Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • Un permis de construire obtenu par fraude

    Voici un arrêt qui retient que le permis de construire a été obtenu par fraude :

     

    "Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 décembre 2011 et 7 mars 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. H...E..., demeurant..., M. G...E..., demeurant..., M. J... E..., demeurant ... et Mme D...B..., épouseE..., demeurant ... ; M. E...et autres demandent au Conseil d'Etat : 

     

    1°) d'annuler l'arrêt n° 11NC00431 du 29 septembre 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a, sur la requête de Mme I...A..., d'une part, annulé le jugement n° 0900850 du 18 janvier 2011 par lequel le tribunal administratif de Nancy a annulé le permis de construire délivré le 6 mars 2009 à Mme A...par le maire de Champ-le-Duc, d'autre part, rejeté la demande tendant à l'annulation de ce permis présentée par Mme C..., épouseE..., aux droits de laquelle les requérants viennent dans la présente instance ; 

     

    2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de Mme A...; 

     

    3°) de mettre à la charge de Mme A...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; 

     

     

    Vu les autres pièces du dossier ;

     

    Vu le code rural et de la pêche maritime ;

     

    Vu le code de l'urbanisme ; 

     

    Vu le code de justice administrative ;

     

    Après avoir entendu en séance publique :

     

    - le rapport de Mme Sophie Roussel, Auditeur, 

     

    - les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

     

    La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de M. H...E..., de M. G...E..., de M. F...E...et de Mme D...E...et à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de Mme A...;

     

     

     

     

    1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un bail rural conclu le 1er avril 1991, MmeC..., épouseE..., a donné en location à M. et MmeA..., sous le régime des baux ruraux, la " ferme des Anifaings ", dont elle est propriétaire indivis ; qu'un incendie a en partie détruit la ferme le 11 août 1997 ; qu'un litige a alors opposé les intéressés devant le tribunal paritaire des baux ruraux au sujet de la reconstruction du bâtiment, demandée par M. et Mme A...sur le fondement de dispositions figurant désormais à l'article L. 411-30 du code rural et de la pêche maritime ; que M. et Mme A... ont entrepris des travaux de reconstruction et d'extension des bâtiments de la ferme sans permis de construire, infraction pour laquelle ils ont été condamnés à procéder à la démolition du bien irrégulièrement édifié par le juge pénal en 2007 ; que, par un arrêté du 6 mars 2009, le maire de Champ-le-Duc a délivré à Mme A...un permis de construire portant sur ces travaux ; qu'à la demande de MmeC..., épouseE..., le tribunal administratif de Nancy a, par un jugement du 18 janvier 2011, annulé ce permis, au motif qu'il avait été délivré à la suite de manoeuvres du pétitionnaire ; que, par un arrêt du 29 septembre 2011, contre lequel M. E... et autres, venant aux droits de MmeC..., épouseE..., se pourvoient en cassation, la cour administrative d'appel de Nancy a annulé ce jugement et rejeté la demande présentée devant le tribunal administratif de Nancy ; 

     

    2. Considérant que le désistement de MmeB..., épouseE..., est pur et simple ; que rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte ;

     

    3. Considérant que le propriétaire d'un terrain justifie, en cette seule qualité, d'un intérêt lui donnant qualité pour agir devant le juge de l'excès de pouvoir contre les autorisations d'urbanisme accordées en vue de la réalisation de travaux sur son bien ; que, par suite, en jugeant que MmeC..., épouseE..., propriétaire indivis du terrain d'assiette du projet litigieux, ne justifiait d'aucun intérêt lui donnant qualité pour contester le permis de construire délivré le 6 mars 2009, au motif qu'elle aurait méconnu les obligations imposées au bailleur par la législation des baux ruraux relative à la reconstruction des biens détruits, la cour a commis une erreur de droit ; que M. E...et autres sont dès lors fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent ; 

     

    4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

     

    En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel de Mme A...: 

     

    5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un (...) d'un permis de construire (...), le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant (...) un permis de construire (...). " ; que ces dispositions n'imposent pas à l'auteur du permis ou à son bénéficiaire, ni d'ailleurs à aucune autre personne ayant qualité pour faire appel d'un jugement annulant en tout ou partie un permis de construire, de notifier l'appel dirigé contre un tel jugement ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par MmeC..., épouseE..., à la requête d'appel de Mme A...et tirée du défaut de notification de celle-ci ne peut qu'être écartée ; 

     

    En ce qui concerne la légalité du permis de construire du 6 mars 2009 : 

     

    6. Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit au point 3, MmeC..., épouseE..., justifiait, du seul fait qu'elle était propriétaire du terrain d'assiette du projet litigieux, d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation du permis délivré le 6 mars 2009 ; 

     

    7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à l'arrêté litigieux : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; / b) Soit, en cas d'indivision, par un ou plusieurs co-indivisaires ou leur mandataire ; / c) Soit par une personne ayant qualité pour bénéficier de l'expropriation pour cause d'utilité publique. " ; qu'aux termes de l'article R. 431-5 du même code : " La demande de permis de construire précise : a) L'identité du ou des demandeurs ; (...) La demande comporte également l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les demandes de permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 cité ci-dessus ; qu'il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction de la demande de permis, la validité de l'attestation établie par le pétitionnaire ; que, toutefois, dans le cas où, en attestant remplir les conditions définies à l'article R. 423-1, le pétitionnaire procède à une manoeuvre de nature à induire l'administration en erreur, le permis qui lui est délivré doit être regardé comme ayant été frauduleusement obtenu ; 

     

    8. Considérant que ni les dispositions du code rural relatives aux baux ruraux applicables à la date de la demande de permis litigieuse, ni le bail rural conclu le 1er avril 1991 avec Mme E...n'autorisaient Mme A...à présenter une demande de permis en vue de réaliser une construction sur les terrains loués ; que, contrairement à ce que soutient MmeA..., le jugement du 18 juin 2011 du tribunal paritaire des baux ruraux d'B... n'a pas jugé qu'elle était habilitée à déposer une demande de permis de construire, mais s'est borné à relever que la construction sur les terres du bailleur sans son autorisation ne constituait pas un motif de résiliation du bail ; qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier que Mme A...a attesté dans sa demande avoir qualité pour demander le permis de construire conformément aux dispositions des articles R. 423-1 et R. 431-5 du code de l'urbanisme ; qu'elle ne pouvait toutefois sérieusement prétendre ignorer, compte tenu du litige en cours avec MmeE..., copropriétaire indivis du terrain d'assiette du projet, l'opposition de cette dernière à la réalisation des travaux litigieux ; qu'ainsi, en attestant remplir les conditions définies à l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, Mme A...doit être regardée comme s'étant livrée à une manoeuvre de nature à induire l'administration en erreur ; qu'est sans incidence sur ce point la circonstance, à la supposer même établie, que le maire aurait eu connaissance de l'opposition de MmeE... ; que, par suite, le permis de construire délivré à Mme A...le 6 mars 2009 par le maire de Champ-le-Duc doit être regardé comme ayant été obtenu par fraude ; 

     

    9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de poser une question préjudicielle à l'autorité judiciaire, que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 18 janvier 2011, le tribunal administratif de Nancy a annulé l'arrêté du 6 mars 2009 par lequel le maire de Champ-le-Duc lui a accordé un permis de construire ; 

     

    10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A...la somme de 1 000 euros à verser à M. H...E..., et la même somme à verser, d'une part, à M. G...E...et, d'autre part, à M. J...E..., au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge des requérants, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante ; 

     

     

     

     

     

     

    D E C I D E :

     

    Article 1er : Il est donné acte du désistement de Mme D...B..., épouseE.... 

     

    Article 2 : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy est annulé. 

    Article 3 : La requête présentée par Mme A...devant la cour administrative d'appel de Nancy est rejetée. 

    Article 4 : Mme A...versera une somme de 1 000 euros à M. H...E..., à M. G... E...et à M. F...E...K.... 

     

    Article 5 : Les conclusions présentées par Mme A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. 

    Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. H...E..., à M. G...E..., à M. J...E..., à Mme D...E..., à Mme I... A...et à la commune de Champ-le-Duc."

  • Emplacement réservé et erreur manifeste d'appréciation (bis)

    L'erreur manifeste d'appréciation n'est pas retenue dans ce cas :

    "Vu l'ordonnance en date du 12 janvier 1994, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 27 janvier 1994 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R.81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la requête présentée à cette cour par M. X... ;

     

    Vu la requête enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon le 7 janvier 1994, présentée par M. Louis X..., demeurant ... du Temple à Paris (75004) ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :

     

    1°) annule le jugement du 3 novembre 1993 en tant que par ce jugement le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 17 octobre 1990 par laquelle le conseil municipal de Saint-Gervais-les-Bains a créé un emplacement réservé sur le terrain lui appartenant lors de la modification n° 3 du plan d'occupation des sols de cette commune ;

     

    2°) annule ladite délibération en tant qu'elle crée ledit emplacement réservé ;

     

    3°) condamne la commune de Saint-Gervais-les-Bains à lui verser la somme de 10 000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

     

    Vu les autres pièces du dossier ;

     

    Vu le code de l'urbanisme ;

     

    Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

     

    Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

     

    Après avoir entendu en audience publique :

     

    - le rapport de M. Zémor, Conseiller d'Etat,

     

    - les conclusions de M. Lasvignes, Commissaire du gouvernement ;

     

     

     

    Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 123-4 du code de l'urbanisme : "un plan d'occupation des sols approuvé peut également être modifié par délibération du conseil municipal après enquête publique à la condition qu'il ne soit pas porté atteinte à son économie générale et que la modification ne concerne pas les espaces boisés classés ou ne comporte pas de graves risques de nuisance" ; que le conseil municipal de Saint-Gervais-les-Bains en décidant par la décision attaquée en date du 17 octobre 1990 de créer un emplacement réservé destiné à permettre la construction ultérieure d'une voie publique desservant la zone voisine NA d, n'a pas porté atteinte à l'économie générale du plan d'occupation des sols approuvé ; que, dès lors, M. X... n'est pas fondé à soutenir que cette délibération, adoptée selon la procédure instituée en cas de modification de plan d'occupation des sols, méconnaîtrait les dispositions susrappelées de l'article L. 123-4 du code de l'urbanisme ;

     

    Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que le terrain appartenant à M. X... serait "inclus dans l'enveloppe du domaine skiable" et "compris dans le périmètre de protection d'un monument historique" ne fait pas obstacle à ce que soit légalement décidée sur une partie de ce terrain la création d'un emplacement réservé à une voie publique ;

     

    Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort du dossier qu'en décidant de créer un emplacement réservé destiné à la création d'une voie publique dans le but de desservir ultérieurement la zone NA d'urbanisation future, et en fixant la localisation de cet emplacement le conseil municipal de Saint-Gervais-les-Bains n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ; que si M. X... soutient qu'il eût été préférable que la voie publique, en vue de laquelle l'emplacement réservé litigieux a été créé, emprunte le tracé d'un sentier existant, il n'appartient pas au Conseil d'Etat statuant au contentieux d'apprécier l'opportunité du tracé choisi ;

     

    Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

     

    Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de Saint-Gervais-les-Bains en date du 17 octobre 1990 en tant qu'elle approuve une modification du plan d'occupation des sols créant un emplacement réservé sur une partie d'un terrain lui appartenant ;

     

    Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :

     

    Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que la commune de Saint-Gervais-les-Bains qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

     

    Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.

     

    Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Louis X..., à la commune de Saint-Gervais-les-Bains et au ministre de l'intérieur."