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  • Déclaration d'aliéner et unité foncière

    La question d'un sénateur :

     M. Jean Louis Masson attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur le cas d'un propriétaire qui vend deux immeubles contigus. Il lui demande si, sur le fondement du droit de préemption urbain, la commune peut décider de préempter un seul de ces deux immeubles.

     

     

    La réponse du ministre :

    L'article R. 213-5 du code de l'urbanisme prévoit que « la déclaration par laquelle le propriétaire d'un bien soumis au droit de préemption manifeste l'intention d'aliéner ce bien » est établie dans les formes prescrites par un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme. Une déclaration d'intention d'aliéner est donc déposée par unité foncière vendue. Le Conseil d'État a défini l'unité foncière comme étant « un îlot de propriété d'un seul tenant, composé d'une parcelle ou d'un ensemble de parcelles appartenant à un même propriétaire ou à la même indivision » (CE, 27 juin 2005, n° 264667). Deux immeubles contigus appartenant à un même propriétaire et faisant l'objet d'une seule déclaration d'aliéner constituent une même unité foncière et donnent lieu au dépôt d'une seule DIA, ne permettant donc pas au titulaire de droit de préemption de ne préempter qu'une partie de cette unité foncière. Il convient de préciser que la jurisprudence considère que deux immeubles contigus appartenant à un même propriétaire et faisant l'objet de deux déclarations d'intention d'aliéner, qui précisent que les deux biens sont englobés dans la même offre de vente, doivent être regardés comme concernant une même unité foncière ; ils appellent donc une décision de préemption commune et la commune ne peut préempter un seul des deux immeubles (CAA Douai, 16 octobre 2008, n° 07DA01873). Dans le cas où deux immeubles contigus ne constituent pas une même unité foncière, la commune peut préempter un seul de ces immeubles. Il convient enfin de préciser qu'en application de l'article L. 213-2-1 du code de l'urbanisme, si une unité foncière n'est incluse que partiellement dans le périmètre de préemption, le titulaire du droit de préemption ne peut préempter que la seule fraction de l'unité foncière incluse dans ledit périmètre ; toutefois, en réponse à l'offre qui lui est faite, le propriétaire peut exiger que le titulaire du droit de préemption se porte acquéreur de l'ensemble de l'unité foncière.

  • L'article 661 du code civil relatif à la mitoyenneté est-il conforme à la constitution ?

    Oui, pour le Conseil Constitutionnel :

     

    "Le Conseil constitutionnel a été saisi le 15 septembre 2010 par la Cour de cassation (troisième chambre civile, arrêt n° 1222 du 15 septembre 2010), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Pierre B., relative à la conformité de l'article 661 du code civil aux droits et libertés que la Constitution garantit.

    LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

    Vu la Constitution ;

    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

    Vu le code civil ;

    Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;

    Vu les observations produites pour la SCI Valanges par Me Jacoupy, avoc at au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 6 octobre 2010 ;

    Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 7 octobre 2010 ;

    Vu les observations produites pour le requérant par la SCP Boré et Salve de Bruneton, enregistrées le 21 octobre 2010 ;

    Vu les pièces produites et jointes au dossier ;

    Me Jean Salve de Bruneton pour le requérant et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 4 novembre 2010 ;

    Le rapporteur ayant été entendu ;

    1. Considérant qu'aux termes de l'article 661 du code civil : « Tout propriétaire joignant un mur a la faculté de le rendre mitoyen en tout ou en partie, en remboursant au maître du mur la moitié de la dépense qu'il a coûté, ou la moitié de la dépense qu'a coûté la portion du mur qu'il veut rendre mitoyenne et la moitié de la valeur du sol sur lequel le mur est bâti. La dépense que le mur a coûté est estimée à la date de l'acquisition de sa mitoyenneté, compte tenu de l'état dans lequel il se trouve » ;

    2. Considérant que le requérant fait grief à ces dispositions d'obliger le propriétaire d'un bien immobilier à une cession de son droit qui n'est ni exigée ni justifiée par une nécessité publique légalement constatée, mais qui lui est, au contraire, imposée au seul bénéfice d'une personne privée, en violation des articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;

    3. Considérant que la propriété figure au nombre des droits de l'homme consacrés par les articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789 ; qu'aux termes de son article 17 : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité » ; qu'en l'absence de privation du droit de propriété, il résulte néanmoins de l'article 2 de la Déclaration de 1789 que les limites apportées à son exercice doivent être justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi ;

    4. Considérant qu'il appartient au législateur, compétent en application de l'article 34 de la Constitution pour fixer les principes fondamentaux de la propriété et des droits réels, de définir les modalités selon lesquelles les droits des propriétaires de fonds voisins doivent être conciliés ; que la mitoyenneté des murs séparatifs est au nombre des mesures qui tendent à assurer cette conciliation ;

    5. Considérant, en premier lieu, que si, en application de l'article 661 du code civil, le propriétaire d'un mur séparatif peut être tenu de le rendre mitoyen en tout ou partie à la demande du propriétaire du fonds qui le joint, cette disposition n'a pour effet que de rendre indivis le droit exclusif du maître du mur qui, dans les limites de l'usage en commun fixées par les articles 653 et suivants du code civil, continue à exercer sur son bien tous les attributs du droit de propriété ; que, dès lors, en l'absence de privation de ce droit, l'accès à la mitoyenneté autorisé par le texte en cause n'entre pas dans le champ d'application de l'article 17 de la Déclaration de 1789 ;

    6. Considérant, en second lieu, que le régime de la mitoyenneté des murs servant de séparation détermine un mode économique de clôture et de construction des immeubles ainsi que d'utilisation rationnelle de l'espace, tout en répartissant les droits des voisins sur les limites de leurs fonds ; que l'accès forcé à la mitoyenneté prévu par la loi constitue un élément nécessaire de ce régime et répond ainsi à un motif d'intérêt général ; qu'il est proportionné à l'objectif visé par le législateur ; qu'il est réservé au propriétaire du fonds joignant le mur et subordonné au remboursement à son propriétaire initial de la moitié de la dépense qu'a coûté le mur ou la portion qu'il veut rendre mitoyenne et la moitié de la valeur du sol sur lequel le mur est bâti ; qu'à défaut d'accord des parties, ces conditions de fond doivent être constatées par la juridiction judiciaire qui fixe le montant du remboursement ; que, compte tenu de ces garanties de fond et de procédure, la restriction portée au droit de propriété par la disposition en cause n'a pas un caractère de gravité tel qu'elle dénature le sens et la portée de ce droit ;

    7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'atteinte portée aux conditions d'exercice du droit de propriété par l'article 661 du code civil ne méconnaît pas l'article 2 de la Déclaration de 1789 ;

    8. Considérant que cet article n'est contraire à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit,

    D É C I D E :

    Article 1er.- L'article 661 du code civil est conforme à la Constitution.

    Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 10 novembre 2010, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Hubert HAENEL et Pierre STEINMETZ."