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Les paons constituent-ils un trouble anormal du voisinage ?

Pour cet arrêt la présence de paons est un trouble anormal du voisinage.

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"Madame Madeleine SERRE possède une propriété sise [...]. Elle se plaint du trouble excessif de voisinage causé par des paons provenant de la propriété voisine de Madame Stéphanie BABIAK épouse DRIGUES qui pénètrent chez elle, émettent des bruits incessants et détruisent ses plantations.

Par acte d'huissier du 10 février 2010, Madame SERRE a fait assigner Madame DRIGUES devant le Tribunal d'instance de MELUN afin notamment de faire cesser sous astreinte les troubles de voisinage dont elle est victime et obtenir, avec exécution provisoire du jugement, la condamnation de sa voisine au paiement d'une somme de 4000 euros à titre de dommages et intérêts pour l'ensemble des préjudices subis depuis 2005 ainsi qu'une indemnité de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 26 avril 2011, le Tribunal d'instance de Melun a :

- condamné Madame DRIGUES à faire cesser par tous moyens les nuisances sonores résultant de la présence de paons sur sa propriété, ou provenant de celle-ci, et constitutives d'un trouble anormal de voisinage, et ce sous astreinte de 500 euros par infraction constatée par un huissier de justice, passé le délai d'un mois à compter de la notification de la décision,

- condamné Madame DRIGUES à verser à Madame SERRE la somme de 750 euros en réparation de son préjudice, outre la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné Madame DRIGUES aux dépens.

Madame Stéphanie DRIGUES a relevé appel de ce jugement par déclaration du 26 mai 2011.

Vu les dernières conclusions signifiées :

- le 18 janvier 2013 par Madame Stéphanie DRIGUES,

- le 24 avril 2013 par Madame Madeleine SERRE.

Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions, moyens et arguments dont elle est saisie, la Cour fait référence expresse à la décision déférée et aux dernières conclusions d'appel des parties.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 24 avril 2013.

CELA ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR,

Sur le trouble anormal de voisinage

Selon les dispositions de l'article 544 du code civil, la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.

Il résulte de ces dispositions que nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage.

Madame DRIGUES demande l'infirmation du jugement déféré en prétendant que Madame SERRE ne rapporte par la preuve d'un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage, ni que le trouble dont elle se plaint est imputable à son fonds, ou à une chose dont elle est la responsable. Elle prétend notamment que les paons en cause sont sauvages et ne lui appartiennent pas ; que le paon bleu n'est pas répertorié comme animal domestique; qu'elle n'en est pas la gardienne et n'a commis aucune faute de nature à entraîner sa responsabilité. Elle soutient en outre que l'intimée ne prouve pas les dégâts qu'elle invoque ni qu'elle est responsable du bruit fait pas les animaux

Subsidiairement, elle demande à la Cour de ramener le montant des dommages et intérêts à l'euro symbolique, et d'infirmer le jugement attaqué en ce qu'il lui a ordonné de faire cesser sous astreinte les nuisances sonores occasionnées par la présence de paons, et dans tous les cas de condamner Madame SERRE au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame SERRE, se fondant sur la théorie du trouble de voisinage demande la confirmation du jugement attaqué en toutes ses dispositions et la condamnation de Madame DRIGUES au paiement d'une somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'intimée rappelle qu'elle subit depuis de nombreuses années des inconvénients anormaux de voisinage causés par les paons installés sur la propriété de Madame DRIGUES ; que ces animaux, particulièrement bruyants (cris stridents de jour comme de nuit), pénètrent sur sa propriété et causent de nombreux dégâts matériels (souillures par leurs excréments, destruction des plants du potager ou des fleurs), gênent sa famille, ses visiteurs et le voisinage ainsi qu'en attestent les nombreux témoignages qu'elle verse aux débats. Elle prétend que jusqu'à présent, Madame DRIGUES n'avait jamais contesté la propriété de ces animaux, qui ne sont nullement des animaux sauvages contrairement à ce que prétend cette dernière ; qu'en tout état de cause, Madame DRIGUES les attire et les recueille sur sa propriété, les nourrit, les élève, fournit même des filets de protection à ses voisins.

Les moyens invoquées par Madame DRIGUES au soutien de son appel ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont le premier juge a connu et auxquels il a répondu par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation.

Il convient toutefois d'ajouter que si Madame DRIGUES a parfaitement le droit de recueillir sur sa propriété des paons, qui autrefois se trouvaient au château d'Aunoy, et pourquoi pas de s'en occuper en les nourrissant, cette liberté ne doit pas devenir une gêne dépassant les inconvénients normaux de voisinage, même dans une zone rurale.

Or en l'espèce, il ressort des témoignages produits que les paons ayant trouvé refuge sur la propriété de Madame DRIGUES qui les protège et les nourrit, sont des animaux envahissants qui émettent des cris stridents, troublant de jour comme de nuit la tranquillité du voisinage et particulièrement la tranquillité de Madame SERRE ou des personnes séjournant chez elle ; que ces volatiles abîment ses plantations et dégradent son environnement par leurs souillures.

Quoiqu'en dise Madame DRIGUES, celle-ci se comporte bien aux yeux du village comme la propriétaire des paons et les accueille sur sa propriété. Elle est bien à l'origine du trouble totalement anormal de voisinage infligé à ses voisins sans qu'il soit besoin de démontrer une quelconque faute de sa part.

Il y a donc lieu de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré rendu le tribunal d'instance de MELUN.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de l'intimée les frais irrépétibles exposés par elle en cause d'appel. Il y a lieu de condamner Madame DRIGUES à lui payer la somme de 1500 euros qu'elle demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame DRIGUES qui succombe, supportera les entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne Madame Stéphanie DRIGUES à payer à Madame Madeleine Gisèle SERRE la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires."

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