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BDIDU Blog Actualités juridiques Droit Immobilier et Droit de l'Urbanisme par Christophe Buffet Avocat Spécialiste en Droit Immobilier et Droit Public Tél. 02 41 81 16 16 - Page 2356

  • Apport partiel d’actif et obligation de délivrance

    L’obligation de délivrance du bailleur peut être invoquée par la société qui vient au droit de la société locataire initiale à la suite d’un apport partiel d’actif, parce que la société ainsi devenue locataire est substituée à celle au profit de laquelle le bail était consenti dans tous les droits et obligations découlant de ce bail :

     

     « Vu les articles 1719 du code civil et L. 145-16, alinéa 2, du code de commerce.

    Attendu que le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée ; qu'en cas de fusion de sociétés ou d'apport d'une partie de l'actif d'une société réalisé dans les conditions prévues à l'article L. 236-22, la société issue de la fusion ou la société bénéficiaire de l'apport est, nonobstant toute stipulation contraire, substituée à celle au profit de laquelle le bail était consenti dans tous les droits et obligations découlant de ce bail ;

    Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 9 novembre 2005), que la société Arceaux 49, devenue titulaire d'un bail commercial par suite d'un apport partiel d'actif que lui a consenti le 12 mai 1993 la société Sup'Exam, a assigné le bailleur, M. X..., en résiliation de ce bail et en paiement de dommages-intérêts, faute de pouvoir exercer dans les locaux loués l'activité d'enseignement post secondaire prévue à la clause de destination du bail en raison de l'état des locaux et du refus du bailleur de réaliser les travaux de mise en conformité exigés par l'autorité administrative pour l'exercice de ce type d'activité ;

    Attendu que, pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que si la société Arceaux 49 s'est vu transférer par un apport partiel d'actif un droit au bail permettant l'enseignement post-secondaire, elle ne peut justifier d'aucun préjudice découlant de l'impossibilité d'exercer cet enseignement dès lors que cette branche d'activité a été conservée par la société Sup'Exam pour l'exercer dans d'autres locaux et qu'elle ne justifie d'aucune impossibilité d'exercer sur place les activités d'imprimerie, seules concernées par l'apport partiel d'actif dont elle a bénéficié ;

    Qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartenait au bailleur de délivrer à la société Arceaux 49, substituée à la suite de l'apport partiel d'actif dans tous les droits et obligations du bail consenti à l'origine par la société Sup'Exam, des locaux conformes à la destination prévue par ce bail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

     

    PAR CES MOTIFS :

    CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 novembre 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;

    Condamne M. X... aux dépens ;

    Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne M. X... à payer à la société Arceaux 49 la somme de 1 800 euros ;

    Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ».

     

    (Cour de Cassation 3 mai 2007)
  • Bail emphytéotique et fraude au droit de préemption

    Cette décision du 28 mars 2007 de la Cour de Cassation est relative à une espèce assez originale : un bail emphytéotique avait en effet été conclu afin de faire échec au droit de préemption au titre des espaces naturels sensibles.

     

    On notera la maladresse du preneur qui avait ouvertement déclaré à un huissier que la conclusion de ce bail emphytéotique ne se justifiait que pour faire échec au droit de préemption en question …

     

    « Attendu selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 24 novembre 2005), que la société Solvay Spécialités France (la société), propriétaire de terrains et constructions sur le territoire de la commune de Cassis, a conclu avec M. X... par acte authentique du 21 juillet 2000 un bail emphytéotique de 99 ans ; que ces terrains sont compris dans une zone de préemption au titre des espaces naturels sensibles ; qu'en 2001, le conservatoire du littoral et des rivages lacustres (le conservatoire) a assigné la société et M. X... en annulation du bail qui aurait été signé en fraude de son droit de préemption ; qu'en 2003, ces biens ont fait l'objet d'un transfert de propriété par ordonnance d'expropriation rendue au profit de la commune de Cassis ;

     

    Sur le moyen unique, pris en ses cinq premières branches, réunies, ci-après annexé :

    Attendu qu'ayant relevé que l'extinction des droits réels de l'exproprié résultant de l'ordonnance d'expropriation ne valait qu'à compter de cette décision alors que l'annulation du bail, si elle était prononcée, avait un effet rétroactif, que la qualité à agir du conservatoire, établissement public administratif chargé d'une mission de service public en vertu des articles L. 322-1 et suivants du code de l'environnement, résultait de l'article L. 142-3 du code de l'urbanisme, étant titulaire, comme le département auquel il peut se substituer, d'un droit de préemption, que l'intérêt à agir du conservatoire résultait de la mission qui lui était confiée par la loi de mener des opérations foncières pour la préservation des équilibres écologiques et le respect des sites naturels littoraux , alors que les terrains litigieux se trouvaient dans le périmètre des espaces sensibles à côté de terrains dont cet établissement public était déjà propriétaire, la cour d'appel, qui a déclaré recevable l'action du conservatoire, a, abstraction faite de motifs surabondants relatifs aux arrêtés de déclaration d'utilité publique et de cessibilité, légalement justifié sa décision de ce chef ;

    Sur le moyen unique, pris en sa sixième branche :

    Attendu que la société fait grief à l'arrêt de prononcer l'annulation du bail emphytéotique, alors, selon le moyen, que la fraude au droit de préemption par un bail emphytéotique suppose que ce bail constitue une vente déguisée faisant fraude au droit de préemption ; qu'en ne recherchant pas si tel n'était pas le cas en l'espèce, alors au surplus qu'elle y était fortement invitée aussi bien par la société Solvay que par M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 12-6 du code de l'expropriation, L. 142-1 et suivants du code de l'urbanisme, notamment L. 142-3, 1134, 1165, 1167 et 2236 du code civil ;

    Mais attendu qu'ayant constaté que la société qui était informée dès le 23 mars 1998 de l'intention du conservatoire d'acquérir les terrains et constructions et de sa recherche d'un accord sur le prix de cession, avait conclu le 21 juillet 2000 un bail emphytéotique pour le prix de 2 500 000 francs outre une redevance annuelle de 60 000 francs, que M. X... avait répondu à un huissier de justice le 27 juillet 2000 que "le bail ne se justifiait que pour faire obstacle au droit de préemption" et relevé que la conclusion d'un bail emphytéotique de la durée maximum de 99 ans avait donc pour objectif délibéré de permettre à la société d'échapper, de fait, à "l'expropriation" désormais privée d'intérêt pour le conservatoire en raison des droits du preneur, et à ce dernier, même en l'absence de pacte de préférence, d'être titulaire d'un droit réel susceptible d'hypothèques et de cession, que compte tenu de la superficie et de la situation du terrain litigieux de plus de 26 hectares, M. X... avait acquis la possibilité de rentabiliser une opération d'intérêt privé à visée spéculative en se plaçant délibérément hors du champ d'application de la loi d'intérêt général puisqu'il était énoncé dans le bail que "l'immeuble donné à bail est destiné à la construction d'immeubles à usage d'habitation ou à la construction et à l'exploitation d'immeubles et d'équipements à usage touristique ou de bureaux à l'exclusion de toutes autres destinations", la cour d'appel qui, procédant à la recherche qui lui était demandée, a retenu que le contrat de bail litigieux n'était donc pas la simple manifestation de l'habileté juridique des parties à cet acte mais caractérisait la fraude aux droits du conservatoire, défenseur de l'intérêt général, pour échapper durablement à son droit de préemption tout en assurant au bailleur et au preneur une rentabilité du bien concerné, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

    PAR CES MOTIFS :

    REJETTE le pourvoi ;

    Condamne M. X... aux dépens ;

    Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne M. X... à payer au Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres la somme de 2 000 euros ;

    Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes de M. X... et de la société Solvay Spécialités France ».