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Deux titres exécutoires pour la même créance ?

La Cour de Cassation juge que qu'aucune disposition légale ne fait obstacle à ce qu'un créancier dispose de deux titres exécutoires pour la même créance.

"Vu l'article 31 du code de procédure civile, ensemble l'article 4 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que se prévalant du non-remboursement d'un prêt constaté dans un acte notarié reçu par M. X..., notaire, et destiné à financer l'acquisition d'un bien immobilier, la société Caisse générale de financement (la banque) a fait assigner les emprunteurs, M. et Mme Y..., devant un tribunal de grande instance pour les voir condamnés au paiement d'une certaine somme au titre du solde du prêt ; qu'ils ont interjeté appel du jugement ayant rejeté leur fin de non-recevoir tirée de la prescription, déclaré valable l'acte authentique de prêt, dit qu'il constituait un titre exécutoire autorisant la banque à procéder au recouvrement forcé de sa créance à l'encontre de M. et Mme Y... et liquidé la créance de la banque à une certaine somme outre les intérêts conventionnels et les cotisations d'assurance-vie échus ;

Attendu que pour déclarer irrecevables les demandes de la banque, la cour d'appel, après avoir relevé que le premier juge a retenu que la validité de l'acte étant discutée, la banque disposait d'une action et d'un intérêt à agir aux fins de voir constater la validité de son titre ou, à défaut, d'obtenir un titre exécutoire et de liquider sa créance, retient que le caractère exécutoire de l'acte authentique a toutefois pour conséquence de rendre inutile l'obtention par le créancier d'un jugement condamnant les emprunteurs à lui rembourser sa créance, que c'est uniquement dans le cas où cette créance n'est pas liquide que le créancier peut intenter une action en liquidation devant la juridiction statuant au fond, qu'en l'espèce, l'action n'est toutefois pas introduite dans ce but, mais uniquement pour se prémunir contre des contestations éventuelles sur la validité du titre, qui n'étaient par ailleurs pas nées à la date de l'introduction de l'instance, qu'il en résulte que la banque n'avait aucun intérêt à agir, alors qu'elle est en droit de procéder par voie d'exécution forcée du titre qu'elle détient et qu'il appartient alors au débiteur de faire valoir ses contestations devant le juge de l'exécution, lequel dispose du pouvoir de les trancher, même si elles remettent en cause le principe du titre ou la validité des droits et obligations qu'il constate ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'acte notarié, bien que constituant un titre exécutoire, ne revêt pas les attributs d'un jugement et qu'aucune disposition légale ne fait obstacle à ce qu'un créancier dispose de deux titres exécutoires pour la même créance, de sorte que la titularité d'un acte notarié n'était pas en soi de nature à priver la banque de son intérêt à agir à fin de condamnation de son débiteur en paiement de la créance constatée dans cet acte, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 janvier 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;

Condamne M. et Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme Y... ; les condamne à payer à la société Caisse générale de financement la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit février deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la Caisse générale de financement

PREMIER MOYEN DE CASSATION

L'arrêt attaqué encourt la censure

EN CE QU'il a déclaré la demande de condamnation de la société CAGEFI irrecevable, faute d'intérêt, refusé en conséquence de liquider la créance et de condamner à payement monsieur et madame Y...

AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur l'intérêt à agir, les époux Y... font ensuite valoir que la demande de la société CAGEFI est irrecevable au motif que celle-ci dispose d'ores et déjà d'un titre exécutoire pour la créance dont elle se prévaut ; que le premier juge a retenu que, la validité de l'acte étant discutée, la société CAGEFI disposait d'une action et d'un intérêt à agir aux fins de voir constater la validité de son titre ou à défaut d'obtenir un titre exécutoire et de liquider sa créance ; que le caractère exécutoire de l'acte authentique a toutefois pour conséquence de rendre inutile l'obtention par le créancier d'un jugement condamnant les emprunteurs à lui rembourser la créance ; que c'est uniquement dans le cas où cette créance n'est pas liquide que le créancier peut intenter une action en liquidation devant la juridiction statuant au fond ; qu'en l'espèce, l'action n'est toutefois pas introduite dans ce but, mais uniquement pour se prémunir contre des contestations éventuelles sur la validité du titre, qui n'étaient par ailleurs pas nées à la date de l'introduction de l'instance ; qu'il en résulte que la banque n'avait aucun intérêt à agir, alors qu'elle est en droit de procéder par voie d'exécution forcée du titre qu'elle détient et qu'il appartient au débiteur de faire valoir ses contestations devant le juge de l'exécution, lequel dispose du pouvoir de les trancher, même si elles remettent en cause le principe du titre ou la validité des droits et obligations qu'il constate ; que le jugement sera en conséquence infirmé et les demandes de la société CAGEFI seront déclarées irrecevables » (arrêt, pp. 4 & 5) ;

ALORS QUE, premièrement, les juges du fond ne sauraient statuer sur l'intérêt à agir en se référant à une règle de fond ; qu'il était dès lors exclu qu'ils puissent opposer le défaut d'intérêt, pour en déduire que les demandes étaient irrecevables au motif que, disposant d'un acte authentique, ayant un caractère exécutoire, la société CAGEFI n'avait pas intérêt à saisir le juge pour obtenir une condamnation ; que l'arrêt doit être censuré pour violation de l'article 31 du code de procédure civile ;

ALORS QUE, deuxièmement, en s'abstenant de comparer les intérêts qui s'attachent, pour obtenir une condamnation judiciaire, aux effets respectifs d'un acte authentique assorti de l'exécution provisoire et d'une condamnation judiciaire, les juges du fond ont à tout le moins privé leur décision de base légale au regard de l'article 31 du code de procédure civile.

DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION

L'arrêt attaqué encourt la censure

EN CE QU'il a déclaré la demande de condamnation de la société CAGEFI irrecevable, faute d'intérêt, refusé en conséquence de liquider la créance et de condamner à payement monsieur et madame Y...

AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur l'intérêt à agir, les époux Y... font ensuite valoir que la demande de la société CAGEFI est irrecevable au motif que celle-ci dispose d'ores et déjà d'un titre exécutoire pour la créance dont elle se prévaut ; que le premier juge a retenu que, la validité de l'acte étant discutée, la société CAGEFI disposait d'une action et d'un intérêt à agir aux fins de voir constater la validité de son titre ou à défaut d'obtenir un titre exécutoire et de liquider sa créance ; que le caractère exécutoire de l'acte authentique a toutefois pour conséquence de rendre inutile l'obtention par le créancier d'un jugement condamnant les emprunteurs à lui rembourser la créance ; que c'est uniquement dans le cas où cette créance n'est pas liquide que le créancier peut intenter une action en liquidation devant la juridiction statuant au fond ; qu'en l'espèce, l'action n'est toutefois pas introduite dans ce but, mais uniquement pour se prémunir contre des contestations éventuelles sur la validité du titre, qui n'étaient par ailleurs pas nées à la date de l'introduction de l'instance ; qu'il en résulte que la banque n'avait aucun intérêt à agir, alors qu'elle est en droit de procéder par voie d'exécution forcée du titre qu'elle détient et qu'il appartient au débiteur de faire valoir ses contestations devant le juge de l'exécution, lequel dispose du pouvoir de les trancher, même si elles remettent en cause le principe du titre ou la validité des droits et obligations qu'il constate ; que le jugement sera en conséquence infirmé et les demandes de la société CAGEFI seront déclarées irrecevables » (arrêt, pp. 4 & 5) ;

ALORS QUE, premièrement, faudrait-il faire abstraction de l'erreur ou de l'insuffisance qui affecte l'arrêt s'agissant de l'intérêt à agir, en toute hypothèse, aucun texte ni aucun principe ne fait obstacle à ce qu'une partie, disposant d'un acte authentique ayant force exécutoire, sollicite la condamnation du débiteur par le juge ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 4 du code civil, l'article 12 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 para. 1 de la convention européenne des droits de l'homme.

TROISIÈME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

L'arrêt attaqué encourt la censure

EN CE QU'il a déclaré la demande de condamnation de la société CAGEFI irrecevable, faute d'intérêt, refusé en conséquence de liquider la créance et de condamner à payement monsieur et madame Y...

AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur l'intérêt à agir, les époux Y... font ensuite valoir que la demande de la société CAGEFI est irrecevable au motif que celle-ci dispose d'ores et déjà d'un titre exécutoire pour la créance dont elle se prévaut ; que le premier juge a retenu que, la validité de l'acte étant discutée, la société CAGEFI disposait d'une action et d'un intérêt à agir aux fins de voir constater la validité de son titre ou à défaut d'obtenir un titre exécutoire et de liquider sa créance ; que le caractère exécutoire de l'acte authentique a toutefois pour conséquence de rendre inutile l'obtention par le créancier d'un jugement condamnant les emprunteurs à lui rembourser la créance ; que c'est uniquement dans le cas où cette créance n'est pas liquide que le créancier peut intenter une action en liquidation devant la juridiction statuant au fond ; qu'en l'espèce, l'action n'est toutefois pas introduite dans ce but, mais uniquement pour se prémunir contre des contestations éventuelles sur la validité du titre, qui n'étaient par ailleurs pas nées à la date de l'introduction de l'instance ; qu'il en résulte que la banque n'avait aucun intérêt à agir, alors qu'elle est en droit de procéder par voie d'exécution forcée du titre qu'elle détient et qu'il appartient au débiteur de faire valoir ses contestations devant le juge de l'exécution, lequel dispose du pouvoir de les trancher, même si elles remettent en cause le principe du titre ou la validité des droits et obligations qu'il constate ; que le jugement sera en conséquence infirmé et les demandes de la société CAGEFI seront déclarées irrecevables » (arrêt, pp. 4 & 5) ;

ALORS QUE, premièrement, en toute hypothèse, dès lors qu'une contestation est élevée quant à la prescription et qu'en outre, une contestation est élevée quant à la liquidation des sommes dues, l'intérêt à agir, en tout état de cause, était suffisamment caractérisé ; qu'à cet égard, l'arrêt doit être censuré pour violation de l'article 31 du code de procédure civile ;

ALORS QUE, deuxièmement, si même il fallait raisonner au regard des règles de fond, de toute façon le créancier titulaire d'un acte authentique doit être en droit de saisir le juge pour obtenir la condamnation du débiteur après avoir préalablement levé les obstacles élevés par ce dernier, tels que les obstacles touchant à la prescription ou au quantum de la dette ; que tel était le cas en l'espèce ; que de ce chef également, l'arrêt doit être censuré pour violation de l'article 4 du code civil, l'article 12 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 para. 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales."

 

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