Notion de changement de destination d’un immeuble (mercredi, 14 mars 2007)

Par cette décision du 19 janvier 2006, la Cour Administrative d'Appel de Versailles juge que pour le droit de l’urbanisme la destination d’habitation d’un immeuble est distincte de la destination du même immeuble qui aura pour objet l’hébergement des enfants en difficulté et de leurs éducateurs :


« Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la FONDATION MEQUIGNON, dont le siège est situé 16 route de l'abbé Méquignon à Elancourt (78900), par Me Haas, avocat ;

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés le 19 janvier et le 17 mars 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par lesquels la FONDATION MEQUIGNON demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement 0200939 du 18 novembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 15 janvier 2002 par laquelle le maire de la commune de Maurepas a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de la réalisation de travaux d'aménagement d'une maison d'habitation pour l'accueil de jeunes enfants ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) de condamner la commune de Maurepas à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement est irrégulier en ce qu'il ne comporte pas les signatures du président de chambre et du rapporteur ; que le tribunal a commis une erreur de droit puisque, pour refuser de qualifier le bâtiment sur lequel devaient porter les travaux d'équipement public, dont la création est autorisée par le plan d'occupation des sols dans la zone considérée, il s'est fondé uniquement sur la circonstance que le dit bâtiment n'était pas la propriété d'une personne publique alors que cette condition n'est pas nécessaire, le foyer en cause devant être créé aux fins d'accueillir, en urgence et de manière temporaire, certains enfants confiés au service départemental de l'aide sociale à l'enfance ; qu'ainsi sa réalisation et son utilisation relèvent des attributions légales d'une personne publique, dans un but d'intérêt général ; que le tribunal a fait une inexacte application de l'article UE 1 du plan d'occupation des sols en considérant que les travaux envisagés remettaient en cause la destination du bâtiment puisque la définition des bâtiments d'habitation mentionnée à l'article R. 111-1 du code de la construction inclut les foyers et que le centre d'accueil projeté peut être assimilé à un foyer ; que les travaux de mise en conformité en ce qui concerne les accès des personnes handicapées et la prévention des risques d'incendie sont sans influence sur la destination du bâtiment et ne justifiaient pas un refus de permis de construire ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 janvier 2006 :

- le rapport de Mme Kermorgant, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'aux termes des articles R. 741-7 et R. 741-8 du code de justice administrative : Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience.. ; qu'aux termes de l'article R. 741-10 du même code : La minute des décisions est conservée au greffe de la juridiction... ; et qu'aux termes de l'article R. 751-1 de ce code : Les expéditions des décisions sont signées et délivrées par le greffier en chef... ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'expédition du jugement notifié à la FONDATION MEQUIGNON comporte la signature d'un greffier, attestant de sa conformité à la minute du jugement, laquelle, seule, doit être signée par le président de la formation de jugement, le magistrat rapporteur et le greffier d'audience ; que la FONDATION MEQUIGNON ne saurait, par suite, utilement soutenir que, faute pour l'expédition qui lui a été adressée d'être revêtue de leurs signatures, le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité ;

Sur le bien-fondé du jugement :

Considérant que le règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Maurepas qui définit les différentes destinations des constructions autorisées dans la zone UE où se situe l'immeuble, prévoit que Cette zone correspond à d'anciennes opérations de constructions essentiellement à usage d'habitation (...) ainsi que des équipements publics. ; que l'article UE 1 II de ce même plan d'occupation des sols autorise les occupations et utilisations du sol ci-après : 1 . Dans la zone UE (...) - changement de destination limité à 25 m2, dans le volume des constructions à usage d'habitation existantes et exclusivement réservé à l'utilisation de bureaux et services... 2 . En UE, Uca et Ueb : - équipement public (...) ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que si l'installation projetée, qui consiste en un centre d'accueil pour enfants destiné à recevoir des jeunes dont la santé, la sécurité, la moralité, l'éducation sont compromises, a le caractère d'un équipement collectif d'intérêt général, cette seule circonstance n'est pas de nature à lui conférer le caractère d'équipement public au sens de l'article UE 1 II 2 du règlement du plan d'occupation des sols dès lors que ce centre d'accueil est un établissement privé exploité par une personne de droit privé ; que, par suite, la FONDATION MEQUIGNON n'est pas fondée à soutenir que le tribunal administratif aurait commis une erreur de droit en estimant que le centre d'accueil ne constituait pas un équipement public et que, de ce fait, son implantation n'était pas autorisée dans la zone UE ;

Considérant, en second lieu, que la FONDATION MEQUIGNON fait valoir que son projet n'a pas changé la destination initiale d'habitation de la construction et qu'il consiste à créer un foyer destiné à l'hébergement des enfants en difficulté et de leurs éducateurs, comportant toutes les pièces nécessaires à l'habitation et que cet usage des locaux correspond à la notion d'habitation telle que définie par les dispositions de l'article R. 111-1 du code de la construction et de l'habitation selon lesquelles les bâtiments d'habitation sont des bâtiments abritant des logements y compris des foyers, à l'exclusion des locaux destinés à la vie professionnelle ;

Considérant, d'une part, que les dispositions du code de la construction et de l'habitation ne sauraient, compte tenu de l'indépendance des législations applicables en matière de construction et d'urbanisme, être prises en compte pour déterminer si le projet comporte un changement de destination des locaux existants au sens des dispositions précitées du plan d'occupation des sols ;

Considérant, d'autre part, qu'il est constant que les locaux acquis par la fondation étaient exclusivement destinés à l'habitation ; que la création d'un centre d'hébergement temporaire pour enfants, qui, comme il vient d'être dit est un équipement collectif d'intérêt général et ne saurait être regardé comme une construction à usage d'habitation, est ainsi constitutif d'un changement de destination du bâtiment existant ; que, dès lors que les dispositions de l'article UE 1 II 1 précitées n'autorisent les changements de destination qu'en tant qu'ils portent sur la création de locaux à usage de bureaux et de services, c'est à bon droit que le tribunal a jugé que lesdites dispositions faisaient obstacle à la délivrance du permis de construire sollicité par la FONDATION MEQUIGNON ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la FONDATION MEQUIGNON n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à la condamnation de la commune de Maurepas au versement d'une somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la FONDATION MEQUIGNON est rejetée. »