La position de la Cour de Cassation n’est pas sans nuance : pour la 1ère Chambre, cela est possible sous réserve de l'absence de fraude : « Attendu que lorsque le mandant a donné à plusieurs mandataires le mandat non exclusif de vendre un même bien, il n'est tenu de payer une rémunération ou commission qu'à celui par l'entremise duquel l'opération a été effectivement conclue, au sens de l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970 et cela même si l'acquéreur lui avait été précédemment présenté par un autre agent immobilier, sauf à ce dernier à prétendre à l'attribution de dommages-intérêts en prouvant une faute du vendeur qui, par abus de sa part et compte tenu des diligences accomplies, l'aurait privé de la réalisation de la vente ;
Attendu que M. X... a confié à l'agence immobilière Abondance Immobilière le 24 mars 2001 un mandat non exclusif de vendre sa maison, moyennant une rémunération de 5 % à la charge de l'acquéreur ; que les époux Y... ont visité le bien par l'intermédiaire de cette agence selon bon de visite en date du 6 avril 2001 ; que la vente a été réalisée entre les parties par l'intermédiaire d'une autre agence immobilière, l'agence Martin à laquelle M. X... avait également donné mandat non exclusif de vente ;
Attendu que pour condamner le vendeur à payer à l'agence immobilière Abondance Immobilière l'indemnité forfaitaire de 5 % du prix de vente qu'elle réclamait pour non-respect par le vendeur de l'interdiction qui lui était faite de traiter directement avec un acheteur présenté par l'agence mandataire, l'arrêt attaqué énonce que l'interdiction de traiter directement avec l'acquéreur présenté par l'agence immobilière n'autorise pas les parties à traiter en dehors de la présence de celle-ci, que le terme directement n'a pas d'autre signification et qu'il n'autorise pas les parties à évincer l'agent immobilier en affectant de traiter avec un intermédiaire moins coûteux ;
Qu'en statuant ainsi, alors que M. X... avait confié aux deux agences des mandats de vente non exclusifs et que la vente a été réalisée par l'intermédiaire de l'une de ces deux agences moyennant paiement d'une commission librement négociée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ».
Mais, pour la même Chambre il faut aussi tenir compte des stipulations contractuelles prévues au mandat, qui doivent être appliquées, si elle prévoient une interdiction de procéder ainsi : « Vu les articles 1134 et 1147 du Code civil ; Attendu que les époux Y... ont, le 26 juin 2000, donné à la société Française immobilière mandat non exclusif de vendre un bien immobilier ; qu'après avoir appris qu'un compromis de vente avait été signé par l'intermédiaire d'une autre agence immobilière avec les époux X... auxquels elle avait fait visiter le bien, la société Française immobilière a assigné les époux Y... en paiement de l'indemnité prévue par la clause 4 du titre III du mandat aux termes de laquelle ils s'étaient interdit, même après l'expiration du mandat, de traiter directement ou indirectement par tout autre intermédiaire, y compris un office notarial, avec un acquéreur ayant été présenté par le mandataire ou ayant visité les locaux avec lui et s'étaient engagés, en cas de non respect de cette obligation, à verser au mandataire une indemnité compensatrice forfaitaire égale au montant de la rémunération prévue ;
Attendu que pour débouter la société Française immobilière de sa demande, la cour d'appel relève que le fait pour les époux Y... d'avoir conclu un compromis de vente avec les époux X... ne constituait pas un manquement contractuel dès lors que les premiers avaient traité avec les seconds non pas directement mais par l'entremise d'une autre agence immobilière et que la société Française immobilière ne justifiait d'aucune diligence ou intervention de sa part dans la réduction du prix déterminante de la vente négociée par l'autre agence immobilière, laquelle avait accepté au surplus de réduire le montant de la commission due par l'acquéreur ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que si les époux Y... n'étaient tenus de payer une rémunération ou une commission qu'à l'agence immobilière par l'entremise de laquelle l'opération avait été effectivement conclue, ils avaient néanmoins méconnu l'interdiction contractuelle de vendre par un autre intermédiaire aux acquéreurs ayant visité le bien avec la société Française immobilière, la cour d'appel a violé les textes susvisés. »
(Cour de Cassation 16 mai 2006 et 30 mai 2006)