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BDIDU Blog Actualités juridiques Droit Immobilier et Droit de l'Urbanisme par Christophe Buffet Avocat Spécialiste en Droit Immobilier et Droit Public Tél. 02 41 81 16 16 - Page 1795

  • Permis de construire, crues et imprudence du pétitionnaire

    Cette imprudence réduit le droit à indemnisation, selon cet arrêt :



    Vu le recours sommaire et le mémoire complémentaire présentés par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT, enregistrés les 20 avril et 16 août 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT demande que le Conseil d'Etat :

    1°) annule l'arrêt en date du 8 février 2001 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a condamné l'Etat, sur appel de M. et Mme X..., à leur verser la somme de 250 000 F (38 112,25 euros) en réparation du préjudice qu'ils ont subi par suite de deux inondations de leur maison pour laquelle le maire de la commune de Verfeil avait délivré, au nom de l'Etat, un permis de construire qui n'était pas assorti de prescription spéciales ;

    2°) rejette la demande que M. et Mme X... ont présentée devant cette cour ;

    Vu les autres pièces du dossier ;

    Vu le code de l'urbanisme ;

    Vu le code de justice administrative ;

    Après avoir entendu en séance publique :

    - le rapport de Mme Imbert-Quaretta, Conseiller d'Etat,

    - les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. et Mme X...,

    - les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;

    Considérant que, pour accorder à M. et Mme X..., bénéficiaires d'un permis de construire délivré au nom de l'Etat par le maire de la commune de Verfeil (Haute-Garonne), une indemnité en réparation des dommages causés par l'inondation de leur maison lors des crues du Girou en 1992 et en 1993, la cour administrative d'appel de Bordeaux s'est fondée sur ce que le maire avait commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat, en n'assortissant pas ce permis de prescriptions spéciales en application de l'article R. 111-3 du code de l'urbanisme alors en vigueur, en dépit de la connaissance qu'il avait du caractère inondable de la zone ;

    Sur la responsabilité :

    Considérant que la cour a estimé que l'administration devait être regardée comme ayant, à la date de la délivrance du permis, une connaissance suffisamment précise des risques d'inondation auxquels la parcelle en cause était de longue date exposée ; que, pour parvenir à cette constatation, la cour pouvait se fonder, sans erreur de droit, eu égard au caractère cyclique du débit d'un cours d'eau, sur des analyses de la périodicité des crues, confirmées de manière surabondante par des événements postérieurs à la délivrance du permis de construire ; qu'eu égard à l'argumentation dont elle était saisie, relative notamment aux travaux réalisés dans les années 1960, la cour a suffisamment motivé l'arrêt attaqué ;

    Considérant qu'en estimant que l'administration n'établissait pas le caractère obsolète, à la date de délivrance du permis, du plan cadastral de 1936, qui révélait le caractère inondable de la zone, la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des faits de l'espèce qui, en l'absence de dénaturation, n'est pas susceptible d'être discutée devant le juge de cassation ;

    Considérant qu'en estimant, après avoir relevé que M. et Mme X... avaient commis l'imprudence, eu égard à la situation de leur parcelle, de ne pas vérifier si celle-ci était exposée aux crues éventuelles du cours d'eau situé à proximité, que cette attitude était constitutive d'une faute de nature à atténuer la responsabilité de l'Etat, la cour n'a pas donné aux faits qu'elle a souverainement appréciés une inexacte qualification juridique ; que, dès lors, les conclusions incidentes de M. et Mme X... tendant à ce que le Conseil d'Etat annule l'arrêt précité, en tant qu'il n'a pas donné entièrement satisfaction à leur requête, ne peuvent qu'être rejetées ;

    Sur l'évaluation du préjudice :

    Considérant qu'en procédant à une évaluation globale des préjudices subis par M. et Mme X..., après avoir apprécié de manière distincte le bien-fondé de chacun de ces chefs de préjudice, la cour n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit ;

    Considérant qu'en admettant l'existence d'un préjudice au titre des troubles dans les conditions de vie des intéressés, la cour, qui était saisie par ces derniers de conclusions tendant à l'indemnisation des "dommages permanents" qu'ils avaient subis, n'a pas statué au-delà de leurs demandes ;

    Considérant qu'après avoir souverainement apprécié la gravité et le caractère répétitif des inondations qui sont à l'origine des désordres subis par la maison de M. et Mme X..., la cour a pu légalement déduire de ces constatations que la perte de la valeur vénale de leur bien était la conséquence directe de la faute commise lors de la délivrance du permis de construire, alors même que cette perte ne se serait révélée qu'à l'occasion d'une vente ultérieure ;

    Considérant qu'en estimant que M. et Mme X... apportaient des justifications de nature à établir le caractère certain et l'importance du préjudice susmentionné, la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des faits de l'espèce qui n'est entachée d'aucune inexactitude matérielle, ni d'aucune dénaturation des pièces du dossier ; que, dès lors, le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

    Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

    Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions précitées et de condamner l'Etat à verser à M. et Mme X... une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
    Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT est rejeté.
    Article 2 : Le pourvoi incident de M. et Mme X... est rejeté.
    Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme X... une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
    Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme X... et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

  • Bail, perte totale de la chose louée, coût des travaux de remise en état et article 1722 du code civil

    A travers cet arrêt :


    "Vu l'article 1722 du code civil ;

    Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis, 11 avril 2008), que Mme X..., locataire de locaux à usage commercial et d'habitation propriété de Mme Y..., a assigné cette dernière aux fins d'obtenir sa condamnation à réaliser des travaux de remise en état et à lui payer des dommages-intérêts pour trouble de jouissance ; que Mme Y... a assigné Mme X... en résiliation de bail pour perte totale de la chose louée ; que les instances ont été jointes et que M. Y... est intervenu volontairement en qualité de donataire de l'immeuble donné à bail ;


    Attendu que pour rejeter la demande en résiliation de bail présentée par les consorts Y..., la cour d'appel retient, par motifs propres et adoptés, que s'il résulte des débats et des éléments produits que la maison occupée par Mme X... présente des désordres quant à l'étanchéité de la toiture, l'état de la plomberie, l'installation électrique et la présence de parasites du bois, il n'en ressort pas une destruction totale de la maison toujours utilisée au jour des débats par Mme X... tant pour son activité de restauration que pour son habitation et que les bailleurs ne peuvent réclamer la résiliation du bail en cas de perte partielle du local loué, seul le locataire disposant de cette possibilité selon l'article 1722 du code civil ;


    Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le coût des travaux de remise en état de l'immeuble loué n'excédait pas sa valeur, emportant ainsi destruction totale de la chose louée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;


    PAR CES MOTIFS :


    CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande en résiliation, présentée par les consorts Y..., du bail les liant à Mme X..., l'arrêt rendu le 11 avril 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis, autrement composée ;


    Condamne Mme X... aux dépens ;


    Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X... à payer aux consorts Y... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de Mme X... ;


    Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;


    Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille neuf.



    MOYEN ANNEXE au présent arrêt


    Moyen produit par Me Blondel, avocat aux Conseils pour les consorts Y...


    Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté des bailleurs de leur demande tendant à voir résilier le bail commercial les liant à Madame Eliane X... ;


    AUX MOTIFS PROPRES QUE le rapport de l'expert judiciaire relève que la chose louée consiste en un immeuble vétuste dont la mise en conformité nécessiterait soit une réhabilitation dont le montant est estimé à 83. 544, 65 euros pour travaux et maîtrise d'oeuvre, soit une démolition et une reconstruction à neuf ; que toutefois, il ressort clairement des débats que Madame Eliane X... utilise ce jour les locaux loués tant pour exploiter son activité de restauration que pour son habitation, que de ce fait, il ne saurait en résulter une perte totale de la chose, en sorte que la demande de résiliation du bail formulée par les bailleurs ne saurait être accueillie sur le fondement de l'article 1722 du Code civil ;


    ET AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTES DES PREMIERS JUGES qu'aux termes dudit article, si pendant la durée du bail la chose est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit, si elle est détruite qu'en partie, le preneur peut, suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix, ou la résiliation même du bail ; que dans l'un et l'autre cas, il n'y a lieu à aucun dédommagement ; qu'il se déduit de ce principe que le bailleur ne saurait réclamer la résiliation du bail dans le cas de perte partielle du local loué, seul le locataire pouvant disposer de cette possibilité ; qu'en l'espèce, il résulte clairement des débats et des éléments produits par N. Z..., expert judiciaire, que si des désordres ont été relevés concernant l'étanchéité de la toiture, l'état de la plomberie ou de l'installation électrique ainsi que la présence de parasites du bois (thermites), il ne ressort pas une destruction totale de la maison utilisée par Madame X... tant pour son activité de restauration, que pour son habitation ; qu'en conséquence, c'est à tort que les consorts Y... entendent invoquer les dispositions de l'article 1722 susvisé relatives à la perte totale de la chose louée ;


    ALORS QUE D'UNE PART dans leurs écritures d'appel, les consorts Y... faisaient valoir que le coût des travaux à entreprendre pour rendre l'immeuble conforme à sa destination a été estimé par l'expert judiciaire à 83. 544, 65 euros pour travaux et maîtrise d'oeuvre, étant souligné que l'expert a aussi évoqué la démolition et une reconstruction à neuf, que le coût sus-évoqué et a fortiori la démolition de la reconstruction étaient totalement disproportionnés par rapport à la valeur de l'immeuble et au montant annuel du loyer, étant observé que les appelants, dans leurs écritures d'appel (cf. p. 6 et 7) précisaient que le montant annuel du loyer était de 10. 980 euros HT et l'immeuble litigieux avait été évalué par une agence immobilière à la somme de 83. 975 euros ; qu'il était ainsi soutenu et établi par des pièces régulièrement versées aux débats qu'afin de préserver les intérêts des propriétaires qui ne pouvaient dans de telles hypothèses être contraints d'avoir à réaliser des travaux totalement hors de proportion avec la valeur de l'immeuble, il est admis que la ruine par vétusté peut être considérée comme un cas de force majeur et entraîner la résiliation du bail sans indemnité ; qu'en ne s'expliquant pas sur le moyen circonstancié ainsi invoqué et en retenant une motivation inopérante par rapport audit moyen, la Cour méconnaît les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile, violé.


    ET ALORS QUE D'AUTRE PART en en tenant pas compte des faits régulièrement entrés dans le débat tiré de travaux hors de proportion avec la valeur de l'immeuble, a fortiori si celui-ci devait être démoli et reconstruit, la Cour prive son arrêt de base légale au regard de l'article 1722 du Code civil, violé."