Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • Pacte de préférence

    Un arrêt sur le pacte de préférence :

     

    "Attendu, selon attaqué (Besançon, 1er décembre 2010), que par acte du 30 novembre 1987, la société Coopérative immobilière de l'Isle-sur- le-Doubs (la société) a conclu avec M. et Mme X... un bail commercial et un bail d'habitation ; que le bail commercial comportait un pacte de préférence suivant lequel dans l'hypothèse d'une vente des locaux loués, "le bailleur devra choisir comme acquéreur le preneur de préférence à tous autres amateurs" ; que le 29 novembre 2004, sans en informer les bénéficiaires du pacte, la société a vendu l'immeuble au prix de 300 000 euros à la société Logissim habitat ; que celle-ci a, le 23 octobre 2007, notifié un projet de vente de la totalité de l'immeuble au prix de 400 000 euros à M. et Mme X... qui l'ont accepté et ont assigné la société et la société Logissim habitat en réparation de leur préjudice ; 

    Sur le moyen unique :

    Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement de dommages-intérêts pour violation du pacte de préférence, alors, selon le moyen :

    1°/ que le pacte de préférence, qui constitue une exception au principe du libre choix du cocontractant, est d'interprétation stricte ; qu'il se renferme dans son objet et ne peut être étendu au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé, d'une part, qu'il résultait du bail commercial conclu le 30 novembre 1987 qu'un pacte de préférence était stipulé, au profit des preneurs, "pour le cas où le bailleur déciderait de vendre les locaux présentement loués", d'autre part, que ce bail portait sur un local commercial au rez-de-chaussée d'un immeuble ; qu'en affirmant que le bailleur avait violé ce pacte en s'abstenant de notifier aux locataires le projet de vente de l'ensemble de l'immeuble dans lequel se trouvaient les locaux loués, après avoir pourtant relevé que la vente projetée était d'une nature différente de celle des locaux loués, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

    2°/ que le refus du bénéficiaire d'un pacte de préférence d'acquérir le bien qui en est l'objet met fin à l'engagement souscrit par le promettant, en l'absence de fraude de ce dernier ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le promettant avait proposé le 3 mars 2004 aux bénéficiaires du pacte de préférence la vente du local commercial et de l'appartement loué, que des pourparlers s'étaient engagés et qu'ils n'avaient pas abouti faute d'accord sur le prix ; que l'arrêt attaqué n'a relevé aucune fraude du promettant ; qu'en retenant néanmoins que ce dernier aurait dû notifier aux bénéficiaires, postérieurement au refus d'acquérir exprimé par ceux-ci, le projet de vente de l'ensemble de l'immeuble dans lequel se trouvaient les locaux loués, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

    3°/ que le juge ne peut dénaturer les termes du litige tels qu'ils résultent des conclusions des parties ; qu'en l'espèce, M. et Mme X... se bornaient à soutenir que la circonstance que la société Coopérative immobilière de l'Isle-sur-le-Doubs avait omis de leur proposer la vente de l'immeuble litigieux leur avait causé un préjudice certain, tenant à la survaleur du coût d'acquisition ultérieur de l'immeuble, au montant des droits de mutation complémentaires sur le différentiel entre le prix proposé à la société Logissim habitat et le prix payé par eux in fine, au versement de loyers à fonds perdus et aux charges liées à l'obligation d'acquérir l'immeuble en son entier ; qu'en condamnant ladite société au titre de la perte d'une chance, que M. et Mme X... n'invoquaient pas, d'acquérir l'immeuble à un prix moindre, de payer des droits de mutation inférieurs et de jouir des lieux loués en qualité de propriétaires, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

    4°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, en relevant d'office le moyen tiré de la perte d'une chance d'acquérir l'immeuble à un prix moindre, de payer des droits de mutation inférieurs et de jouir des lieux en qualité de propriétaires, sans inviter au préalable les parties à formuler leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

    5°/ que seule l'existence d'une perte de chance certaine et en relation de causalité avec la faute retenue peut donner lieu à réparation ; qu'en l'espèce, pour affirmer que le non respect du pacte de préférence avait fait perdre aux bénéficiaires une chance d'acquérir à la fin de l'année 2004 l'immeuble au prix de 300 000 euros, de payer des droits de mutation inférieurs et de jouir des lieux en qualité de propriétaires, la cour d'appel a retenu qu'ils avaient eu le projet d'acquérir les lieux loués en mars 2004, qu'un établissement bancaire pouvait alors leur prêter des fonds dans la limite de 165 000 euros et que le prix proposé en mars 2004 pour les lieux loués de 260 000 euros avait été jugé excessif par eux ; qu'en statuant par de tels motifs inopérants, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les bénéficiaires auraient été en mesure d'acquérir l'immeuble litigieux si le projet de vente de celui-ci leur avait été proposé fin 2004 pour un prix de 300 000 euros, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ; 

    Mais attendu qu'ayant souverainement retenu que le pacte de préférence ne distinguait pas l'hypothèse de la vente de la totalité de l'immeuble de celle de la vente des seuls locaux loués et que, si les pourparlers faisant suite à la proposition de vente du local commercial et de l'appartement loués n'avaient pas abouti faute d'accord sur le prix, le promettant n'était pas dispensé de notifier le projet de vente concernant l'immeuble entier, la cour d'appel, qui n'a pas modifié les termes du litige et n'était pas tenue de procéder à des recherches qui ne lui étaient pas demandées, a pu en déduire que la société avait manqué à son obligation contractuelle et fait perdre à M. et Mme X... une chance d'acquérir l'immeuble au meilleur prix, de payer des droits de mutation inférieurs et d'être exonérés du paiement du loyer ;

    D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

    PAR CES MOTIFS :

    REJETTE le pourvoi ;

    Condamne la société Coopérative immobilière de l'Isle-sur-le-Doubs aux dépens ;

    Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Coopérative immobilière de l'Isle-sur-le-Doubs à payer à M. et Mme X... la somme de 2 500 euros, rejette la demande de la société Coopérative immobilière de l'Isle-sur-le-Doubs ;

    Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six juin deux mille douze.


    MOYEN ANNEXE au présent arrêt

    Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Coopérative immobilière de L'Isle-Sur-Le-Doubs

    IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR dit que la société COOPÉRATIVE IMMOBILIÈRE DE L'ISLE SUR LE DOUBS n'avait pas respecté le pacte de préférence stipulé au bail et, en conséquence, d'AVOIR condamné cette société à leur payer les sommes de 80 000 euros de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt et de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

    AUX MOTIFS QUE « par acte notarié du 30 novembre 1987, la Société COOPERATIVE IMMOBILIERE DE L'ISLE SUR LE DOUBS a conclu avec Monsieur et Madame X... un bail commercial portant sur un local destiné à l'exploitation d'une activité de pressing et nettoyage au rez-de-chaussée d'un immeuble sis ... et un bail afférent à l'appartement du 1er étage ; Selon acte authentique dressé le 29 novembre 2004 , par Maître Y..., notaire à Montbéliard, la Société COOPERATIVE IMMOBILIERE DE L'ISLE SUR LE DOUBS a vendu l'immeuble à la SA HLM LOGISSIM HABITAT au prix de 300 000 €. Par un autre acte notarié du 22 avril 2008, cette dernière a cédé l'immeuble aux époux X... au prix de 400 000 € ; (…) qu'en page 7 du bail commercial conclu le 30 novembre 1987, entre Monsieur et Madame X... et la Société COOPERATIVE IMMOBILIERE DE L'ISLE SUR LE DOUBS, il est prévu "pour le cas où le bailleur décidait de vendre les locaux présentement loués que le bailleur devra choisir comme acquéreur le preneur de préférence à tous autres amateurs, qu'à cet effet il "notifiera par LRAR le prix et les conditions de la vente projetée", que le preneur disposera d'un "délai de 15 jours partant du jour de la réception de la notification pour exercer son droit de préférence", son absence d'acceptation dans ce délai constituant un refus ; Attendu que cette clause ne distingue pas I'hypothèse de la vente de la totalité de I'immeuble englobant les locaux loués de celle de la vente des seuls locaux loués ; Attendu dès lors qu'avant de passer le 29 novembre 2004, l'acte de vente de I'ensemble immobilier, sis ..., à la Société LOGISSIM, au prix de 300.000 €, la Société COOPERATIVE IMMOBILIERE DE L'ISLE SUR LE DOUBS devait notifier aux locataires le projet de vente incluant les locaux loués ; qu'elle ne justifie pas l'avoir fait et a donc manqué à son obligation contractuelle ; Que même si précisément suite à sa proposition du 3 mars 2004 de vendre le local commercial et l'appartement loués, des pourparlers s'étaient engagés avec les époux X... et n'avaient pas abouti faute d'accord sur le prix ainsi que le révèle un courrier du 25 mars 2004, la Société COOPERATIVE IMMOBILIERE DE L'ISLE SUR LE DOUBS n'était pas dispensée de cette notification puisque la vente projetée concernant I'immeuble entier était d'une nature différente ; Attendu que la faute contractuelle de la Société COOPERATIVE IMMOBILIERE DE L'ISLE SUR LE DOUBS doit être retenue ; Attendu que le nouveau propriétaire, la Société LOGISSIM, à qui était opposable le pacte de préférence du bail, a adressé le octobre 2007 une LRAR à Monsieur et Madame X... pour les avertir en exécution dudit pacte qu'elle avait trouvé un acquéreur pour I'intégralité de I'immeuble au prix de 400.000 €, à savoir les époux A..., et pour leur impartir un délai de 15 jours à compter de la réception pour faire connaître leur intention de se porter acquéreurs aux même conditions ; Attendu que la Société LOGISSM a ainsi rempli son obligation ; que la passation d'un compromis de vente avec les époux A... le 12 octobre 2007 ne peut s'analyser en un refus de respecter le pacte de préférence alors que le compromis prévoyait sous la rubrique "autres conditions suspensives" la purge de "tous droits de préemption ou tout pacte de préférence", qu'il y a eu effectivement envoi par Maître Y..., notaire, de la lettre susvisée dans un délai de 11 jours insusceptible de générer un retard préjudiciable, sauf preuve qui n'est pas apportée ; Que les époux X... invoquent en fait un préjudice éventuel dans I'hypothèse où aucune purge du pacte de préférence ne serait intervenue ; Attendu que la Société LOGISSIM sera mise hors de cause ; Attendu que le non respect du pacte a fait perdre aux époux X... une chance d'acquérir en 2004 l'immeuble au prix de 300.000 € au lieu de 400.000 € 3 ans et demi plus tard, de payer des droits de mutation inférieurs, de jouir des lieux en qualité de propriétaire depuis cette période ce qui les aurait exonérés de loyer mais impliquait toutefois de supporter des charges foncières ; Attendu que le lien de causalité ne peut être contesté au motif que les locataires ont continué de payer les loyers sans engager de procédure, alors qu'il n'est pas contesté que la Société LOGISSIM assumait avant de devenir propriétaire la gestion au nom de la Société COOPERATIVE IMMOBILIERDE L'ISLE SURLE DOUBS et percevait les loyers, ce qui a empêché les locataires de percevoir le changement de qualité de leur interlocuteur ; Attendu également qu'il ne peut être valablement soutenu que les époux X... incapables d'acquérir en mars 2004 ne pouvaient davantage le faire en 2004 et n'ont donc pas subi de préjudice alors que les pièces versées révèlent qu'ils avaient le projet d'acquérir les lieux loués, qu'un établissement bancaire pouvait leur prêter des fonds dans la limite de 165.000 € et que le prix proposé de 260.000 € avait été jugé excessif par eux, appréciation que justifie l'estimation à 300.000 € de la totalité de I'immeuble quelques mois plus tard ; Attendu que les époux X... ne peuvent cependant réclamer un dédommagement pour les charges à supporter pour la revente des locaux autres que leur fonds de commerce et le bail et le coût de la mise en copropriété, qu'ils auraient dû assumer si le pacte avait été respecté puisqu'ils auraient aussi acquis I'immeuble entier ; Attendu dès lors qu'il convient de leur allouer une somme de 80.000 € de dommages et intérêts ; Attendu que l'équité commande de condamner la Société COOPERATIVE IMMOBILIER DE L'ISLE SUR LE DOUBS à payer 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile aux époux X..., sans mettre à la charge de ceux-ci au profit de la Société LOGISSIM d'indemnité à ce titre » ;

    1. ALORS QUE le pacte de préférence, qui constitue une exception au principe du libre choix du cocontractant, est d'interprétation stricte ; qu'il se renferme dans son objet et ne peut être étendu au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a relevé, d'une part, qu'il résultait du bail commercial conclu le 30 novembre 1987 qu'un pacte de préférence était stipulé, au profit des preneurs, "pour le cas où le bailleur déciderait de vendre les locaux présentement loués", d'autre part, que ce bail portait sur un local commercial au rez-de-chaussée d'un immeuble ; qu'en affirmant que le bailleur avait violé ce pacte en s'abstenant de notifier aux locataires le projet de vente de l'ensemble de l'immeuble dans lequel se trouvaient les locaux loués, après avoir pourtant relevé que la vente projetée était d'une nature différente de celle des locaux loués, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;

    2. ALORS subsidiairement QUE le refus du bénéficiaire d'un pacte de préférence d'acquérir le bien qui en est l'objet met fin à l'engagement souscrit par le promettant, en l'absence de fraude de ce dernier ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que le promettant avait proposé le 3 mars 2004 aux bénéficiaires du pacte de préférence la vente du local commercial et de l'appartement loué, que des pourparlers s'étaient engagés et qu'ils n'avaient pas abouti faute d'accord sur le prix ; que l'arrêt attaqué n'a relevé aucune fraude du promettant ; qu'en retenant néanmoins que ce dernier aurait dû notifier aux bénéficiaires, postérieurement au refus d'acquérir exprimé par ceux-ci, le projet de vente de l'ensemble de l'immeuble dans lequel se trouvaient les locaux loués, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;

    3. ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les termes du litige tels qu'ils résultent des conclusions des parties ; qu'en l'espèce, Monsieur et Madame X... se bornaient à soutenir que la circonstance que la société COOPÉRATIVE IMMOBILIÈRE DE L'ISLE SUR LE DOUBS avait omis de leur proposer la vente de l'immeuble litigieux leur avait causé un préjudice certain, tenant à la survaleur du coût d'acquisition ultérieur de l'immeuble, au montant des droits de mutation complémentaires sur le différentiel entre le prix proposé à la société LOGISSIM HABITAT et le prix payé par eux in fine, au versement de loyers à fonds perdus et aux charges liées à l'obligation d'acquérir l'immeuble en son entier (v. conclusions récapitulatives p.11) ; qu'en condamnant ladite société au titre de la perte d'une chance, que Monsieur et Madame X... n'invoquaient pas, d'acquérir l'immeuble à un prix moindre, de payer des droits de mutation inférieurs et de jouir des lieux loués en qualité de propriétaires, la Cour d'appel a dénaturé les termes du litige, en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ;

    4. ALORS à tout le moins QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, en relevant d'office le moyen tiré de la perte d'une chance d'acquérir l'immeuble à un prix moindre, de payer des droits de mutation inférieurs et de jouir des lieux en qualité de propriétaires, sans inviter au préalable les parties à formuler leurs observations, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;

    5. ALORS en toute hypothèse QUE seule l'existence d'une perte de chance certaine et en relation de causalité avec la faute retenue peut donner lieu à réparation ; qu'en l'espèce, pour affirmer que le non respect du pacte de préférence avait fait perdre aux bénéficiaires une chance d'acquérir à la fin de l'année 2004 l'immeuble au prix de 300 000 euros, de payer des droits de mutation inférieurs et de jouir des lieux en qualité de propriétaires, la Cour d'appel a retenu qu'ils avaient eu le projet d'acquérir les lieux loués en mars 2004, qu'un établissement bancaire pouvait alors leur prêter des fonds dans la limite de 165 000 euros et que le prix proposé en mars 2004 pour les lieux loués de 260 000 euros avait été jugé excessif par eux ; qu'en statuant par de tels motifs inopérants, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les bénéficiaires auraient été en mesure d'acquérir l'immeuble litigieux si le projet de vente de celui-ci leur avait été proposé fin 2004 pour un prix de 300.000 euros, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil."

  • Ligne ERDF voie de fait et acceptation tacite de l'ouvrage

    Voici un arrêt qui juge que l'inaction pendant de longues années des propriétaires successifs des parcelles, en pleine connaissance de l'ouvrage réalisé, caractérisait une acceptation tacite de cet ouvrage et excluait la voie de fait :

     

    "Attendu, selon l'arrêt attaqué (Limoges, 25 mai 2011), que M. X..., devenu propriétaire de parcelles sur lesquelles a été implantée sans titre une ligne électrique aérienne, et désireux de procéder à des plantations d'arbres à proximité, en a demandé le déplacement à ERDF, alléguant une voie de fait ;

    Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de retenir l'incompétence de la cour d'appel en l'absence de voie de fait, alors, selon le moyen :

    1°/ que la propriété est le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ; qu'en décidant qu'en l'état de parcelles à vocation agricole, l'impossibilité de planter des arbres 10 mètres sous la ligne électrique, stérilisant 14 % de la surface et entraînant une perte de production à hauteur de 4.322 € ne caractérisait pas une atteinte grossière et intolérable à la propriété immobilière, la cour d'appel a violé l'article 544 du code civil, ensemble l'article 1er du Protocole additionnel n° 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

    2°/ que constitue une atteinte grave à la propriété, et par suite, une voie de fait, l'implantation irrégulière, par l'administration, d'un ouvrage sur une propriété privée ; qu'en décidant que l'implantation d'une ligne électrique sur la parcelle appartenant à M. X... ne constituait pas une voie de fait, aux motifs que les parcelles en cause avaient une vocation agricole, et que l'impossibilité de planter des arbres 10 mètres sous la ligne électrique, stérilisant 14 % de la surface et entraînant une perte de production à hauteur de 4.322 € ne caractérisait pas une atteinte grossière et intolérable à sa propriété immobilière, tout en constatant que la ligne électrique avait été implantée en dehors de toute procédure administrative régulière, la cour d'appel a violé l'article 545 du code civil, ensemble la loi des 16-21 août 1790 ;

    3°/ que le silence ne vaut pas, à lui seul, acceptation ; qu'en déduisant de la seule ancienneté de l'implantation de la ligne l'acceptation tacite des propriétaires successifs, la cour d'appel a violé les articles 1101 et 1108 du code civil ;

    4°/ que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité ; qu'en décidant que l'acceptation tacite des propriétaires successifs pendant de longues années excluait la voie de fait, laquelle supposait, par le caractère intolérable du trouble commis, la réaction immédiate de ceux qui en sont victimes, tout en constatant que la société ERDF ne pouvait justifier du respect des procédures prévues par les articles 12 et 12 bis de la loi du 15 juin 1906 et sans relever que M. X..., qui avait acquis les terrains le 30 octobre 2006 et sollicité dès le 7 septembre 2007 le déplacement de la ligne électrique, eût lui-même donné son consentement à l'implantation de ces lignes, la cour d'appel a violé l'article 545 du code civil, ensemble la loi des 16-21 août 1790 ;

    5°/ que constitue une voie de fait la décision de l'administration portant une atteinte grave au droit de propriété, si cette décision est manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir appartenant à l'autorité administrative ; qu'en décidant que, même si elle ne justifiait pas avoir respecté les dispositions des articles 12 et 12 bis de la loi du 15 juin 1906, la société ERDF avait agi dans le cadre de ses pouvoirs, dès lors que sa mission consistait, dans l'intérêt commun, à électrifier le territoire, sans constater qu'elle disposait d'un pouvoir de procéder à l'implantation de lignes électriques en dehors des procédures légales visées par les articles 12 et 12 bis de la loi du 15 juin 1906, la cour d'appel a violé l'article 545 du code civil, ensemble la loi des 16-21 août 1790 ;

    Mais attendu qu'ayant relevé qu'il n'était pas contesté que la ligne électrique aérienne était ancienne et retenu que, quand bien même ERDF ne pouvait justifier d'un titre, l'inaction pendant de longues années des propriétaires successifs des parcelles, en pleine connaissance de l'ouvrage réalisé, caractérisait une acceptation tacite de cet ouvrage, la cour d'appel, indépendamment d'un motif erroné mais surabondant relatif à la justification de l'empiétement par les missions d'intérêt général confiées à ERDF, a pu en déduire, sans méconnaître la portée du droit de propriété de M. X..., que la voie de fait n'était pas caractérisée ;

    D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

    PAR CES MOTIFS:

    REJETTE le pourvoi ;

    Condamne M. X... aux dépens ;

    Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

    Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille douze.

    MOYEN ANNEXE au présent arrêt

    Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour M. X... 

    Il est reproché à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir jugé qu'il n'existait pas de voie de fait commise par la société ERDF et le syndicat intercommunal d'électrification de la Haute-Vézère au préjudice de Monsieur Christophe X... et de s'être déclaré en conséquence incompétent pour connaître du litige les opposant ;

    AUX MOTIFS PROPRES QUE « les demandes et moyens des parties demeurent, à titre principal, les mêmes qu'en première instance et qu'il n'a été produit, à l'occasion de l'appel, aucun élément nouveau qui n'ait été connu de la juridiction du premier degré ; que c'est par des motifs exacts en fait et pertinents en droit, que la cour adopte, que le tribunal, après avoir justement considéré que ERDF ne pouvait ni justifier du respect des procédures prévues par les articles 12 et 12 bis de la loi du 15 juin 1906 ni se prévaloir utilement des dispositions de l'article 690 du code civil inapplicables en présence de règles dérogatoires relatives à la servitude de passage d'une ligne électrique résultant desdits textes, a néanmoins estimé que les éléments de l'espèce n'étaient pas de nature à caractériser une voie de fait de l'administration ; que celle-ci en effet a agi, alors même qu'elle ne justifie pas avoir respecté les dispositions des articles 12 et 12 bis de la loi du 15 juin 1906, dans le cadre de ses pouvoirs ; que l'implantation de lignes électriques ressort en effet de la mission de ERDF, laquelle consiste, dans l'intérêt commun, à électrifier le territoire ; que la cour ajoutera que, s'il ne peut être déterminé avec précision la date d'implantation de la ligne en cause, il n'est pas sérieusement contesté qu'elle est ancienne en sorte que l'acceptation tacite des propriétaires successifs pendant de longues années exclut l'existence d'une voie de fait qui suppose en effet, de par le caractère intolérable du trouble commis, la réaction immédiate de ceux qui en sont victimes » ;

    ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « s'agissant d'un litige relatif à une servitude administrative, il convient de rappeler que le juge judiciaire n'est compétent que si une voie de fait est démontrée ; à défaut de voie de fait, seul le juge administratif est compétent pour apprécier le caractère disproportionné ou proportionné d'une atteinte à une propriété privée dans l'intérêt général ; les articles 12 et 12 bis de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie électrique concernent les droits que la concession déclarée d'utilité publique confère à son titulaire pour l'installation de lignes de transport électrique ; ils prévoient deux procédés possibles : l'expropriation et la servitude qui n'entraîne pas la dépossession du bien ; ces textes permettent à EDF, au terme d'une procédure spéciale impliquant déclaration d'utilité publique et indemnisation, d'imposer à un propriétaire privé, le survol de son terrain par une ligne de distribution d'électricité ; il s'agit dès lors de règles dérogatoires du droit commun des servitudes qui excluent le recours aux règles régissant les servitudes de droit privé instituées pour l'utilité des particuliers ; ainsi ERDF ne saurait invoquer la prescription acquisitive trentenaire de l'article 690 du code civil à son profit dans les hypothèses où elle se serait dispensée de respecter les textes en vigueur ; en l'espèce, il n'est pas soutenu qu'une déclaration d'utilité publique ait été réalisée et aucune convention entre le propriétaire de la parcelle litigieuse et EDF n'est produite aux débats ; le fait que ERDF affirme qu'une convention a été nécessairement signée entre le propriétaire des parelles à l'époque de l'implantation de poteaux électriques et ses services ne suffit pas à établir l'existence de cette convention, faute de tout commencement de preuve ; enfin ERDF ne saurait se prévaloir d'une prescription acquisitive non applicable, seules les règles dérogatoires du droit commun édictées par la loi du 15 juin 1906 étant applicables ; l'acte de donation par lequel Monsieur X... est devenu propriétaire de la parcelle litigieuse contient certes une clause stipulant qu'il prend le bien dans l'état où il se trouve et accepte toute servitude active ou passive éventuelle, y compris des servitudes d'urbanisme ; mais cet acte n'est opposable qu'entre les parties signataires et ne saurait être invoqué dans les relations entre Monsieur X... et ERDF pour justifier la servitude administrative litigieuse ; il résulte de l'ensemble de ces éléments que ERDF ne justifie pas avoir respecté la réglementation en vigueur lors de l'implantation de la ligne électrique litigieuse ; cette constatation n'établit pas pour autant l'existence d'une voie de fait ; il y a lieu de rappeler que la voie de fait est constituée dès lors que l'administration procède à une opération matérielle dans des conditions manifestement non susceptibles de se rattacher à l'exercice d'un de ses pouvoirs et portant une atteinte intolérable et grossière soit à une liberté publique, soit à la propriété mobilière ou immobilière ; en l'espèce, même si ERDF ne prouve pas avoir respecté la réglementation en vigueur, en premier lieu, il ne saurait être considéré que l'implantation de la ligne EDF en cause était non susceptible de se rattacher à l'exercice de ses pouvoirs ; en effet cette implantation a été nécessairement réalisée dans le cadre de ses pouvoirs, dans le but de faire profiter les habitants de la région des bienfaits de l'électricité ; en second lieu, il est nécessaire de noter qu'aux termes de l'acte de donation entre Madame Renée Y... épouse X... et Monsieur Christophe X... reçu le 30 octobre 2006 par Maître Virginie Z..., les parcelles AD 19 ET 20 sont qualifiées respectivement de pacage et de terre ; il s'agit par conséquent de parcelles à vocation agricole, ne comportant aucune habitation ; le fait que, selon le compte rendu de visite de Monsieur Claude A..., expert forestier contacté par Monsieur Christophe X..., l'implantation de la ligne électrique aérienne empêche Monsieur Christophe X... de planter des arbres 10 mètres sous ladite ligne, ce qui stérilise « 950 m2 soit 14% de la surface », que les « élagages fréquents et coûteux seront à réaliser et qu'une perte de production est à prévoir à hauteur de 4.322 € ne permet pas de caractériser une atteinte intolérable et grossière à sa propriété immobilière ; dès lors, la situation n'est pas constitutive de voie de fait et le présent tribunal doit se déclarer incompétent sans qu'il soit nécessaire de répondre aux autres exceptions et arguments rappelés plus haut » ;

    1°) ALORS QUE la propriété est le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ; qu'en décidant qu'en l'état de parcelles à vocation agricole, l'impossibilité de planter des arbres 10 mètres sous la ligne électrique, stérilisant 14% de la surface et entraînant une perte de production à hauteur de 4.322 € ne caractérisait pas une atteinte grossière et intolérable à la propriété immobilière, la cour d'appel a violé l'article 544 du code civil, ensemble l'article 1er du Protocole additionnel n°1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

    2°) ALORS QUE constitue une atteinte grave à la propriété, et par suite, une voie de fait, l'implantation irrégulière, par l'administration, d'un ouvrage sur une propriété privée ; qu'en décidant que l'implantation d'une ligne électrique sur la parcelle appartenant à Monsieur X... ne constituait pas une voie de fait, aux motifs que les parcelles en cause avaient une vocation agricole, et que l'impossibilité de planter des arbres 10 mètres sous la ligne électrique, stérilisant 14% de la surface et entraînant une perte de production à hauteur de 4.322 € ne caractérisait pas une atteinte grossière et intolérable à sa propriété immobilière, tout en constatant que la ligne électrique avait été implantée en dehors de toute procédure administrative régulière, la cour d'appel a violé l'article 545 du code civil, ensemble la loi des 16-21 août 1790 ;

    3°) ALORS QUE le silence ne vaut pas, à lui seul, acceptation ; qu'en déduisant de la seule ancienneté de l'implantation de la ligne l'acceptation tacite des propriétaires successifs, la cour d'appel a violé les articles 1101 et 1108 du code civil ;

    4°) ALORS QUE nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité ; qu'en décidant que l'acceptation tacite des propriétaires successifs pendant de longues années excluait la voie de fait, laquelle supposait, par le caractère intolérable du trouble commis, la réaction immédiate de ceux qui en sont victimes, tout en constatant que la société ERDF ne pouvait justifier du respect des procédures prévues par les articles 12 et 12 bis de la loi du 15 juin 1906 et sans relever que Monsieur X..., qui avait acquis les terrains le 30 octobre 2006 et sollicité dès le 7 septembre 2007 le déplacement de la ligne électrique, eût lui-même donné son consentement à l'implantation de ces lignes, la cour d'appel a violé l'article 545 du code civil, ensemble la loi des 16-21 août 1790 ;

    5°) ALORS QUE constitue une voie de fait la décision de l'administration portant une atteinte grave au droit de propriété, si cette décision est manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir appartenant à l'autorité administrative ; qu'en décidant que, même si elle ne justifiait pas avoir respecté les dispositions des articles 12 et 12 bis de la loi du 15 juin 1906, la société ERDF avait agi dans le cadre de ses pouvoirs, dès lors que sa mission consistait, dans l'intérêt commun, à électrifier le territoire, sans constater qu'elle disposait d'un pouvoir de procéder à l'implantation de lignes électriques en dehors des procédures légales visées par les articles 12 et 12 bis de la loi du 15 juin 1906, la cour d'appel a violé l'article 545 du code civil, ensemble la loi des 16-21 août 1790."