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  • Loyers impayés, rétablissement personnel et responsabilité de l'Etat pour refus d'accorder la force publique

    Une décision relative à la conciliation de l'effacement des dettes et la responsabilité de l'Etat pour refus d'octroi de la force publique :


    "Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 avril et 19 juillet 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Sébastien A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

    1°) d'annuler le jugement n° 0705007 du 4 février 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a condamné l'Etat à lui verser une indemnité de 10 000 euros en réparation des préjudices ayant résulté pour lui du refus de concours de la force publique qui lui a été opposé par le préfet de la Haute-Garonne le 3 juillet 2007 et a rejeté le surplus de ses conclusions ;

    2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions présentées devant le tribunal administratif de Toulouse ;

    3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;




    Vu les autres pièces du dossier ;

    Vu le code de la consommation ;

    Vu la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 ;

    Vu le code de justice administrative ;



    Après avoir entendu en séance publique :

    - le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, Maître des Requêtes, 

    - les observations de la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de M. A, 

    - les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, rapporteur public ;

    La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de M. A ;




    Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, le 3 mai 2007, M. A, propriétaire d'un appartement situé 12, chemin de Pelleport à Toulouse, a demandé au préfet de la Haute-Garonne de lui prêter le concours de la force publique pour l'exécution d'une décision du 8 septembre 2006 du juge des référés du tribunal d'instance de Toulouse ordonnant l'expulsion de Mme B, qui avait pris les lieux à bail en mars 2005 et ne versait plus les loyers ; qu'à la suite du rejet implicite de cette demande, acquis le 3 juillet 2007, l'intéressé a recherché la responsabilité de l'Etat devant le tribunal administratif de Toulouse ; que, par un jugement du 4 février 2010, le tribunal a déclaré l'Etat responsable des préjudices ayant résulté pour le propriétaire de l'occupation irrégulière de son bien entre le 3 juillet 2007 et le 15 juin 2009, date de la libération des lieux, et fixé à 10 000 euros le montant de l'indemnité due à M. A ; que ce dernier et, par la voie d'un pourvoi incident, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration demandent l'annulation du jugement ; 

    Sans qu'il soit besoin de statuer sur le pourvoi incident et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi principal ;

    Considérant que, pour fixer l'indemnité mise à la charge de l'Etat, le jugement attaqué énonce que M. A peut prétendre à la réparation du préjudice correspondant au montant des loyers et charges locatives dont il a été privé pendant la période de responsabilité, puis évalue ce préjudice à la somme de 10 000 euros ; qu'en retenant ce chiffre sans s'en expliquer, alors que, dans un mémoire enregistré le 14 janvier 2010, l'intéressé avait présenté un état détaillé de ses pertes de loyers et de charges récupérables, pour un montant total de 14 711,61 euros, le juge du fond a entaché son jugement d'une insuffisance de motivation ; que M. A est, par suite, fondé à en demander l'annulation ;

    Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

    Sur la responsabilité :

    Considérant qu'aux termes de l'article 16 de la loi du 9 juillet 1991 : " L'Etat est tenu de prêter son concours à l'exécution des jugements et des autres titres exécutoires. Le refus de l'Etat de prêter son concours ouvre droit à réparation " ;

    Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la date du 3 juillet 2007, à laquelle le préfet de la Haute-Garonne a implicitement refusé d'accorder à M. A le concours de la force publique, la décision du 8 septembre 2006 du juge des référés du tribunal d'instance de Toulouse était exécutoire ; que, par suite, le rejet de la réquisition dont l'administration avait été régulièrement saisie a engagé la responsabilité de l'Etat à l'égard du propriétaire ; que si la commission départementale de surendettement de la Haute-Garonne a, le 28 décembre 2007, saisi le juge de l'exécution aux fins d'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel de Mme B et si, par application des dispositions alors en vigueur de l'article L. 331-3-1 du code de la consommation, cette saisine a emporté suspension des voies d'exécution à l'encontre de l'intéressée, y compris les mesures d'expulsion du logement, cette circonstance postérieure à la date à laquelle le concours de la force publique a été refusé et indépendante de la volonté du propriétaire n'a pas, contrairement à ce que soutient le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, eu pour effet de suspendre la responsabilité de l'Etat ; qu'il incombe à ce dernier de réparer l'ensemble des préjudices que l'occupation irrégulière a causés au propriétaire entre le 3 juillet 2007 et le 15 juin 2009, date à laquelle les lieux ont été libérés ; 

    Sur le préjudice :

    En ce qui concerne les pertes de loyers et de charges locatives :

    Considérant que, contrairement à ce que soutient le ministre, la circonstance que la décision du 18 mars 2009 par laquelle le juge de l'exécution du tribunal d'instance de Toulouse a ordonné la clôture pour insuffisance d'actif de la procédure de rétablissement personnel ouverte à l'égard de Mme B a effacé les dettes de l'intéressée antérieures au 21 mai 2008 est sans incidence sur le droit de M. A d'obtenir réparation des pertes de loyers qu'il a subies avant cette date ; que les pertes subies entre le 3 juillet 2007 et le 15 juin 2009 doivent être regardées comme une conséquence directe du refus de concours de la force publique qui a rendu possible la poursuite de l'occupation irrégulière ; 

    Considérant qu'il résulte de l'instruction que le bail de Mme B stipulait un loyer de 516 euros par mois ; que les pertes de loyers calculées sur cette base pendant la période de responsabilité de l'Etat s'élèvent à 12 216 euros, auxquels il convient d'ajouter une somme de 1 498 euros correspondant au montant des charges incombant au locataire ; que si M. A demande qu'il soit tenu compte des augmentations légales du montant du loyer, il ressort d'un courrier adressé par lui à sa locataire le 10 mars 2008 qu'il ne les lui appliquait pas ; qu'ainsi le préjudice résultant des pertes de loyers et de charges s'élève à 13 624 euros ; qu'il y a lieu toutefois de déduire de ce montant la provision de 9 200 euros augmentée des intérêts au taux légal accordée à M. A au titre des pertes de loyers et de charges par une ordonnance du 27 novembre 2008 du juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux ; que le complément d'indemnité dû par l'Etat pour ce chef de préjudice s'élève donc à 4 424 euros ; 

    En ce qui concerne les autres chefs de préjudice invoqués :

    Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les dépenses exposées pour la remise en état de l'appartement à la suite du départ de l'ancienne locataire, qui incombaient normalement au propriétaire, aient été majorées du fait du refus de concours de la force publique ; 

    Considérant qu'il n'est pas davantage établi que la poursuite de l'occupation irrégulière à la faveur de ce refus ait eu pour conséquence une diminution de la valeur vénale de l'appartement de M. A ; 

    Considérant que M. A indique avoir contracté en novembre 2006 un emprunt qu'il entendait rembourser à l'aide du produit de la vente de l'appartement, laquelle a été retardée du fait du refus de concours de la force publique ; qu'il demande que les intérêts qu'il a versés au titre de cet emprunt pendant la période de responsabilité de l'Etat soient mis à la charge de celui-ci ; que, toutefois, dès lors qu'il obtient, sur sa demande, une indemnisation au titre de la perte des revenus qu'il aurait tirés de la location de son bien, il ne saurait prétendre en outre à une indemnité au titre d'un préjudice imputé à l'impossibilité de le vendre et consistant dans le coût de l'immobilisation du capital correspondant ; 

    Considérant que M. A demande à être indemnisé des troubles qu'il aurait subis dans ses conditions d'existence du fait du refus de concours de la force publique ; que, contrairement à ce que soutient le ministre, la circonstance que ce chef de préjudice n'ait pas été expressément mentionné dans la réclamation préalable adressée à l'administration ne rend pas irrecevables les conclusions tendant à sa réparation ; qu'il ressort de l'instruction qu'indépendamment de l'indisponibilité de son bien, réparée par l'indemnité qui lui est allouée au titre des pertes de loyers, M. A a subi, du fait du refus qui lui a été opposé par le préfet de la Haute-Garonne, des troubles dont il sera fait une juste appréciation en lui accordant une indemnité de 3 000 euros ;

    Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

    Considérant que M. A a droit à compter du 25 juillet 2007, date à laquelle il a saisi le préfet d'une réclamation préalable, aux intérêts sur l'indemnité de 3 000 euros réparant les troubles dans ses conditions d'existence ; que l'indemnité de 4 424 euros qui lui est accordée au titre des pertes de loyers, en complément de la provision allouée par l'ordonnance du 27 novembre 2008 du juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux correspondant aux pertes encourues entre décembre 2008 et juin 2009, elle portera intérêts à compter du premier jour de chaque mois de cette période pour la perte encourue au cours de ce mois ; que la capitalisation des intérêts, demandée par un mémoire enregistré le 30 octobre 2008, date à laquelle il était dû plus d'un mois d'intérêts, sera effectuée à cette date puis à chaque échéance annuelle ultérieure ; 

    Sur la subrogation :

    Considérant qu'il y a lieu de subordonner le versement des indemnités fixées par la présente décision à la subrogation de l'Etat dans les droits que détiendrait M. A sur Mme Catherine B ;

    Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

    Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre des frais exposés par M. A devant le Conseil d'Etat et devant le tribunal administratif de Toulouse et non compris dans les dépens ;




    D E C I D E :

    Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 4 février 2010 est annulé.

    Article 2 : L'Etat versera à M. A une somme de 3 000 euros portant intérêt à compter du 25 juillet 2007 et une somme de 4 424 euros portant intérêt à compter du premier jour de chaque mois entre décembre 2008 et juin 2009 pour la fraction correspondant aux pertes de loyers subies au cours de ce mois. Les intérêts échus le 30 octobre 2008 seront capitalisés à cette date puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date pour produire eux-mêmes intérêts. 

    Article 3 : Le paiement des sommes allouées par la présente décision est subordonné à la subrogation de l'Etat dans les droits que détiendrait M. A sur Mme Catherine B.

    Article 4 : L'Etat versera à M. A la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

    Article 5 : Le surplus des conclusions de M. A est rejeté.

    Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Sébastien A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration."

  • Construction comportant plusieurs logements et à usage d'habitation individuelle

    Un arrêt sur cette question :


    "Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 avril et 6 juillet 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SCI PHILAUR, dont le siège est 50, chemin des Semestres à Arles (13200) ; la SCI PHILAUR demande au Conseil d'Etat :

    1°) d'annuler l'arrêt du 29 janvier 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 1er mars 2007 par lequel le tribunal administratif de Montpellier, à la demande de M. Achille D et autres, a annulé l'arrêté du 20 février 2003 du maire de la commune de Bellegarde lui délivrant un permis de construire pour édifier deux bâtiments comprenant huit logements ;

    2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; 

    3°) de mettre à la charge de M. D et autres le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


    Vu les autres pièces du dossier ;

    Vu le code de l'urbanisme ;

    Vu le code de justice administrative ;

    Après avoir entendu en séance publique :

    - le rapport de M. Alain Boulanger, chargé des fonctions de Maître des requêtes, 

    - les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la SCI PHILAUR et de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. et Mme D et de M. et Mme F, 

    - les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

    La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la SCI PHILAUR et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. et Mme D et de M. et Mme F ;





    Considérant que la SCI PHILAUR se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 29 janvier 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté son appel dirigé contre le jugement du 1er mars 2007 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 20 février 2003 par lequel le maire de cette commune lui a délivré un permis de construire pour édifier, dans le lotissement dénommé L'Enfer , deux bâtiments comprenant chacun quatre logements et totalisant une surface hors oeuvre nette de 489 m² ;

    Considérant, en premier lieu, que la cour, par une appréciation souveraine dont il n'est pas soutenu qu'elle serait entachée de dénaturation et qui est suffisamment motivée, a estimé que les constructions en litige n'avaient fait l'objet que d'un seul arrêté portant permis de construire, délivré le 20 février 2003 ; que, par suite, elle n'a pu commettre d'erreur de droit en ne jugeant pas que cet arrêté était seulement confirmatif d'une première autorisation qui aurait été précédemment délivrée ;

    Considérant, en second lieu, qu'en vertu des dispositions du règlement du lotissement L'Enfer , applicable à la construction en litige, le lotissement est réservé exclusivement à l'implantation de bâtiments à usage de bureaux, de services, de commerces et d'artisanat et à l'habitation individuelle ; qu'une construction comportant plusieurs logements peut toutefois, eu égard à la fois à son aspect architectural, à sa taille et à ses conditions d'usage, être regardée comme une construction à usage d'habitation individuelle autorisée par ce règlement ; qu'en retenant notamment comme critère pour qualifier le projet d'habitat collectif son aspect architectural, la cour n'a donc pas commis d'erreur de droit ; qu'en retenant que les constructions n'étaient pas destinées à l'habitat individuel et qu'elles comportaient des parties communes, elle n'a pas dénaturé les pièces du dossier ;

    Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCI PHILAUR n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées à ce même titre par M. et Mme D et M. et Mme F et de mettre à la charge de la SCI PHILAUR le versement de la somme globale de 3 000 euros ;



    D E C I D E :

    Article 1er : Le pourvoi de la SCI PHILAUR est rejeté.
    Article 2 : La SCI PHILAUR versera à M. et Mme D et à M. et Mme F la somme globale de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
    Article 3 : La présente décision sera notifiée à SCI PHILAUR, à M. et Mme Achille D, à M. et Mme Frédéric F, à M. Hubert C, à M. Gérard E, à M. Denis B, à M. Patrick H, à M. Laurent A et à M. Patrice G.
    Copie en sera adressée pour information à la commune de Bellegarde."