Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Responsabilité du bailleur qui ne vérifie pas que son locataire est assuré

Retenue par cet arrêt :


"Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 5 septembre 1998, Laurent H... s'est donné la mort par le gaz dans l'appartement qu'il louait à la société HLM Provence Logis, aux droits de laquelle vient la société HLM Erilia (la société) ; que l'explosion provoquée a causé la mort de sa voisine, a blessé grièvement plusieurs personnes et a causé des dégâts très importants, tant à l'immeuble qu'aux véhicules d'autres locataires ; que le 10 octobre 2002, la société MAIF (l'assureur) subrogée dans les droits de huit de ses assurés qu'elle avait indemnisés ensuite de ce sinistre, et six autres assurés partiellement indemnisés par l'assureur, soit Mme X..., née Y..., Mme Z..., M. A..., Mme B..., née C..., Mme D..., née E...et Mme F..., née G...ont assigné la société en indemnisation de leurs préjudices matériels sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du code civil et subsidiairement sur celui de l'article 1382 du même code ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 1315 du code civil ;

Attendu que pour débouter l'assureur, Mmes X..., Z..., B..., D..., F...et M. A...de leurs demandes fondées sur les articles 1382 et 1383 du code civil, l'arrêt énonce qu'il est certain que par application des dispositions de l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989 modifiées par la loi du 21 juillet 1994, le locataire a l'obligation de s'assurer contre les risques locatifs ; qu'en sa qualité de propriétaire, la société aurait dû vérifier chaque année que Laurent H... était assuré ; que dans l'hypothèse où la société n'aurait pas effectué ce contrôle, elle aurait commis une faute de négligence ; que l'assureur et Mmes X..., Z..., B..., D..., F...et M. A...affirment que Laurent H... n'était pas assuré et que la société n'a pas exigé annuellement la production de l'attestation d'assurance sans toutefois en rapporter la preuve ;

Qu'en statuant ainsi alors qu'il appartenait à la société bailleresse de rapporter la preuve qu'elle avait vérifié annuellement que son locataire était assuré, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;

Attendu que pour statuer comme il l'a fait l'arrêt énonce que, à supposer que Laurent H... n'ait pas été assuré et que la société n'ait pas vérifié annuellement qu'il l'ait été, ces éléments sont insuffisants pour établir l'existence d'un lien de causalité avec le sinistre ; qu'en effet, l'assureur et Mmes X..., Z..., B..., D..., F...et M. A...ne démontrent pas que l'assurance locative qu'aurait pu souscrire Laurent H... aurait pris en charge le règlement de ce sinistre consécutif à un geste volontaire ;

Qu'en statuant ainsi, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;

Attendu que pour débouter l'assureur et Mmes X..., Z..., B..., D..., F...et M. A...de leurs demandes fondées sur l'article 1384, alinéa 1er, du code civil, l'arrêt énonce que si le propriétaire est présumé avoir la garde de l'immeuble, il peut s'exonérer de sa responsabilité lorsqu'il rapporte la preuve d'un cas fortuit ou de la force majeure ou d'une cause étrangère ; que l'acte de Laurent H... de se donner la mort par le gaz dans son appartement, imprévisible et irrésistible pour la société, caractérise le cas de force majeure l'exonérant de sa responsabilité ;

Qu'en statuant ainsi, sans avoir invité préalablement les parties à présenter leurs observations sur ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du premier moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 mars 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la société HLM Erilia aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société HLM Erilia à payer à la société Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF) et à Mmes X..., Z..., B..., D..., F...et M. A...la somme globale de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille douze.

 

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la société Mutuelle assurance des instituteurs de France, de Mmes X..., Z..., B..., D..., F...et M. A...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la Maif, Mme Christiane Y..., épouse X..., Mme Dominique Z..., M. Serge A..., Mme Thérèse C..., épouse B..., Mlle Florence E..., épouse D...et Mme Arlette G..., épouse F...de leurs demandes fondées sur les articles 1382 et 1383 du code civil ;

AUX MOTIFS QUE sur le fondement de l'article 1382 et 1383 du code civil, le demandeur doit démontrer une faute fût-ce une négligence ou une imprudence, un dommage et un lien de causalité entre la faute et le dommage. Il est certain que par application des dispositions de l'article 7 de la loi du 06 juillet 1989 modifiées par la loi du 21 juillet 1994, le locataire a l'obligation de s'assurer contre les risques locatifs. En sa qualité de propriétaire, la Société Provence Logis aurait dû vérifier chaque année que M. H... était assuré. Dans l'hypothèse où la Société Provence Logis n'aurait pas effectué ce contrôle, elle aurait commis une faute de négligence. La société Maif et les consorts X...affirment que M. H... n'était pas assuré et que la Société Provence Logis n'a pas exigé annuellement la production de l'attestation d'assurance sans toutefois en rapporter la preuve. Ils n'ont pas, non plus, fait sommation à l'intimée de justifier que M. H... était assuré et de démontrer que tous les ans, elle avait sollicité l'attestation d'assurance de son locataire. Mais à supposer que M. H... n'ait pas été assuré, et que la Société Provence Logis n'ait pas vérifié annuellement qu'il l'ait été, ces éléments étaient insuffisants pour établir l'existence d'un lien de causalité avec le sinistre. En effet, la Société Maif et les consorts X...ne démontrent pas que l'assurance locative qu'aurait pu souscrire M. H... aurait pris en charge le règlement de ce sinistre consécutif à un geste volontaire. Sur le fondement de l'article 1382 et 1383, l'action de la Société Maif et des Consorts X...ne peut prospérer ;

1) ALORS QU'il appartient à celui qui prétend avoir exécuté son obligation de justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société Provence Logis avait l'obligation, en sa qualité de propriétaire, de vérifier chaque année si son locataire M. H... était assuré ; qu'il incombait dès lors à la société Provence Logis de démontrer qu'elle avait satisfait à cette obligation de vérification ; qu'en retenant, pour rejeter l'action en responsabilité de la société Maif et des consorts X...contre la société Provence Logis, qu'ils ne rapportaient pas la preuve que celle-ci n'avait pas exigé la production de l'attestation d'assurance de son locataire, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;

2) ALORS QUE les juges du fond, qui doivent en toutes circonstances faire observer et observer eux-mêmes le principe du contradictoire, ne peuvent fonder leur décision sur un moyen qu'ils ont relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que devant les juges du fond, la société Provence Logis ne soutenait pas que l'absence d'assurance locative de M. H... était sans lien de causalité avec le dommage subi par les victimes de l'explosion au gaz qu'il avait provoquée, dès lors que l'assureur n'aurait pas pris en charge le règlement de ce sinistre dû à un geste volontaire ; qu'en relevant d'office que la Maif et les consorts X...ne démontraient pas que l'assurance locative qu'aurait pu souscrire M. H... aurait pris en charge les conséquences du sinistre dû à un geste volontaire, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3) ALORS QUE la faute intentionnelle ou dolosive qui exclut la garantie de l'assureur implique que l'assuré a voulu non seulement l'action ou l'omission génératrice du dommage, mais encore le dommage lui-même ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de la cour d'appel que M. H... s'est suicidé au gaz le 5 septembre 1998, provoquant une explosion ayant endommagé les véhicules des demandeurs ; qu'en retenant que la Maif et les consorts X...ne démontraient pas que l'assurance locative qu'aurait pu souscrire M. H... aurait pris en charge les conséquences du sinistre, dû à un geste volontaire, sans rechercher s'il avait eu la volonté de causer des dommages matériels à des tiers, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 113-1 du code des assurances et 1382 et 1383 du code civil ;

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la Maif, Mme Christiane Y..., épouse X..., Mme Dominique Z..., M. Serge A..., Mme Thérèse C..., épouse B..., Mademoiselle Florence E..., épouse D...et Mme Arlette G..., épouse F...de leurs demandes fondées sur l'article 1384, alinéa 1er, du code civil ;

AUX MOTIFS QUE sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du code civil, si le propriétaire est présumé avoir la garde de l'immeuble, il peut s'exonérer de sa responsabilité lorsqu'il rapporte la preuve d'un cas fortuit ou de la force majeure ou d'une cause étrangère. En l'espèce, l'acte de M. H... de se donner la mort par le gaz dans son appartement était imprévisible et irrésistible pour la société Provence Logis et caractérise le cas de force majeure l'exonérant de sa responsabilité ;

1) ALORS QUE les juges du fond, qui doivent en toutes circonstances faire observer et observer eux-mêmes le principe du contradictoire, ne peuvent fonder leur décision sur un moyen qu'ils ont relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que devant la cour d'appel, la société Provence Logis n'invoquait pas la force majeure pour s'exonérer de sa responsabilité sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du code civil ; qu'en retenant d'office l'existence d'un cas de force majeure, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, la cour d'appel a méconnu le principe du contradictoire, et violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2) ALORS QUE l'existence d'un cas de force majeure suppose un événement non seulement imprévisible et irrésistible, mais aussi extérieur ; qu'en se bornant à retenir que l'acte de M. H... de se donner la mort au gaz constituait un événement imprévisible et irrésistible, sans constater l'extériorité de cet événement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384, alinéa 1er, du code civil."

Les commentaires sont fermés.