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Permis de construire retiré, vente annulée ?

Cet arrêt juge que la vente d'un bien immobilier c'est-à-dire d'un terrain ne peut pas être annulée au motif qu'un permis de construire qui avait été accordé postérieurement à la vente a fait l'objet d'un retrait par le maire à la suite d'un recours gracieux du préfet, et ceci pour des motifs de sécurité.

 

Les juges relèvent que l'acte de vente mentionnait, dans l'état des risques, le fait que les parcelles vendues étaient en zones inondables et couvertes par un plan de prévention des risques d'une part et qu'au jour de la vente le terrain en question était constructible.

 

On notera cependant que les juges condamnent les notaires à indemniser l'acheteur, à hauteur de 15 000 €, au titre de la réparation de la perte d'une chance de ne pas acheter.

 

"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 1er septembre 2015), que, par acte notarié du 22 août 2006, dressé par MM. X...et Y..., Charles Z...et Mme Huguette A..., son épouse, ont vendu à M. B...et Mme C..., différentes parcelles de terrain pour lesquelles ceux-ci ont obtenu, le 26 décembre 2007, un permis de construire, qui, à la suite d'un recours gracieux du préfet, a été retiré par arrêté municipal du 7 juillet 2008, pour des motifs de sécurité, le lotissement se trouvant dans un secteur soumis à des risques naturels ; que M. B...et Mme C..., invoquant l'inconstructibilité du terrain, ont assigné les vendeurs, M. X..., M. Y..., la société civile professionnelle Mallet et Benoît et la société civile professionnelle Y... D..., en nullité du contrat de vente et en indemnisation de leur préjudice ; que, Charles Z...étant décédé, l'instance a été reprise par Mmes Maryvonne et Huguette Z...(les consorts Z...) ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. B...et Mme C...font grief à l'arrêt de rejeter leur demande en résolution et en nullité de la vente, alors, selon le moyen :

1°/ que lorsque le refus d'octroi d'un permis de construire en raison du caractère inconstructible du terrain est fondé sur des circonstances existant antérieurement à la vente, l'erreur commise par l'acquéreur qui croyait le terrain constructible est de nature à vicier son consentement ; que dès lors en retenant, pour rejeter la demande d'annulation de la vente des consorts B...-C..., que le fait que les décisions de retrait du permis de construire aient visé une circulaire du 30 avril 2002 relative à la gestion des espaces situés derrière les digues de protection contre les inondations, pourtant de nature à établir que la qualité attendue de constructibilité du terrain faisait déjà virtuellement défaut à la date de la vente conclue le 22 août 2006, était sans incidence sur le fait qu'au moment de la vente, le terrain devait être considéré comme constructible par les parties, la cour d'appel a violé les articles 1109 et 1110 du code civil ;

2°/ que lorsque les acquéreurs d'un terrain se voient refuser un permis de construire en raison des risques d'inondation, le vice d'inconstructibilité affectant le terrain, qui résulte de son caractère inondable et qui est seulement constaté par la décision administrative, est inhérent au bien vendu ; que dès lors, en retenant, pour rejeter la demande de résolution des consorts B...-C...en raison du vice d'inconstructibilité du terrain révélé postérieurement à la vente, que l'inconstructibilité relevait de l'appréciation de l'administration et qu'il s'agissait donc d'un vice extrinsèque ne pouvant donner lieu à réparation sur le fondement de l'action en garantie des vices cachés, la cour d'appel a violé l'article 1641 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, qu'à l'acte notarié de vente, figurait un état des risques mentionnant que les parcelles étaient en zone inondable et étaient couvertes par un plan de prévention des risques et qu'au jour de la vente, le terrain litigieux était constructible, la cour d'appel, qui a exactement retenu que l'annulation rétroactive du permis de construire obtenu après la vente était sans incidence sur l'erreur devant s'apprécier au moment de la formation du contrat, a pu en déduire que le retrait du permis de construire ne pouvait entraîner la nullité de la vente, ni donner lieu à la garantie des vices cachés ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que M. B...et Mme C...font grief à l'arrêt de condamner solidairement les notaires à leur payer la somme de 15 000 euros en réparation de leur perte de chance de ne pas contracter ;

Mais attendu qu'ayant retenu que M. B...et Mme C..., s'ils avaient été informés du risque d'annulation du permis de construire par les notaires, avaient d'importantes chances de ne pas contracter, la cour d'appel qui, sans procéder à une évaluation forfaitaire, a souverainement apprécié le préjudice résultant de cette perte de chance, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. B...et Mme C...aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre novembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par laSCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour M. B...et Mme C...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Les consorts B.../ C...font grief à l'arrêt confirmatif attaqué de les avoir déboutés de leurs demandes de résolution et de nullité de la vente de 22 août 2006 régularisée avec les époux Z...;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, « sur la demande en résolution de la vente pour vices cachés : aux termes de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui en diminuent tellement l'usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquis ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus ; que l'acquéreur doit établir que l'inconstructibilité est un vice intrinsèque du terrain, antérieur à la vente ; qu'en l'espèce, l'inconstructibilité du terrain litigieux relève de l'appréciation de l'administration qui a évolué délivrant en premier lieu le permis de construire puis le retirant ; qu'il s'agit donc d'un vice extrinsèque permettant uniquement d'invoquer l'erreur et ne pouvant donner lieu à réparation sur le fondement de l'action en garantie pour vices cachés ; sur la demande en nullité pour erreur ; que par application de l'article 1110 du code civil, l'erreur est une cause de nullité de la convention lorsqu'elle tombe sur la substance de la chose qui en est l'occasion ; que l'erreur sur les qualités substantielles de la chose vendue s'apprécie au moment de la conclusion du contrat ; qu'au moment de la formation du contrat, Monsieur Z...avait obtenu un certificat d'urbanisme concernant les parcelles cadastrées section F 844, 845, 846, 848, 981, 1019 et 1020 en vue de la réalisation d'un lotissement puis l'autorisation de lotir ; qu'au moment de la rencontre des consentements des parties, le terrain litigieux était constructible et les acquéreurs ont bien obtenu le permis de construire sollicité ; que l'annulation rétroactive du permis de construire accordé est sans incidence sur l'erreur qui doit s'apprécier au moment de la vente ; que dès lors, le retrait du permis de construire postérieurement à la vente n'affecte pas sa validité et ne peut justifier son annulation ; que c'est donc par une appréciation pertinente des faits et du droit que le tribunal a rejeté les demandes en résolution et en nullité de la vente du 22 août 2006 » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « la commune d'Allemont (Isère) a délivré le 11 août 2000 à Monsieur Charles Z...un certificat d'urbanisme positif concernant les parcelles cadastrées section F 1019, F 1020, F 844, F 845, F 846, F 848 et F 981 d'une superficie de 20922 m2 en vue de la réalisation d'un lotissement ; que le 10 septembre 2002, le maire de la commune d'Allemont a délivré à Monsieur Charles Z...une autorisation de lotir pour 13 lots ; que le 13 avril 2005, le Maire de la commune d'Allemont a signé un certificat d'achèvement des travaux certifiant que les prescriptions imposées par l'arrêté d'autorisation de lotir susvisé ont été exécutées ; la vente des terrains dans le lotissement est autorisée ; que des permis de construire pourront être délivrés pour des projets conformes aux prescriptions de l'arrêté de lotir ; que selon acte en date du 12 mai 2006, Monsieur Charles Z...et Madame Hugette A..., épouse Z..., ont promis unilatéralement de vendre à Monsieur Olivier B...et à Mademoiselle Véronique C...jusqu'au 11 août 2006 le lot n° 8 du lotissement « Hameau du Champeau », soit une parcelle de terrain à bâtir d'une superficie de 1003 m2, cadastrée section F 1147 et une parcelle attenante cadastrée section F 1160 d'une superficie de 530 m2 ; que l'acte détaille l'ensemble des documents relatifs au lotissement ; que la promesse comporte diverse conditions suspensives, dont celle de délivrance d'un certificat d'urbanisme compte tenu du projet de construction d'une maison à usage d'habitation, cette condition étant stipulée dans le seul intérêt des bénéficiaires ; que par acte en date du 22 août 2006, dressé par Me Gabriel X..., avec la participation de Me Y..., Notaires, la vente des parcelles est réitérée par acte authentique ; qu'à l'acte sont évoqués un état des risques dans le cadre du plan de prévention des risques naturels et technologiques ainsi qu'une note de renseignement d'urbanisme ; qu'il est mentionné dans un paragraphe « Urbanisme » que les parcelles sont en zone inondable, qu'elles sont couvertes par un plan de prévention des risques et de « l'acquéreur déclare en faire son affaire personnelle et dispense le notaire de relater ou d'annexer ladite note au présent acte » ; que le 15 février 2007, les consorts C... B...ont déposé une demande de permis de construire ; que le 26 décembre 2007, le maire de la commune d'Allemont a délivré le permis de construire ; que le 24 avril 2008, ensuite d'un recours gracieux de Monsieur le Préfet de l'Isère du 28 février 2008, le maire a procédé au retrait du permis de construire avec la motivation suivante : « recours faisant référence à la circulaire interministérielle du 30 avril 2002 relative à la gestion des espaces situés derrière les digues de protection contre les inondations et à l'étude hydraulique de l'eau Olle Hydratec R 20462, éléments d'analyse non portés à la connaissance de la commune et non pris en compte lors de l'instruction préliminaire de lotir » ; que le 7 juillet 2008, le maire de la commune d'Allemont a pris une décision d'annulation et de remplacement de la décision du 24 avril 2008 avec la même motivation ; que premièrement, au visa des articles 1641 et suivants du code civil, il apparaît que l'inconstructibilité d'un terrain à bâtir constitue effectivement un vice caché ; que toutefois, pour que l'action en résolution puisse être accueillie, il importe que le vice soit antérieur à la vente ; or il résulte de la relation des faits qu'au jour de la vente, les parcelles vendues qui faisaient partie d'un lotissement étaient constructibles au vu des décisions prises par l'autorité administrative ; que contrairement à ce que soutiennent les consorts B.../ C..., une inconstructibilité antérieure à la vente du lot n° 8 n'a pas été révélée postérieurement à la vente lors du recours gracieux exercé par le Préfet sur l'arrêté d'autorisation du permis de construire délivré par le maire puis retiré, mais l'autorité administrative a modifié son appréciation sur la constructibilité du terrain après la vente, sans préjudice d'ailleurs de son éventuelle responsabilité à ce titre devant être appréciée par la juridiction de l'ordre administratif ; que le vice allégué d'inconstructibilité est dès lors postérieur à la vente de sorte que les consorts B...et C...ne peuvent qu'être déboutés de leur action en résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés ; que deuxièmement, au visa de l'article 1110 du code civil, l'erreur sur les qualités substantielles de la chose vendue s'apprécie au moment de la conclusion du contrat (Civ. 3e, 23 mai 2007, pourvoi n° 06-11. 889 ; Civ. 3e, 8 octobre 2003, n° 02-11. 841) ; qu'il s'ensuit qu'un raisonnement similaire doit être tenu ; qu'au jour de la vente, les autorisations délivrées par l'autorité administrative permettaient tant aux vendeurs qu'aux acquéreurs de considérer que les parcelles vendues étaient constructibles ; que le fait que le maire ait pu lors de ses décisions de retrait en date 24 avril et 7 juillet 2008 du permis de construire, sollicité et accordé après la vente, viser une circulaire du 30 avril 2002 est sans incidence sur le fait qu'à la date de la vente, le terrain devait être considéré par les parties comme constructible, sans préjudice de la responsabilité éventuelle de l'autorité administrative quant aux décisions prises et à leur motivation ; qu'un raisonnement similaire doit être tenu s'agissant du moyen tiré de l'absence de cause, au visa implicitement mais nécessairement de l'article 1131 du code civil en ce que la cause existait au jour de la conclusion de la vente mais a disparu ultérieurement ; qu'il convient dans ces conditions de rejeter la demande de nullité pour erreur et absence de cause de la vente intervenue entre les consorts B.../ C...d'une part et les époux Z...d'autre part » ;

1./ ALORS QUE lorsque le refus d'octroi d'un permis de construire en raison du caractère inconstructible du terrain est fondé sur des circonstances existant antérieurement à la vente, l'erreur commise par l'acquéreur qui croyait le terrain constructible est de nature à vicier son consentement ; que dès lors en retenant, pour rejeter la demande d'annulation de la vente des consorts B...-C..., que le fait que les décisions de retrait du permis de construire aient visé une circulaire du 30 avril 2002 relative à la gestion des espaces situés derrière les digues de protection contre les inondations, pourtant de nature à établir que la qualité attendue de constructibilité du terrain faisait déjà virtuellement défaut à la date de la vente conclue le 22 août 2006, était sans incidence sur le fait qu'au moment de la vente, le terrain devait être considéré comme constructible par les parties, la cour d'appel a violé les articles 1109 et 1110 du code civil ;

2./ ALORS, subsidiairement, QUE lorsque les acquéreurs d'un terrain se voient refuser un permis de construire en raison des risques d'inondation, le vice d'inconstructibilité affectant le terrain, qui résulte de son caractère inondable et qui est seulement constaté par la décision administrative, est inhérent au bien vendu ; que dès lors, en retenant, pour rejeter la demande de résolution des consorts B...-C...en raison du vice d'inconstructibilité du terrain révélé postérieurement à la vente, que l'inconstructibilité relevait de l'appréciation de l'administration et qu'il s'agissait donc d'un vice extrinsèque ne pouvant donner lieu à réparation sur le fondement de l'action en garantie des vices cachés, la cour d'appel a violé l'article 1641 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Les consorts B.../ C...font grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement attaqué sur le quantum de la condamnation principale des SCP X... E... et Y... D...et, statuant à nouveau sur ce point, de les avoir condamnés solidairement à M. B...et Mme C...la somme de 15 000 € en réparation de leur perte de chance de ne pas contracter ;

AUX MOTIFS QUE, « sur le fondement de l'article 1382 du code civil, le notaire est tenu d'une obligation de conseil à l'égard de ses clients et doit s'assurer de l'efficacité des actes passés avec son concours eu égard aux buts poursuivis par les acquéreurs ; que le notaire a l'obligation de vérifier la situation des biens au regard de la législation sur l'urbanisme et d'informer ses clients des conséquences que peuvent avoir les règles d'urbanisme sur le projet immobilier ; qu'en l'espèce, les notaires, qui se sont contentés de solliciter une simple fiche de renseignements d'urbanisme et d'indiquer que le terrain était inondable, ont manqué à leurs obligations de conseil en omettant d'éclairer les acquéreurs sur le risque qu'ils encouraient en s'engageant sans certitude que le permis de construire pouvant être délivré devienne définitif ; que les consorts B.../ C..., s'ils avaient bien compris qu'une partie du terrain encourait un risque d'inondation, pouvaient légitimement penser au regard des éléments en leur possession qu'un permis de construire pouvait leur être délivré ce qui est advenu mais n'ont pas été réellement informés de ce que cette constructibilité n'était pas définitive dès lors que le permis pouvait être retiré, risque qui s'est réalisé ; que la légalité des actes administratifs n'ayant pas à être examinée par le juge judiciaire, l'argumentation des notaires à ce titre est inopérante ; que l'impossibilité pour les consorts B.../ C...de finaliser leur projet immobilier résulte tant des fautes de la commune que des manquements des notaires ; que les consorts B.../ C...ont été indemnisés de divers frais par la commune ; que concernant les manquements des notaires, ils ont occasionné aux consorts B.../ C...ont été indemnisés de divers frais par la commune ; que concernant les manquements des notaires, ils ont occasionné aux consorts B.../ C...uniquement une perte de chance de ne pas contracter ; qu'au regard des multiples difficultés rencontrées, des nombreuses procédures engagées, les consorts B.../ C..., s'ils avaient été correctement informés, non seulement du caractère inondable du terrain mais surtout des risques d'annulation, avaient d'importantes chances de ne pas contracter ou, à tout le moins, d'exiger l'insertion d'une clause suspensive tenant à l'obtention d'un permis de construire purgé du droit des tiers ; qu'il convient d'indemniser cette perte de chance en condamnant solidairement les SCP X... E... et Y... D...à payer aux consorts B.../ C...la somme de 15 000 € » ;

ALORS QUE, pour évaluer la perte de chance, les juges doivent mesurer la chance perdue et apprécier à quelle fraction du préjudice elle correspond ; que dès lors, en se bornant à affirmer qu'il y a lieu de condamner solidairement les SCP X...-E... et Y...-D...à payer aux consorts B.../ C...la somme forfaitaire de 15 000 € en réparation de la perte de chance de ne pas contracter que leurs fautes auraient causé à ces derniers, sans préciser le préjudice que la conclusion du contrat leur a causé, et la mesure de la chance perdue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil."

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