siège est au lieu-dit " Aux Tuileries " à Contamine-sur-Arve (74130) ; la société demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 08LY02297 du 8 juin 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0501360 du 10 juillet 2008 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil de la communauté de communes du Genevois du 25 janvier 2005 décidant d'exercer le droit de préemption urbain sur le tènement immobilier de l'ancienne usine de la société ACE sur les communes de Beaumont et de Présilly ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de la communauté de communes du Genevois le versement de la somme de 6 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 22 mai 2012, présentée pour la SOCIETE RD MACHINES OUTILS ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 25 mai 2012, présentée pour la communauté de communes du Genevois ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Rémi Decout-Paolini, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SOCIETE RD MACHINES OUTILS et de la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de la communauté de communes du Genevois,
- les conclusions de Mme Claire Landais, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SOCIETE RD MACHINES OUTILS et à la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de la communauté de communes du Genevois ;
Considérant que, par une délibération du 24 janvier 2005, le conseil de la communauté de communes du Genevois a décidé de préempter le tènement immobilier de l'ancienne usine de la société ACE situé sur le territoire des communes de Beaumont et Présilly (Haute-Savoie) ; que la SOCIETE RD MACHINES OUTILS, acquéreur évincé, a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande d'annulation de cette délibération ; que sa demande a été rejetée par un jugement du 10 juillet 2008, confirmé par un arrêt du 8 juin 2010 de la cour administrative d'appel de Lyon ; que la société se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;
Sur la régularité de l'arrêt attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 613-3 du code de justice administrative : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsque, postérieurement à la clôture de l'instruction, le juge est saisi d'une production, mémoire ou pièce, émanant de l'une des parties à l'instance, il lui appartient de prendre connaissance de cette production avant de rendre sa décision, ainsi que de la viser sans l'analyser, mais qu'il ne peut la prendre en compte sans avoir préalablement rouvert l'instruction afin de la soumettre au débat contradictoire ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, postérieurement à la clôture de l'instruction devant la cour administrative d'appel de Lyon, la SOCIETE RD MACHINES OUTILS a produit la copie d'un article de journal ; que si, pour attester qu'elle avait satisfait à l'obligation de prendre connaissance de cette production, la cour pouvait se borner à la viser au nombre des " autres pièces du dossier ", la circonstance qu'elle ait cru devoir indiquer à cette même fin qu'en application de l'article R. 613-3 " la pièce produite pour la société requérante le 17 février 2010, après la clôture de l'instruction, n'a pas été examinée par la cour ", est sans incidence sur la régularité de son arrêt ;
Sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. / Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les collectivités titulaires du droit de préemption urbain peuvent légalement exercer ce droit, d'une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date, et, d'autre part, si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption ; qu'en outre, la mise en oeuvre de ce droit doit, eu égard notamment aux caractéristiques du bien faisant l'objet de l'opération ou au coût prévisible de cette dernière, répondre à un intérêt général suffisant ;
Considérant qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir de vérifier si le projet d'action ou d'opération envisagé par le titulaire du droit de préemption est de nature à justifier légalement l'exercice de ce droit ; que, par suite, en se bornant à estimer que la décision de préempter la superficie totale du tènement n'était pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, la cour a commis une erreur de droit ; que dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit, pour ce motif, être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant, en premier lieu, que par deux délibérations du 21 décembre 2004, transmises au représentant de l'Etat respectivement les 23 et 29 décembre 2004, les conseils municipaux des communes de Beaumont et de Présilly ont délégué à la communauté de communes du Genevois, en application de l'article L. 213-3 du code de l'urbanisme, l'exercice du droit de préemption urbain sur le tènement immobilier de l'ancienne usine de la société ACE ; que ces délibérations réglementaires, qui ont été affichées les 24 et 30 décembre 2004, n'avaient pas à être notifiées au propriétaire du bien concerné ni à l'acquéreur pressenti, non plus qu'à leurs mandataires ; qu'elles étaient exécutoires à la date du 24 janvier 2005 à laquelle le conseil de la communauté de communes du Genevois a décidé d'exercer le droit de préemption ainsi délégué ; que la circonstance qu'à la date de réception de la déclaration d'intention d'aliéner, les communes de Beaumont et de Présilly n'avaient pas encore délégué leur droit de préemption à la communauté de communes du Genevois est sans incidence sur la légalité de la décision de préemption, qui s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la communauté de communes pour prendre la délibération attaquée doit être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la communauté de communes du Genevois a demandé au mois de février 2004 à la Maison de l'économie et du développement la réalisation d'une étude de faisabilité d'une offre immobilière de type " ateliers relais " aux fins de faciliter l'implantation de jeunes entreprises sur son territoire ; que, lors de la présentation de cette étude le 19 avril 2004, la possibilité de réaliser ce projet sur le site de l'ancienne usine de la société ACE a été évoquée ; que la communauté de communes a adressé à cette fin au juge commissaire en charge du redressement judiciaire de la société ACE une offre d'achat du tènement immobilier ; qu'à la suite de l'autorisation donnée par le juge commissaire le 16 juillet 2004 pour la cession du bien à la communauté de communes, et avant l'intervention de l'ordonnance du 22 octobre 2004 du tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains réformant au profit de la SOCIETE RD MACHINES OUTILS la décision du juge commissaire, la communauté de communes a adopté le 6 septembre 2004 une délibération relative à l'acquisition et à la réhabilitation de ce site pour y " installer des ateliers relais et des entreprises en création " puis confié le 13 septembre suivant à la SED Haute-Savoie la réalisation d'une estimation des travaux de réhabilitation ; que, dans ces conditions, contrairement à ce que soutient la société requérante, la communauté de communes justifiait, à la date de la délibération attaquée, de la réalité d'un projet de " village d'entreprises " ;
Considérant, en troisième lieu, que si la SOCIETE RD MACHINES OUTILS fait valoir que la superficie d'environ cinq hectares du tènement préempté est disproportionnée au regard du projet envisagé et que, par suite, la décision de préemption ne revêt pas un intérêt général suffisant, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu de la nature de ce projet, dont la réalisation est programmée en plusieurs phases et nécessite des aires de stationnement, de livraison et de stockage, et du fait qu'une préemption limitée à une partie seulement du terrain concerné par la déclaration d'intention d'aliéner n'était pas légalement possible, que les auteurs de la délibération litigieuse aient fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme en décidant la préemption de ce tènement ;
Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE RD MACHINES OUTILS n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la SOCIETE RD MACHINES OUTILS au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le versement d'une somme de 3 000 euros à la communauté de communes du Genevois en application de ces dispositions ;
D E C I D E :
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 8 juin 2010 est annulé.
Article 2 : Le surplus des conclusions présentées par la SOCIETE RD MACHINES OUTILS est rejeté.
Article 3 : La SOCIETE RD MACHINES OUTILS versera à la communauté de communes du Genevois la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE RD MACHINES OUTILS et à la communauté de communes du Genevois.
Copie en sera adressée pour information à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie."
BDIDU Blog Actualités juridiques Droit Immobilier et Droit de l'Urbanisme par Christophe Buffet Avocat Spécialiste en Droit Immobilier et Droit Public Tél. 02 41 81 16 16 - Page 1297
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Étendue du contrôle du juge sur l'intérêt général justifiant une décision de préemption
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Constructions temporaires et restaurant de plage
La décision rendue par le Conseil d'Etat dans l'affaire du restaurant de la Voile Rouge :
"Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SARL Tom Tea, dont le siège social ... et M. Antoine B, demeurant à la même adresse ; les requérants demandent au juge des référés du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1201667 du 26 juin 2012, par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Toulon, statuant sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté leur demande tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 12 juin 2012 par lequel le maire de Ramatuelle leur a ordonné d'interrompre les travaux réalisés sur les parcelles cadastrées AE 43, 262 et 72 situées chemin des Moulins ;
2°) de faire droit à leur demande de première instance ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la commune de Ramatuelle le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
ils soutiennent que :
- l'arrêté contesté a méconnu les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril prévoyant une procédure contradictoire, aucune situation d'urgence ou de compétence liée ne justifiant l'absence de mise en oeuvre d'une procédure contradictoire ;
- l'arrêté litigieux est entaché d'erreur de droit, dès lors qu'aucune autorisation d'urbanisme n'était nécessaire pour la construction litigieuse, qui relève des constructions temporaires régies par les articles L. 421-5 et R. 421-5 du code de l'urbanisme ;
- la qualification de site remarquable au sens des articles L. 146-6 et R. 146-1 du code de l'urbanisme ne saurait être retenue, dès lors que l'espace en cause n'est pas un site classé ;
- aux termes du schéma d'aménagement en cours d'approbation, le caractère remarquable de la plage de Pampelonne ou les caractéristiques de l'arrière plage ne font pas obstacle à l'implantation de constructions ou installations démontables ou réversibles ;
- l'arrêté contesté est entaché de détournement de pouvoir ;
- l'arrêté litigieux porte une atteinte manifestement illégale, d'une part, au droit de disposer de son bien et au droit de construire, corollaires du droit de propriété et, d'autre part, à la liberté de commerce, corollaire de la liberté d'entreprendre ;
- la condition d'urgence est remplie ;
- l'arrêté contesté leur cause un grave préjudice en les plaçant dans l'impossibilité de poursuivre leur activité pendant l'été 2012 ;
- l'interruption des travaux provoque la détérioration des matériaux ;
Vu l'ordonnance attaquée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 juillet 2012, présenté pour la SCI Ram Tom, dont le siège social est chemin de Moorea à Ramatuelle (83350), la SCI Château de sable de Pampelonne, dont le siège social est 49 rue du Commerce à Paris (75015) et M. Yves C domicilié chemin des Moulins à Ramatuelle (83550) qui concluent au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la SARL Tom Tea et de M. B le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
ils soutiennent que :
- l'arrêté contesté pouvait être pris sans mise en oeuvre préalable d'une procédure contradictoire dès lors qu'il y avait situation d'urgence au sens de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et que le maire était en situation de compétence liée ;
- l'arrêté attaqué ne porte pas atteinte au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre, dès lors que les requérants, d'une part, ne disposent d'aucun droit à construire et d'autre part, ne démontrent pas qu'ils disposent d'un droit de jouissance exclusif sur les parcelles en cause ;
- l'arrêté n'est pas entaché d'erreur de droit, dès lors que les constructions sont interdites dans la bande littorale des cent mètres en vertu du III de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, sauf à disposer d'un permis de construire explicite ;
- les travaux litigieux constituent des constructions saisonnières qui, en vertu notamment de l'article L. 432-1 du code de l'urbanisme, sont soumises à autorisation d'urbanisme, dont les requérants ne disposent pas ;
- l'ambiguïté sur le point de savoir si la construction requérait une autorisation d'urbanisme ne permet de qualifier l'illégalité de manifeste ;
- la condition d'urgence n'est pas remplie ;
Vu les observations, enregistrées le 16 juillet 2012, présentées par le ministre de l'égalité des territoires et du logement ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 juillet 2012, présenté pour la commune de Ramatuelle, qui reprend les conclusions du mémoire en défense de la SCI Ram Tom, la SCI Château de sable de Pampelonne et M. C et les mêmes moyens, et tend à ce que soit mis à la charge de la SARL Tom Tea et de M. B le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
elle soutient en outre que :
- la condition d'urgence n'est pas remplie dès lors que les requérants ont tardé à saisir le juge des référés ;
- la société requérante ne peut se prévaloir, pour caractériser l'urgence, de ce qu'il serait mis fin à une activité qu'elle n'a exercée qu'illégalement ;
- les requérants ne peuvent invoquer la méconnaissance de libertés fondamentales alors que leur projet est manifestement illégal ;
- les parcelles litigieuses étant inscrites par l'arrêté du 15 février 1966 à l'inventaire des sites pittoresques du département du Var, les travaux ont été entrepris en méconnaissance des dispositions de l'article L. 341-1 du code de l'environnement et qu'il y a lieu, le cas échéant, de substituer ce motif aux motifs énoncés par l'arrêté contesté ;
- la construction litigieuse sur un site remarquable est illégale dès lors qu'elle ne peut recevoir la qualification " d'aménagements légers " au sens de l'article L. 146-1 du code de l'urbanisme ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code l'urbanisme ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, et notamment son article 24 ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la SARL Tom Tea et M. B et, d'autre part, la commune de Ramatuelle, la SCI Ram Tom, la SCI Château de sable de Pampelonne, M. C et le ministre de l'égalité des territoires et du logement ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du 17 juillet 2012 à 11 heures au cours de laquelle ont été entendus :
- Me Briard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la SARL Tom Tea et de M. B ;
- Me Pinet, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la commune de Ramatuelle ;
- Me Gatineau, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la SCI Ram Tom, la SCI Château de sable de Pampelonne et M. C ;
- les représentants du ministre de l'égalité des territoires et du logement ;
et à l'issue de laquelle l'instruction a été close ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale (...) " ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme : " (...) Dans le cas de constructions sans permis de construire (...) le maire prescrira par arrêté l'interruption des travaux ainsi que, le cas échéant, l'exécution, aux frais du constructeur, des mesures nécessaires à la sécurité des personnes ou des biens (...) " ; qu'il résulte de l'instruction que, sur la base de procès-verbaux de constatation d'infractions au code de l'urbanisme dressés les 9 et 12 juin 2012 et sur le fondement de l'article L. 480-2 de ce même code, le maire de Ramatuelle a pris, le 12 juin 2012, un arrêté interruptif des travaux engagés par la SARL Tom Tea, représentée par M. B, sur les parcelles cadastrées AE 43, 262 et 72 situées chemin des moulins à Ramatuelle, au motif que ces travaux étaient réalisés sans autorisation, alors qu'ils étaient soumis à permis de construire, qu'ils portaient atteinte à un espace naturel remarquable au sens de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme, et qu'ils portaient atteinte à la protection de la bande littorale de cent mètres résultant du III de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme ; que la SARL Tom Tea et M. B, associé unique de cette société, font valoir que l'interruption des travaux les mettra dans l'impossibilité d'exploiter l'établissement de restauration " La voile rouge ", sur son nouveau lieu d'implantation, pendant la saison estivale 2012, lui causant un grave préjudice financier ;
3. Considérant que les requérants soutiennent que leur projet de construction d'un établissement de restauration reprenant l'enseigne " La voile rouge ", en bordure de la place de Pampelonne, n'était pas soumis à l'obtention d'un permis de construire au titre des dispositions de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme, mais devait être regardé comme bénéficiant d'une dispense de permis de construire, sur le fondement des articles L. 421-5 et R. 421-5 du code de l'urbanisme, eu égard au caractère temporaire des installations projetées, les constructions devant être implantées pour une durée inférieure à trois mois et être ultérieurement démontées ; que la commune de Ramatuelle fait valoir qu'eu égard à leur objet et à leur importance, les constructions entreprises par les requérants étaient soumises à permis de construire en application de l'article L. 421-1 et que, si elles pouvaient relever le cas échéant des dispositions de l'article L. 432-1 relatives aux constructions saisonnières, elles ne sauraient en revanche, eu égard à leur objet, bénéficier d'une dispense de permis de construire sur le fondement de l'article L. 421-5 ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 421-5 du code de l'urbanisme : " Un décret en Conseil d'Etat arrête la liste des constructions, aménagements, installations et travaux qui, par dérogation aux dispositions des articles L. 421-1 à L. 421-4, sont dispensés de toute formalité au titre du présent code en raison : / a) De leur très faible importance ; / b) De la faible durée de leur maintien en place ou de leur caractère temporaire compte tenu de l'usage auquel ils sont destinés ; (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Sont dispensées de toute formalité au titre du présent code, en raison de la faible durée de leur maintien en place ou de leur caractère temporaire compte tenu de l'usage auquel elles sont destinées, les constructions implantées pour une durée n'excédant pas trois mois. / Toutefois cette durée est portée à : / a) Un an en ce qui concerne les constructions nécessaires au relogement d'urgence des personnes victimes d'un sinistre ou d'une catastrophe naturelle ou technologique ; b) Une année scolaire en ce qui concerne les classes démontables installées dans les établissements scolaires ou universitaires pour pallier les insuffisances temporaires de capacités d'accueil ; c) La durée du chantier, en ce qui concerne les constructions temporaires directement nécessaires à la conduite des travaux ainsi que les installations liées à la commercialisation d'un bâtiment en cours de construction et pour une durée d'un an en ce qui concerne les constructions nécessaires au maintien des activités économiques ou des équipements existants, lorsqu'elles sont implantées à moins de trois cent mètres du chantier ; d) La durée d'une manifestation culturelle, commerciale, touristique ou sportive, dans la limite d'un an, en ce qui concerne les constructions ou installations temporaires directement liées à cette manifestation. / A l'issue de cette durée, le constructeur est tenu de remettre les lieux dans leur état initial. " ; qu'il résulte de ces dispositions que la possibilité de bénéficier de la dispense de permis de construire prévue par l'article L. 421-5 ne résulte pas uniquement du caractère temporaire ou démontable de la construction projetée mais aussi de l'usage auquel cette construction est destinée ; que le projet des requérants consiste en la construction d'un établissement de restaurant de plage démontable, d'une surface d'environ 170 m2 pour le bâti, accompagné d'une terrasse et structure de 550 m2 ; qu'eu égard à ses caractéristiques et à l'usage auquel il est destiné, ce projet de construction n'entre pas dans les catégories de constructions dispensées de permis de construire par les articles L. 421-5 et R. 421-5 du code de l'urbanisme ; qu'ainsi, en se fondant sur le motif tiré de ce que les travaux avaient été réalisés sans autorisation d'urbanisme, le maire de Ramatuelle n'a pas entaché l'arrêté litigieux d'illégalité manifeste ; qu'un tel motif suffit à lui seul à justifier l'arrêté attaqué ; que par suite, la contestation des autres motifs de l'arrêté litigieux est inopérante et qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'examiner la substitution de motifs sollicitée par la commune de Ramatuelle, tirée de ce que l'arrêté litigieux aurait pu être fondé sur l'article L. 341-1 du code de l'environnement ;
5. Considérant que si les requérants font valoir que l'arrêté contesté aurait dû être précédé d'une procédure contradictoire préalable en application des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, ces dispositions ne trouvent pas à s'appliquer dès lors que le maire est en situation de compétence liée pour prendre un arrêté interruptif de travaux en application des dispositions du 10ème alinéa de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme ;
6. Considérant que le détournement de pouvoir invoqué n'est pas établi ;
7. Considérant qu'ainsi, il n'apparaît pas, en l'état de l'instruction, que l'arrêté litigieux aurait porté aux libertés dont se prévalent les requérants une atteinte manifestement illégale ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL Tom Tea et M. B ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 12 juin 2012 ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la société Tom Tea et M. B à ce titre ; qu'il y a lieu, en revanche, de condamner solidairement M. B et la société Tom Tea à verser, d'une part, à la commune de Ramatuelle une somme de 3 000 euros et, d'autre part, à la SCI Ram Tom, à la SCI Château de sable de Pampelonne, et à M. C, une somme globale de 3 000 euros au titre de ces dispositions ;
O R D O N N E :
Article 1er : la requête de la SARL Tom Tea et de M. Antoine B est rejetée.
Article 2 : la SARL Tom Tea et M. B sont solidairement condamnés à verser, d'une part, une somme de 3 000 euros à la commune de Ramatuelle et, d'autre part, une somme globale de 3 000 à la SCI Ram Tom, à la SCI Château de sable de Pampelonne et à M. C, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la SARL Tom Tea, à M. Antoine B, à la commune de Ramatuelle, au ministre de l'égalité des territoires et du logement, à la SCI Ram Tom, à la SCI Château de sable de Pampelonne et à M. Yves C."