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Pas de faute de l'acheteur à passer par une autre agence immobilière

Faire une offre par une agence autre que celle qui a été à l'origine de la visite n'est pas fautif. (Mais ce peut être une faute de négocier de la part du vendeur dans ce cas, même si le mandat n'est pas exclusif).

"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 14 janvier 2015), que M. X...et Mme Y...ont confié à la société Cabinet Delaitre immobilier (le Cabinet Delaitre) un mandat exclusif de vendre leur maison au prix de 460 000 euros, outre les honoraires de l'agence immobilière fixés à la somme de 23 000 euros, soit un prix total de 483 000 euros ; qu'après expiration de la période d'exclusivité, le Cabinet Delaitre a fait visiter le bien à Mme Z...et M. A... qui ont émis une offre d'achat d'un montant global de 460 000 euros, frais d'agence inclus ; que, des tiers ayant présenté une offre supérieure, Mme Z...et M. A... ont formulé, par l'intermédiaire d'une autre agence immobilière, une nouvelle offre au prix total de 475 000 euros, laquelle a été acceptée par M. X...et Mme Y...; que le Cabinet Delaitre a assigné les vendeurs et les acquéreurs sur le fondement de l'article 1382 du code civil, en indemnisation de son préjudice ;

Attendu que le Cabinet Delaitre fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts formée contre Mme Z...et M. A..., alors, selon le moyen, que l'acquéreur qui visite un bien par l'entremise d'une agence immobilière s'oblige à lui soumettre en priorité les offres d'achat qu'il formule ; qu'en jugeant qu'aucune faute n'était imputable aux acquéreurs au motif « qu'il était effectivement loisible aux consorts Z...-A... d'avoir recours à l'intermédiaire d'une autre agence », quand il résultait de ses propres constatations qu'ils n'avaient pas soumis au Cabinet Delaitre, qui le leur avait pourtant fait visiter, l'offre d'achat de l'immeuble litigieux d'un montant de 475 000 euros, bien supérieur à celle adressée à ce cabinet, qu'ils ont soumise dès le lendemain à un concurrent ne leur ayant pas fait visiter le bien, de sorte qu'ils avaient fait preuve d'un comportement déloyal à l'égard du Cabinet Delaitre, le privant fautivement de la commission à laquelle il avait droit, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu que n'est pas fautif le fait, pour l'acquéreur non lié contractuellement à l'agent immobilier par l'intermédiaire duquel il a visité le bien, d'adresser une nouvelle offre d'achat aux vendeurs par l'intermédiaire d'un autre agent immobilier également mandaté par ces derniers ; que c'est donc à bon droit que la cour d'appel a décidé qu'il était loisible à Mme Z...et M. A..., qu'aucun contrat ne liait au Cabinet Delaitre dont la clause d'exclusivité était expirée, de recourir, sans faute de leur part, à une autre agence immobilière pour proposer une nouvelle offre d'achat aux vendeurs ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Cabinet Delaitre immobilier aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Cabinet Delaitre immobilier et la condamne à payer à Mme Z...et M. A..., la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six avril deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour le Cabinet Delaitre immobilier

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le cabinet Delaitre de sa demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de M. A... et de Mme Z...;

AUX MOTIFS QUE même s'il n'est pas débiteur de la commission, l'acquéreur dont le comportement fautif a fait perdre celle-ci à l'agent immobilier, par l'entremise duquel il a été mis en rapport avec le vendeur qui l'avait mandaté, doit, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, réparation à cet agent immobilier de son préjudice ; qu'il convient dès lors d'apprécier si le comportement des consorts A...-Z...revêt en l'espèce un caractère fautif ; qu'à cet égard, il est constant que, par lettre du 1er avril 2010, M. A... a adressé au cabinet DELAITRE une proposition d'achat de la maison de M. et Mme X...pour un montant de 460. 000 € frais d'agence inclus (soit 437. 000 € net vendeur) valable jusqu'au mardi suivant (6 avril) au plus tard ; que dès le lendemain, 2 avril, il a signé une lettre d'intention d'achat portant sur le même bien par l'intermédiaire d'un autre agent immobilier, le cabinet ACTUEL IMMOBILIER, pour un montant de 475. 000 € comprenant une commission de 15. 000 € inférieure à la commission de 23. 000 € qui serait revenue au cabinet DELAITRE en cas d'acquisition par son intermédiaire ; que le cabinet DELAITRE impute à faute aux consorts A...-Z...le fait d'avoir pris contact avec une autre agence immobilière dont les honoraires étaient moins élevés pour évincer le cabinet DELAITRE, alors qu'ils demeuraient liés par leur première offre jusqu'au mardi 6 avril. Le tribunal les a condamnés au motif qu'ils ne pouvaient s'engager ailleurs avant l'expiration du délai courant jusqu'au 6 avril ; que pour contester toute faute de leur part, les consorts A...-Z...se prévalent, en premier lieu, d'une lettre du 3 avril 2010 qu'ils prétendent avoir adressée au cabinet DELAITRE prenant acte d'un refus de vente caractérisé qui leur aurait été opposé de la part du dit cabinet au prétexte d'une autre proposition d'achat faite par d'autres personnes intéressées ; que toutefois, le cabinet DELAITRE conteste avoir reçu une telle lettre et il ne résulte d'aucun des éléments versés aux débats que celte lettre aurait effectivement été envoyée, et en tout cas reçue, par le cabinet DELAITRE ; qu'ils font valoir, en second lieu, qu'ils n'étaient pas contractuellement liés au cabinet DELAITRE, que leur offre, fut-elle transmise par l'intermédiaire de cet agent immobilier, les liait seulement aux vendeurs, les consorts X..., et qu'ils pouvaient donc faire à ces derniers une nouvelle offre, fut-ce par l'intermédiaire d'un autre agent immobilier ; que la Cour ne peut, sur ce point, que constater qu'il était effectivement loisible aux consorts A...-Z...d'avoir recours à l'intermédiaire d'une autre agence, et ce sans faute de leur part, quand bien même cette démarche aurait eu soit pour objet, soit simplement pour effet, de soumettre l'opération à des frais d'agence moins élevés ; que quant au fait de n'avoir pas maintenu leur offre jusqu'au mardi 6 avril, il ne saurait davantage revêtir un caractère fautif, dès lors d'une part, que, fut-ce par l'intermédiaire du cabinet DELAITRE en tant que mandataire des consorts X..., c'est à ces derniers et eux seuls que cette offre était destinée, d'autre part, que l'acceptation faite, dans ce délai, par les consorts X...d'une offre, plus intéressante pour eux, faite par les consorts A...-Z...par l'intermédiaire d'une autre agence n'était pas constitutif d'une faute de leur part à l'encontre du cabinet DELAITRE auquel ne les liait plus aucune clause d'exclusivité ; qu'en l'absence de toute faute résultant soit de leur fait exclusif, soit d'un concert frauduleux avec les consorts X..., aucune condamnation ne peut être infligée aux consorts A...-Z...; que le cabinet DELAITRE sera débouté de sa demande en ce sens, par infirmation du jugement ;

ALORS QUE l'acquéreur qui visite un bien par l'entremise d'une agence immobilière s'oblige à lui soumettre en priorité les offres d'achat qu'il formule ; qu'en jugeant qu'aucune faute n'était imputable aux acquéreurs au motif « qu'il était effectivement loisible aux consorts Z...-A... d'avoir recours à l'intermédiaire d'une autre agence » (arrêt, p. 10, pén. et dernier al.), quand il résultait de ses propres constatations qu'ils n'avaient pas soumis au cabinet Delaitre, qui le leur avait pourtant fait visiter, l'offre d'achat de l'immeuble litigieux d'un montant de 475. 000 euros, bien supérieur à celle adressée à ce cabinet, qu'ils ont soumise dès le lendemain à un concurrent ne leur ayant pas fait visiter le bien, de sorte qu'ils avaient fait preuve d'un comportement déloyal à l'égard du cabinet Delaitre, le privant fautivement de la commission à laquelle il avait droit, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1382 du Code civil."

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