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Le gérant de la SCI est responsable !

Cet arrêt évoque la question de la responsabilité du gérant d'une SCI qui invoquait le quitus donné par les associés, vainement. On notera que sa responsabilité était mise en cause pour avoir vendu à des prix différents des lots du programme immobilier sans que cette différence de prix soit justifiée.

 

"Faits et procédure

 

1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 30 janvier 2019), invoquant des fautes commises dans sa gestion, la société civile immobilière [Personne physico-morale 1] (la SCI) a assigné M. [M], son ancien gérant, en réparation de ses préjudices.

 

Examen des moyens

 

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses deuxième à quatrième branches, et sur le moyen unique du pourvoi incident, ci-après annexés

 

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

 

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

 

Enoncé du moyen

 

3. M. [M] fait grief à l'arrêt de le condamner à verser à la SCI la somme de 120 000 euros en réparation de son préjudice financier, alors « que ne constitue pas une faute l'acte du gérant dont l'assemblée lui a donné quitus en pleine connaissance de cet acte et des circonstances l'entourant ; qu'en retenant la responsabilité pour faute du gérant pour un acte ratifié par l'assemblée de la société, sans rechercher si l'assemblée, constituée des associés avec lesquels il avait été décidé de vendre les lots 22 et 23 et connaissant aussi bien la grille tarifaire que le prix de vente de ces lots, n'avait pas, en connaissance de l'acte et des circonstances l'entourant, valablement ratifié l'acte de son gérant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1843-5 et 1850 et 1998 du code civil dans leur rédaction applicable au litige. » Réponse de la Cour

 

4. La cour d'appel a rappelé qu'en application de l'article 1843-5, alinéa 3, du code civil, aucune décision de l'assemblée des associés ne peut avoir pour effet d'éteindre une action en responsabilité contre les gérants pour la faute commise dans l'accomplissement de leur mandat.

 

5. Elle en a exactement déduit, sans être tenue de procéder à une recherche inopérante relative à l'information des associés, que le quitus donné par l'assemblée des associés ne pouvait avoir d'effet libératoire au profit de M. [M] pour les fautes commises dans sa gestion.

 

6. Elle a ainsi légalement justifié sa décision.

 

PAR CES MOTIFS, la Cour :

 

REJETTE les pourvois ;

 

Laisse à chaque demandeur la charge des dépens afférents à son pourvoi ;

 

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

 

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

 

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. [M].

 

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Monsieur [M] à verser à la société [Personne physico-morale 1] la somme de 120.000 euros en réparation de son préjudice financier ;

 

AUX MOTIFS QUE, en application des dispositions de l'article 1843-5 du code civil, outre l'action en réparation du préjudice subi personnellement, un ou plusieurs associés peuvent intenter l'action sociale en responsabilité contre les gérants ; les demandeurs sont habilités à poursuivre la réparation du préjudice subi par la société ; en cas de condamnation, les dommages-intérêts sont alloués à la société... aucune décision de l'assemblée des associés ne peut avoir pour effet d'éteindre une action en responsabilité contre les gérants pour la faute commise dans l'accomplissement de leur mandat.

 

Autrement dit, le premier juge ne pouvait retenir le caractère libératoire du quitus puisque l'action ut singuli, peut être initiée par les nouveaux dirigeants à l'encontre des anciens qui demeurent responsables des fautes commises durant l'exercice de leurs fonctions même s'ils ont cédé la totalité de leur participation et même s'ils ont reçu quitus. L'article L223-22 du code de commerce applicable à la S.A.R.L. dispose que les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion.

 

L'action suppose la démonstration d'un fait générateur, d'un préjudice et d'un lien de causalité.

 

Au terme des statuts le gérant ne peut, sans y avoir été préalablement autorisé par une décision collective ordinaire des associés, notamment acquérir ou vendre des biens et droits immobiliers. En l'espèce, par acte reçu le 18 avril 2011, la S.A.R.L., représentée par M. [N] [M] gérant, a vendu les lots 22 et 23 constitués de deux villas de type T3 sur deux niveaux moyennant paiement de 190 000 euros payables par fractions suivant l'état d'avancement de la construction. Par acte reçu le 15 décembre 2011, la S.A.R.L. représentée dans les mêmes conditions a cédé les lots 6 et 7, constitués de deux villas de type T3 moyennant paiement de 310 000 euros payables par fractions suivant l'état d'avancement de la construction.

 

Peu importe l'état d'avancement de la_ construction, considérant qu'il s'agit de ventes en état futur d'achèvement. La grille tarifaire n'a pas été jointe à l'acte de vente mais elle est opposable au gérant s'agissant d'une opération de promotion immobilière. Ces deux actes mettent en évidence une différence de 120 000 euros pour deux lots exactement similaires s'agissant de la nature de la construction, de sa surface et même de la jouissance exclusive du jardin. Cette différence ne se justifie pas.

 

Ces éléments caractérisent un préjudice financier subi par la S.C.I. consécutif à la décision de M. [M] ès-qualités de gérant de la S.C.I. de vendre ce lot à un prix inférieur à celui convenu dans le cadre de l'opération de promotion ;

 

1°) ALORS QUE ne constitue pas une faute l'acte du gérant dont l'assemblée lui a donné quitus en pleine connaissance de cet acte et des circonstances l'entourant ; qu'en retenant la responsabilité pour faute du gérant pour un acte ratifié par l'assemblée de la société, sans rechercher si l'assemblée, constituée des associés avec lesquels il avait été décidé de vendre les lots 22 et 23 et connaissant aussi bien la grille tarifaire que le prix de vente de ces lots, n'avait pas, en connaissance de l'acte et des circonstances l'entourant, valablement ratifié l'acte de son gérant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1843-5 et 1850 et 1998 du Code civil dans leur rédaction applicable au litige ;

 

2°) ALORS QUE Monsieur [M] faisait valoir que les lots 22 et 23 ont été vendus en avril 2011, soit à une date à laquelle la grille tarifaire n'était plus valable, à un prix permettant de générer de la trésorerie à une période où la société n'avait ni réalisé de vente, ni terminé la construction des lots ; qu'en retenant une faute de Monsieur [M], sans rechercher si la vente des lots 22 et 23 ne poursuivait pas un objectif conforme à l'intérêt de la société, à savoir permettre la continuation de la société, exclusif de faute, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1843-5 et 1850 au litige du Code civil ;

 

3°) ALORS QUE Monsieur [M] faisait valoir que les grilles tarifaires étaient valables jusqu'au 31 août 2010 et que les lots 22 et 23 ont été vendus en avril 2011, soit à une date à laquelle la grille tarifaire n'était plus valable ( pièce n°5 adverse ; conclusions p.4) ; qu'en affirmant, pour retenir une faute du gérant, que la grille tarifaire était opposable par les associés de la société s'agissant d'une opération de promotion immobilière, quand la durée de validité de cette grille était expirée à la date de la vente et que le gérant n'avait donc plus à s'y conformer, la cour d'appel a violé les articles 1843-5 et 1850 au litige du Code civil ;

 

4°) ALORS QUE, la responsabilité du gérant implique qu'un de ses actes déclaré fautif ait causé un préjudice à la société ; qu'en retenant l'existence d'un préjudice de la société [Personne physico-morale 1] résultant de la différence de prix de vente des lots 22 et 23 par rapport à celui des lots 6 et 7, sans rechercher si la vente des lots 22 et 23 ne visait pas à procurer à la société de la trésorerie pour poursuivre son projet immobilier, à une période où aucun lot n'avait encore été vendu, ce qui excluait l'existence d'un préjudice de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1843-5 et 1850 au litige du Code civil. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour la société [Personne physico-morale 1].

 

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la Sci [Personne physico-morale 1] de ses demandes contre M. [N] [M] ;

 

AUX MOTIFS QUE « la S.CI, invoque, en se fondant sur une expertise, l'achat de matériaux non utilisés par l'opération de construction, une surconsommation de carrelages, de faïences, de plinthes, d'enduits, de peintures, l'achat de deux meubles de salle de bain, de deux miroirs et des frais réglés pour le compte de M. [E] (6 762 euros) le tout à hauteur de 205 380,17 euros. Or, sans qu'il y ait lieu de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, l'expertise qui réalise des métrés contient ses propres limites puisqu'elle indique qu'elle ne porte pas sur l'ensemble des lots, qu'elle tient seulement compte de la hauteur finie pour les placo-plâtres (laissant donc les découpes), que les surfaces enduits se limitent aux parties situées à l'extérieur de chaque lot sur jardin (laissant donc les avancées sur seuils), que les surfaces des marches extérieures des escaliers n'ont pas été prises en compte, ni les garages ainsi qu'une terrasse. De plus, les pertes et réfections, pas plus que les demandes particulières des acquéreurs n'ont pas été prises en considération. Enfin, le décompte général définitif n'a pas été remis à l'expert, de sorte qu'il ne disposait pas de toutes les informations. En tout état de cause, en absence du décompte général définitif, il n'est pas établi que la S.C.1. a subi un préjudice financier et payé des matériaux à tort ou que les matériaux ont été détournés au seul bénéfice de M. [M], alors que la S.C.I. est un maître d'ouvrage qui bénéficiait de l'assistance d'un maître d'oeuvre pour viser les factures de matériaux. Enfin, les frais d'actes relatifs à la dation en paiement au profit de M. [E] sont, sauf convention contraire, doit l'existence n'est ni alléguée ni démontrée, à la charge du bénéficiaire de la donation » ;

 

1°) ALORS QUE le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont soumises ; qu'en l'espèce, pour établir les surconsommations de matériaux en rapport avec les besoins réels du programme immobilier imputables à M. [M], la Sci [Personne physico-morale 1] produisait une expertise privée et sollicitait subsidiairement, une expertise judiciaire ; que la cour d'appel a affirmé, pour débouter la Sci [Personne physico-morale 1] de ses demandes à l'encontre de M. [M], que « l'expertise qui réalise des métrés contient ses propres limites puisqu'elle indique qu'elle ne porte pas sur l'ensemble des lots qu'elle tient seulement compte de la hauteur finie pour les placo-plâtres », que « les surfaces enduites se limitent aux parties situées à l'extérieur de chaque lot sur jardin (?), que les surfaces des marches extérieures des escaliers n'ont pas été prises en compte, ni les garages ainsi qu'une terrasse », que « les pertes et réfections, pas plus que les demandes particulières les demandes particulières des acquéreurs n'ont pas été prises en considération » et enfin que « le décompte général définitif n'a pas été remis à l'expert, de sorte qu'il ne disposait pas de toutes les informations » ; qu'en refusant ainsi de statuer sur les demandes de la Sci [Personne physico-morale 1] au seul vu des insuffisances du rapport produit, la cour d'appel a commis un déni de justice en violation de l'article 4 du code civil ;

 

2°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en déboutant la Sci [Personne physico-morale 1], motif pris de l'insuffisance du rapport d'expertise produit par la Sci [Personne physico-morale 1], sans analyser même sommairement les factures et le tableau produits par la Sci [Personne physico-morale 1], qui établissaient les surconsommations et les écarts de prix reprochés à M. [M], la cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du code de procédure civile ;

 

3°) ALORS QUE les juges ne peuvent méconnaître les termes du litige ; qu'il résulte en l'espèce des écritures de M. [M] que celui-ci faisait uniquement valoir, relativement au rapport d'expertise privée, que ce dernier avait seulement pris en compte les métrés réels ; qu'en retenant, pour considérer que ce rapport était insuffisant, que le décompte général définitif n'avait pas été remis à l'expert pour en déduire que ce dernier ne disposait pas de toutes les informations, quand ce moyen n'était pas invoqué par M. [M], la cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation de l'articles 4 du code de procédure civile ;

 

4°) ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances observer lui-même le principe du contradictoire et ne peut soulever d'office un moyen sans inviter au préalable les parties à en débattre contradictoirement ; qu'il résulte en l'espèce des écritures de la M. [M] que ce dernier faisait uniquement valoir que le rapport d'expertise privée avait seulement pris en compte les métrés réels ; qu'en décidant, pour considérer que ce rapport était insuffisant, que le décompte général définitif n'avait pas été remis à l'expert pour en déduire qu'il ne disposait pas de toutes les informations, sans avoir préalablement ordonné la réouverture les débats et invité les parties à s'expliquer sur cette affirmation, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

 

5°) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, en affirmant « qu'en l'absence du décompte général définitif, il n'est pas établi que la S.C.I. a subi un préjudice financier et payé des matériaux à tort ou que les matériaux ont été détournés au seul bénéfice de M. [M] » quand ce moyen n'était pas invoqué par M. [M] dans ses écritures, la cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

 

6°) ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances observer lui-même le principe du contradictoire et ne peut soulever d'office un moyen sans inviter au préalable les parties à en débattre contradictoirement; qu'en l'espèce, en affirmant « qu'en l'absence du décompte général définitif, il n'est pas établi que la S.C.I. a subi un préjudice financier et payé des matériaux à tort ou que les matériaux ont été détournés au seul bénéfice de M. [M] », sans avoir préalablement ordonné la réouverture les débats et invité les parties à s'expliquer sur cette affirmation, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

 

7°) ALORS QU'en déboutant la SCI [Personne physico-morale 1] de ses demandes, après avoir considéré dans ses motifs qu'elle devait faire droit à sa demande tendant à la condamnation de M. [M] à lui payer la somme de 120.000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice financier résultant des conditions de vente des lots litigieux, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre les motifs et le dispositif, et a violé l'article 455 du code de procédure civile."

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