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L'indemnité versée par l'assureur dommages ouvrage qui n'est pas utilisée doit être remboursée à l'assureur

L'indemnité versée par l'assureur dommages ouvrage qui n'est pas utilisée doit être remboursée à l'assureur. Dans cette affaire, c'est le sous-acquéreur qui est condamné à rembourser.

Cassation 3e civ. 13-4-2023 n° 19-24.060 FS-B

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"Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 septembre 2019), la société civile immobilière Val des cigales (la SCI) a fait construire une maison d'habitation qu'elle a vendue en l'état futur d'achèvement à M. et Mme [D]. Elle a souscrit un contrat d'assurance de dommages à l'ouvrage auprès de la société MMA IARD.

2. Se plaignant de désordres affectant un mur de soutènement, M. et Mme [D] ont assigné la société MMA IARD, qui a été condamnée à leur payer une provision de 175 000 euros à valoir sur le coût des travaux de reprise.

3. M. et Mme [D] ont vendu la maison à M. [E].

4. La société MMA IARD a assigné M. [E] aux fins de remboursement d'une partie des sommes qu'elle avait versée à M. et Mme [D] et qui n'avait pas été affectée aux travaux de réparation.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. M. [E] fait grief à l'arrêt de le condamner à rembourser la somme de 136 633 euros à la société MMA IARD, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 15 novembre 2011, alors :

« 1°/ que l'action en répétition de l'indu ne peut être engagée que contre celui qui a reçu le paiement ou pour le compte duquel le paiement a été reçu ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats comme résultant des propres constatations de l'arrêt que la compagnie MMA, en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage, avait versé aux époux [D] une somme de 175 000 euros aux fins de réaliser les travaux réparatoires et que ceux-ci ne les avaient pas fait réaliser ; que M. [E] n'ayant reçu aucune somme provisionnelle de la part de l'assureur, celui-ci n'était pas fondé à agir contre lui en répétition de l'indu, fût-il nouvel acquéreur du bien immobilier assuré en dommages-ouvrage ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1376 devenu 1302-1 du code civil ;

2°/ que la transmission du bénéfice de l'assurance dommages-ouvrage au nouvel acquéreur du bien immobilier n'emporte pas cession des éventuelles créances détenues par l'assureur contre le maître d'ouvrage initial au nouveau maître de l'ouvrage, sauf à ce que le contrat de vente ait expressément prévu le transfert de l'indemnité d'assurance à l'acquéreur ; qu'en l'espèce, le contrat de vente du 28 mai 2009 ne prévoyait aucun transfert de l'indemnité à M. [E] puisque, bien au contraire, les vendeurs indiquaient "conserver la maîtrise tant physique que pécuniaire de la procédure en cours, faisant leur affaire personnelle des conséquences et du bénéfice pouvant en résulter pour les parties" ; que M. [E], devenu bénéficiaire de l'assurance dommages-ouvrage en sa qualité d'acquéreur de l'immeuble assuré, n'était donc pas devenu débiteur de l'assureur; qu'en déduisant la qualité d'accipiens de M. [E] à l'égard de la société MMA du seul transfert de la qualité de bénéficiaire de l'assurance dommages-ouvrage, sans constater par ailleurs que l'indemnité versée en exécution de l'assurance DO aurait été transférée à l'acquéreur, la cour d'appel a violé l'article L. 242-1 du code des assurances ;

3°/ que les conventions n'ayant d'effet qu'entre les parties contractantes, un tiers ne peut être lié par un contrat ni davantage s'en prévaloir, sauf à pouvoir invoquer une inexécution dommageable pour lui-même ; qu'en l'espèce, l'acte de vente du 28 mai 2009 ayant prévu une réfaction du prix à charge pour M. [E] de réaliser les travaux du mur de soutènement ne concernait que les époux [D] et M. [E] en leurs qualités respectives de vendeurs et d'acquéreur, à l'exclusion de la compagnie MMA, tiers au contrat de vente ; que dès lors, en retenant que l'assureur était "en droit d'agir en répétition contre l'acquéreur de l'immeuble, (...) seul bénéficiaire de l'assurance dommages-ouvrage" motif pris de ce que les vendeurs, bénéficiaires de l'indemnité, avaient "consenti à l'acquéreur une réduction du prix de vente du bien immobilier au moins équivalente à l'indemnité versée qui permet de satisfaire à l'obligation d'affectation" quand les stipulations du contrat de vente ne pouvaient être invoquées à son profit par la compagnie MMA, la cour d'appel a violé l'article 1165, devenu 1199, du code civil. »

Réponse de la Cour

6. Par motifs propres et adoptés, la cour d'appel a constaté que l'acquéreur s'était vu consentir une réduction du prix de vente au moins équivalente à l'indemnité versée aux vendeurs par l'assureur de dommages-ouvrage et qu'aux termes de l'acte de vente, le vendeur avait déclaré que l'assureur lui avait versé la somme de 175 000 euros mais ne pas avoir fait exécuter les travaux, qui restaient à la charge de l'acquéreur, ce que celui-ci acceptait expressément.

7. Elle a, ainsi, fait ressortir que, selon la convention des parties à l'acte de vente, l'indemnité d'assurance avait été transférée à l'acquéreur, qui devait effectuer les travaux pour laquelle elle avait été versée.

8. Les tiers pouvant invoquer à leur profit comme constituant un fait juridique la situation créée par un contrat auquel ils ne sont pas parties, la cour d'appel a pu en déduire que M. [E] avait acquis la qualité d'accipiens à l'égard de l'assureur, de sorte qu'il devait lui restituer les indemnités non affectées à la réparation de l'ouvrage.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

10. M. [E] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de garantie formée contre M. et Mme [D], alors :

« 1°/ que le juge ne peut dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'en l'espèce, le contrat de vente prévoyait que les époux [D] demeuraient, malgré la vente, maîtres de la procédure les opposant à la SCI et à la compagnie MMA sans nullement limiter les conséquences de celle-ci à l'indemnisation de leurs préjudices immatériels ; qu'en énonçant dès lors que "les époux [D] se sont réservés la poursuite de la procédure à l'égard de la SCI Val des Cigales et de la société MMA pour l'indemnisation de leurs préjudices immatériels", la cour d'appel a dénaturé le contrat de vente du 28 mai 2009 et, partant, a violé le principe selon lequel le juge ne peut dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

2°/ qu'en toute hypothèse, la circonstance selon laquelle la charge de faire exécuter les travaux de confortement aurait été transférée à M. [E] n'induisait pas pour autant que celui-ci se voyait transférer les conséquences de la procédure opposant initialement les vendeurs à l'assureur dommages-ouvrage ; qu'en inférant la charge de la restitution des sommes versées par l'assureur du seul transfert contractuel de l'exécution des travaux à l'acquéreur, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 242-1 du code des assurances. »

Réponse de la Cour

11. M. [E] soutenait que les vendeurs devaient le garantir en application de la clause du contrat de vente qui stipulait qu'ils faisaient leur affaire personnelle des conséquences et du bénéfice pouvant résulter de la procédure qu'ils avaient engagée contre la SCI et la société MMA IARD.

12. La cour d'appel, ayant constaté que cette procédure était distincte de celle engagée par l'assureur pour obtenir le remboursement des indemnités d'assurances, a pu en déduire, abstraction faite des motifs tenant à la nature des préjudices dont la réparation était poursuivie par les vendeurs, que ceux-ci n'étaient pas tenus de garantir l'acquéreur.

13. Elle a, ainsi, légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [E] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [E] et la société MMA IARD et condamne M. [E] à payer à M. et Mme [D] la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize avril deux mille vingt-trois."

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