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Fausse identité du locataire et annulation du bail

Voici un arrêt rendu par la cour d'appel de Rennes qui a considéré que le locataire qui avait trompé le bailleur en ce qui concerne son identité, et qui ne disposait pas d'un titre de séjour régulier s'est rendu coupable d'un dol qui justifie l'annulation du bail.

"Vu le jugement, frappé du présent appel, rendu le 29 décembre 2014 par le tribunal d'instance de Vannes, qui a :

accordé l'aide juridictionnelle provisoire à M.Nariman S. et Mme Esmira D. épouse S. ;
annulé le bail d'habitation conclu le 28 février 2012 pour dol ;
dit qu'à défaut par M. et Mme Nariman S. d'avoir volontairement quitté le logement deux mois après la signification du commandement d'avoir à libérer les lieux, il sera procédé à l'expulsion de M. et Mme Nariman S. et à celle de tous occupants de leur fait, avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, si besoin est, et au transport des meubles laissés dans les lieux aux frais des expulsés dans tel garde-meuble désigné par ces derniers ou à défaut par le bailleur ;
condamné solidairement M. et Mme Nariman S. à payer à l'office public de l'habitat Vannes Golfe Habitat la somme de 8670,84 € au titre de son préjudice avec intérêt au taux légal à compter du présent jugement ;
condamné solidairement M. et Mme Nariman S. à payer à l'office public de l'habitat Vannes Golfe Habitat une indemnité d'occupation de 700 €, à compter de ce jour ;
dit que l'indemnité d'occupation sera due au pro-rata temporis et payable à terme et au plus tard le 5 du mois suivant ;
rejeté tous les autres chefs de demandes des parties ;
condamné in solidum M. et Mme Nariman S. à verser à l'office public de l'habitat Vannes Golfe Habitat la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
ordonné l'exécution provisoire ;
ordonné la communication du présent jugement à M. le Préfet du Morbihan ;
Vu les dernières conclusions, en date du 24 avril 2015, de M. Nariman S. et Mme Esmira D. épouse S., appelants, tendant à :

déclarer l'appel recevable ;
réformer le jugement en date du 29 décembre 2014, sauf en ce qu'il a dit qu'il n'y avait pas lieu de faire application des dispositions de 2ème alinéa de l'article L 412-l du code des procédures civiles d'exécution ;
débouter le bailleur de toutes ses autres demandes, fins et prétentions reconventionnelles ou d'incident ;
si l'expulsion devait être ordonnée judiciairement, décerner acte aux concluants de ce qu'ils sollicitent le bénéfice des dispositions de l'article L 412-6 du code des procédures civiles d'exécution ;
subsidiairement, décerner acte aux concluants de ce qu'ils sollicitent le bénéfice des dispositions des articles L 412-3 et 4 du code des procédures civiles d'exécution ;
en conséquence, accorder aux concluants des délais dont la durée sera fixée par la juridiction de céans ;
dire et juger que les concluants bénéficieront de délais de paiement sur 3 ans , concernant le paiement de la somme de 8 670.84 € ;
réduire à de plus justes proportions l'indemnité d'occupation qui serait éventuellement prononcée ;
décerner acte aux concluants de ce qu'ils sollicitent le bénéfice des dispositions de l'article L 412-6 du code des procédures civiles d'exécution ;
réduire à de plus justes proportions la somme qui serait éventuellement accordée au demandeur sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
dépens comme de droit ;
Vu les dernières conclusions, en date du 16 juin 2015, de l'office public de l'habitat Vannes Golfe Habitat, intimé, tendant à :

confirmer le jugement du tribunal d'instance de Vannes du 29 décembre 2014, sauf sur les chefs de condamnations intéressant la demande d'expulsion qui est désormais sans objet, les occupants ayant libéré les lieux le 24 avril 2015 ;
condamner solidairement les appelants au paiement de la somme de 13.331,97 € correspondant aux dommages-intérêts alloués par la juridiction de première instance, augmentée des indemnités d'occupation prorata temporis échues postérieurement du 14 novembre 2014 au 24 avril 2015 ;
condamner in solidum les appelants au paiement de la somme de 1.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamner les mêmes sous la même forme aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
débouter les époux Nariman S. de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 16 mars 2017 ;

SUR QUOI, LA COUR

Selon contrat du 28 février 2012, l'office public de l'habitat Vannes Golfe Habitat a donné a bail à M. Narik S. un appartement sis [...], [...] moyennant le paiement d'un loyer mensuel de 320,48 € révisable, outre 65,94 € d'avance sur charges et le versement d'un dépôt de garantie de 320 €.

Le 3 avril 2013, , l'office public de l'habitat Vannes Golfe Habitat a mis en demeure son locataire de payer la somme de 1249,61 €.

Il s'est avéré que M. Narik S. se nommait en réalité Nariman S. et Mme Esmira D. épouse S., son épouse, Esmira D. épouse S..

Suivant acte d'huissier en date du 7 juillet 2014, l'office public de l'habitat Vannes Golfe Habitat a fait assigner M. Nariman S. et Mme Esmira D. épouse S. afin d'obtenir, avec exécution provisoire, à titre principal, sur le fondement de l'article 1116 du code civil, la nullité du contrat de bail en date du 15 mars 2012, et subsidiairement, la résiliation du bail.

Par le jugement déféré, le tribunal a prononcé la nullité du bail pour dol, sur le fondement de l'article 1116 du code civil , au motif que les locataires ont produit des faux documents pour conclure le bail sous une fausse identité alors que l'organisme bailleur n'aurait jamais conclu ce bail s'il avait eu connaissance de cette fausse identité l'empêchant de faire exécuter tout jugement en cas de manquement par le locataire à ses obligations contractuelles. Il a condamné M. et Mme S. sans droit ni titre au paiement d'une indemnité d'occupation et de dommages et intérêts du fait du non paiement des loyers et charges et les a déboutés de leur demande de délais de paiement.

M. et Mme Nariman S. ont libéré les lieux le 24 avril 2015 pour s'installer chez leurs parents et beaux-parents lesquels font l'objet d'une procédure identique.

1. M. et Mme S. soutiennent que le dol n'est pas caractérisé au motif qu'ils n'ont jamais eu l'intention de frauder, que leurs parents sont arrivés en France en 2003 sous un faux nom par peur des représailles de la communauté russe et que seule leur volonté de reprendre leur identité d'origine, dont le bailleur social a été tenu informé, est à l'origine de la procédure pénale intentée à l'encontre de leur parents pour faux documents et de la suppression des prestations sociales dont les aides au logement. Ils demandent donc à la cour de réformer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du bail.

L'office public de l'habitat Vannes Golfe Habitat rétorque qu'ils ne rapportent aucune preuve des supposées craintes de représailles de la communauté russe à Vannes, que la réalité n'est pas qu'ils ont voulu reprendre leur nom d'origine mais qu'ils y ont été contraints du fait de la procédure pénale engagée contre les parents de M. S. qui avaient également obtenu des titres de séjour sous une fausse identité, que leurs loyers étaient impayés avant même la suppression des aides sociales, que les parents de M. S. chez qui ils résident désormais font l'objet d'une procédure identique devant la cour et ne règlent pas plus leur dette vis à vis de lui. Il demande la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu l'existence d'un dol.

M. S., seul signataire du bail, ne justifie aucunement ni de la date de son arrivée en France ni des raisons qui ont pu motiver l'établissement d'un titre de séjour sous une fausse identité. Il n'est pas contesté qu'il a produit ce titre de séjour pour obtenir un logement du bailleur social lequel n'aurait à l'évidence pas contracté s'il avait su que le document présenté, à savoir un titre de séjour au nom de Narik S. valable jusqu'au 7 juillet 2012, était un faux et que l'identité de son co-contractant n'était pas exacte, ce qui aurait empêché toute exécution forcée à son égard. Alors que l'aide personnalisée au logement lui a été versée par la CAF jusqu'en juillet 2014, la dette de loyer était de 7 159,67 € à cette date et de 8 670,84 € au 31 octobre 2014. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a prononcé la nullité du bail conclu le 28 février 2012 pour dol.

2. La demande de délais pour quitter les lieux formée par M. et Mme S. est devenue sans objet puisqu'ils ont quitté le logement le 24 avril 2015 ainsi qu'il ressort de l'état des lieux de sortie établi à cette date. De même, la demande d'expulsion se trouve désormais sans objet comme le relève l'office public de l'habitat Vannes Golfe Habitat.

3. M. et Mme S. ne contestent pas devoir la somme de 8 670,84 € réclamée à titre de dommages et intérêts et correspondant aux loyers et charges impayés au 31 octobre 2014. En revanche, ils demandent la réduction de l'indemnité d'occupation fixée par le premier juge à la somme de 700 € par mois, à de plus justes proportions.

L'office public de l'habitat Vannes Golfe Habitat soutient que le montant de l'indemnité d'occupation n'est nullement excessif et que sa dette s'élève à la somme de 13 331,97 € au 3 juin 2015, M. et Mme S. n'ayant versé aucune somme depuis le jugement déféré.

Le montant de l'indemnité mensuelle d'occupation apparaît excessif en ce qu'il a été fixé à la somme de 700 € alors que le montant du loyer courant était de 470,20 € au 31 décembre 2014 et que les époux S. ont quitté les lieux en avril 2015. Elle sera fixée à la somme de 470,20 € pour la période du 29 décembre 2014 au 24 avril 2015.

En conséquence, la créance de l'organisme bailleur s'élève à la somme de 11 398 € ( 8 670,84 + 2 351 + 376,16) au titre des dommages et intérêts augmentés des indemnités d'occupation et le jugement sera infirmé de ce chef.

4. M. et Mme S. n'ont réglé aucune somme alors qu'ils ont bénéficié de fait de larges délais de paiement depuis 2015 et que M. S. bénéfice d'un emploi en contrat à durée indéterminée. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté leur demande de délais de paiement.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a prononcé l'expulsion de M. et Mme S. et les a condamnés à payer la somme de 8 670,84 € à titre de dommages et intérêts et une indemnité mensuelle d'occupation de 700 €';

Statuant à nouveau sur ces points,

Dit que la demande d'expulsion n'a plus d'objet puisque M. et Mme S. ont quitté les lieux le 24 avril 2015';

Dit que la demande de délais pour quitter les lieux est également devenue sans objet ';

Condamne solidairement M. et Mme S. à payer à l'office public de l'habitat Vannes Golfe Habitat la somme de 11 398 € au titre des dommages et intérêts et indemnités d'occupation jusqu'au 24 avril 2015 ;

Condamne M. et Mme S. aux dépens';

Condamne M. et Mme S. à payer à l'office public de l'habitat Vannes Golfe Habitat la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile."

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