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BDIDU Blog Actualités juridiques Droit Immobilier et Droit de l'Urbanisme par Christophe Buffet Avocat Spécialiste en Droit Immobilier et Droit Public Tél. 02 41 81 16 16 - Page 1457

  • Contrôle judiciaire du refus d'agrément du cessionnaire par le bailleur

    Un exemple ;

    "Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 février 2010), que la société Smart Distribution, aux droits de laquelle vient la société Mercedes Benz France, locataire, selon acte du 17 juin 2004, de locaux à usage commercial appartenant à la SCI 5 & 7 rue Louis Rouqier à Levallois-Perret (la SCI), a, conformément aux stipulations du contrat de bail, demandé à cette dernière d'agréer la société Sivam en qualité de cessionnaire du droit au bail ; que les pourparlers engagés par la SCI avec la société Sivam en vue de la conclusion d'un contrat de bail n'ont pas abouti ; que la SCI en a informé la société Smart Distribution par courrier du 22 janvier 2007, puis, par acte notifié le 23 mai 2007, l'a mise en demeure d'exploiter les locaux loués ; que la société Smart Distribution a assigné la SCI pour voir dire non justifié le refus de la cession du droit au bail et ordonner l'indemnisation de son préjudice ; que la SCI a demandé reconventionnellement que soit constatée la résiliation du bail par acquisition de la clause résolutoire

    Sur les deuxième et troisième branches du moyen unique : 

    Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt d'accueillir les demandes de la société Mercedes Benz France et de la condamner à payer la somme de 370 000 euros à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen : 

    1°/ que conformément à l'article L. 145-16 du code de commerce, si les clauses interdisant au preneur de céder son droit au bail sont nulles, les parties peuvent néanmoins prévoir que le bailleur, informé du projet de cession, devra donner son autorisation ; que le juge saisi du caractère abusif du refus du bailleur doit rechercher, au-delà de son refus in fine, écrit et non explicite, les circonstances ayant entouré ce refus et en conséquence, la légitimité des motifs de refus du bailleur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a énoncé qu'il importait peu que des pourparlers aient été engagés par le bailleur avec le preneur et le cessionnaire en vue de la rédaction d'un nouveau bail avec augmentation du loyer et que ceux-ci aient été rompus par le refus du cessionnaire d'assumer la charge du coût de rédaction de l'acte, s'en tenant au fait que la notification du refus d'autorisation du bailleur n'avait pas été motivée ; qu'en statuant ainsi, pour décider que le refus d'autorisation de la cession par le bailleur était abusif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la disposition susvisée ; 

    2°/ que le contrat de bail prévoyant que le preneur a la faculté de céder le droit au bail, à la condition d'obtenir l'accord du bailleur, et le preneur ayant eu connaissance de ce que celui-ci suspendait cet accord à l'augmentation du montant du loyer, ce qu'il avait accepté lors de sa propre entrée dans les lieux, le refus du bailleur de donner son autorisation est légitime, même dans le cas où il n'énonce pas les motifs de ce refus dans son courrier définitif de refus, s'il ressort des circonstances ayant entouré la demande d'autorisation puis le refus, in fine, du bailleur que ce refus a pour cause le refus du cessionnaire de payer le coût de rédaction de l'acte ; qu'en se déterminant en la seule considération du défaut de motif énoncé par le bailleur dans son courrier informant le preneur de son refus, la cour d'appel qui a décidé que ce refus était abusif en dépit de la clause d'agrément qui suspendait l'autorisation de cession à l'accord du bailleur, sans mention d'une obligation de motivation expresse du refus, a, en statuant ainsi, ajouté aux conditions contractuelles tout en refusant d'exercer son contrôle sur les conditions du défaut d'accord, ce qui s'imposait à elle et elle a, en conséquence, violé l'article 1134 du code civil ; 

    Mais attendu qu'ayant relevé que le contrat de bail n'interdisait pas au preneur la cession du droit au bail à un tiers autre que l'acquéreur de son fonds de commerce et que le refus opposé par la bailleresse à cette cession ne pouvait être discrétionnaire et devait revêtir un caractère légitime, la cour d'appel, qui a constaté que la bailleresse, notifiant son refus à la locataire par un courrier du 22 janvier 2007, n'alléguait aucun motif, a souverainement retenu que l'échec des pourparlers conduits avec la société Sivam en vue de la conclusion d'un contrat de bail, ne caractérisait pas un motif légitime du refus opposé à la cession de son droit au bail par la société Smart Distribution, et ordonné la réparation du préjudice subi de ce fait par cette dernière ; 

    D'où il suit que le moyen n'est pas fondé de ce chef ; 

    Mais sur la première branche du moyen unique : 

    Vu l'article 4 du code de procédure civile, ensemble l'article 562 du même code ; 

    Attendu que l'appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu'il critique implicitement ou explicitement et de ceux qui en dépendent ; que la dévolution s'opère pour le tout lorsque l'appel n'est pas limité à certains chefs, lorsqu'il tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible ; 

    Attendu que la cour d'appel a infirmé la décision des premiers juges en ce qu'ils avaient constaté la résiliation du bail par l'acquisition de la clause résolutoire ; 

    Qu'en statuant ainsi, alors que la société Mercedes Benz France avait, dans ses dernières conclusions, expressément renoncé à critiquer ce chef du jugement et que la SCI, intimée, en demandait la confirmation, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; 

    Et vu l'article 627 du code de procédure civile ; 

    PAR CES MOTIFS : 

    CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a infirmé la décision des premiers juges qui avait constaté la résiliation du bail par l'acquisition de la clause résolutoire, l'arrêt rendu le 3 février 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; 

    DIT n'y avoir lieu à renvoi ; 

    Dit que les dépens afférents aux instances devant les juges du fond seront supportés par la société 5 & 7 rue Louis Rouquier à Levallois-Perret ; 

    Condamne la société Mercedes Benz France aux dépens du présent arrêt ; 

    Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; 

    Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; 

    Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juin deux mille onze. 
    MOYEN ANNEXE au présent arrêt 

    Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour la société 5 & 7 rue Louis Rouquier à Levallois-Perret. 

    Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir décidé que le refus de la cession du droit au bail par la SCI 5/ 7 rue Louis Rouquier sans aucun motif ni fondement contractuel, illégitime et abusif, engage la responsabilité contractuelle de la SCI, d'avoir condamné la SCI à payer à la Sté MERCEDEZ BENZ FRANCE, venant aux droits de la Sté SMART DISTRIBUTION la somme de 370 000 €, augmentée des intérêts à compter de l'assignation, et d'avoir débouté la SCI 5/ 7 rue Louis Rouquier de sa demande visant à voir constater l'acquisition de la clause résolutoire et à prononcer la résiliation judiciaire du bail ; 

    AUX MOTIFS QUE, sur le caractère abusif du refus du bailleur, que l'article 22 du bail liant les parties est ainsi rédigé : « Le preneur ne pourra plus céder son droit au bail si ce n'est à l'acquéreur de son fonds de commerce, sans l'autorisation expresse et par écrit du bailleur, à peine de résiliation immédiate, si bon semble à ce dernier » ; que les alinéas 3 et 10 de ce même article définissent en ces termes les conditions d'une cession du droit au bail : « la cession ne sera possible que si le cédant est à jour de ses loyers et de toutes les obligations résultant du présent bail … ; au surplus, ladite cession devra, sous peine d'être inopposable au propriétaire et de résiliation immédiate du bail si bon semble à ce dernier, prévoir une clause aux termes de laquelle le cessionnaire se porte garant et répondant solidaire du cédant, pour le paiement de tout arriéré de loyer et accessoires dus au jour de l'acte de cession et ce, même au cas de redressement, de liquidation judiciaire du cédant …. ; le cessionnaire devra être présenté personnellement par le cédant au bailleur, 15 jours au moins avant de procéder à la cession … ; en outre, le bailleur aura en tout état de cause, en cas de cession des droits du présent bail, en cas de cession partielle ou totale du fonds de commerce comprenant les droits du présent bail un droit de préemption. Ainsi, préalablement à la conclusion de toute cession du présent bail, toute cession du fonds de commerce comprenant le droit au présent bail le preneur devra, à peine d'inopposabilité, adresser au bailleur une copie de l'acte de cession envisagée … cette notification du projet d'acte de cession pour offre de vente au profit du bailleur » ; qu'il importe peu que le bailleur argumente sur l'existence de pourparlers avec le cessionnaire en vue de la rédaction d'un nouveau bail, comprenant augmentation du prix de loyer, ni même qu'aucun accord n'ait finalement été conclu en raison du refus de la SAS SIVAM de prendre en charge le coût de la rédaction de l'acte dès lors que le bail liant les parties prévoyait clairement la possibilité d'une cession du droit au bail seul sous réserve de l'accord du bailleur ; que cette clause n'est pas contraire à l'ordre public, et que le refus du bailleur n'est pas discrétionnaire mais doit revêtir un caractère légitime ; que c'est ainsi avec raison que le premier juge a constaté la validité de la clause du bail, autorisant la cession du droit au bail à un tiers autre que l'acquéreur du fonds de commerce, étant ici observé que cette clause a été déjà utilisée lors de la cession du droit au bail par la Sté EDEN CAR à la SAS SMART DISTRIBUTION et ce, avec l'accord du bailleur ; que cependant, le courrier officiel adressé au nom du bailleur par son mandataire, le Cabinet X... et Associés, ne fait aucunement mention de motifs permettant d'apprécier le caractère légitime du refus mais se borne à opposer un refus de principe à la cession du droit au bail hors la cession du fonds de commerce ; qu'il convient dès lors de dire illégitime le refus opposé par la SCI sans aucun motif ni fondement contractuel ; que, sur le montant des dommages intérêts, la Sté MERCEDES France venant aux droits de la SAS SMART DISTRIBUTION expose qu'elle a subi un préjudice important du fait de la privation du prix prévu par la cession du droit au bail soit 370 000 €, et de l'obligation dans laquelle elle s'est trouvée de suspendre la restructuration de ses activités dans l'attente d'une réponse de son bailleur, puis d'une solution judiciaire du litige ; qu'elle sollicite l'octroi de dommages intérêts d'un montant global de 450 000 € ; que si la Sté MERCEDES BENZ ne verse aucun élément probant à l'appui du fait qu'elle aurait été contrainte de retarder sa restructuration, elle justifie en revanche pleinement de la perte du prix de cession de son droit au bail, en raison de l'attitude fautive du bailleur ; que la SCI bailleur sera condamnée à réparer ce préjudice par le paiement d'une somme de 370 000 € augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation initiale ; 

    1) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que l'appel ne défère à la cour que les chefs de jugement qu'il critique expressément ou implicitement ; que la société MERCEDES BENZ FRANCE, en l'espèce, avait renoncé, dans ses dernières conclusions, à solliciter l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il avait constaté l'acquisition de la clause résolutoire ; que la SCI 5/ 7 rue Louis Rouquier sollicitait quant à elle la confirmation du jugement entrepris, qui avait constaté l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail ; qu'en déboutant cependant la SCI 5/ 7 rue Louis Rouquier, par infirmation du jugement entrepris, de sa demande visant à voir constater l'acquisition de la clause résolutoire, la cour d'appel a violé les articles 4 et 562 du code de procédure civile ; 

    2) ALORS QUE conformément à l'article L. 145-16 du code de commerce, si les clauses interdisant au preneur de céder son droit au bail sont nulles, les parties peuvent néanmoins prévoir que le bailleur, informé du projet de cession, devra donner son autorisation ; que le juge saisi du caractère abusif du refus du bailleur doit rechercher, au-delà de son refus in fine, écrit et non explicite, les circonstances ayant entouré ce refus et en conséquence, la légitimité des motifs de refus du bailleur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a énoncé qu'il importait peu que des pourparlers aient été engagés par le bailleur avec le preneur et le cessionnaire en vue de la rédaction d'un nouveau bail avec augmentation du loyer et que ceux-ci aient été rompus par le refus du cessionnaire d'assumer la charge du coût de rédaction de l'acte, s'en tenant au fait que la notification du refus d'autorisation du bailleur n'avait pas été motivée ; qu'en statuant ainsi, pour décider que le refus d'autorisation de la cession par le bailleur était abusif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la disposition susvisée ; 

    3) ALORS QUE le contrat de bail prévoyant que le preneur a la faculté de céder le droit au bail, à la condition d'obtenir l'accord du bailleur, et le preneur ayant eu connaissance de ce que celui-ci suspendait cet accord à l'augmentation du montant du loyer, ce qu'il avait accepté lors de sa propre entrée dans les lieux, le refus du bailleur de donner son autorisation est légitime, même dans le cas où il n'énonce pas les motifs de ce refus dans son courrier définitif de refus, s'il ressort des circonstances ayant entouré la demande d'autorisation puis le refus, in fine, du bailleur que ce refus a pour cause le refus du cessionnaire de payer le coût de rédaction de l'acte ; qu'en se déterminant en la seule considération du défaut de motif énoncé par le bailleur dans son courrier informant le preneur de son refus, la cour d'appel qui a décidé que ce refus était abusif en dépit de la clause d'agrément qui suspendait l'autorisation de cession à l'accord du bailleur, sans mention d'une obligation de motivation expresse du refus, a, en statuant ainsi, ajouté aux conditions contractuelles tout en refusant d'exercer son contrôle sur les conditions du défaut d'accord, ce qui s'imposait à elle et elle a, en conséquence, violé l'article 1134 du code civil."

  • Connaissance acquise et permis de construire

    Un arrêt sur cette question de la connaissance acquise :


    "Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 mai et 25 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN (GAEC) LEFEBVRE ET FILS, dont le siège est Quartier Tamagnon, à Saint-Pierre-de-Mézoargues (13150) ; le groupement demande au Conseil d'Etat :

    1°) d'annuler l'arrêt n° 06MA0355 du 23 mars 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, sur l'appel de l'association pour la défense de l'environnement rural (Ader), a annulé le jugement n° 042871 du 19 octobre 2006 du tribunal administratif de Marseille et l'arrêté du 18 avril 2003 par lequel le maire de Tarascon a délivré un permis de construire au GAEC LEFEBVRE ET FILS ;

    2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de l'association Ader ;

    3°) de mettre à la charge de l'association Ader le versement de la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; 


    Vu les autres pièces du dossier ;

    Vu le code de l'urbanisme ;

    Vu le code de justice administrative ;

    Après avoir entendu en séance publique :

    - le rapport de M. Nicolas Polge, Maître des Requêtes, 

    - les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat du GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN LEFEBVRE ET FILS et de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de l'association Ader, 

    - les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;

    La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat du GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN LEFEBVRE ET FILS et à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de l'association Ader ; 



    Considérant que le juge d'appel auquel est déféré un jugement ayant rejeté au fond des conclusions sans que le juge de première instance ait eu besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées devant lui ne peut faire droit à ces conclusions qu'après avoir écarté expressément ces fins de non-recevoir, alors même que le défendeur, sans pour autant les abandonner, ne les aurait pas reprises en appel ;

    Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le GAEC LEFEBVRE ET FILS avait opposé à la demande de l'association Ader, devant le tribunal administratif de Marseille, deux fins de non-recevoir, tirées, d'une part, de la tardiveté de la requête et, d'autre part, de l'inaccomplissement des formalités prescrites par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ; que si la cour administrative d'appel de Marseille, pour faire droit, par l'arrêt attaqué, aux conclusions d'appel de l'association dirigées contre le jugement du 19 octobre 2006 ayant rejeté sa demande, a écarté la première, reprise en appel, elle n'a pas expressément statué sur la seconde, alors que le défendeur, qui ne l'avait pas reprise en appel, ne l'avait pas pour autant abandonnée ; que son arrêt doit, pour ce motif, être annulé, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

    Considérant qu'il y a lieu de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

    Sur la régularité du jugement : 

    Considérant, en premier lieu, que si l'association Ader soutient que l'absence de réouverture de l'instruction, close trois jours francs avant l'audience du 5 octobre 2006, ne lui a pas permis de répondre utilement au premier mémoire en défense du GAEC LEFEBVRE, enregistré le 29 septembre 2006, il ressort des pièces du dossier soumis au tribunal administratif de Marseille que la teneur de ce mémoire n'était pas substantiellement différente de celle du mémoire en défense de la commune de Tarascon, enregistré le 22 mai 2006 et alors communiqué à l'association requérante ; que l'association Ader n'est par suite pas fondée à soutenir qu'en l'absence de réouverture de l'instruction le tribunal administratif aurait statué au terme d'une procédure irrégulière ;

    Considérant, en deuxième lieu, que si le juge a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, de tenir compte d'un mémoire dont il est saisi postérieurement à la clôture de l'instruction, après avoir rouvert celle-ci et soumis ce mémoire au débat contradictoire, il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si ce mémoire contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction écrite et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office ; qu'il ne ressort pas du mémoire de l'association Ader enregistré le 4 octobre 2006 qu'eu égard à sa teneur, le tribunal administratif de Marseille aurait été tenu de rouvrir l'instruction ;

    Considérant, en troisième lieu, que si le juge saisi de plusieurs affaires présentant à juger la même question ou des questions connexes a la faculté de les joindre pour statuer par une seule décision, il n'en a jamais l'obligation et n'est pas tenu de motiver sa décision ;

    Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association Ader n'est pas fondée à soutenir que le jugement qu'elle attaque serait irrégulier ;

    Sur la recevabilité de la demande présentée devant le tribunal administratif de Marseille :

    Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 490-7 du code de l'urbanisme, alors en vigueur : Le délai de recours contentieux à l'encontre d'un permis de construire court à l'égard des tiers à compter de la plus tardive des deux dates suivantes : / a) Le premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées, selon le cas, au premier ou au deuxième alinéa de l'article R. 421-39 ; / b) Le premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage en mairie des pièces mentionnées au troisième alinéa de l'article R. 421-39 (...) ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-39 : Mention du permis de construire doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de la décision d'octroi et pendant toute la durée du chantier. ; que si le GAEC LEFEBVRE ET FILS produit, en ce qui concerne l'affichage ainsi prévu en mairie, une attestation de la directrice du service technique de la ville de Tarascon, il ne justifie pas de l'accomplissement de la formalité d'affichage sur le terrain ; que la circonstance que l'association Ader ait eu connaissance du permis de construire du 18 avril 2003 à l'occasion de l'instance qu'elle avait introduite en référé le 16 avril 2003 devant la juridiction judiciaire n'a pas fait courir le délai de recours contentieux à l'encontre de ce permis de construire ; que le GAEC LEFEBVRE ET FILS n'est par suite pas fondé à soutenir que la demande présentée le 15 avril 2004 en vue de l'annulation du permis de construire délivré le 18 avril 2003 était tardive ;

    Considérant, d'autre part, que l'association Ader produit les avis postaux de la réception, le 14 avril 2004, par le maire de Tarascon et par le GAEC LEFEBVRE ET FILS, de la notification de son recours, conformément à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

    Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les fins de non-recevoir opposées par le GAEC LEFEBVRE ET FILS doivent être écartées ;

    Sur la légalité du permis de construire : 

    Considérant que par l'arrêté attaqué, le maire de Tarascon a autorisé le GAEC LEFEBVRE ET FILS à construire, pour une surface hors oeuvre brute totale de 1 947 m2 et une surface hors oeuvre nette de 160 m2, un hangar agricole occupant une emprise au sol de 56 m sur 31 m et un logement, dans la zone NC définie par le plan d'occupation des sols, à proximité du massif boisé de la Montagnette ;

    Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué : A. Le dossier joint à la demande de permis de construire comporte : / (...) 5° Deux documents photographiques au moins permettant de situer le terrain respectivement dans le paysage proche et lointain et d'apprécier la place qu'il y occupe. Les points et les angles des prises de vue seront reportés sur le plan de situation et le plan de masse ; / 6° Un document graphique au moins permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction dans l'environnement, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et des abords (...) ; / 7° Une notice permettant d'apprécier l'impact visuel du projet. A cet effet, elle décrit le paysage et l'environnement existants et expose et justifie les dispositions prévues pour assurer l'insertion dans ce paysage de la construction, de ses accès et de ses abords (...) ; 

    Considérant que le dossier joint à la demande de permis de construire présentée par le GAEC LEFEBVRE ET FILS ne comportait de photographie permettant de situer le terrain qu'à partir d'un seul point de vue, dans le paysage proche mais non le paysage lointain, alors qu'il ressort des pièces du dossier qu'eu égard à son implantation et à son volume, le projet de construction était susceptible d'affecter la perception lointaine du massif de la Montagnette, à proximité duquel est situé le terrain d'assiette du projet ; que les autres pièces produites ne permettaient pas à l'autorité compétente d'apprécier l'ensemble des critères énumérés par les dispositions citées ci-dessus ; que le contenu du dossier était par suite insuffisant pour mettre le maire de Tarascon à même de statuer ;

    Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet de construction est situé à l'intérieur des limites du site de la Montagnette, inscrit par arrêté ministériel du 17 décembre 1970 sur la liste des monuments naturels et des sites dont la conservation ou la préservation présente, au point de vue artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque un intérêt général ; que cet ensemble de collines boisées forme le décor naturel de la commune de Tarascon vers le nord et l'est, notamment le long de la route départementale 35 allant de Tarascon à Boulbon ; que par l'implantation et les dimensions du hangar dont il prévoit la construction, occupant une emprise au sol de 56 m par 31 pour une hauteur maximale proche de 8 m, et l'incidence de cette construction sur la perception du paysage de la Montagnette depuis la route départementale 35, depuis laquelle il barre la perspective, ainsi que sur le caractère des abords de ce massif, le projet autorisé est de nature à porter atteinte au caractère et à l'intérêt de cette partie du site inscrit de la Montagnette ; qu'en autorisant la construction de ce hangar, le maire de Tarascon a ainsi commis une erreur manifeste d'appréciation ;

    Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article NC 0 du règlement du plan d'occupation des sols : La zone NC est une zone de richesses naturelles à protéger en raison notamment de la valeur agricole des terres (...) ; qu'aux termes de l'article NC 1 : (...) Ne sont admises que les occupations et utilisations du sol suivantes (...) : a) dans l'intérêt de l'exploitation agricole : (...) Les constructions à usage d'habitation nécessaires à l'exercice ou au maintien de l'exploitation et notamment le logement de l'exploitant et des employés (...) ; que le GAEC LEFEBVRE ET FILS et la commune de Tarascon se bornent à faire valoir la vocation du logement dont la construction est autorisée à accueillir des salariés de l'exploitation, sans apporter d'élément tendant à démontrer que ce logement serait nécessaire à l'exercice ou au maintien de l'exploitation, alors que l'association Ader le conteste ; que, par suite, le permis de construire accordé est également illégal en tant qu'il autorise la construction de ce logement ;

    Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, en l'état du dossier soumis au Conseil d'Etat, aucun autre moyen n'est susceptible d'entraîner l'annulation du permis de construire attaqué ;

    Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association Ader est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation du permis de construire délivré le 18 avril 2003 au GAEC LEFEBVRE ET FILS ;

    Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

    Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soient mise à la charge de l'association Ader, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, les sommes que demandent le GAEC LEFEBVRE ET FILS et la commune de Tarascon au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, sur le fondement des mêmes dispositions, au titre de l'ensemble de la procédure, de mettre à la charge du GAEC LEFEBVRE ET FILS le versement à l'association de la somme de 3 500 euros et à celle de la commune le versement à cette association de la somme de 1 500 euros ;



    D E C I D E :
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    Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 23 mars 2009, le jugement du tribunal administratif de Marseille du 19 octobre 2006 et l'arrêté du maire de Tarascon du 18 avril 2003 délivrant un permis de construire au GAEC LEFEBVRE ET FILS sont annulés.
    Article 2 : Le GAEC LEFEBVRE ET FILS et la commune de Tarascon verseront à l'association Ader la somme de 3 500 euros et celle de 1 500 euros, respectivement, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
    Article 3 : Les conclusions du GAEC LEFEBVRE ET FILS et de la commune de Tarascon tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
    Article 4 : La présente décision sera notifiée au GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN LEFEBVRE ET FILS, à l'association pour la défense de l'environnement rural et à la commune de Tarascon. "