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Une décision d'adjudication ne permet pas l'expulsion

C'est ce qui a été jugé par le conseil d'État dans cette décision rendue le 29 octobre 2007.

Cela paraît assez évident : il appartenait à l'adjudicataire de saisir le juge compétent pour ordonner cette expulsion et non de se prévaloir uniquement de la décision d'adjudication.

« Vu le recours, enregistré le 31 mars 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 30 décembre 2004 par lequel le tribunal administratif de Nancy a condamné l'Etat à verser à la SARL Immobjectifs France une indemnité de 55 409,33 euros en réparation du préjudice résultant pour elle du refus de concours de la force publique pour procéder à l'expulsion des occupants d'un immeuble à Dommartemont, que lui a opposé le préfet de Meurthe-et-Moselle ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande présentée par la SARL Immobjectifs devant le tribunal administratif de Nancy ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 1er protocole additionnel à cette convention ;

Vu la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 ;

Vu le décret n° 47-233 du 23 janvier 1947 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Lambron, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la SARL Immobjectifs France,

- les conclusions de M. Terry Olson, Commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité du recours :

Considérant que le présent recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES est signé par M. Jacques Quastana, sous-directeur du conseil juridique et du contentieux, qui a reçu, par un arrêté du 9 mars 2005 publié au Journal officiel de la République française du 25 mars 2005, une délégation de signature l'habilitant notamment à signer au nom du ministre les mémoires présentés devant la juridiction administrative ; que par suite, la fin de non-recevoir tirée de ce que le recours introduit par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES n'aurait pas été signé par une personne habilitée à cet effet doit être écarté ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'aux termes de l'article 61 de la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution : « Sauf disposition spéciale, l'expulsion ou l'évacuation d'un immeuble ou d'un lieu habité ne peut être poursuivie qu'en vertu d'une décision de justice ou d'un procès-verbal de conciliation exécutoire » ; que la décision par laquelle le juge judiciaire prononce l'adjudication d'un bien vendu sur saisie immobilière, quelle que soit sa formulation, n'a ni pour objet ni pour portée d'autoriser l'expulsion des occupants de ce bien et n'est donc pas au nombre des décisions de justice mentionnées par les dispositions de l'article 61 la loi du 9 juillet 1991 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en jugeant que la décision du 14 mars 1996 par laquelle la chambre des saisies immobilières du tribunal de grande instance de Nancy avait prononcé l'adjudication d'un immeuble situé 12, chemin stratégique à Dommartemont, alors même qu'elle faisait mention « à tous détenteurs et possesseurs de délaisser l'immeuble », permettait au préfet de Meurthe-et-Moselle d'accorder à la SARL Immobjectifs France, adjudicataire de l'immeuble, le concours de la force publique pour en expulser les occupants, et en en déduisant que le refus de concours de la force publique en vue de cette expulsion, que le préfet a opposé à la demande que la société lui avait présentée le 21 août 2000, était de nature à engager la responsabilité de l'Etat, le tribunal administratif de Nancy a entaché d'erreur de droit son jugement du 30 décembre 2004 par lequel il a condamné l'Etat à verser une indemnité à cette société ; que le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES est dès lors fondé à en demander l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

Considérant que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le préfet de Meurthe-et-Moselle était tenu de refuser, comme il l'a fait, le concours de la force publique que lui avait demandé la SARL Immobjectifs France le 21 août 2000 en se bornant à se prévaloir d'une adjudication judiciaire ; que l'interdiction de poursuivre une expulsion qui n'est pas préalablement autorisée par le juge judiciaire n'est contraire à aucune stipulation de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou de l'article 1er du 1er protocole additionnel à cette convention ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le refus opposé par le préfet à la demande de concours de la force publique du 21 août 2000 n'est pas de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; que, dès lors, la SARL Immobjectifs France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par la décision attaquée, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui accorder une indemnité ; que doivent être rejetées par voie de conséquence ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ».

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