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L'indemnisation des servitudes d'urbanisme

L'indemnisation des servitudes d'urbanisme


Une servitude d'urbanisme est une restriction aux droits de propriété qui découle des dispositions légales ou réglementaires applicables à un terrain ou à une construction.


Cette restriction, dont la plus importante est l'interdiction de construire, est vécue par le propriétaire comme une atteinte intolérable à ses droits, exprimés de façon particulièrement vigoureuse à l'article 544 du code civil et à l'article 545 du Code civil qui prévoient que :

La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.

Nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.


Les propriétaires comprennent donc difficilement de telles restrictions, et le principe corrélatif à ces restrictions qui est l'absence d'indemnisation des servitudes d'urbanisme.


Ce principe consiste à considérer que toute indemnisation des conséquences des restrictions au droit de propriété découlant des règles d'urbanisme est exclue.


Ceci au nom de l'intérêt général, supérieur à l'intérêt particulier.

 

 

 

Le principe de l'absence d'indemnisation des servitudes d'urbanisme


Ce principe découle de l’article L.160-5 du code de l’urbanisme :


N'ouvrent droit à aucune indemnité les servitudes instituées par application du présent code en matière de voirie, d'hygiène et d'esthétique ou pour d'autres objets et concernant, notamment, l'utilisation du sol, la hauteur des constructions, la proportion des surfaces bâties et non bâties dans chaque propriété, l'interdiction de construire dans certaines zones et en bordure de certaines voies, la répartition des immeubles entre diverses zones.

Toutefois, une indemnité est due s'il résulte de ces servitudes une atteinte à des droits acquis ou une modification à l'état antérieur des lieux déterminant un dommage direct, matériel et certain ; cette indemnité, à défaut d'accord amiable, est fixée par le tribunal administratif, qui doit tenir compte de la plus-value donnée aux immeubles par la réalisation du plan d'occupation des sols rendu public ou du plan local d'urbanisme approuvé ou du document qui en tient lieu.


C'est le premier alinéa de cet article qui pose donc ce principe qui n'appelle pas d'explication particulière.


Les exceptions au principe de l'absence d'indemnisation des servitudes d'urbanisme


Première exception : l'atteinte à des droits acquis


La notion de droit de droits acquis est retenue à partir du moment où le propriétaire qui subit une servitude d'urbanisme est titulaire d'une autorisation d'urbanisme régulière.


L'exemple classique est une autorisation de lotir.



Un autre exemple est l'autorisation d'exploiter une carrière :


Requête de la société Ciments Lafarge France tendant à :

1° l'annulation du jugement du 3 novembre 1980 du tribunal administratif de Montpellier rejetant sa requête tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer une somme de 3 986 129 F avec intérêt de droit en réparation du préjudice par elle subi du fait de l'ordre qui lui a été donné, le 3 août 1971, de cesser toute exploitation sur une partie des terrains de la carrière lui appartenant sur le territoire de la commune de Frontignan ;

2° la condamnation de l'Etat à lui payer une somme de 3 986 129 F avec intérêt de droit ;

Vu le code de l'urbanisme, notamment son article L. 160-5 ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;

Considérant, qu'aux termes de l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme : " N'ouvrent droit à aucune indemnité les servitudes instituées par application du présent code ... Toutefois, une indemnité est due s'il résulte de ces servitudes une atteinte à des droits acquis ou une modification à l'état antérieur des lieux déterminant un dommage direct, matériel et certain ; cette indemnité, à défaut d'accord amiable, est fixée par le tribunal administratif, qui doit tenir compte de la plus-value donnée aux immeubles par la réalisation du plan d'occupation des sols rendu public ou approuvé ou du document qui en tient lieu " ;

Cons. que par sa lettre du 13 décembre 1976, la société Ciments Lafarge France a demandé au préfet de l'Hérault réparation du préjudice que lui causait la servitude d'urbanisme instituée par le plan d'urbanisme directeur de la commune de Frontignan Hérault approuvé le 22 février 1971, réservant pour la construction d'une voie expresse reliant l'autoroute A-9 à la ville de Sète des parcelles servant à l'exploitation d'une carrière à laquelle le préfet de l'Hérault lui avait ordonné de mettre fin par une décision du 3 août 1971 ; que le préfet a implicitement rejeté cette demande sur le terrain des dispositions précitées de l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme qui instituent un régime légal d'indemnisation exclusif de tout autre mode de réparation ; que, dès lors, en appréciant le bien-fondé des prétentions de la société requérante sur un fondement différent, sans les examiner d'office au regard des dispositions de l'article L. 160-5 précité, le tribunal administratif a omis de se prononcer sur le litige tel qu'il se présentait ; que son jugement doit être annulé ;

Cons. que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu de renvoyer les parties devant le tribunal administratif de Montpellier pour être statué ce qu'il appartiendra sur l'application de l'article L. 160-5 à la demande de la société requérante ; ... annulation du jugement ; renvoi des parties devant le T.A. pour être statué ce qu'il appartiendra sur la demande d'indemnité .


Un cas important est celui du propriétaire bénéficiant d'un permis de construire :


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 12 novembre 1985 et 12 mars 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Pierre X..., demeurant ... à Lucé (Eure-et-Loir), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :

1- annule le jugement du 11 juillet 1985 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête tendant à ce que l'Etat fût condamné à lui verser la somme de 180 437,19 F en réparation du préjudice subi du fait du refus illégal opposé par le maire de Puyvert (Vaucluse) à la demande de transfert du permis de construire déposée par M. Y... ;

2- condamne l'Etat à lui verser la somme de 205 021,49 F augmentée des intérêts de droit capitalisés depuis la date de la demande d'indemnisation au préfet du Vaucluse ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu :

- le rapport de M. Errera, Conseiller d'Etat,

- les observations de la S.C.P. Delaporte, Briard, avocat de M. Pierre X...,

- les conclusions de M. Faugère, Commissaire du gouvernement ;


Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... a obtenu le 23 juillet 1979 un permis de construire une maison à usage d'habitation sur un terrain sis au lieudit "Le Buou", dans la commune de Puyvert (Vaucluse) ; que, se trouvant dans l'impossibilité de réaliser la construction projetée par suite de difficultés financières et alors que le plan d'occupation des sols de Puyvert en cours d'élaboration classait le terrain concerné en zone inconstructible, M. X... a conclu le 21 août 1979, une promesse de vente sous la condition qu'il serait autorisé à transférer ledit permis de construire à l'acheteur ; que, par un arrêté du 7 novembre 1979, le maire de Puyvert a refusé ce transfert ; que par un jugement du 8 avril 1982 devenu définitif le tribunal administratif de Marseille a annulé cette décision ;

Considérant que le refus de l'acheteur d'acquérir le terrain de M. X... est la conséquence directe de la décision illégale du maire de Puyvert de faire obstacle au transfert du permis dont M. X... était titulaire ; que, par suite, le requérant, qui justifie de la perte d'un droit acquis au sens de l'article L.160-5 du code de l'urbanisme, est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à l'indemniser du préjudice résultant de cette décision ;

Sur le préjudice :

Considérant que M. X... a droit à l'indemnisation de la dépréciation de son patrimoine qui résulte directement de la décision illégale du 7 novembre 1979 ; que celle-ci est égale à la différence entre le prix de vente convenu le 21 août 1979, soit 110 000 , et la valeur vénale du terrain compte tenu des dispositions du plan d'occupation des sols de Puyvert, laquelle s'élève à la somme non contestée de 9 482 F ; qu'ainsi l'Etat doit être condamné à verser à M. X... une indemnité de 100 518 F ;

Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :


Considérant que M. X... a droit aux intérêts de la somme susmentionnée à compter du 27 décembre 1982, date sa demande d'indemnité ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 6 avril 1984 et le 12 mars 1986 ; qu'à chacune de ces dates, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à ces demandes ;

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 11 juillet 1985 est annulé.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. Pierre X... la somme de 100 518 F, avec intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 1982. Les intérêts échus les 6 avril 1984 et 12 mars 1986 seront capitalisés à ces dates pour porter eux-mêmes intérêts.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête et de la demande est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Pierre X..., à la commune de Puyvert et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de la mer.


Si la servitude d'urbanisme cause un préjudice dans de telles circonstances une indemnisation pourra être accordée


Deuxième exception : la modification de l'état antérieur des lieux


Le fait est que cette exception semble difficilement compréhensible et qu'en l'absence de décision des tribunaux à ce sujet il est difficile de déterminer à quoi elle correspond vraiment.


Troisième exception : l'arrêt BITOUZET et l'indemnisation des propriétaires supportant une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général suivi


Voici le texte de l'arrêt rendu par le conseil d'État le 3 juillet 1998, dénommé BITOUZET.


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 17 mai 1994 et 15 septembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Claude X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt du 17 mars 1994 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 19 avril 1991 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer avec intérêts, une somme de 1 218 830 F en réparation du préjudice que lui a causé le déclassement de ses terrains dans le plan d'occupation des sols de la commune de Béthemont-la-Forêt ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son protocole additionnel ;

Vu le code de l'urbanisme, notamment son article L. 160-5 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. Costa, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Le Griel, avocat de M. X...,

- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;


Considérant qu'aux termes de l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme, "N'ouvrent droit à aucune indemnité les servitudes instituées par application du présent code ... et concernant, notamment, l'utilisation du sol, la hauteur des constructions, la proportion des surfaces bâties et non bâties dans chaque propriété, l'interdiction de construire dans certaines zones et en bordure de certaines voies, la répartition des immeubles entre diverses zones. Toutefois, une indemnité est due s'il résulte de ces servitudes une atteinte aux droits acquis ou une modification à l'état antérieur des lieux déterminant un dommage matériel, direct et certain ..." ;

Considérant que M. X... critique l'arrêt attaqué pour n'avoir pas écarté ces prescriptions législatives au motif qu'elles seraient incompatibles avec l'article 1er du Protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui stipule : "Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. - Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ..." ;

Considérant que si les stipulations ci-dessus reproduites ont pour objet d'assurer un juste équilibre entre l'intérêt général et les impératifs de sauvegarde du droit de propriété, elles laissent au législateur une marge d'appréciation étendue, en particulier pour mener une politique d'urbanisme, tant pour choisir les modalités de mise en oeuvre d'une telle politique que pour juger si leurs conséquences se trouvent légitimées, dans l'intérêt général, par le souci d'atteindre les objectifs poursuivis par la loi ;

Considérant que, d'une part, l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme subordonne le principe qu'il édicte de non-indemnisation des servitudes d'urbanisme à la condition que celles-ci aient été instituées légalement, aux fins de mener une politique d'urbanisme conforme à l'intérêt général et dans le respect des règles de compétence, de procédure et de forme prévues par la loi ; que, d'autre part, cet article ne pose pas un principe général et absolu, mais l'assortit expressément de deux exceptions touchant aux droits acquis par les propriétaires et à la modification de l'état antérieur des lieux ; qu'enfin, cet article ne fait pas obstacle à ce que le propriétaire dont le bien est frappé d'une servitude prétende à une indemnisation dans le cas exceptionnel où il résulte de l'ensemble des conditions et circonstances dans lesquelles la servitude a été instituée et mise en oeuvre, ainsi que de son contenu, que ce propriétaire supporte une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi ; que, dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme serait incompatible avec les stipulations de l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;


Considérant qu'il ne ressort pas du dossier soumis aux juges du fond que ni par son contenu ni par les conditions dans lesquelles il est intervenu le classement des terrains de M. X... en zone inconstructible par le plan d'occupation des sols de la commune de Béthemont-la-Forêt ait fait peser sur le requérant une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec les justifications d'intérêt général sur lesquelles reposait ce document d'urbanisme ; que c'est, par suite, par une exacte qualification des faits de la cause, contrairement à ce que soutient le requérant, que la cour administrative d'appel a considéré que M. X... n'avait pas droit à indemnité ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt du 17 mars 1994 de la cour administrative d'appel de Paris ;

Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Claude X... et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.


L'arrêt en question a posé le principe d'une indemnisation, sans l'accorder dans le cas en question, ni d'ailleurs dans aucune autre décision postérieure ...






Enfin on notera que le Conseil d’Etat ne considère pas qu’il soit utile de poser la question de la constitionnalité de l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme :



" Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 décembre 2009 et 15 mars 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SCI LA SAULAIE, dont le siège est 49, rue de La Hoube à Urmatt (67820) ; la SCI LA SAULAIE demande au Conseil d'Etat :


1°) d'annuler l'arrêt du 8 octobre 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a, confirmant le jugement du 30 septembre 2008 du tribunal administratif de Nancy, rejeté ses conclusions tendant à ce que la communauté urbaine de Strasbourg soit condamnée à lui verser une somme de 5 070 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du classement des terrains dont elle est propriétaire en zone ND du plan local d'urbanisme de Lingolsheim ;


2°) de mettre à la charge de la communauté urbaine de Strasbourg le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;



Vu les autres pièces du dossier ;


Vu la Constitution, notamment son article 61-1 ;


Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;


Vu l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme ;


Vu le code de justice administrative ;




Après avoir entendu en séance publique :


- le rapport de M. Gilles Pellissier, Maître des Requêtes,


- les observations de la SCP Boullez, avocat de la SCI LA SAULAIE, et de la SCP Roger, Sevaux, avocat de la société Communauté urbaine de Strasbourg,


- les conclusions de M. Julien Boucher, Rapporteur public ;


La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Boullez, avocat de la SCI LA SAULAIE, et à la SCP Roger, Sevaux, avocat de la société Communauté urbaine de Strasbourg ;





Sur la question prioritaire de constitutionnalité :


Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ; qu'il résulte des dispositions du 3ème alinéa de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et qu'elle soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;


Considérant que la SCI LA SAULAIE soutient que l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme est contraire au droit de propriété énoncé aux articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et au principe constitutionnel d'égalité devant les charges publiques ; que, toutefois, d'une part, le Conseil constitutionnel a eu l'occasion de faire à plusieurs reprises application de ces dispositions à valeur constitutionnelle ; que, d'autre part, l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme, qui ne pose pas un principe général de non indemnisation des servitudes d'urbanisme mais l'assortit expressément de deux exceptions touchant aux droits acquis par les propriétaires et à la modification de l'état antérieur des lieux et qui ne saurait avoir ni pour objet ni pour effet, ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat statuant au contentieux dans sa décision du 3 juillet 1998 n° 158592, de faire obstacle à ce que le propriétaire dont le bien est frappé d'une servitude prétende à une indemnisation dans le cas exceptionnel où il résulte de l'ensemble des conditions et circonstances dans lesquelles la servitude a été instituée et mise en oeuvre, ainsi que de son contenu, que ce propriétaire supporte une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi, n'a, par conséquent, pour effet ni de priver le propriétaire, dont le bien serait frappé d'une telle servitude, de la propriété de son bien, ni de porter à cette propriété une atteinte d'une gravité telle que le sens et la portée de ce droit s'en trouvent dénaturés, ni d'exclure tout droit à réparation du préjudice résultant d'une telle servitude ; que par suite, la question soulevée n'est pas nouvelle et ne présente pas un caractère sérieux ; qu'ainsi, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté ;


Sur les autres moyens :


Considérant qu'aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ;


Considérant que, pour demander l'annulation de l'arrêt attaqué, LA SCI LA SAULAIE soutient que la cour administrative d'appel de Nancy n'a pas répondu au moyen tiré de ce que la parcelle dont elle est propriétaire devait rester classée en zone ND ; que la cour a commis une erreur de droit et dénaturé les faits de l'espèce en jugeant que les conditions d'une indemnisation du préjudice résultant pour elle de ce classement, sur le fondement de la rupture de l'égalité devant les charges publiques, n'étaient pas remplies ;


Considérant qu'aucun de ces moyens n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi ;




D E C I D E :



Article 1er : Il n'y a pas lieu de saisir le Conseil constitutionnel de la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par LA SCI LA SAULAIE.


Article 2 : Le pourvoi de la SCI LA SAULAIE n'est pas admis.


Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SCI LA SAULAIE, à la Communauté urbaine de Strasbourg, au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat et au Premier ministre."




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