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Non-respect des DTU et absence de désordres : quelle responsabilité du constructeur ?

La responsabilité du constructeur est-elle engagée si l'ouvrage n’est pas conforme à un DTU mais qu’il n'y a pas de désordre ?

La Cour de Cassation répond à cette question.

Le NF DTU 51.4 - Platelages bois paru en décembre 2018

 

"I. La Société Bureau Veritas construction, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 20-15.277 contre un arrêt rendu le 5 février 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 5), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Logiforce, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à la société Kaufman & Broad développement, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],

3°/ à la société Envelia, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4],

4°/ à la société Gad Property management, dont le siège est [Adresse 5],

5°/ à la société Baudin Châteauneuf, société anonyme, dont le siège est [Adresse 6],

6°/ à la société GSE, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 7],

7°/ à la société Allianz IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 8],

8°/ à la société Advenis Property Management, dont le siège est [Adresse 9],

9°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 10],

10°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 10],

11°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 10], pris en qualité d'assureur CNR de la société Kaufman & Broad développement aux droits de la SCI Vaux-le-Penil logistique RD82,

défenderesses à la cassation.

II. La Société Baudin Châteauneuf, société anonyme, a formé le pourvoi n° X 20-15.349 contre le même arrêt rendu, dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Logiforge, société en nom collectif,

2°/ à la société Kaufman & Broad développement, société par actions simplifiée,

3°/ à la société Envelia, société par actions simplifiée,

4°/ à la société GSE, société par actions simplifiée,

5°/ à la société Allianz IARD,

6°/ à la société Advenis Property management,

7°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, assureur dommages ouvrage, 8°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, assureur police unique de chantier,

9°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, assureur CNR de la société Kaufman & Broad développement,

10°/ à la société Bureau Veritas construction, société par actions simplifiée

11°/ à la société Conseiller résidentiel, dont le siège est [Adresse 11], venant aux droits de la société Gad Property Management,

défenderesses à la cassation.

III. La Société GSE, société par actions simplifiée, a formé le pourvoi n° C 20-17.033 contre le même arrêt rendu, dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Bureau Véritas construction, société par actions simplifiée,

2°/ à la société Logiforce, société en nom collectif,

3°/ à la société Kaufman & Broad développement, société par actions simplifiée,

4°/ à la société Envelia, société par actions simplifiée,

5°/ à la société Gad Property Management, société par actions simplifiée,

6°/ à la société Baudin Châteauneuf, société anonyme à directoire,

7°/ à la société Allianz IARD, société anonyme,

8°/ à la société Advenis Property Management, société par actions simplifiée,

9°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, assureur dommages ouvrage,

10°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, assureur police unique de chantier,

11°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, assureur CNR de la société Kaufman & Broad développement,

12°/ à la société Conseiller résidentiel, société par actions simplifiée, venant aux droits de la société Gad Property Management,

défenderesses à la cassation.

La demanderesse au pourvoi n° U 20-15.277 invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi n° X 20-15.349 invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi n° C 20-17.033 invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation également annexés au présent arrêt ;

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Pameix, avocat de la société Baudin Châteauneuf, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Bureau Veritas construction, de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la société GSE, de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Axa France IARD, de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de la société Logiforge, et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 11 mai 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mmes Farrenq-Nési, Greff-Bohnert, MM. Jacques, Boyer, conseillers, Mmes Georget, Renard, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° U 20-15.277, X 20-15.349 et C 20-17.033 sont joints.

Désistement partiel

2. Il est donné acte à la société Bureau Veritas construction du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les sociétés Kaufman & Broad développement (la société K&B), Envelia, Gad Property Management, Allianz IARD, Advenis Property Management et Axa France IARD (la société Axa).

3. Il est donné acte à la société Baudin Châteauneuf du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les sociétés K&B, Envelia, Allianz IARD, Advenis Property Management et le Conseiller résidentiel venant aux droits de Gad Property Management.

4. Il est donné acte à la société GSE du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les sociétés K&B, Envelia, Allianz IARD, Advenis Property Management, Axa, Gad Property Management et le Conseiller résidentiel venant aux droits de Gad Property Management.

Faits et procédure

5. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 février 2020), la société civile immobilière Vaux-le-Pénil-logistique RD 82, aux droits de laquelle vient la société K&B, a entrepris la construction d'une plate-forme logistique composée d'entrepôts et de bureaux.

6. Les travaux ont été confiés à la société GSE, qui a sous-traité le lot charpente métallique à la société Baudin Châteauneuf.

7. La société Bureau Veritas, aux droits de laquelle vient la société Bureau Veritas construction, a reçu une mission de contrôle technique.

8. Une police unique de chantier couvrant les dommages à l'ouvrage et la responsabilité des constructeurs en cas de dommages de nature décennale a été souscrite auprès de la société Axa.

9. Après la réception de l'ouvrage, à la suite d'un orage, une partie de la toiture d'un des entrepôts s'est affaissée.

10. La société Logiforce, nouvelle propriétaire de l'immeuble, a demandé l'indemnisation de ses préjudices résultant, notamment, de la non-conformité des toitures.

Recevabilité des mémoires en réponse de la société Baudin Châteauneuf

11. Le délai de deux mois dont dispose le défendeur au pourvoi à compter de la signification du mémoire du demandeur pour remettre un mémoire en réponse au greffe de la Cour de cassation est prescrit à peine d'irrecevabilité prononcée d'office du mémoire en réponse déposé tardivement.

12. Les mémoires en réponse de la société Baudin Châteauneuf au titre des pourvois n° U 20-15.277, X 20-15.349 et C 20-17.033 ont été déposés plus de deux mois après la signification, à cette société, des mémoires en demande.

13. Ces mémoires en réponse ne sont donc pas recevables.

Examen des moyens

Sur le second moyen du pourvoi X 20-15.349, ci-après annexé

14. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen du pourvoi n° X 20-15.349 et sur le premier moyen du pourvoi n° C 20-17.033, pris en leur première branche, réunis

15. Par son premier moyen, la société Baudin Châteauneuf fait grief à l'arrêt de la condamner, in solidum avec la société GSE et la société Bureau Veritas construction, sur le fondement de leur responsabilité civile de droit commun, à payer à la société Logiforce diverses sommes et de fixer le partage de responsabilité dans certaines proportions, alors « que le non-respect d'une norme de construction, tel qu'un document technique unifié (DTU), lequel se distingue des règles de l'art, ne peut engager la responsabilité du constructeur qu'à la condition d'avoir été intégré dans le champ contractuel ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu la responsabilité de la société Baudin Châteauneuf, sous-traitant de la société GSE, en énonçant qu'elle était tenue de « livrer un ouvrage conforme aux prescriptions contractuelles et aux règles de l'art et DTU applicables en la matière » car « l'ensemble des DTU font partie intégrante de la catégorie plus large des règles de l'art, ensemble des règles et techniques professionnelles validées par l'expérience et admises par les professionnels, opposables à ces derniers » ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que les DTU sont distincts des règles de l'art, et après avoir constaté que le DTU 43.3, sur la méconnaissance duquel elle a fondé le manquement retenu contre la société Baudin Châteauneuf, n'était pas mentionné dans le marché et n'avait donc pas été contractualisé, ce qui excluait toute responsabilité délictuelle de la société Baudin Châteauneuf, en tant que sous-traitant, pour non-conformité de sa prestation à cette norme technique la cour d'appel a violé les articles 1134, devenu 1103 et 1382, devenu 1240, du code civil. »

16. Par son premier moyen, la société GSE fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Logiforce portant sur la non-conformité de la toiture de l'entrepôt et, statuant à nouveau sur ce point, de condamner la société GSE, in solidum avec la société Bureau Veritas construction et la société Baudin Châteauneuf, sur le fondement de leur responsabilité de droit commun, à payer à la société Logiforce certaines sommes, de fixer le partage de responsabilité et les garanties selon certaines proportions, alors « qu'en l'absence de désordre constaté, ne saurait être engagée la responsabilité de l'entrepreneur au motif que l'ouvrage ne serait pas conforme à un DTU auquel le marché n'est pas contractuellement soumis ; qu'en accueillant la demande de la société Logiforce au titre de la « remise aux normes », en l'absence de tout désordre, pour cela que la « responsabilité » de la société GSE peut être retenue dès lors que la charpente de l'entrepôt livré s'est révélée non conforme à un DTU que le contrat ne visait pas, que la société GSE a conçu un projet non conforme à cette règle de l'art et n'a pas relevé cette non-conformité, et que le dommage serait caractérisé par le fait que la société Logiforce avait entrepris à ses frais des travaux de remise aux normes, la cour a violé les articles 1134 (devenu 1103) et 1147 (devenu 1231-1) du code civil dans leur rédaction applicable en la cause. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

17. La société Logiforce conteste la recevabilité du premier moyen de la société GSE, pris en sa première branche. Elle soutient que le moyen est nouveau et mélangé de fait.

18. Cependant, la société GSE soutenait, devant la cour d'appel, que la société Logiforce était défaillante dans la preuve d'une faute et d'un dommage en lien avec la faute alléguée.

19. Le moyen, qui n'est pas nouveau, est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles 1134, alinéa 1er, 1147, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 1382, devenu 1240, du code civil :

20. Selon le premier de ces textes, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

21. Selon le deuxième, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

22. Selon le dernier, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

23. Il résulte de la combinaison de ces textes qu'en l'absence de désordre, le non-respect des normes qui ne sont rendues obligatoires ni par la loi ni par le contrat ne peut donner lieu à une mise en conformité à la charge du constructeur.

24. Pour condamner l'entrepreneur et son sous-traitant à indemniser le propriétaire de l'ouvrage du coût de la mise en conformité des toitures avec les prescriptions du document technique unifié (DTU) 43.3, l'arrêt énonce que, quand bien même le marché ne fait pas référence à ce document, celui-ci et l'ensemble des DTU font partie intégrante de la catégorie plus large des règles de l'art, ensemble des règles et techniques professionnelles validées par l'expérience et admises par les professionnels, opposables à ceux-ci, et que la responsabilité des constructeurs et du contrôleur peut donc être retenue puisque la charpente de l'entrepôt livré s'est révélée non-conforme à un DTU.

25. En statuant ainsi, après avoir relevé que le DTU 43.3 n'était pas mentionné dans le marché et n'avait pas été contractualisé et que la non-conformité n'avait été à l'origine d'aucun désordre, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Et sur le premier moyen du pourvoi n° U 20-15.277, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

26. La société Bureau Veritas construction fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes portant sur la non-conformité de la toiture de l'entrepôt et, statuant à nouveau sur ce point, de la condamner in solidum avec la société GSE et la société Baudin Châteauneuf sur le fondement de leur responsabilité de droit commun à payer diverses sommes à la société Logiforce et de fixer le partage de responsabilité et les garanties selon certaines proportions, alors « que l'étendue des obligations incombant au contrôleur technique est délimitée par la mission qui lui a été confiée par son client ; qu'en retenant, pour condamner la société Bureau Veritas construction à indemniser la société Logiforce du montant des travaux nécessaires à la mise en conformité de la toiture de l'entrepôt, que le contrôleur technique n'avait pas su déceler la non-conformité de la toiture au DTU 43.3, quand elle avait constaté que la mission du contrôleur technique portait sur la solidité de l'ouvrage et que la non-conformité invoquée ne portait pas atteinte à la solidité de l'ouvrage, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1147, devenu 1231-1 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

27. Aux termes de ce texte, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages-intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

28. Pour condamner le contrôleur technique à indemniser le propriétaire de l'ouvrage du coût de sa mise en conformité avec les prescriptions du DTU 43.3, l'arrêt constate, d'abord, que la mission de la société Bureau Veritas portait sur la solidité des ouvrages et sur la sécurité des personnes.

29. Il énonce, ensuite, que le contrôleur, chargé de contribuer à la prévention des différents aléas techniques susceptibles d'être rencontrés dans la réalisation des ouvrages, dont la charpente, n'avait pas su déceler la non-conformité.

30. En statuant ainsi, alors qu'elle avait retenu que la non-conformité des toitures au DTU 43.3 n'affectait ni la solidité de l'ouvrage ni sa destination, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Demande de mise hors de cause

31. Il n'y a pas lieu de mettre hors de cause la société Axa, dont la présence est nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne in solidum les sociétés GSE, Bureau Veritas construction et Baudin Châteauneuf, sur le fondement de leur responsabilité civile de droit commun, à payer à la société Logiforce les sommes, avec intérêts au taux légal, de 867 132 euros HT au titre des travaux de reprise et frais annexes et 30 877,50 euros HT au titre des prestations de géomètre et de calculs techniques, en ce qu'il fixe le partage de responsabilité ainsi : pour la société GSE : 20 %, pour la société Baudin Châteauneuf : 70 %, pour la société Bureau Veritas construction : 10 % et en ce qu'il dit que dans leurs recours entre eux, ces parties seront garanties des condamnations prononcées à leur encontre à proportion du partage de responsabilité ainsi fixé, l'arrêt rendu le 5 février 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la société Axa France IARD ;

Condamne la société Logiforce aux dépens des pourvois ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix juin deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits au pourvoi n° U 20-15.277 par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocats aux Conseils, pour la société Bureau Veritas
construction

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement en ce qu'il avait débouté la société Logiforce de ses demandes portant sur la non-conformité de la toiture de l'entrepôt et, statuant à nouveau sur ce point, d'AVOIR condamné la société Bureau Veritas Construction in solidum avec les sociétés GSE et Baudin Châteauneuf sur le fondement de leur responsabilité de droit commun à payer à la société Logiforce les sommes, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, de 867 132 euros HT au titre des travaux de reprise et frais annexes et de 30 877,50 euros HT au titre des prestations de géomètre et de calculs techniques, d'AVOIR fixé le partage de responsabilité selon les proportions suivantes : 20 % pour la société GSE, 70 % pour la société Baudin Châteauneuf, 10 % pour la société Bureau Veritas Construction et d'AVOIR dit que dans leurs recours entre eux, ces parties seraient garanties des condamnations prononcées à leur encontre à proportion du partage de responsabilité ainsi fixé ;

AUX MOTIFS QUE le contrôleur technique a pour mission, au terme de l'article L111-23 du code de la construction et de l'habitation, de contribuer à la prévention des différents aléas techniques susceptibles d'être rencontrés dans la réalisation des ouvrages ; que l'expert judiciaire, estimant que la société BUREAU VERITAS avait en charge le contrôle technique de la charpente, a retenu sa responsabilité ; que la société BUREAU VERITAS a en effet annoncé dans un courrier adressé à la société KAUFMAN & BROAD le 16 janvier 2002 qu'elle n'émettrait aucune observation particulière dans son rapport final de contrôle technique au titre de la mission LP ; que n'ayant ainsi pas su déceler, sur les documents qui lui ont été confiés, la non-conformité de la charpente, de sa pente et de sa charge, le contrôleur technique voit sa responsabilité engagée ; que l'article L. 111-24 alinéa 2 du code de la construction et de l'habitation énonce que le contrôleur technique n'est tenu vis-à-vis des constructeurs à supporter la réparation de dommages qu'à concurrence de la part de responsabilité susceptible d'être mise à sa charge dans les limites des missions définies par le contrat le liant au maître d'ouvrage ; que ce partage de responsabilité n'est ainsi opposable qu'aux constructeurs et non au maître d'ouvrage ou au propriétaire victime du dommage ; que les trois entreprises, les sociétés GSE, BAUDIN CHATEAUNEUF et BUREAU VERITAS, qui ont ensemble contribué à l'apparition d'un même dommage subi par la société LOGIFORCE doivent, en l'absence de solidarité expresse entre elles, légale ou conventionnelle, être condamnées in solidum à réparation ;

ET QUE l'entrepôt livré à la société GIANFAR, premier acquéreur aux droits de laquelle vient désormais la société LOGIFORCE aujourd'hui propriétaire, n'a certes subi aucun dommage spécifique, distinct de l'affaissement d'une partie de sa toiture du fait d'une cause étrangère ; que la société LOGIFORCE se trouve cependant propriétaire d'un entrepôt construit de manière non conforme aux règles de l'art et subit de ce seul fait un préjudice indemnisable, ayant dû entreprendre des travaux de remise aux normes, préjudice en lien direct avec les manquements des sociétés GSE, BAUDIN CHATEAUNEUF et BUREAU VERITAS ; que l'absence de ruine ou de menace d'effondrement du bâtiment est inopérante en l'espèce ; que la société GIANFAR, aujourd'hui LOGIFORCE, a acquis et réglé un entrepôt et pouvait légitimement s'attendre à recevoir la livraison d'un bâtiment construit en conformité avec les règles de l'art applicable en la matière ; que le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a retenu la responsabilité des sociétés KAUFMAN & BROAD, GSE, BAUDIN CHATEAUNEUF et BUREAU VERITAS, mais n'a pas retenu l'existence d'un préjudice en lien de causalité certain et direct avec leurs manquements et fautes et a débouté la société LOGIFORCE de sa demande d'indemnisation ; que statuant à nouveau, la Cour condamnera in solidum les sociétés GSE, BAUDIN CHATEAUNEUF et BUREAU VERITAS à indemniser la société LOGIFORCE : que l'expert judiciaire a évalué le coût de la reprise de l'ensemble des pannes de lacet sur les bâtiments 1 et 3, non-conformes, à la somme totale de 799.200 euros HT, incluant les études de structure, au vu d'un devis de la société BAUDIN CHATEAUNEUF du mois de juillet 2010, somme qu'il convient d'augmenter de 8,5% pour tenir compte des frais complémentaires annexes (4% de maîtrise d'oeuvre, 2,5% de contrôleur technique et 2% pour l'assurance DO) ; que la société LOGIFORCE indique avoir effectivement déboursé la somme totale de 859.661 euros HT, outre des frais d'assurance de 18.000 euros, mais n'établit cependant pas que les dépenses ainsi effectivement engagées, au-delà de l'évaluation proposée par l'expert, correspondent aux seuls travaux nécessaires préconisés par celui-ci pour la reprise de la non-conformité de la toiture et de sa charpente ; qu'elle sera donc déboutée de sa demande d'indemnisation à hauteur de la somme totale sollicitée ; que la responsabilité de la société KAUFMAN & BROAD DEVELOPPEMENT étant écartée, la Cour, statuant à nouveau, condamnera in solidum les seules sociétés GSE, BAUDIN CHATEAUNEUF et BUREAU VERITAS à payer à la société LOGIFORCE la somme de 799.200 euros HT au titre des travaux de reprise de l'affaissement de la toiture de l'entrepôt, augmentée de 8,5% au titre des frais annexes, soit la somme totale de 867.132 euros HT ; que les trois sociétés seront en outre également condamnées in solidum à payer les sommes de 90 + 8.160 + 2.000 = 10.250 euros HT en remboursement des frais du cabinet TARTACEDE-BOLLAERT, géomètres-experts (notes d'honoraires des 28 septembre 2006 et 26 mars 2007 et facture du 9 février 2012), et de 9.700 + 5.770 + 5.157,50 = 20.627,50 euros HT en remboursement des frais de la SAS ETA, société d'ingénierie (notes d'honoraires des 23 décembre 2011, 31 mai et 25 juillet 2012), dont "les investigations" et "les études pertinentes" ont, selon l'expert, été "les unes et les autres utiles aux opérations d'expertise" (soit la somme totale de 30.877,50 euros HT à ce titre) ; que ces condamnations ayant un caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, conformément aux dispositions de l'article 1153-1 du code civil en sa version antérieure au 1er octobre 2016 ;

ET QUE si les sociétés GSE, BAUDIN CHATEAUNEUF et BUREAU VERITAS sont tenues in solidum à réparation vis-à-vis de la société LOGIFORCE, au titre de leur obligation à la dette, elles ne sont tenues in fine, dans le cadre de leur contribution définitive à la dette, qu'à proportion de leurs responsabilités respectives à l'origine des désordres constatés ; qu'elles disposent donc de recours entre elles, examinés sur le fondement de leur responsabilité civile délictuelle de droit commun, posée par l'article 1382 du code civil ; qu'au regard des fautes imputables à chacun des intervenants et à leur sphère d'intervention respective, il convient d'opérer le partage des responsabilités de la manière suivante : - pour la société GSE, contractante générale, qui en sa qualité de maître d'oeuvre n'a pas présenté un projet conçu en conformité avec les règles de l'art et, au stade de la direction des travaux, n'a pas repéré cette non-conformité : 20%, - pour la société BAUDIN CHATEAUNEUF, spécialiste confirmé en matière de construction, qui n'a pas décelé la non-conformité du projet et n'a pas respecté les règles de l'art applicables en la matière : 70%, - pour la société BUREAU VERITAS, qui n'a pas décelé la non-conformité sur les documents qui lui ont été présentés : 10% ; que dans leurs recours entre eux, les intervenants responsables seront garantis des condamnations prononcées à leur encontre à proportion du partage de responsabilité ainsi fixé ;

1°) ALORS QUE l'étendue des obligations incombant au contrôleur technique est délimitée par la mission qui lui a été confiée par son client ; qu'en retenant, pour condamner la société Bureau Veritas Construction à indemniser la société Logiforce du montant des travaux nécessaires à la mise en conformité de la toiture de l'entrepôt, que le contrôleur technique n'avait pas su déceler la non-conformité de la toiture au DTU 43.3, quand elle avait constaté que la mission du contrôleur technique portait sur la solidité de l'ouvrage et que la nonconformité invoquée ne portait pas atteinte à la solidité de l'ouvrage, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1147, devenu 1231-1 du code civil ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse, la responsabilité du contrôleur technique est subordonnée à la démonstration d'un préjudice en lien causal avec le manquement qui lui est imputé ; qu'en retenant, pour condamner la société Bureau Veritas Construction à indemniser la société Logiforce du montant des travaux nécessaires à la mise en conformité de la toiture de l'entrepôt, que le contrôleur technique n'avait pas su déceler la non-conformité de la toiture au DTU 43.3, quand elle avait relevé que l'affaissement de la toiture avait pour seule origine le mauvais entretien de la toiture et que la non-conformité invoquée ne portait pas atteinte à la solidité de l'ouvrage, de sorte que le manquement imputé au contrôleur technique n'était pas à l'origine d'un préjudice subi par la société Logiforce, la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, après avoir fixé le partage de responsabilité s'agissant de la non-conformité de la toiture de l'entrepôt selon les proportions suivantes : 20 % pour la société GSE, 70 % pour la société Baudin Châteauneuf, 10 % pour la société Bureau Veritas Construction, dit que dans leurs recours entre eux, ces parties seraient garanties des condamnations prononcées à leur encontre à proportion du partage de responsabilité ainsi fixé ;

AUX MOTIFS QUE si les sociétés GSE, BAUDIN CHATEAUNEUF et BUREAU VERITAS sont tenues in solidum à réparation vis-à-vis de la société LOGIFORCE, au titre de leur obligation à la dette, elles ne sont tenues in fine, dans le cadre de leur contribution définitive à la dette, qu'à proportion de leurs responsabilités respectives à l'origine des désordres constatés ; qu'elles disposent donc de recours entre elles, examinés sur le fondement de leur responsabilité civile délictuelle de droit commun, posée par l'article 1382 du code civil ; qu'au regard des fautes imputables à chacun des intervenants et à leur sphère d'intervention respective, il convient d'opérer le partage des responsabilités de la manière suivante : - pour la société GSE, contractante générale, qui en sa qualité de maître d'oeuvre n'a pas présenté un projet conçu en conformité avec les règles de l'art et, au stade de la direction des travaux, n'a pas repéré cette non-conformité : 20%, - pour la société BAUDIN CHATEAUNEUF, spécialiste confirmé en matière de construction, qui n'a pas décelé la non-conformité du projet et n'a pas respecté les règles de l'art applicables en la matière : 70%, - pour la société BUREAU VERITAS, qui n'a pas décelé la non-conformité sur les documents qui lui ont été présentés : 10% ; que dans leurs recours entre eux, les intervenants responsables seront garantis des condamnations prononcées à leur encontre à proportion du partage de responsabilité ainsi fixé ;

1°) ALORS QU'est irrecevable, le recours en garantie formé pour la première fois en cause d'appel ; que dans ses conclusions d'appel, la société Bureau Veritas Construction faisait valoir que la société Baudin Châteauneuf n'avait formé devant les premiers juges aucun recours en garantie dirigé contre elle, de sorte que celui qu'elle formait pour la première fois devant la cour d'appel était irrecevable ; qu'en condamnant néanmoins la société Bureau Veritas Construction à garantir la société Baudin Châteauneuf à hauteur de 10 % des condamnations prononcées à son encontre, sans répondre aux conclusions d'appel de la société Bureau Veritas Construction sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que dans ses conclusions d'appel, la société Bureau Veritas Construction faisait valoir que le recours en garantie dirigé à son encontre par la société Baudin Châteauneuf était prescrite, car formé plus de cinq ans après le dépôt du rapport de l'expert ayant mis en évidence la non-conformité de la toiture ; qu'en condamnant la société Bureau Veritas Construction à garantir la société Baudin Châteauneuf à hauteur de 10 % des condamnations prononcées à son encontre, sans répondre aux conclusions d'appel de la société Bureau Veritas Construction sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. Moyens produits au pourvoi n° X 20-15.349 par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocats aux Conseils, pour la société Baudin Châteauneuf

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, infirmatif sur ce point, d'avoir condamné la société Baudin Chateauneuf, in solidum avec la société GSE et la société Bureau Véritas Construction, sur le fondement de leur responsabilité civile de droit commun, à payer à la société Logiforce les sommes, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, de 867.132 euros HT au titre des travaux de reprise et frais annexes et 30.877,50 euros HT au titre des prestations de géomètre et de calculs techniques, et d'avoir fixé le partage de responsabilité ainsi : pour la société GSE : 20%, pour la société Baudin Chateauneuf : 70%, pour la société Bureau Veritas : 10% ;

AUX MOTIFS QUE si la non-conformité généralisée à l'ensemble de la toiture de l'entrepôt est avérée, et n'est d'ailleurs contestée d'aucune part, il n'est cependant pas établi qu'elle affecte la solidité ni la destination du bâtiment ; que l'expert judiciaire, au cours de ses opérations menées entre sa désignation par ordonnance du 17 mars 2006 et la remise de son rapport le 8 janvier 2013, n'a préconisé aucune mesure conservatoire (hors zone sinistrée du fait d'une cause étrangère) et n'a pas autorisé la société LOGIFORCE à exécuter des travaux d'urgence pendant ses opérations. Il a écarté "toute menace d'effondrement" et considéré de ce fait le maintien d'échafaudages pendant les sept années de ses opérations "incohérent". La non-conformité n'a, dans le délai décennal d'épreuve du bâtiment, entre le 18 janvier 2002 et dans les 10 années qui ont suivi, voire jusqu'aux travaux de reprise effectués par la société LOGIFORCE courant 2012/2013, entraîné aucun désordre ; que la société LOGIFORCE elle-même relève que "la charpente ne peut supporter une lame d'eau de 55 mm provenant d'un orage avec en même temps une crapaudine encombrée", admettant qu'en l'absence d'encrassement et d'encombrement de l'avaloir, dès lors que l'entretien du système siphoïde d'évacuation des eaux pluviales est régulier et que celui-ci fonctionne correctement, la charpente peut supporter une telle quantité d'eau ; que la société BAUDIN CHATEAUNEUF a certes affirmé en cours d'expertise que "le calcul itératif avec une lame d'eau de 55 millimètres conduit à des déformations puis à la plastification du profil et donc irrémédiablement à sa ruine" (affirmation reprise en ces termes par l'expert).
Force est cependant de constater que ces allégations ne sont appuyées sur aucun élément tangible et que la ruine prétendument irrémédiable n'est pas survenue dans le délai d'épreuve décennal de l'entrepôt. L'expert s'est ici contenté de reprendre les propos de la société BAUDIN CHATEAUNEUF, mais la réalité du risque n'a pas été examinée et n'est pas démontrée ; que la réalité du risque d'effondrement de la toiture dans le délai décennal d'épreuve du bâtiment n'est pas établie. Le risque n'était pendant cette période qu'éventuel, mais non avéré ; qu'il ne s'est d'ailleurs pas effectivement réalisé dans ce délai (arrêt, p. 34) [?] ; que la société GSE, entreprise générale, et la société BAUDIN CHATEAUNEUF, sous-traitante chargée du lot charpente métallique, étaient en revanche tenues, la première vis-à-vis de la société LOGIFORCE, venant aux droits de la société VAUX LE PENIL-LOGISTIQUE RD 82 en qualité de maître d'ouvrage, et la seconde vis-à-vis de la société GSE, son entreprise principale, d'une obligation de résultat, et devaient livrer un ouvrage conforme aux prescriptions contractuelles et aux règles de l'art et DTU applicables en la matière. Quand bien même le marché ne fait pas référence au DTU 43.3, celui-ci et l'ensemble des DTU font partie intégrante de la catégorie plus large des règles de l'art, ensemble des règles et techniques professionnelles validées par l'expérience et admises par les professionnels, opposables à ces derniers, contrairement aux affirmations inverses de la société BAUDIN CHATEAUNEUF. Celle-ci, en outre, ne peut renier sa compétence affirmée en matière de charpentes métalliques et, partant, sa connaissance des DTU applicables ; que la responsabilité de ces deux entreprises peut donc être retenue alors que la charpente de l'entrepôt livré s'est révélée non-conforme à un DTU (arrêt, p. 35) [?] ; que l'entrepôt livré à la société GIANF AR, premier acquéreur aux droits de laquelle vient désormais la société LOGIFORCE aujourd'hui propriétaire, n'a certes subi aucun dommage spécifique, distinct de l'affaissement d'une partie de sa toiture du fait d'une cause étrangère ; que la société LOGIFORCE se trouve cependant propriétaire d'un entrepôt construit de manière non conforme aux règles de l'art et subit de ce seul fait un préjudice indemnisable, ayant dû entreprendre des travaux de remise aux normes, préjudice en lien direct avec les manquements des sociétés GSE, BAUDIN CHATEAUNEUF et BUREAU VERITAS ; que l'absence de ruine ou de menace d'effondrement du bâtiment est inopérante en l'espèce. La société GIANF AR, aujourd'hui LOGIFORCE, a acquis et réglé un entrepôt et pouvait légitimement s'attendre à recevoir la livraison d'un bâtiment construit en conformité avec les règles de l'art applicable en la matière (arrêt, p. 36) ;

1°) ALORS QUE le non-respect d'une norme de construction, tel qu'un document technique unifié (DTU), lequel se distingue des règles de l'art, ne peut engager la responsabilité du constructeur qu'à la condition d'avoir été intégré dans le champ contractuel ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu la responsabilité de la société Baudin-Chateauneuf, sous-traitant de la société GSE, en énonçant qu'elle était tenue de « livrer un ouvrage conforme aux prescriptions contractuelles et aux règles de l'art et DTU applicables en la matière » car « l'ensemble des DTU font partie intégrante de la catégorie plus large des règles de l'art, ensemble des règles et techniques professionnelles validées par l'expérience et admises par les professionnels, opposables à ces derniers » (arrêt, p. 35 § 4) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que les DTU sont distincts des règles de l'art, et après avoir constaté que le DTU 43.3, sur la méconnaissance duquel elle a fondé le manquement retenu contre la société Baudin-Chateauneuf, n'était pas mentionné dans le marché (arrêt, p. 35 § 4) et n'avait donc pas été contractualisé, ce qui excluait toute responsabilité délictuelle de la société Baudin-Chateauneuf, en tant que soustraitant, pour non-conformité de sa prestation à cette norme technique la cour d'appel a violé les articles 1134, devenu 1103 et 1382, devenu 1240, du code civil ;

2°) ALORS QUE seul le dommage en lien de causalité avec le fait générateur ouvre droit à réparation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que l'effondrement de la toiture avait pour cause exclusive un défaut d'entretien imputable aux sociétés Adyal Île-de-France et Adyal PM Paris (arrêt, p. 29 et 30) ; qu'après avoir relevé que la recherche des causes de l'affaissement avait mis en évidence une non-conformité de la toiture au DTU 43.3, la cour d'appel a retenu que cette non-conformité n'avait été à l'origine d'aucun dommage spécifique distinct de l'affaissement d'une partie de la toiture (arrêt, p. 36 § 6), et qu'elle n'avait pas non plus causé un risque d'effondrement pendant la période de garantie décennale (arrêt, p. 34 § 9) ;
qu'en condamnant néanmoins la société Baudin-Chateauneuf, in solidum avec la société GSE et la société Bureau Veritas Construction, à payer à la société Logiforce les sommes de 867.132 ? HT au titre des travaux de reprise et frais annexes et 30.877,50 ? HT au titre des prestations de géomètre et de calculs techniques, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 1134, devenu 1103 et 1382, devenu 1240, du code civil ;

3°) ALORS QUE, subsidiairement, le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, la société Baudin Chateauneuf faisait valoir dans ses écritures que le défaut de conformité au DTU 43.3, se traduisant par un défaut de pente de la toiture, était un vice apparent lors de la réception, et qu'en l'absence de réserves sur ce point, il n'était plus possible au maître de l'ouvrage de l'invoquer pour rechercher sa responsabilité (concl., p. 18 dernier §) ; qu'en ne répondant pas à ce moyen précis et opérant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION, ÉVENTUEL :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, infirmatif sur ce point, d'avoir débouté la société Baudin Chateauneuf de sa demande en garantie contre la société Axa France IARD, au titre de la police unique de chantier, volet RCS, du chef de la non-conformité de la toiture de l'entrepôt ;

AUX MOTIFS QUE les sociétés GSE et BAUDIN CHATEAUNEUF bénéficient de la PUC souscrite pour le chantier en cause auprès de la compagnie AXA FRANCE, sur le volet de la garantie RCD ; que cependant, alors que la garantie décennale des constructeurs n'est pas engagée, les deux entreprises ne peuvent se prévaloir de la garantie de la compagnie AXA FRANCE, qui ne couvre pas leur responsabilité civile de droit commun ; que la société LOGIFORCE, sur son action directe contre l'assureur, et les sociétés GSE et BAUDIN CHATEAUNEUF, sur leur action contractuelle contre celui-ci, seront en conséquence déboutées de toute demande de garantie formulée contre la compagnie AXA FRANCE au titre de la PUC sur le volet RCD (arrêt, p. 36) ;

ALORS QUE, à supposer que la censure soit prononcée à l'occasion de l'un des pourvois formés par la société GSE ou la société Logiforce, il soit considéré que la non-conformité de la toiture constitue un désordre de nature décennale, cette censure s'étendra au chef de dispositif déboutant la société Baudin Chateauneuf de sa demande en garantie contre la société Axa France IARD fondée sur le volet RCD de la police PUC, la garantissant contre sa responsabilité civile en cas de désordres de nature décennale, le rejet de cette demande étant fondé sur l'absence de couverture des non-conformités lorsqu'elles ne revêtent pas un caractère décennal, et ce en application de l'article 624 du code de procédure civile. Moyens produits au pourvoi n° C 20-17.033 par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour la société GSE

PREMIER MOYEN DE CASSATION

La société GSE FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR infirmé le jugement en ce qu'il avait débouté la société Logiforce de ses demandes portant sur la non-conformité de la toiture de l'entrepôt et, statuant à nouveau sur ce point, D'AVOIR condamné la société GSE, in solidum avec les sociétés Bureau Veritas Construction et Baudin Châteauneuf, sur le fondement de leur responsabilité de droit commun, à payer à la société Logiforce les sommes, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, de 867 132 ? HT au titre des travaux de reprise et frais annexes et de 30 877,50 ? HT au titre des prestations de géomètre et de calculs techniques, D'AVOIR fixé le partage de responsabilité selon les proportions suivantes : 20 % pour la société GSE, 70 % pour la société Baudin Châteauneuf, 10 % pour la société Bureau Veritas Construction et D'AVOIR dit que dans leurs recours entre eux, ces parties seraient garanties des condamnations prononcées à leur encontre à proportion du partage de responsabilité ainsi fixé ;

1°) ALORS QU'en l'absence de désordre constaté, ne saurait être engageìe la responsabiliteì de l'entrepreneur au motif que l'ouvrage ne serait pas conforme à un DTU auquel le marché n'est pas contractuellement soumis ; qu'en accueillant la demande de la société Logiforce au titre de la « remise aux normes », en l'absence de tout désordre, pour cela que la « responsabilité » de la société GSE peut e.tre retenue dès lors que la charpente de l'entrepôt livreì s'est révélée non conforme à un DTU que le contrat ne visait pas, que la société GSE a conçu un projet non conforme à cette règle de l'art et n'a pas relevé cette non-conformité, et que le dommage serait caractérisé par le fait que la société Logiforce avait entrepris à ses frais des travaux de remise aux normes, la Cour a violé les articles 1134 (devenu 1103) et 1147 (devenu 1231-1) du Code civil dans leur rédaction applicable en la cause ;

2°) ALORS, subsidiairement, QUE le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable n'avait pas eu lieu et que cette réparation, qui doit être à la mesure de l'équilibre détruit, ne peut être disproportionnée ; qu'en condamnant la société GSE, in solidum avec la société Baudin Châteauneuf et la société Bureau Veritas Construction, à payer à la société Logiforce les sommes de 867 132 ? HT au titre des travaux de reprise et frais annexes et 30 877,50 ? HT au titre des prestations de géomètre et de calculs techniques, à raison d'une « remise aux normes » de la pente d'une toiture, légèrement inféìrieure à celle préconisée par un DTU, quand elle relevait que cette non-conformité mineure n'avait causé aucun désordre pendant plus de dix ans et que le seul sinistre à déplorer avait pour cause exclusive un deìfaut d'entretien de l'ouvrage, la Cour d'appel, a violé le principe susvisé, ensemble l'article 1147 (devenu 1231-1) du Code civil dans sa rédaction applicable en la cause.

SECOND MOYEN DE CASSATION

La société GSE FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, après avoir fixé le partage de responsabilité s'agissant de la non-conformité de la toiture de l'entrepôt selon les proportions suivantes : 20 % pour la société GSE, 70 % pour la société Baudin Châteauneuf, 10 % pour la société Bureau Veritas Construction, D'AVOIR dit que dans leurs recours entre eux, ces parties seraient garanties des condamnations prononcées à leur encontre à proportion du partage de responsabilité ainsi fixé ;

1°) ALORS QUE la société GSE faisait valoir que la société Baudin Châteauneuf n'avait formé devant les premiers juges aucun recours en garantie dirigé contre elle, de sorte que celui qu'elle formait pour la première fois devant la Cour d'appel eìtait irrecevable ; qu'en condamnant neìanmoins la société GSE à garantir la société Baudin Châteauneuf, sans répondre à ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE la société GSE faisait valoir que le recours en garantie dirigé à son encontre par la société Baudin Châteauneuf était prescrit, car formé plus de cinq ans après le dépôt du rapport de l'expert ayant mis en évidence la non-conformité de la toiture ; qu'en condamnant la société GSE à garantir la société Baudin Châteauneuf, sans répondre à ce moyen, la Cour d'appel a derechef violeì l'article 455 du Code de procédure."

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