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BDIDU Blog Actualités juridiques Droit Immobilier et Droit de l'Urbanisme par Christophe Buffet Avocat Spécialiste en Droit Immobilier et Droit Public Tél. 02 41 81 16 16 - Page 1353

  • Installation collective d'eau chaude vétuste et règle de majorité de la copropriété

    Une majorité de l'article 26 de la loi de copropriété suffit pour voter son abandon :

     

    "Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 18 janvier 2011), que Mme A..., copropriétaire, a assigné le syndicat des copropriétaires Le Pic Blanc, Rouies Thabor (le syndicat) en annulation de la deuxième décision de l'assemblée générale du 6 avril 2010 abandonnant le service collectif d'eau chaude au profit de ballons électriques individuels ;

    Sur le premier moyen, ci-après annexé :

    Attendu qu'ayant par motifs adoptés, relevé que la décision d'abandonner le service collectif d'eau chaude pour un chauffage individuel ne nécessitait pas de travaux sur les parties communes mais des aménagements sur les parties privatives des copropriétaires, la cour d'appel en a exactement déduit qu'aucun devis ne devait être joint à la convocation à l'assemblée générale du 6 avril 2010 et a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;

    Sur le second moyen :

    Attendu que Mme A... fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande, alors, selon le moyen :

    1°/ que l'assemblée générale ne peut, à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance telles qu'elles résultent du règlement de copropriété ; que la décision de supprimer purement et simplement le système collectif d'eau chaude dont l'existence est expressément prévue dans le règlement de copropriété, sans solution de remplacement par un autre équipement collectif équivalent, qui a de surcroît pour effet de contraindre les copropriétaires à modifier l'agencement de leurs lots privatifs pour pouvoir y installer un cumulus, constitue une décision qui porte atteinte à la destination des parties privatives et aux modalités de leur jouissance telles qu'elles résultent du règlement de copropriété et qui ne peut dès lors être prise qu'à l'unanimité ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué a violé l'article 26, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 ; 

    2°/ qu'une amélioration ne peut être décidée sans un vote unanime que si elle est exclusive de toute atteinte à la destination des parties privatives et aux modalités de leur jouissance telles qu'elles résultent du règlement de copropriété ; qu'en énonçant que des décisions modifiant les conditions de jouissance des parties privatives peuvent être prises à la majorité qualifiée de l'article 26 lorsqu'elles constituent des améliorations, la cour d'appel a violé l'article 26, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 ;

    3°/ qu'en statuant comme elle l'a fait, sur le seul fondement d'une prétendue amélioration, sans qu'il résulte de ses constatations l'absence corrélative d'atteinte à la destination des parties privatives et aux modalités de leur jouissance telles qu'elles résultent du règlement de copropriété, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 26, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 ;

    Mais attendu qu'ayant relevé que l'installation collective d'origine n'était pas en mesure, depuis plusieurs exercices, de faire face à la demande d'eau chaude sanitaire dans l'ensemble des logements, et que les documents produits démontraient la faisabilité de l'installation d'un ballon d'eau chaude dans chacun des types d'appartements de la copropriété, la cour d'appel a souverainement retenu que la décision adoptée par les copropriétaires constituait une amélioration du fait des économies d'énergie occasionnées ainsi que des difficultés techniques et du coût de la remise en état d'une installation vétuste et a pu en déduire que la décision avait été régulièrement adoptée à la double majorité de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965 ;

    D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

    PAR CES MOTIFS :

    REJETTE le pourvoi ;

    Condamne Mme A... aux dépens ;

    Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme A... et la condamne à payer au syndicat des copropriétaires Le Pic Blanc Rouies Thabor la somme de 2 500 euros ;

    Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mai deux mille douze.

    MOYENS ANNEXES au présent arrêt

    Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour Mme A... 

    PREMIER MOYEN DE CASSATION

    Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme A... de ses demandes ;

    Aux motifs que selon l'article 11 du décret du 17 mars 1967, doivent être notifiées en même temps que l'ordre du jour…4°) les conditions essentielles du contrat proposé lorsque l'assemblée générale est appelée à approuver un devis ou un marché, ou la réalisation de travaux ou l'un des contrats visés aux articles 25 d et 25 a de la loi du 10 juillet 1965… ; que tel n'est pas le cas en l'espèce, la coupure de la production et de la distribution de l'eau chaude sanitaire ne générant pas des travaux importants ; que la convocation doit donc être déclarée régulière ;

    Alors d'une part, que sont notifiés au plus tard en même temps que l'ordre du jour, et ce pour la validité de la décision, les conditions essentielles du contrat ou en cas d'appel à la concurrence, des contrats proposés, lorsque l'assemblée est appelée à approuver un contrat, un devis ou un marché, notamment pour la réalisation de travaux ; qu'en l'espèce, il résulte de la convocation du 2 mars 2010 que l'assemblée générale était appelée à choisir entre l'exécution de travaux de réfection du système collectif d'eau chaude ou son abandon pour un système électrique individuel supposant la neutralisation de l'installation existante et son remplacement par des ballons individuels ; qu'il appartenait dès lors au syndic de joindre à la convocation de cette assemblée, les devis proposés pour l'exécution des travaux de réfection du système collectif ainsi que les devis proposés pour la coupure de ce système et son remplacement par un système individuel ou encore les conditions générales de ces contrats ; qu'en refusant d'annuler la décision de l'assemblée générale qui a fait ce choix sans qu'aucun devis quel qu'il soit n'ait été joint à la convocation, la Cour d'appel a violé l'article 11-3° du décret du 17 mars 1967 ;

    Alors d'autre part, que l'article 11-3° du décret du 17 mars 1967 ne distingue pas selon l'importance des travaux sur lesquels l'assemblée générale est amenée à se prononcer ; qu'en se fondant pour refuser de prononcer la nullité de la décision de l'assemblée générale prise sans qu'aucun devis ait été joint à la convocation, sur le caractère peu important des travaux de coupure du système collectif d'eau chaude, la Cour d'appel a violé les dispositions précitées.

    SECOND MOYEN DE CASSATION

    Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme A... de ses demandes ;

    Aux motifs propres que le point n° 2 inscrit à l'ordre du jour de l'assemblée générale du 6 avril 2010 s'intitulait « décision à prendre à l'article 26, pour des raisons techniques financières et d'économie d'énergie, d'abandonner le système collectif d'eau chaude à partir du 15/12/2010, celui-ci nécessitant une réfection complète » ; qu'il était proposé aux copropriétaires de se prononcer sur le projet de résolution suivante : « l'assemblée générale après en avoir délibéré, constate que la suppression du service de l'eau chaude au profit des ballons d'eau chaude individuels constitue une amélioration par rapport à la situation antérieure et qu'en raison de la vétusté de l'installation il s'avère plus rationnel et économique de l'abandonner pour lui substituer un système individuel d'eau chaude, décide pour des raisons tant techniques que financières d'abandonner le service collectif d'eau chaude au profit des ballons électriques individuels à partir du 15/12/2010 au plus tard. Chaque copropriétaire devra faire réaliser et financer son installation de ballons électriques individuels ; que cette résolution a été adoptée par 69.745/100.000èmes et 100 copropriétaires sur 138 ; que selon l'alinéa 1 de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965, sont prises à la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix, les décisions concernant…c) les travaux comportant transformation, addition ou amélioration à l'exception de ceux visés aux e, g, h ; que l'alinéa 2 précise que l'assemblée générale ne peut à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance, telles qu'elles résultent du règlement de copropriété ; que la suppression d'un service collectif peut cependant être qualifiée d'amélioration lorsqu'en raison de la vétusté de l'installation il s'avère plus rationnel et économique de l'abandonner pour opter en faveur d'un système individuel ; que l'ensemble immobilier est composé de trois immeubles construits en 1968, l'eau chaude étant produite par l'un d'entre eux (Le Pic Blanc) et subissant de grandes pertes calorifiques lors de son transport vers les autres immeubles ; que les consommations d'eau chaude sanitaire se caractérisent par de très fortes pointes pendant les quatre mois de la saison hivernale ; qu'il est constant que depuis plusieurs exercices l'installation collective d'origine n'est pas en mesure de faire face à la demande d'eau chaude sanitaire dans l'ensemble des logements ; que la vétusté du système en place n'est pas contestée ; que les copropriétaires demandeurs forment d'ailleurs une demande de remplacement de l'échangeur à plaques existant sous astreinte ; mais qu'aucun document technique n'établit que cette demande alternative serait suffisante pour permettre un fonctionnement satisfaisant de l'installation collective ; qu'elle n'a pas recueilli l'agrément de la majorité requise des copropriétaires que les appelants avaient la liberté de questionner en demandant l'inscription de cette question précise à l'ordre du jour d'une assemblée générale ; que les assemblées précédentes avaient successivement rejeté la proposition de confier un contrat de maîtrise d'oeuvre à une société spécialisée, le vote d'un budget de remise en état de l'installation collective comme son abandon ; qu'à défaut de solution, de nombreux copropriétaires ont spontanément pris l'initiative de faire installer un cumulus individuel dans leur appartement ; qu'en l'état d'une installation collective ne remplissant pas son office, de l'absence d'un accord à une majorité suffisante de copropriétaires pour faire procéder à une expertise de l'installation, comme pour faire réaliser des travaux et alors que les documents produits aux débats démontrent la faisabilité de l'installation d'un ballon d'eau chaude dans chacun des types d'appartements de la copropriété, il apparaît que l'abandon du système de production d'eau chaude est raisonnable ; que la plupart des lots étant occupés de manière intermittente à titre de résidences secondaires, une production par lot d'eau chaude strictement nécessaire est de nature à éviter des déperditions de calories considérables ; qu'un tel système qui encourage une maîtrise de la consommation et qui est plus équitable et plus rationnel ; que comme l'a précisément exposé le premier juge, il résulte des réflexions de la commission chauffage et de l'étude effectuée par M. B... qu'en présence d'une installation vétuste, devant être intégralement refaite, il s'avère plus économique de l'abandonner pour lui substituer un système de production individuelle d'eau chaude ; qu'il s'ensuit que la décision adoptée par les copropriétaires à la majorité de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965 consistant à abandonner le service collectif d'eau chaude au profit des ballons électriques individuels peut être qualifiée d'amélioration du fait des économies d'énergie générées ainsi que des difficultés techniques et coût présentés par la remise en état d'une installation vétuste ;

    Et aux motifs adoptés du jugement que l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965 énumère les décisions devant être votées à la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix ; que selon ce même article, « l'assemblée générale ne peut à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance telles qu'elles résultent du règlement de copropriété » ; que cependant il est jugé de façon constante que des décisions modifiant les conditions de jouissance des parties privatives peuvent être prises à la majorité qualifiée de l'article 26 lorsqu'elles constituent des améliorations ; qu'en l'espèce l'assemblée générale a voté la résolution n° 2 à la double majorité de l'article 26 après avoir constaté que « la suppression du service collectif d'eau chaude au profit des ballons d'eau chaude individuels constitue une amélioration par rapport à la situation antérieure et qu'en raison de la vétusté de l'installation, totalement à refaire, il s'avère plus rationnel et économique (tant sur le plan financier qu'écologique) de l'abandonner et de choisir pour lui substituer, un système individuel d'eau chaude » ; que lors de l'assemblée, les avantages et inconvénients du système de chauffage individuel ont été exposés par M. C... membre du conseil syndical ; que son compte rendu exprime l'avis recueilli à la suite d'études réalisées en 2008 et 2009 par M. B... ingénieur en bâtiment, et d'un travail de réflexion mené par les membres de la commission chauffage et les membres du conseil syndical ; que selon l'ensemble des personnes consultées, les avantages l'emportent sur les inconvénients à savoir, des économies d'énergie appréciables qui vont dans les sens des accords de Grenelle surtout pour les résidences secondaires, une maitrise de la consommation d'eau chaude mais aussi d'eau froide par l'utilisation des compteurs d'eau chaude individuels pour l'eau froide, des dépenses contrôlées de l'installation d'un chauffe-eau individuel par rapport à la remise en état collective, l'obligation de mettre en conformité l'installation électrique, un rendement nettement supérieur à celui de la production d'eau chaude collective, les pertes en calories ne sont pas comparables, les inconvénients étant l'emplacement du ballon, la limitation de la quantité d'eau chaude, et les détériorations lors de l'installation ; que quels que soient les inconvénients de la production d'eau chaude individuelle, ceux-ci sont techniquement surmontables et il ne fait aucun doute qu'un tel système est moins onéreux, plus efficace et répond davantage aux préoccupations environnementales que le service collectif actuel ; que c'est donc à juste titre que la délibération attaquée a été votée à la double majorité de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965 ;

    Alors d'une part, que l'assemblée générale ne peut, à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance telles qu'elles résultent du règlement de copropriété ; que la décision de supprimer purement et simplement le système collectif d'eau chaude dont l'existence est expressément prévue dans le règlement de copropriété, sans solution de remplacement par un autre équipement collectif équivalent, qui a de surcroît pour effet de contraindre les copropriétaires à modifier l'agencement de leurs lots privatifs pour pouvoir y installer un cumulus, constitue une décision qui porte atteinte à la destination des parties privatives et aux modalités de leur jouissance telles qu'elles résultent du règlement de copropriété et qui ne peut dès lors être prise qu'à l'unanimité ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué a violé l'article 26 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965 ;

    Alors d'autre part, qu'une amélioration ne peut être décidée sans un vote unanime que si elle est exclusive de toute atteinte à la destination des parties privatives et aux modalités de leur jouissance telles qu'elles résultent du règlement de copropriété ; qu'en énonçant que des décisions modifiant les conditions de jouissance des parties privatives peuvent être prises à la majorité qualifiée de l'article 26 lorsqu'elles constituent des améliorations, la Cour d'appel a violé l'article 26, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 ;

    Alors enfin, qu'en statuant comme elle l'a fait, sur le seul fondement d'une prétendue amélioration, sans qu'il résulte de ses constatations l'absence corrélative d'atteinte à la destination des parties privatives et aux modalités de leur jouissance telles qu'elles résultent du règlement de copropriété, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 26 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965."

  • Loyers impayés, rétablissement personnel et responsabilité de l'Etat pour refus d'accorder la force publique

    Une décision relative à la conciliation de l'effacement des dettes et la responsabilité de l'Etat pour refus d'octroi de la force publique :


    "Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 avril et 19 juillet 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Sébastien A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

    1°) d'annuler le jugement n° 0705007 du 4 février 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a condamné l'Etat à lui verser une indemnité de 10 000 euros en réparation des préjudices ayant résulté pour lui du refus de concours de la force publique qui lui a été opposé par le préfet de la Haute-Garonne le 3 juillet 2007 et a rejeté le surplus de ses conclusions ;

    2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions présentées devant le tribunal administratif de Toulouse ;

    3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;




    Vu les autres pièces du dossier ;

    Vu le code de la consommation ;

    Vu la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 ;

    Vu le code de justice administrative ;



    Après avoir entendu en séance publique :

    - le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, Maître des Requêtes, 

    - les observations de la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de M. A, 

    - les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, rapporteur public ;

    La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de M. A ;




    Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, le 3 mai 2007, M. A, propriétaire d'un appartement situé 12, chemin de Pelleport à Toulouse, a demandé au préfet de la Haute-Garonne de lui prêter le concours de la force publique pour l'exécution d'une décision du 8 septembre 2006 du juge des référés du tribunal d'instance de Toulouse ordonnant l'expulsion de Mme B, qui avait pris les lieux à bail en mars 2005 et ne versait plus les loyers ; qu'à la suite du rejet implicite de cette demande, acquis le 3 juillet 2007, l'intéressé a recherché la responsabilité de l'Etat devant le tribunal administratif de Toulouse ; que, par un jugement du 4 février 2010, le tribunal a déclaré l'Etat responsable des préjudices ayant résulté pour le propriétaire de l'occupation irrégulière de son bien entre le 3 juillet 2007 et le 15 juin 2009, date de la libération des lieux, et fixé à 10 000 euros le montant de l'indemnité due à M. A ; que ce dernier et, par la voie d'un pourvoi incident, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration demandent l'annulation du jugement ; 

    Sans qu'il soit besoin de statuer sur le pourvoi incident et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi principal ;

    Considérant que, pour fixer l'indemnité mise à la charge de l'Etat, le jugement attaqué énonce que M. A peut prétendre à la réparation du préjudice correspondant au montant des loyers et charges locatives dont il a été privé pendant la période de responsabilité, puis évalue ce préjudice à la somme de 10 000 euros ; qu'en retenant ce chiffre sans s'en expliquer, alors que, dans un mémoire enregistré le 14 janvier 2010, l'intéressé avait présenté un état détaillé de ses pertes de loyers et de charges récupérables, pour un montant total de 14 711,61 euros, le juge du fond a entaché son jugement d'une insuffisance de motivation ; que M. A est, par suite, fondé à en demander l'annulation ;

    Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

    Sur la responsabilité :

    Considérant qu'aux termes de l'article 16 de la loi du 9 juillet 1991 : " L'Etat est tenu de prêter son concours à l'exécution des jugements et des autres titres exécutoires. Le refus de l'Etat de prêter son concours ouvre droit à réparation " ;

    Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la date du 3 juillet 2007, à laquelle le préfet de la Haute-Garonne a implicitement refusé d'accorder à M. A le concours de la force publique, la décision du 8 septembre 2006 du juge des référés du tribunal d'instance de Toulouse était exécutoire ; que, par suite, le rejet de la réquisition dont l'administration avait été régulièrement saisie a engagé la responsabilité de l'Etat à l'égard du propriétaire ; que si la commission départementale de surendettement de la Haute-Garonne a, le 28 décembre 2007, saisi le juge de l'exécution aux fins d'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel de Mme B et si, par application des dispositions alors en vigueur de l'article L. 331-3-1 du code de la consommation, cette saisine a emporté suspension des voies d'exécution à l'encontre de l'intéressée, y compris les mesures d'expulsion du logement, cette circonstance postérieure à la date à laquelle le concours de la force publique a été refusé et indépendante de la volonté du propriétaire n'a pas, contrairement à ce que soutient le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, eu pour effet de suspendre la responsabilité de l'Etat ; qu'il incombe à ce dernier de réparer l'ensemble des préjudices que l'occupation irrégulière a causés au propriétaire entre le 3 juillet 2007 et le 15 juin 2009, date à laquelle les lieux ont été libérés ; 

    Sur le préjudice :

    En ce qui concerne les pertes de loyers et de charges locatives :

    Considérant que, contrairement à ce que soutient le ministre, la circonstance que la décision du 18 mars 2009 par laquelle le juge de l'exécution du tribunal d'instance de Toulouse a ordonné la clôture pour insuffisance d'actif de la procédure de rétablissement personnel ouverte à l'égard de Mme B a effacé les dettes de l'intéressée antérieures au 21 mai 2008 est sans incidence sur le droit de M. A d'obtenir réparation des pertes de loyers qu'il a subies avant cette date ; que les pertes subies entre le 3 juillet 2007 et le 15 juin 2009 doivent être regardées comme une conséquence directe du refus de concours de la force publique qui a rendu possible la poursuite de l'occupation irrégulière ; 

    Considérant qu'il résulte de l'instruction que le bail de Mme B stipulait un loyer de 516 euros par mois ; que les pertes de loyers calculées sur cette base pendant la période de responsabilité de l'Etat s'élèvent à 12 216 euros, auxquels il convient d'ajouter une somme de 1 498 euros correspondant au montant des charges incombant au locataire ; que si M. A demande qu'il soit tenu compte des augmentations légales du montant du loyer, il ressort d'un courrier adressé par lui à sa locataire le 10 mars 2008 qu'il ne les lui appliquait pas ; qu'ainsi le préjudice résultant des pertes de loyers et de charges s'élève à 13 624 euros ; qu'il y a lieu toutefois de déduire de ce montant la provision de 9 200 euros augmentée des intérêts au taux légal accordée à M. A au titre des pertes de loyers et de charges par une ordonnance du 27 novembre 2008 du juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux ; que le complément d'indemnité dû par l'Etat pour ce chef de préjudice s'élève donc à 4 424 euros ; 

    En ce qui concerne les autres chefs de préjudice invoqués :

    Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les dépenses exposées pour la remise en état de l'appartement à la suite du départ de l'ancienne locataire, qui incombaient normalement au propriétaire, aient été majorées du fait du refus de concours de la force publique ; 

    Considérant qu'il n'est pas davantage établi que la poursuite de l'occupation irrégulière à la faveur de ce refus ait eu pour conséquence une diminution de la valeur vénale de l'appartement de M. A ; 

    Considérant que M. A indique avoir contracté en novembre 2006 un emprunt qu'il entendait rembourser à l'aide du produit de la vente de l'appartement, laquelle a été retardée du fait du refus de concours de la force publique ; qu'il demande que les intérêts qu'il a versés au titre de cet emprunt pendant la période de responsabilité de l'Etat soient mis à la charge de celui-ci ; que, toutefois, dès lors qu'il obtient, sur sa demande, une indemnisation au titre de la perte des revenus qu'il aurait tirés de la location de son bien, il ne saurait prétendre en outre à une indemnité au titre d'un préjudice imputé à l'impossibilité de le vendre et consistant dans le coût de l'immobilisation du capital correspondant ; 

    Considérant que M. A demande à être indemnisé des troubles qu'il aurait subis dans ses conditions d'existence du fait du refus de concours de la force publique ; que, contrairement à ce que soutient le ministre, la circonstance que ce chef de préjudice n'ait pas été expressément mentionné dans la réclamation préalable adressée à l'administration ne rend pas irrecevables les conclusions tendant à sa réparation ; qu'il ressort de l'instruction qu'indépendamment de l'indisponibilité de son bien, réparée par l'indemnité qui lui est allouée au titre des pertes de loyers, M. A a subi, du fait du refus qui lui a été opposé par le préfet de la Haute-Garonne, des troubles dont il sera fait une juste appréciation en lui accordant une indemnité de 3 000 euros ;

    Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

    Considérant que M. A a droit à compter du 25 juillet 2007, date à laquelle il a saisi le préfet d'une réclamation préalable, aux intérêts sur l'indemnité de 3 000 euros réparant les troubles dans ses conditions d'existence ; que l'indemnité de 4 424 euros qui lui est accordée au titre des pertes de loyers, en complément de la provision allouée par l'ordonnance du 27 novembre 2008 du juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux correspondant aux pertes encourues entre décembre 2008 et juin 2009, elle portera intérêts à compter du premier jour de chaque mois de cette période pour la perte encourue au cours de ce mois ; que la capitalisation des intérêts, demandée par un mémoire enregistré le 30 octobre 2008, date à laquelle il était dû plus d'un mois d'intérêts, sera effectuée à cette date puis à chaque échéance annuelle ultérieure ; 

    Sur la subrogation :

    Considérant qu'il y a lieu de subordonner le versement des indemnités fixées par la présente décision à la subrogation de l'Etat dans les droits que détiendrait M. A sur Mme Catherine B ;

    Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

    Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre des frais exposés par M. A devant le Conseil d'Etat et devant le tribunal administratif de Toulouse et non compris dans les dépens ;




    D E C I D E :

    Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 4 février 2010 est annulé.

    Article 2 : L'Etat versera à M. A une somme de 3 000 euros portant intérêt à compter du 25 juillet 2007 et une somme de 4 424 euros portant intérêt à compter du premier jour de chaque mois entre décembre 2008 et juin 2009 pour la fraction correspondant aux pertes de loyers subies au cours de ce mois. Les intérêts échus le 30 octobre 2008 seront capitalisés à cette date puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date pour produire eux-mêmes intérêts. 

    Article 3 : Le paiement des sommes allouées par la présente décision est subordonné à la subrogation de l'Etat dans les droits que détiendrait M. A sur Mme Catherine B.

    Article 4 : L'Etat versera à M. A la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

    Article 5 : Le surplus des conclusions de M. A est rejeté.

    Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Sébastien A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration."