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Notion de lots transitoires et obligation au paiement des charges de leur propriétaire

Cette décision rendue par la Cour de Cassation le 10 octobre dernier permet d'évoquer la notion de lot transitoire, qui est habituellement défini comme un lot de copropriété comportant le droit de construire ou le droit de surélever et une quote-part des parties communes. Il s'agit le plus souvent de terrains sur lesquels des constructions seront élevées par le constructeur qui est à l'origine de la copropriété.

Il est classiquement jugé que le titulaire de tels lots doit payer les charges de copropriété, et cet arrêt fait application de ce principe :

« Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er juin 2006), que la société Compagnie de réalisations immobilières (IMCOR), propriétaire de lots de copropriété, a assigné le syndicat des copropriétaires Parc technologique de Saint-Aubin et la société Comadim, syndic de copropriété, aux fins notamment de voir annuler les résolutions n° 3 et 4 de l'assemblée générale des copropriétaires du 11 juin 2003 approuvant les comptes de l'exercice 2002 et le budget de fonctionnement pour 2003 qui comprenaient des frais de sécurisation du site contre les intrusions de gens du voyage ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société IMCOR fait grief à l'arrêt de la débouter de cette demande, alors, selon le moyen :

1 / que les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants, dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions qui leur est faite à la diligence du syndic ; que l'assemblée générale peut modifier la répartition initiale des charges ; que la société IMCOR soutenait que la résolution n° 6 adoptée lors de l'assemblée générale du 28 juillet 1992, dispensant les copropriétaires des lots transitoires de contribuer à toutes les charges communes, hormis celles relatives aux espaces verts, bail à construction et honoraires du syndic, n'avait jamais fait l'objet d'aucun recours et que, définitive, elle était opposable aux copropriétaires ; qu'en affirmant que cette résolution n'ayant pas été votée à l'unanimité conformément aux dispositions de l'article 11 de la loi du 10 juillet 1965, l'assemblée aurait agi en dehors de son domaine de compétence, de sorte que cette décision, quoique définitive, aurait été inopérante et de plein droit inopposable à l'ensemble des copropriétaires, la cour d'appel, qui a refusé de tirer les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 42, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965, ensemble l'article 11 de cette même loi ;

2 / qu'en toute hypothèse, les décisions votées par l'assemblée générale et emportant modification de la répartition des charges s'imposent à tous les copropriétaires, sans qu'un nouveau règlement de copropriété ne doive, formellement, être établi ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 11 de la loi du 10 juillet 1965 et l'article 1134 du code civil ;

3 / qu'en tout état de cause, les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d'équipement commun en fonction de l'utilité que ces services et éléments présentent à l'égard de chaque lot ; qu'ils sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes proportionnellement aux valeurs respectives des parties privatives comprises dans leurs lots ; que la société IMCOR demandait l'annulation des résolutions n° 3 et n° 4 de l'assemblée générale du 11 juin 2003, en ce qu'elles emportaient, à tort, intégration aux charges générales des frais résultant de l'emploi d'un service de sécurité consistant dans des rondes effectuées par des vigiles, les assimilant ainsi à des charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes ; qu'en se bornant à affirmer que les lots transitoires doivent participer à l'ensemble des dépenses de la copropriété, sauf à démontrer que tel équipement n'est d'aucune utilité et que la société IMCOR ne pouvait soutenir que les travaux de sécurisation et de gardiennage ne lui étaient d'aucune utilité, sans constater que les charges litigieuses auraient, par nature, été relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes, seule qualification de nature à justifier leur intégration dans les charges générales, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965 ;

4 / que les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d'équipement commun en fonction de l'utilité que ces services et éléments présentent à l'égard de chaque lot ; que tel est le cas de dépenses résultant de la mise en place d'un service de sécurité rendu nécessaire afin de pallier les insuffisances d'un élément commun ; que la société IMCOR faisait valoir que le gardiennage dont il était question consistait dans le recours à la prestation ponctuelle d'une société de sécurité destinée à pallier l'inefficacité temporaire de la clôture des seuls lots construits, mise en place en exécution de l'assemblée générale du 30 novembre 1995 au bénéfice de ces seuls lots, de sorte que les frais en résultant ne pouvaient être mis à la charge des copropriétaires des lots non bâtis, qui ne bénéficiaient pas de ces équipements dépourvus, pour eux, de toute utilité ; qu'en se bornant à affirmer que les rondes de surveillance étaient effectuées sur l'ensemble du site, l'attention des vigiles se portant tant sur les lots construits que sur les lots non construits, sans se prononcer sur leur utilité, pour les lots non bâtis, du système de protection qui n'avait été mis en place qu'au profit des seuls lots bâtis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965 ;

5 / que la société IMCOR soutenait que ce service de sécurité ne présentait aucune utilité pour les lots non construits, sur lesquels les gens du voyage ne s'étaient jamais installés en 2002 et qui, se trouvant à l'état de friche, envahis par une végétation sauvage, des taillis et des arbres de plusieurs mètres de haut, étaient inaccessibles ;

qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant retenu à bon droit que les propriétaires de lots transitoires devaient participer à l'ensemble des dépenses de la copropriété, sauf à démontrer qu'un tel équipement ne leur était d'aucune utilité et relevé que la société IMCOR ne pouvait ni revendiquer une pratique antérieure erronée ni soutenir que les travaux de sécurisation et de gardiennage ne lui étaient d'aucune utilité alors même que des "gens du voyage" s'installaient sur des terrains vides de construction, la cour d'appel, répondant aux conclusions, a exactement déduit, de ces seuls motifs, qu'il n'y avait pas lieu d'annuler les décisions n° 3 et 4 du 11 juin 2003 ».

 

 

Voici une autre décision plus ancienne appliquant les mêmes principes :

 

« Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 février 2002), que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble 46/48 rue Raffet a assigné la société en nom collectif Volney Invest (SNC), marchand de biens, propriétaire dans cet immeuble de deux lots n° 176 et 684 constitués par le droit d'affouiller les bâtiments A et B afin de réaliser quatre niveaux de sous-sol, en paiement de charges de copropriété impayées ;

Attendu que la SNC fait grief à l'arrêt de la condamner à payer des charges de copropriété, alors selon le moyen :

1 / que dès lors que le lot transitoire ne peut plus recevoir la destination qui avait été prise en considération à l'origine, le lot transitoire perd sa consistance et devient sans valeur, de sorte que l'obligation de participer aux charges communes générales ne peut plus être à la mesure de la valeur relative, et qu'elle est dépourvue de cause ; qu'en refusant de considérer dans ces conditions que la répartition des charges communes, telle qu'elle était fixée par le règlement de copropriété, était non écrite, les juges du fond ont violé l'article 1134 du Code civil, ensemble les articles 5 et 10 de la loi du 10 juillet 1965 ;

2 / qu'en tout cas, le lot transitoire, ne peut être assimilé, pour l'estimation de sa valeur et la détermination de l'obligation aux charges, comme un terrain construit , qu'en s'abstenant de rechercher si la répartition prévue par le règlement de copropriété était bien fondée sur la valeur réelle du lot, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil, 5 et 10 de la loi du 10 juillet 1965 ;

Mais attendu qu'ayant relevé par motifs adoptés que les lots de la SNC étaient des lots transitoires qui étaient soumis au statut de la copropriété et comme tels, devaient participer aux charges de copropriété en fonction de leurs tantièmes sans pouvoir prétendre qu'elles ne pourraient avoir aucune utilité pour ces lots et constaté par motifs propres qu'il importait peu que ces lots soient actuellement inconstructibles et ne profitent pas notamment des espaces verts, de l'eau froide, du gardiennage ou du nettoyage et que la disparition de son fait de la possibilité d'affouiller le sous-sol ne pouvait faire disparaître la cause juridique de son obligation aux charges, la cour d'appel a retenu à bon droit que la SNC était tenue au paiement des charges générales afférentes à ses lots ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que la SNC fait grief à l'arrêt de refuser de faire produire effet à l'abandon par elle décidé et de la condamner à payer des charges de copropriété, alors, selon le moyen :

1 / que la possibilité pour le titulaire d'un droit réel de l'abandonner est un principe général et absolu, et il emporte disparition à compter du jour de l'abandon de l'obligation réelle qui l'accompagne ; que cette règle d'application générale s'applique aux lots de copropriété, et notamment aux lots transitoires ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 544 du Code civil, ensemble le principe suivant lequel le titulaire d'un droit réel peut unilatéralement abandonner son droit à l'effet de se libérer de la charge qui l'assortit ;

2 / que dès lors que la règle énoncée à la première branche participe du régime du droit réel, les considérations de l'arrêt relatives à l'existence d'un pacte social qui ne concerne que la source du droit, ou encore à la cause juridique, qui ne concerne elle aussi que la cause du droit assorti de l'obligation, étaient indifférentes ; qu'à cet égard également, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article 544 du Code civil, ensemble le principe suivant lequel le titulaire d'un droit réel peut unilatéralement abandonner son droit à l'effet de se libérer de la charge qui l'assortit ;

Mais attendu qu'ayant exactement relevé par motifs propres et adoptés que le caractère contractuel du règlement de copropriété impliquait qu'un copropriétaire ne pouvait se dégager unilatéralement de ses obligations sans le consentement des autres copropriétaires, et constaté que les acheteurs des appartements rénovés par le marchand de biens Volney Invest avaient procédé à leur acquisition en tenant compte des charges qu'ils devraient acquitter et qu'ils ne pouvaient voir augmenter celles-ci de façon conséquente parce que leur vendeur avait estimé que la création d'emplacement des parkings en sous-sol serait moins rentable que ce qu'il avait cru pouvoir en espérer, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que le syndicat des copropriétaires ne pouvait procéder à aucune acquisition immobilière sans que fût intervenue une décision de l'assemblée générale statuant à la majorité prévue à l'article 26 a) de la loi du 10 juillet 1965 ».

 

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