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BDIDU Blog Actualités juridiques Droit Immobilier et Droit de l'Urbanisme par Christophe Buffet Avocat Spécialiste en Droit Immobilier et Droit Public Tél. 02 41 81 16 16 - Page 2206

  • La modification du POS (ou du PLU) et le détournement de pouvoir

    Le fait de modifier un document d'urbanisme dans le but de permettre la réalisation d'une construction ayant fait l'objet d'une annulation d'autorisation parce qu'elle violait le règlement d'urbanisme antérieur n'est pas forcément constitutif d'un détournement de pouvoir :

     

     

    « Vu la requête, enregistrée le 18 janvier 2007, complétée par mémoire enregistré le 9 janvier 2008, présentée pour M. et Mme André X, demeurant ..., par la Selarl Soler-Couteaux/Lllorens, avocats au barreau de Strasbourg ;

     

    M. et Mme X demandent à la Cour :

     

    1°) d'annuler le jugement n° 0404674 en date du 21 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Marckolsheim en date du 25 octobre 2004 délivrant un permis de construire à la SCI du Grand Bleu ;

     

    2°) d'annuler le permis de construire susmentionné ;

     

    3°) de mettre à la charge de la commune de Marckolsheim la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

     

     

    Ils soutiennent que :

     

     

    -  le jugement attaqué est entaché d'absence de motivation;

     

    - le permis de construire contesté est dépourvu de base légale en raison de l'illégalité du plan d'occupation des sols de la commune qui a fait l'objet d'une modification pour rendre possible la délivrance du permis de construire un centre équestre, antérieurement illégal ;

     

    - le plan local d'urbanisme a été irrégulièrement modifié, dès lors que la modification en cause comporte de graves risques de nuisance, ce qui obligeait la commune à mettre en œuvre la procédure de révision ;

     

    - il n'est pas douteux que l'exploitation d'un centre équestre comporte des risques graves de pollution des eaux souterraines ;

     

    - la modification en cause est entachée de détournement de pouvoir à celle en ce qu'elle a uniquement eu pour objet de régulariser la construction d'un manège à chevaux dont le précédent permis de construire avait été suspendu par le juge des référés administratifs ; - cette modification n'obéit qu'à des préoccupations d'intérêt privé, ce qui caractérise bien le détournement de pouvoir ;

     

    - la cour doit donc écarter les dispositions du plan d'occupation des sols modifié et constater que le permis de construire est illégal au regard des dispositions antérieures du plan d'occupation des sols ;

     

    - le permis de construire litigieux méconnaît les dispositions du règlement sanitaire départemental ;

     

     

    Vu le jugement attaqué ; Vu enregistré le 30 août 2007, le mémoire en défense présenté par la commune de Marckolsheim, par Me Sonnenmoser, qui conclut au rejet de la requête et demande la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

     

    Elle soutient que :

     

    - le jugement attaqué est suffisamment motivé ;

     

    - les modifications du plan local d'urbanisme relevaient de la simple procédure de modification et non de la procédure de révision, compte tenu de l'objet des modifications en cause qui n'emportent pas en soi des nuisances graves ;

     

    - la création du centre équestre ne comporte pas de graves risques de nuisance ; - la modification du plan local d'urbanisme n'est pas entachée de détournement de pouvoir, dès lors qu'elle obéit à un but d'intérêt général et qu'elle est fondée sur des motifs d'urbanisme ;

     

    - le permis de construire en cause ne méconnaît pas les dispositions du règlement sanitaire départemental, dont au surplus certaines dispositions invoquées ne sont pas applicables à l'exploitation d'un centre équestre qui ne constitue pas une activité agricole ;

     

     

    Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de l'urbanisme ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 janvier 2008 : - le rapport de Mme Stahlberger, présidente, - les observations de Me Dietenhoffer, de la SELARL Soler-Couteau, Llorens, avocat de M. et Mme X ; - et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;

     

     

    Sur la régularité du jugement attaqué : Considérant qu'en se bornant à relever dans son jugement que la modification du plan local d'urbanisme de la commune de Marckolsheim approuvée par délibération du conseil municipal en date du 12 août 2004 ne méconnaît aucune disposition du règlement sanitaire départemental, alors que le moyen était soulevé à l'encontre du permis de construire lui-même et non à l'appui du moyen tiré de l'exception d'illégalité du plan local d'urbanisme, le tribunal a entaché ce jugement d'une omission à statuer ; qu'ainsi le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 21 novembre 2006 doit être annulé ;

     

    Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme X devant le Tribunal administratif de Strasbourg ; Sur la légalité du permis de construire attaqué :

     

    Sur le moyen tiré de l'exception d'illégalité du plan local d'urbanisme : En ce qui concerne la méconnaissance de l'article L. 123-13 du code de l'urbanisme : Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-13 du code de l'urbanisme : «Le plan local d'urbanisme est modifié ou révisé par délibération du conseil municipal après enquête publique. La procédure de modification est utilisée à condition que la modification envisagée (…) c) Ne comporte pas de graves risques de nuisance (…)» ; Considérant que par la délibération du 12 août 2004, le conseil municipal de Marckolsheim a modifié le règlement du plan local d'urbanisme en supprimant, dans l'énoncé de la vocation de la zone INA 4, destinée à des activités de sports, de loisirs ou d'attractions ouvertes au public, la restriction des constructions les accompagnant à des «aménagements légers» et en autorisant des «constructions peu importantes» et «des installations surfaciques», nécessaires aux sports équestres ; que cette modification a en outre porté sur l'article 10 INA 4 relatif à la hauteur des constructions autorisées, portant celle-ci de 5,5 mètres à 8 mètres au faîtage, ainsi que sur l'article 11 INA autorisant une pente de toit plus faible ; qu'il ressort des pièces du dossier que ces modifications ont été décidées en vue de régulariser l'implantation dans ce secteur d'un centre équestre et doivent être examinées au regard de la nature de l'activité sportive désormais autorisée ; que les modifications en cause ne sont pas d'une grande ampleur et ne génèrent pas par elles-mêmes de graves risques de nuisance ; que la circonstance que le centre équestre existant dans la zone serait une source de nuisances importantes est inopérante à cet égard ; qu'il s'ensuit que les modifications susanalysées ont pu légalement être adoptées selon les modalités prévues au troisième alinéa de l'article L. 123-4 du code de l'urbanisme ;

     

    Sur le détournement de pouvoir : Considérant que s'il est établi que les modifications du plan local d'urbanisme adoptées par délibération du conseil municipal de Marckolsheim en date du 12 août 2004 ont eu notamment pour but de permettre la réalisation d'un centre équestre dans une zone au demeurant déjà réservée aux activités sportives et de loisirs, cette circonstance ne suffit pas, à elle seule, à entacher le plan local d'urbanisme de détournement de pouvoir, dès lors qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le maire aurait poursuivi ainsi un but étranger à l'intérêt général ;

     

    Sur le moyen tiré de la méconnaissance du règlement sanitaire départemental : Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le bâtiment abritant les boxes à chevaux est situé à plus de 25 mètres du reste de la zone de loisirs ou de bâtiments d'habitation de tiers et que la fumière est située à plus de 5 mètres d'immeubles d'habitation du reste de la zone de loisirs ; que si l'écurie est située à 150 mètres de l'étang appartenant aux requérants, il ne ressort pas des pièces du dossier que celui-ci ait une vocation acquicole ; que, dès lors, M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que le permis de construire litigieux méconnaîtrait les dispositions du règlement sanitaire départemental auxquelles se réfère expressément ledit permis ;

     

     

    Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Marckolsheim, qui n'est pas, dans la présente instance la partie perdante, la somme que demandent M. et Mme X au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme X le paiement à la commune de Marckolsheim de la somme de 1 000 euros sur le fondement de ces dispositions ;

     

    DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 0404674 en date du 21 novembre 2006 du Tribunal administratif de Strasbourg est annulé. Article 2 : La requête de M. et Mme X est rejetée. Article 3 : M. et Mme X verseront à la commune de Marckolsheim la somme de mille euros (1 000 euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme André X, à la commune de Marckolsheim et à la SCI du Grand Bleu. »

     

     

    (Cour Administrative d'Appel de Nancy 7 février 2008)

     

  • C’est le dernier exploitant d’un site qui doit dépolluer

    Selon cet important arrêt de la Cour de Cassation qui a rejeté le recours fait par un locataire contre le propriétaire du terrain :

     

     

    « Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 4 mai 2006), que la société civile immobilière du Réal (la SCI) est propriétaire d'un terrain sur lequel sont édifiés des bâtiments donnés en location aux fins d'exploitation d'une usine de production de produits chimiques et d'engrais à la société Sud-Est engrais, aux droits de laquelle vient la société Reno dont la dénomination est désormais Interfertil France ; que la société Reno a donné congé pour le 30 septembre 1993 ; qu'elle a remis les clés du site le 6 septembre 1994 ; que les travaux de dépollution du site imposés par la loi du 19 juillet 1976 ont été réalisés du 9 octobre 2001 au 12 mars 2003 ; que la SCI a saisi le juge d'une demande en paiement de dommages-intérêts pour le retard apporté à la dépollution et l'immobilisation des locaux pendant cette période ; que la société Interfertil a reconventionnellement sollicité la condamnation de la bailleresse au remboursement des frais de dépollution ;

     

     

    Sur le moyen unique du pourvoi n° H 07-12.155, ci-après annexé :

     

     

    Attendu que la cour d'appel qui n'a pas exonéré la société Reno de sa responsabilité et devant laquelle la SCI du Réal sollicitait le paiement d'une somme au titre de l'indemnisation globale du préjudice subi du fait de la non-restitution des lieux dépollués, a, sans dénaturer les conclusions de la bailleresse, ni violer le principe de la réparation intégrale du préjudice, fixé souverainement le montant des dommages-intérêts qui devaient être alloués à cette dernière ;

     

     

    D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

     

     

    Sur le moyen unique du pourvoi n° X 07-13.158 :

     

     

    Attendu que la société Interfertil France fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en remboursement des frais de dépollution, alors, selon le moyen, que l'exploitant d'une installation classée qui a, en cette qualité, assumé les frais de la dépollution du terrain qu'il occupait a, en la qualité distincte de preneur à bail du terrain et lorsqu'il est établi que le terrain était déjà pollué lors de son entrée en jouissance, une créance de remboursement de ces frais envers le bailleur, la dépollution apportant dans un tel cas une amélioration au bien loué et le preneur ne pouvant être tenu, en cette qualité, de restituer la chose louée dans un meilleur état que celui où il l'a reçue ; que la cour d'appel a constaté que lors de l'entrée dans les lieux de la société Reno en 1989, le site était déjà lourdement pollué par la pyrite de fer, que la société Reno n'avait elle-même jamais utilisé les procédés chimiques à l'origine de cette pollution industrielle, et que cependant, après la dépollution assumée par la société Reno, la SCI du Réal avait repris un bien immobilier totalement dépollué ; qu'en refusant d'en déduire le droit pour le preneur à bail d'obtenir du bailleur remboursement des frais de dépollution ayant ainsi apporté une amélioration au terrain, par la considération inexacte qu'une telle créance de remboursement n'aurait pu procéder que d'une convention entre bailleur et preneur, la cour d'appel a violé les articles L. 511-1 et L. 514-1 du code de l'environnement et l'article 34-1 du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977, par fausse interprétation, et les articles 1730 et 555 du code civil, par refus d'application, ensemble l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

     

     

    Mais attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, exactement retenu qu'aux termes des dispositions de la loi du 19 juillet 1976, la charge de la dépollution d'un site industriel incombait au dernier exploitant et non au propriétaire du bien pollué, la cour d'appel, qui n' a pas violé l'article 1er du premier Protocole additionnel de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en a déduit à bon droit que la remise en état du site résultant d'une obligation légale particulière dont la finalité est la protection de l'environnement et de la santé publique, était à la charge de la locataire . »

     

     

    (Cour de cassation 2 avril 2008)