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Troubles du voisinage et règles d'urbanisme

Le respect des règles d'urbanisme n'exclut pas le "principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage" :


"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 25 mars 2003), que les époux X... ont chargé la société ECC de la construction d'une maison d'habitation sur un terrain leur appartenant ; que cette maison n'étant pas conforme au permis de construire, les époux X... ont obtenu un permis de construire modificatif ; que, soutenant que cette construction, qui n'entrait pas dans les prévisions du plan d'occupation des sols, lui causait un préjudice, la société civile immobilière Fara Preu (la SCI) a assigné la société ECC en paiement de dommages-intérêts ;

 

Sur le premier moyen :

 

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de déclarer sa demande irrecevable, alors, selon le moyen :

 

1 / que les dispositions de l'article L. 480-13 du Code de l'urbanisme ne profitent qu'au seul propriétaire d'immeuble auquel il est reproché d'avoir méconnu les règles d'urbanisme ou une servitude d'utilité publique ; qu'en revanche, elle ne peuvent être utilement opposées par le constructeur de maisons individuelles pour tenir en échec l'action en responsabilité civile délictuelle intentée par les tiers à raison du non-respect de ces mêmes régles et servitudes qui, dans les rapports entre le constructeur et le maître d'ouvrage, s'analyse en un manquement aux devoirs et obligations découlant du contrat de construction ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel viole les articles L. 480-13 du Code de l'urbanisme et l'article 1382 du Code civil ;

 

2 / que la SCI Fara Preu soulignait que le permis modificatif avait exclusivement porté sur l'assiette du bâtiment et sur sa hauteur, originairement déclarée à 7,65 mètres et finalement portée à 9,55 mètres ; qu'elle en déduisait que la non-conformité de la construction au permis de construire initial n'avait pas été régularisée et ne pouvait être régularisée, s'agissant de la hauteur illicite du remblai par rapport au niveau naturel du terrain ; qu'en retenant néanmoins que la SCI Fara Preu ne contestait pas la conformité de la construction réalisée par la société ECC au permis de construire modificatif du 19 avril 1999, la cour d'appel méconnaît les termes du litige dont elle était saisie et partant méconnaît les exigences de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

 

Mais attendu qu'ayant relevé, par une interprétation souveraine des conclusions ambiguës de la SCI, sans modifier l'objet du litige, que la société ECC soutenait sans être contredite que la construction était conforme au permis de construire modificatif, lequel n'avait pas fait l'objet de recours devant la juridiction administrative, la cour d'appel a exactement retenu que la SCI ne pouvait avoir davantage de droits contre l'entrepreneur qui avait fait les travaux que contre le maître de l'ouvrage puisque le préjudice éventuel résultait du même fait générateur ;

 

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

 

Mais sur le second moyen :

 

Vu le principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage ;

 

Attendu que pour rejeter la demande de la SCI fondée sur l'existence d'un tel trouble, l'arrêt retient que celle-ci ne prétend pas que les vues créées sur ses fonds l'avaient été en violation des dispositions des articles 678 et 679 du Code civil ;

 

Qu'en statuant ainsi, alors que le respect des dispositions légales n'exclut pas l'existence éventuelle de troubles excédant les inconvénients normaux du voisinage, la cour d'appel a violé le principe susvisé ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de la SCI Fara Preu en ce qu'elle était fondée sur l'existence de troubles anormaux de voisinage, l'arrêt rendu le 25 mars 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

 

Condamne la société ECC aux dépens ;

 

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société ECC à payer à la société Fara Preu la somme de 2 000 euros ;

 

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

 

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille cinq."

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