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Espionner ses voisins est-il un trouble anormal du voisinage ?

Selon cet arrêt espionner ses voisins est un trouble anormal du voisinage.

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"FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES :

Monsieur Franck Verney et madame Virginie Dabenne sont propriétaires sur la commune de Vaux Milieu (38) d'un tènement immobilier cadastré [...] section AH n° 108 alors que monsieur Henri Neel est propriétaire, même commune et même section de la parcelle voisine n°109 .

Dénonçant un comportement intrusif et des nuisances sonores, monsieur Verney et madame Dabenne ont, suivant exploit d'huissier en date du 5 décembre 2008, fait citer monsieur Neel devant le tribunal d'instance de Vienne à l'effet d'obtenir sa condamnation à leur payer diverses sommes sur le fondement du trouble anormal du voisinage.

Par jugement du 28 janvier 2011, le tribunal d'instance de Vienne a, rejetant la demande principale de monsieur Verney et la demande reconventionnelle de monsieur Neel, condamné ce dernier à payer à madame Dabenne des dommages intérêts de 1.500,00 € et une indemnité de procédure de 500,00 €.

Par déclaration du 17 février 2011, monsieur Neel a formé appel de cette décision.

Au dernier état de ses écritures en date du 2 octobre 2013, monsieur Neel demande le rejet des prétentions de madame Dabenne et sa condamnation avec monsieur Verney à lui payer la somme de 1.500,00 € pour fausses accusations outre la somme de 2.000,00 € au titre de ses frais irrépétibles.

Il fait valoir que :

* il n'exerce aucune surveillance et conteste les attestations de complaisance produites par ses adversaires,

* ceux-ci ont coupé un arbre qui masquait leur propriété et il ne peut être contraint à vivre les volets fermés,

* il est victime de diverses pétitions dont sont coutumiers les témoins de la partie adverse,

* il peut justifier de témoignages en sa faveur,

* il souffre d'une baisse auditive,

* le certificat médical daté de la veille de la visite de madame Dabenne est discutable,

* les accusations portées à son encontre sont diffamatoires et vexatoires.

Par conclusions récapitulatives du 2 juin 2011, monsieur Verney et madame Dabenne sollicitent, sur le fondement de l'article 544 du code civil, la confirmation du jugement déféré sauf à recevoir la demande de monsieur Verney et à porter leur indemnisation à chacun, à hauteur de 7.500,00 € outre la condamnation de monsieur Neel à leur payer des dommages intérêts de 3.000,00 € pour procédure abusive et la somme de 4.000,00 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils estiment que :

* le comportement nuisible de monsieur Neel est constitutif d'un trouble anormal du voisinage,

* leurs vendeurs, victimes de celui-ci, ont précisément vendu pour échapper à son attitude,

* chacun d'eux subit un préjudice de ce fait.

La clôture de la procédure est intervenue le 12 novembre 2013.

SUR CE :

1/ sur la demande au titre du trouble anormal du voisinage :

Attendu que par application de l'article 544 du code civil, nul ne doit occasionner à autrui un trouble anormal de voisinage ;

Attendu que monsieur Verney et madame Dabenne qui doivent démontrer que les nuisances invoquées, même en l'absence de toute infraction aux règlements, excédent les inconvénients normaux du voisinage, versent aux débats des éléments concernant une action en bornage qui les oppose aux époux Neel qui ne concerne pas le présent litige sauf à démontrer de plus fort que les relations de voisinage sont conflictuelles ;

Que par ailleurs, ils versent des attestations précises à savoir détaillant la date des incidents, circonstanciées et concordantes de madame Kishishian, madame Yanar, monsieur Borgnetta, madame Bertino et monsieur Bertino selon lesquelles monsieur Neel épie monsieur Verney et madame Dabenne , les filme ou les photographie, générant chez eux et les amis qu'ils reçoivent un sentiment de malaise, d'inquiétude voire d'angoisse pour madame Dabenne qui se sent harcelée ;

Que monsieur Verney et madame Dabenne produisent également divers courriers de l'association syndicale Clos des Lazes sur le comportement menaçant et les nuisances sonores de monsieur Neel ;

Qu'il convient de relever que l'existence d'un vis à vis en l'absence de tous végétaux masquant la vue, n'autorise pas pour autant monsieur Neel à regarder de façon insistante et déplacée son voisinage ;

Que chacun des témoins a su décrire de façon précise et personnelle, les atteintes aux règles de bon voisinage commises par monsieur Neel ;

Qu'ainsi, monsieur Verney et madame Dabenne rapportent la preuve d'un comportement de monsieur Neel excédant les inconvénients normaux du voisinage ;

Que monsieur Neel, pour contester ces témoignages, produit à son tour des attestations en sa faveur par divers voisins qui indiquent n'avoir aucun reproche à lui adresser et entretenir avec lui et sa famille de bonnes relations ;

Que ces éléments ne sont pas de nature à contredire les attestations dont entendent se prévaloir les intimés dans la mesure où monsieur Neel peut parfaitement bien s'entendre avec certaines personnes et avoir un comportement déplacé envers d'autres ;

Qu'il justifie également de sa baisse auditive ;

Que toutefois, il n'explique pas pourquoi, il a fait, selon le témoignage de monsieur Winzerich, tourner une bétonnière à vide générant ainsi une nuisance sonore gratuite ;

Attendu que pour indemniser le trouble anormal du voisinage, il convient de rechercher si les nuisances invoquées excèdent ou non les inconvénients normaux du voisinage et non l'intensité des répercussions au plan personnel pour ceux qui les invoquent ;

Qu'ainsi, il n'y a pas lieu de distinguer entre monsieur Verney et madame Dabenne à raison d'une différence de répercussions des nuisances de monsieur Neel ;

Qu'il convient en conséquence de condamner celui-ci à payer tant à monsieur Verney qu'à madame Dabenne, une somme de 1.500,00 € chacun ;

Que le jugement déféré sera donc confirmé sur la condamnation de monsieur Neel à payer des dommages intérêts à madame Dabenne et infirmé concernant le rejet de la demande de monsieur Verney ;

2/ sur la demande en dommages intérêts de monsieur Neel :

Attendu qu'en l'absence de démonstration de l'existence de fausses déclarations de monsieur Verney et madame Dabenne , c'est à juste titre que le tribunal à rejeté la demande en dommages intérêts de monsieur Neel ;

3/ sur la demande en dommages intérêts de monsieur Verney et madame Dabenne :

Attendu que monsieur Verney et madame Dabenne ne démontrant pas davantage la réalité d'un abus de leur adversaire dans son appel de la décision déférée, ils seront déboutés de leur demande en dommages intérêts de ce chef ;

4/ sur les mesures accessoires :

Attendu que monsieur Neel succombant, supportera tout ou partie des frais de monsieur Verney et madame Dabenne non compris dans les dépens ;

Attendu pour les mêmes raisons, qu'il sera condamné aux dépens de la procédure d'appel avec distraction au profit de la SELARL Dauphin & Mihajlovic.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :

* retenu à l'encontre de monsieur Henri Neel le principe de troubles anormaux de voisinage,

* condamné monsieur Henri Neel à payer à madame Virginie Dabenne des dommages intérêts de 1.500,00 €,

* rejeté la demande reconventionnelle de monsieur Henri Neel,

* condamné monsieur Henri Neel à payer à madame Virginie Dabenne une indemnité de procédure de 500,00 € et aux dépens de première instance,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau :

Condamne monsieur Henri Neel à payer à monsieur Franck Verney des dommages intérêts de 1.500,00 €,

Y ajoutant :

Déboute monsieur Franck Verney et madame Virginie Dabenne de leur demande en dommages intérêts pour appel abusif,

Condamne monsieur Henri Neel à payer à monsieur Franck Verney et madame Virginie Dabenne la somme supplémentaire en cause d'appel de 2.000,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne monsieur Henri Neel aux dépens de la procédure d'appel avec distraction au profit de la SELARL Dauphin & Mihajlovic."

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