Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Auchan n'avait pas intérêt à agir contre le permis de construire de Costco

C'est ce que juge cette décision de la CAA de Versailles.

costcowho.jpg

 

"Procédure contentieuse antérieure :

La SA Auchan France a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté en date du 2 décembre 2014 par lequel le maire de la commune de Villebon-sur-Yvette a au nom de l'Etat accordé un permis de construire à la société Costco France pour la construction d'une surface commerciale, ainsi que la décision du 16 avril 2014 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France a dispensé la société Costco Wholesale de la réalisation d'une étude d'impact pour la construction de cette surface commerciale.

Par un jugement n° 1500613 du 10 juin 2016, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 5 août 2016, le 11 décembre 2017, le 13 décembre 2017, le 1er octobre 2018 et le 6 novembre 2018, la SA Auchan France, représentée par Me Gallois, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4° de mettre à la charge de la société Costco le versement de la somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SA Auchan France soutient :
- à l'encontre de la décision de dispense d'étude d'impact : la société requérante a intérêt à agir contre cette décision qui n'étant pas une mesure préparatoire fait grief ; cette décision est affectée d'incompétence et d'un défaut de motivation ; elle est illégale du fait de l'inconventionnalité de l'article R. 122-3 du code de l'environnement, qui est contraire à l'article 9 de la convention sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement, signée à Aarhus le 25 juin 1998, et à l'article 11 de la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation du risque sanitaire et des flux de circulation générés par le projet de construction ; elle est incompatible avec le schéma directeur de la région d'Ile-de-France ; elle a été obtenue par fraude ;
- à l'encontre de l'arrêté de permis de construire valant autorisation d'établissement recevant du public : la société requérante a intérêt à agir contre cet arrêté ; le permis de construire a été accordé au vu d'un dossier de demande incomplet ; il présente des vices de forme, faute de viser l'avis de l'agence régionale de santé et les prescriptions relatives aux porteurs d'implants et de stimulateurs cardiaques ; il est incompatible avec le schéma directeur de la région d'Ile-de-France ; il méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, du fait des risques sanitaires liés à la proximité du centre radioélectrique d'émission et de réception Télé Diffusion de France de Villebon-sur-Yvette.
.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code de l'environnement ;
- Le code de l'urbanisme ;
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guével,
- les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., substituant Me Gallois, pour la SA Auchan France et de MeB..., pour la société Costco France.


Considérant ce qui suit :

1. La SA Auchan France relève régulièrement appel du jugement n° 1500613 du 10 juin 2016 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision du 2 décembre 2014 du maire de la commune de Villebon-sur-Yvette accordant au nom de l'Etat à la société Costco France un permis de construire un bâtiment à usage commercial d'une SHON de 16 555 m² et d'une surface de vente de 12 000 m², et, d'autre part, de la décision du 16 avril 2014 du préfet de la région Ile-de-France dispensant la société Costco Wholesale de la réalisation d'une étude d'impact pour l'édification de ce bâtiment.

Sur le bien-fondé :

En ce qui concerne la décision du 16 avril 2014 du préfet de la région Ile-de-France :

2. L'article L. 122-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable, dispose : " I.- Les projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements publics et privés qui, par leur nature, leurs dimensions ou leur localisation sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine sont précédés d'une étude d'impact. / Ces projets sont soumis à étude d'impact en fonction de critères et de seuils définis par voie réglementaire et, pour certains d'entre eux, après un examen au cas par cas effectué par l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement. (...). ". L'article R. 122-2 du même code énonce : " I.-Les travaux, ouvrages ou aménagements énumérés dans le tableau annexé au présent article sont soumis à une étude d'impact soit de façon systématique, soit après un examen au cas par cas, en fonction des critères précisés dans ce tableau. (...) ". Il ressort du 36° du tableau annexé à cet article, dans sa rédaction applicable, que les travaux ou constructions soumis à permis de construire, sur le territoire d'une commune dotée, à la date du dépôt de la demande, d'un plan local d'urbanisme qui seront " réalisés en une ou plusieurs phases, lorsque l'opération crée une SHON supérieure ou égale à 10 000 mètres carrés et inférieure à 40 000 mètres carrés sont soumis à un examen au cas par cas. ". Selon l'article R. 122-3 du même code : " I.-Pour les projets relevant d'un examen au cas par cas en application de l'article R. 122-2, l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement, définie à l'article R. 122-6, examine, au regard des informations fournies par le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage, si le projet doit faire l'objet d'une étude d'impact. / Les informations demandées au pétitionnaire sont définies dans un formulaire de demande d'examen au cas par cas dont le contenu est précisé par arrêté du ministre chargé de l'environnement. Ce formulaire comprend notamment : / une description des caractéristiques principales du projet, notamment sa nature, sa localisation et ses dimensions ; / une description succincte des éléments visés aux 2° et 3° du II de l'article R. 122-5 susceptibles d'être affectés de manière notable par le projet. (...) IV.-L'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement dispose d'un délai de trente-cinq jours à compter de la réception du formulaire complet pour informer, par décision motivée, le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage de la nécessité ou non de réaliser une étude d'impact. L'absence de réponse au terme de ce délai vaut obligation de réaliser une étude d'impact. (...) / V.-Tout recours contentieux contre la décision imposant la réalisation d'une étude d'impact doit, à peine d'irrecevabilité, être précédé d'un recours administratif préalable devant l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement qui a pris la décision. / (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions que si la décision imposant la réalisation d'une étude d'impact est, en vertu des dispositions du V de l'article R. 122-3 du code de l'environnement, un acte faisant grief susceptible d'être déféré au juge de l'excès de pouvoir après exercice d'un recours administratif préalable, tel n'est pas le cas de l'acte par lequel l'autorité de l'Etat compétente en matière d'environnement décide de dispenser d'étude d'impact un projet mentionné à l'article R. 122-2 du code de l'environnement. Un tel acte a le caractère d'une mesure préparatoire à la décision prise sur le projet, insusceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir, eu égard tant à son objet qu'aux règles particulières prévues au V de l'article R. 122-3 du code de l'environnement pour contester la décision imposant la réalisation d'une étude d'impact. Cette décision de dispense d'étude d'impact ne peut donc être contestée qu'à l'occasion de l'exercice d'un recours contre la décision autorisant le projet en cause.
4. Par suite, si l'examen au cas par cas, au titre du 36° du tableau mentionné au point 2, a conduit le préfet de la région Ile-de-France à dispenser d'une étude d'impact le projet de construction d'un ensemble commercial à Villebon-sur-Yvette, cette décision qui a le caractère d'un acte préparatoire d'une demande de permis de construire, ne constitue pas une décision faisant grief, susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la SA Auchan France n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande d'annulation de cette décision de dispense d'étude d'impact.
En ce qui concerne la décision du 2 décembre 2014 du maire de la commune de Villebon-sur-Yvette :

6. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ".

7. Il résulte des dispositions de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Il appartient ensuite au juge de l'excès de pouvoir de former sa conviction sur la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci.

8. Il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier des études de circulation et de trafic produites, que, compte tenu de sa localisation, notamment sa proximité par rapport à l'autoroute A 10, de ses caractéristiques propres comme sa superficie de vente et les dimensions du parking prévu, et des données de fréquentation de clientèle escomptée, l'ensemble commercial autorisé par le permis de construire en litige impliquerait des flux de circulation et des risques d'embouteillage routier, en particulier sur la voie RD 59 longeant les deux surfaces commerciales, de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de l'établissement commercial exploité par la SA Auchan France et situé à 4,2 km du projet de la société Costco France. En outre, l'existence du seul intérêt commercial ne saurait donner intérêt pour agir à la SA Auchan France. Par ailleurs, si la SA Auchan France fait état des risques auxquels seraient exposés les porteurs d'implants actifs et de stimulateurs cardiaques du fait des champs électromagnétiques émis par le centre radioélectrique d'émission et de réception de Télé Diffusion de France implanté à proximité du projet commercial autorisé, elle ne démontre pas un intérêt au respect de la législation relative aux établissements recevant du public suffisant pour lui donner qualité pour agir contre une décision de permis de construire valant autorisation d'établissement recevant du public au titre de l'article L. 111-8 du code de la construction et de l'habitation ainsi que le prévoit l'article L. 425-3 du code de l'urbanisme. Dans ces conditions, la société requérante ne justifie pas d'un intérêt à contester la décision litigieuse prise le 2 décembre 2014 au nom de l'Etat par le maire de la commune de Villebon-sur-Yvette.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la SA Auchan France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué.


Sur les conclusions de la société Costco France tendant à l'application de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme :

10. Aux termes de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme : " Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager est mis en oeuvre dans des conditions qui traduisent un comportement abusif de la part du requérant et qui causent un préjudice au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel. ".

11. La société Costco France demande la condamnation de la SA Auchan France au versement d'une somme de 330 000 euros représentative du montant dont elle a dû s'acquitter auprès de la SAS Parc de l'Atlantique sur la période allant du 11 mai 2015 au 19 juillet 2016 en application de la promesse de vente modifiée du 8 novembre 2013. Toutefois, il ressort des modifications apportées à cette promesse de vente que la somme ci-dessus a été mise à la charge de la société Costco France, à raison de 22 000 euros mensuels, du fait de la prorogation de la condition suspensive relative à la seule autorisation d'exploitation commerciale délivrée le 14 mai 2014 par la commission nationale d'aménagement commercial (CNAC), distincte du permis de construire valant autorisation d'établissement recevant du public, et dont le contentieux, étranger au présent litige relatif au permis de construire, a donné lieu à des décisions n° 396271, et n° 396487 du 13 juillet 2016 du Conseil d'Etat. Si la société Costco France se prévaut également de la condition suspensive afférente au permis de construire valant autorisation d'établissement recevant du public, cette condition n'a donné lieu au versement d'aucune indemnité. Dans ces conditions, la société Costco France ne justifie pas d'un préjudice en relation directe et certaine avec le comportement abusif attribué à la SA Auchan France. Par suite, ses conclusions sont vouées au rejet.

Sur les frais liés au litige :

12. Par voie de conséquence du rejet de sa requête, les conclusions de la SA Auchan France présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la SA Auchan France une somme de 5 000 euros à verser à la société Costco France sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SA Auchan France est rejetée.
Article 2 : La SA Auchan France versera à la société Costco France une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions de la société Costco France présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme sont rejetées."

Les commentaires sont fermés.