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Jouissance paisible et résiliation du bail d'habitation

Voici un arrêt qui ne prononce pas la résiliation du bail en considération des reproches faits au locataire.

"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 28 octobre 2008), que l'Office public d'habitations à loyer modéré des Hauts de Seine (l'OPDHLM), propriétaire d'un logement donné à bail à M. X..., a assigné ce dernier en résiliation de ce bail pour manquement à l'obligation d'usage paisible des lieux loués ;

Attendu que l'OPDHLM fait grief à l'arrêt de rejeter la demande, alors, selon le moyen :

1° / que la circonstance que M. X... ait été " une personne fragile, sérieusement suivi et traité médicalement, qui a pu être influencé et / ou utilisé par d'autres " n'était pas de nature à lui conférer une quelconque impunité et à retirer leur caractère de gravité aux infractions aux clauses du bail qui lui étaient reprochées ; qu'ainsi, en se fondant sur cet élément pour refuser de prononcer la résiliation du bail, la cour d'appel a violé les articles 1741 et 1184 du code civil ;

2° / que l'action en résiliation n'est pas subordonnée à l'engagement préalable de poursuites pénales ; qu'ainsi, en déboutant l'OPDHLM de ses demandes au motif, inopérant, que la responsabilité de M. X... " n'a jamais été recherchée pénalement ", la cour d'appel a violé les articles 1741 et 1184 du code civil ;

3° / qu'ayant constaté de la part de M. X... et d'autres personnes " qui passaient chez lui " des " agissements constitutifs d'infractions au bail par le trouble occasionné à la tranquillité et la sécurité des autres locataires ", la cour d'appel, en se bornant à affirmer que ces agissements " ne justifient pas que la résiliation du bail et l'expulsion soient prononcées avec toutes leurs conséquences ", sans rechercher, peut important qu'il n'ait pas été " expressément établi que les faits de troubles de voisinage reprochés aient continué en 2008 ", si ces agissements n'étaient pas, de par leur gravité, de nature à justifier la résiliation du bail et l'expulsion, quelles qu'en soient leurs conséquences pour le locataire, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1741 et 1184 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que certains des faits reprochés à M. X... étaient très anciens, qu'une pétition non datée ne précisait pas le comportement qualifié de " dangereux " du preneur, que ce dernier, sous curatelle, apparaissait être victime des faits du 17 janvier 2006 imputables à un tiers, que les constats d'huissier relataient de façon anonyme les déclarations de locataires, que le preneur produisait pour sa part un courrier signé de quatre autres locataires, et constaté que le locataire était une personne fragile, sérieusement suivie et traitée médicalement, ayant pu être influencée ou utilisée par d'autres, la cour d'appel, appréciant, comme elle en avait le pouvoir, la situation au jour où elle statuait, qui a constaté qu'il n'était pas établi que les troubles de voisinage reprochés aient continué en 2008, a, sans accorder à M. X... l'impunité ni nier la gravité des faits, souverainement retenu, abstraction faite de motifs surabondants, que la responsabilité personnelle du locataire et sa responsabilité quant aux agissements d'autres personnes qui passaient chez lui, constitutifs d'infractions au bail par le trouble occasionné à la tranquillité et la sécurité des autres locataires, ne justifiaient pas le prononcé de la résiliation de ce bail ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'OPDHLM des Hauts de Seine aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile et l'article 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991, condamne L'OPDHLM des Hauts de Seine à payer à la SCP Ghestin la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de l'OPDHLM des Hauts de Seine ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

Moyen produit par Me Jacoupy, avocat aux Conseils, pour l'OPDHLM des Hauts de Seine.

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté l'OPDHLM DES HAUTS DE SEINE de sa demande tendant à voir ordonner la résiliation du bail consenti à Monsieur Charles X... et l'expulsion de ce dernier,

AUX MOTIFS QUE

« Considérant que l'OPDHLM DES HAUTS DE SEINE produit à l'appui de ses demandes :

• une plainte de voisins du 2 février 2000, une pétition de plusieurs voisins de mars 2000, un rapport d'incident du gardien de l'immeuble du 9 novembre 2000 faisant état essentiellement de tapages nocturnes causés par des jeunes qui se réuniraient chez Monsieur X... ;

/ il s'agit de faits très anciens ;

• un rapport d'incident du gardien d'août 2002 faisant état d'un incendie dans une cave ayant causé des brûlures à une victime ;

/ le gardien n'a pas été lui-même témoin des faits, il dit qu'un autre locataire, non dénommé, impute la responsabilité de cet incendie à Monsieur X... ; aucune plainte, aucune enquête ne sont produites de nature à retenir la responsabilité de celui-ci ;

• une pétition de cinq colocataires stigmatisant la dangerosité de Monsieur X...

/ cette pétition n'est pas datée ; elle ne précise aucunement le comportement qualifié de « dangereux » de Monsieur X... ;

• une plainte du 18 janvier 2006 de quatre colocataires qui indiquent que le 17 janvier, en pleine nuit, un inconnu a essayé d'enfoncer la porte de Monsieur X... ;

/ ce dernier apparaît être victime et non pas auteur ou complice des faits.

Il a déposé plainte contre Monsieur Amokrane Z... ; une médiation pénale a été diligentée le 8 mars 2006 aux termes de laquelle Monsieur Z... s'est engagé à ne plus se rendre au domicile de Monsieur X... et à trouver un arrangement avec la compagnie d'assurance pou rembourser les dégâts ;

• une main courante déposée le 15 février 2006 par un salarié de l'OPDHLM qui met en cause le même Amokrane Z... pour un certain nombre de faits (injures, menaces, saletés) en précisant que celui-ci est hébergé chez Monsieur X... ;

/ Monsieur X... n'est pas lui-même mis en cause pour des faits de voisinage répréhensibles mais seulement en ce qu'il hébergerait Monsieur Z... ;

Mais le même salarié dans la même main courante précise également que « Amokrane menace une locataire qui demeure au 1er étage du..., appartement ..., Madame B..., pour dormir chez elle alors qu'elle est vulnérable ».

Monsieur Amokrane Z... a été condamné par le Tribunal Correctionnel de NANTERRE le 1er juin 2006 à 12 mois d'emprisonnement, dont 4 mois avec sursis et mise à l'épreuve pendant deux ans, notamment pour avoir « courant 2004, 2005 et jusqu'au 26 avril 2006 frauduleusement abusé de la vulnérabilité de Madame B... Rose, due à une déficience psychique qui était apparente ou connue de son auteur, pour obliger la victime à un acte ou une abstention gravement préjudiciable pour elle, en l'espèce en s'installant chez elle, en lui interdisant de circuler librement dans son appartement et en lui soutirant de l'argent » ;

Il résulte de cette condamnation que Monsieur Z... était logé essentiellement chez Madame B... ; la fréquence de ses « passages » chez Monsieur X... n'est pas précisée et il est certain que celui ci est également une personne vulnérable placée sous curatelle renforcée ;

• un PV de constat d'huissier du 30 mars 2006 qui relate de façon anonyme les déclarations de deux colocataires faisant état à l'encontre de Monsieur X... et d'autres jeunes de faits répétés d'injures, de bagarres, d'usage d'alcool et de drogue dans les escaliers, les halls ou les caves de jour, comme de nuit ;

/ les deux colocataires mettent également en cause un complice qui fait usage de « béquilles » ; aux termes de la main courante du 15 février 2006 ce complice avec des béquilles est le dénommé Amokrane Z..., or ce dernier a été condamné pour avoir abusé pendant plusieurs années d'une personne vulnérable ;

Monsieur X... est une personne vulnérable, placé sous curatelle renforcée ; il suit un traitement sérieux (cf certificats médicaux produits du 6 octobre 2006) ; il est décrit par son psychiatre comme « une personne fragilisée par divers troubles psychiques et somatiques qui se maintient au prix de coûteux efforts psychologiques » ;

• un constat d'huissier du 3 mai 2007 qui relate de façon anonyme les déclarations de trois colocataires qui font état du même genre de faits en y ajoutant des menaces de la part de Monsieur X... ;

• un constat d'huissier du 10 janvier 2008 qui relate, toujours de façon anonyme, les déclarations de trois colocataires qui indiquent que les faits précédemment dénoncés se perpétuent ;

• un courrier d'huissier du 23 juillet 2008 qui mentionne qu'un responsable de l'Office a essayé de joindre les locataires susceptibles de témoigner mais qu'aucun locataire ne veut témoigner même sous couvert d'anonymat ;

/ L'OPDHLM explicite ce refus par la peur de représailles mais il faut observer qu'il n'est justifié d'aucune plainte déposée à l'encontre de Monsieur X... alors que, toujours selon l'Office, les faits durent depuis plusieurs années et relèveraient d'une certaine gravité puisqu'il est question de menaces ;

Le refus de déposer peut tout aussi bien provenir du fait que la situation s'est calmée depuis la procédure et l'appel interjeté par le bailleur.

Considérant que Monsieur X... produit pour sa part un courrier signé de quatre autres colocataires qui disent ne pas être d'accord avec les faits qui lui sont reprochés (squat, usage d'alcool et de drogue, nuisances sonores) ;

Considérant que Monsieur X... est une personne fragile, sérieusement suivi et traité médicalement, mais qui a pu être influencé et / ou utilisé par d'autres, notamment Monsieur Z..., qui a fait l'objet d'une condamnation pour des faits de cette nature.

Considérant qu'il n'est pas expressément établi que les faits de troubles de voisinage reprochés aient continué en 2008 ;

Considérant, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, que la responsabilité personnelle du locataire X..., qui n'a jamais été recherchée pénalement, et sa responsabilité à l'égard des agissements d'autres personnes qui passaient chez lui, agissements constitutifs d'infractions au bail par le trouble occasionné à la tranquillité et la sécurité des autres locataires, ne justifient pas que la résiliation du bail et l'expulsion soient prononcées avec toutes leurs conséquences »,

ALORS, D'UNE PART, QUE

La circonstance que Monsieur X... ait été « une personne fragile, sérieusement suivi et traité médicalement, qui a pu être influencé et / ou utilisé par d'autres » n'était pas de nature à lui conférer une quelconque impunité et à retirer leur caractère de gravité aux infractions aux clauses du bail qui lui étaient reprochées ; qu'ainsi, en se fondant sur cet élément pour refuser de prononcer la résiliation du bail, la Cour d'Appel a violé les articles 1741 et 1184 du Code Civil,

ALORS, D'AUTRE PART, QUE

L'action en résiliation n'est pas subordonnée à l'engagement préalable de poursuites pénales ; qu'ainsi, en déboutant l'OPDHLM DES HAUTS DE SEINE de ses demandes au motif, inopérant, que la responsabilité de Monsieur X... « n'a jamais été recherchée pénalement », la Cour d'Appel a violé les articles 1741 et 1184 du Code Civil,

ALORS, ENFIN, QUE

Ayant constaté de la part de Monsieur X... et d'autres personnes « qui passaient chez lui » des « agissements constitutifs d'infraction au bail par le trouble occasionné à la tranquillité et la sécurité des autres locataires », la Cour d'Appel, en se bornant à affirmer que ces agissements « ne justifient pas que la résiliation du bail et l'expulsion soient prononcées avec toutes leurs conséquences », sans rechercher, peu important qu'il n'ait pas été « expressément établi que les faits de trouble de voisinage reprochés aient continué en 2008 », Si ces agissements n'étaient pas, de par leur gravité, de nature à justifier la résiliation du bail et l'expulsion, quelles qu'en soient leurs conséquences pour le locataire, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1741 et 1184 du Code Civil."

 

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