Rappel : la responsabilité du notaire est délictuelle ! (lundi, 09 juillet 2018)

La responsabilité du notaire est délictuelle et non contractuelle.

Cet arrêt le rappelle : 

"Vu l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte du 21 mars 1992 reçu par M. Y... (le notaire), la banque BNP Guyane (la banque) a consenti à la Société immobilière du littoral (la SIMLI) une ouverture de crédit de 365 878,06 euros pour financer la construction de maisons ; que, par le même acte, la Société générale immobilière de Guyane (la SOGIG) s'est portée caution hypothécaire de la SIMLI et a consenti, en garantie du remboursement de l'ouverture de crédit, une hypothèque sur une parcelle cadastrée section [...] ; que, suivant acte authentique du 28 mai 1993, reçu par le même notaire, la SIMLI a vendu à la Société du lac bleu une parcelle cadastrée section [...] au prix de 152 449 euros ; que, par le même acte, la banque a consenti à la Société du lac bleu une ouverture de crédit de 914 684 euros destinée, pour partie, au paiement du prix de la parcelle et, pour le surplus, au règlement du coût de construction de vingt et une villas et au remboursement de l'ouverture de crédit consentie par la banque à la SIMLI ; qu'il a été convenu que le prix de vente des villas serait versé à la banque, bénéficiaire d'un privilège de prêteur de deniers sur le terrain en cause ; que, soutenant que le notaire avait commis des fautes dans l'exécution de l'acte du 28 mai 1993, la SOGIG l'a assigné, le 13 août 2010, afin de le voir condamné à payer à la banque la totalité du prix de vente des maisons visées à cet acte ; que le prix de vente de celles-ci a été versé dans la comptabilité du notaire à hauteur de 1 282 692,21 euros ; que, par acte authentique du 13 avril 2012, la SOGIG a réglé à la banque la somme de 1 240 934,99 euros, correspondant aux dettes de la Société du lac bleu, et a été subrogée à hauteur de cette somme dans les droits de la banque ;

Attendu que, pour écarter la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action dirigée contre le notaire, l'arrêt retient qu'il lui est reproché de ne pas avoir versé à la banque le prix de chacune des ventes des villas construites sur une parcelle appartenant à la Société du lac bleu et que, dès lors, sa responsabilité contractuelle est engagée ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les obligations du notaire qui tendent à assurer l'efficacité d'un acte instrumenté par lui et qui constituent le prolongement de sa mission de rédacteur d'acte relèvent de sa responsabilité délictuelle, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 décembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Cayenne ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Cayenne, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge des dépens qu'elle a exposés ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six juin deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES au présent arrêt


Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé, par motifs substitués, le jugement entrepris en ce qu'il avait écarté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action dirigée contre le notaire ;

AUX MOTIFS QUE comme le relève fort justement le notaire, Lucien Y..., sa responsabilité est recherchée sur le fondement contractuel, l'article 1147 du code civil étant visé par la SOGIG ; qu'il est reproché à Lucien Y... de ne pas avoir versé à la BNPG le prix de chacune des ventes des villas construites sur la parcelle cadastrée [...] , appartenant à la société du Lac Bleu, alors que la BNPG avait financé le coût d'acquisition du terrain et le coût de la construction des maisons ; que comme continue de l'affirmer non moins exactement le notaire, les manquements à cette obligation doivent être appréciés chacun de manière distincte, au regard de la prescription ; que le délai de prescription du défaut de versement du prix de vente à la BNPG part, pour chaque vente, de la date à laquelle elle a été reçue ; que les ventes sont intervenues au cours d'une période allant du 28 mai 1996 au 7 mai 2008, ainsi qu'il résulte du compte du notaire et du tableau figurant au rapport d'expertise, aucune contestation n'opposant les parties sur les dates des actes de vente ; que s'agissant d'un engagement de responsabilité contractuelle, le délai de prescription extinctive était de trente ans, par application des dispositions de l'article 2262 du code civil ; qu'au cours de ce délai de trente ans, la prescription a été régulièrement interrompue par le procès-verbal de saisie-attribution signifié au notaire le 19 janvier 2007, pour les ventes antérieures à cette date ; qu'il sera rappelé que, selon l'article 2244 du code civil, une saisie, ou plus généralement une mesure d'exécution forcée, interrompt la prescription ; que pour les ventes postérieures au 19 janvier 2007, la prescription a été interrompue par l'assignation délivrée à Lucien Y..., le 13 août 2010, qui lui réclame le remboursement des prix de vente des villas ; que c'est donc à tort que Lucien Y... prétend que les demandes présentées contre lui sont prescrites ; que les dispositions du jugement ayant rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription seront donc confirmées, par motifs substitués ;

1° ALORS QUE les obligations du notaire instrumentaire d'un acte liées au maniement de fonds remis par les parties, qui constituent le prolongement de sa mission de rédacteur d'actes, relèvent de la responsabilité délictuelle ; qu'en faisant application du délai de prescription trentenaire, applicable aux actions en responsabilité contractuelle, quand l'action dirigée contre M. Y... était fondée sur une faute qu'il aurait commise dans le maniement des fonds issus du prix des villas dont il avait instrumenté les ventes, faute non détachable de sa mission de rédacteur d'actes, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles 1147 et 2262 anciens du code civil et, par refus d'application, les articles 1382 et 2270-1 anciens du même code ;

2° ALORS QUE l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre ; qu'en retenant que la prescription de l'action en responsabilité dirigée contre l'exposant avait été interrompue, pour les ventes antérieures à 2007, « par le procès-verbal de saisie-attribution signifié au notaire le 19 janvier 2007 » et, pour les ventes postérieures à cette date, « par l'assignation délivrée à Lucien Y... le 13 août 2010, qui lui réclam[ait] le remboursement des prix de vente des villas » (arrêt, p. 4, al. 4), quand ces actions tendaient à des fins différentes, la cour d'appel a violé l'article 2244 ancien du code civil ;

3° ALORS QU'en toute hypothèse le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en retenant que le procès-verbal de saisie-attribution signifié au notaire, le 19 janvier 2007, avait interrompu la prescription de l'action en responsabilité dirigée contre lui, la cour d'appel, qui a relevé un moyen d'office, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations, a violé l'article 16 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné M. Y... à verser à la SOGIG la somme de 670 798,79 euros, outre intérêt au taux légal à compter du prononcé de la décision ;

AUX MOTIFS QUE par acte authentique du 13 avril 2012, la BNPG a reçu la somme de 1 249 334,99 euros de la SOGIG, représentant, à hauteur de la somme de 1 240 934,99 euros, la somme offerte en contrepartie de la mainlevée, par la BNPG, des inscriptions grevant les parcelles cadastrées section [...] et [...], et, à hauteur de 8 400 euros, le montant des condamnations prononcées en faveur de cette banque en remboursement de frais d'avocat ; que cet acte indique que la SOGIG est, par l'effet de ce versement, subrogée dans les droits et actions que la BNPG détient à l'encontre de la société du Lac Bleu, en vertu de l'acte authentique du 28 mai 1993, à hauteur du règlement reçu de 1 240 934,99 euros ; que cette subrogation conventionnelle, expresse et concomitante au paiement, constatée par acte authentique, satisfait aux exigences de l'article 1250, 1° du code civil ; qu'elle a transmis à la SOGIG tous les droits et actions que la BNPG détenait à l'encontre de la société du Lac Bleu, à hauteur de la somme de 1 240 934,99 euros, la BNPG pouvant agir, par ailleurs, pour le remboursement de sa créance ; que ce droit propre n'éteint ni ne limite les droits de la SOGIG, qui s'élèvent à la somme précitée de 1 240 934,99 euros ; qu'il résulte de l'article 1252 du Code civil que la subrogation a pour effet d'investir le subrogé de la créance primitive avec tous ses accessoires et transporte à son profit toutes les actions qui se rattachaient à cette créance ; que si l'acte authentique du 13 avril 2012 a transféré à la SOGIG les droits que détenait la BNPG sur la société du Lac Bleu, ce transfert s'étend aux accessoires de cette créance, dont fait partie l'action en responsabilité que détenait la Banque à l'encontre du notaire, s'il méconnaissait son mandat et rendait impossible le paiement, à la BNPG, de sa créance sur la société du Lac Bleu ; que l'acte authentique du 28 mai 1993 comprend la vente, par la SIMILI à la société du Lac Bleu, d'une parcelle cadastrée section [...] , au prix de 1 000 000 d'euros contre-valeur de 152 449 euros, ainsi qu'une ouverture de crédit, par la BNPG, de 6 000 000 de francs, contre-valeur de 914 684 euros, destinée à financer le prix de vente du terrain, le prix de la construction des maisons devant y être édifiées, une garantie d'achèvement de ces maisons et la reprise d'un prêt qui avait été consenti par la BNPG à la SIMLI ; que l'acte du 28 mai 1993 stipule : « Étant ici expressément convenu que la totalité des prix de vente des villas devra être versée à la Banque » ; que l'acte prévoit aussi que les opérations relatives à cette ouverture de crédit seront comptabilisées dans un compte ouvert au nom de la société du Lac Bleu, dans les livres de la BNPG, sous le numéro 9680.064.860 ; que l'acte indique que tout acte de vente des parcelles obtenues à partir de la division de la parcelle cadastrée section [...] : « devra comporter l'obligation, pour l'acquéreur, de verser au compte ci-dessus rappelé toutes sommes dues à la SOCIETE DU LAC BLEU au titre de la vente intervenue », une copie conforme de chaque acte de vente devant être adressée à la BNPG ; que l'acte stipule que : « Tous paiements à faire, pour couvrir les dépenses afférentes à la réalisation de l'ensemble immobilier projeté, seront effectués par la Banque » par prélèvements sur le compte de la société du Lac Bleu ; qu'il indique encore que la société du Lac Bien s'engage à payer « les arriérés dus au titre des travaux de construction déjà effectués directement aux Entreprises suivantes : MEGABLOC, COMPAGNIE EUROPEENNE DE DISTRIBUTION, SI..G.M.A., KOSIMAG, LE GAC MATERIAUX, HAIRONVILLE, et S.K.B.M. et SETLK » ; qu'il appartenait donc au notaire de verser à la BNPG la totalité des prix de vente encaissés à l'occasion de la vente des villas construites sur le terrain appartenant à la société du Lac Bleu ; que si le notaire ne l'a pas fait, et qu'il a, ainsi, lésé les droits de la BNPG, la SOGIG, subrogée dans les droits du banquier à hauteur de la somme de 1 240 934,99 euros, est fondée à exercer toutes les actions appartenant à la Banque pour obtenir réparation du préjudice qui a pu lui être causé pax la faute de toute personne qui a empêché le versement des prix de vente qui devaient être remis à la BNPG ; que la subrogation a fait entrer dans le patrimoine de la SOGIG toutes les actions qui appartenaient à la BNPG, et qui étaient en relation avec les droits qu'elle tenait de l'acte du 28 mai 1993, à hauteur de 1 240 934,99 euros ; que c'est à tort que Lucien Y... prétend que l'article 1252 du Code civil empêche la SOGIG d'agir avant que la BNPG ait été désintéressée en totalité ; que ce texte limite seulement les droits de la SOGIG au montant qu'elle a payé et l'empêche d'entrer en concours avec la BNPG avant que sa créance soit éteinte mais qu'ici, la SOGIG agit dans la limite de la somme qu'elle a payée et n'entre pas en concours avec la BNPG, libre d'exercer ses droits par ailleurs ; qu'en vertu de l'acte du 28 mai 1993, il appartenait à Lucien Y... de verser à la BNPG le prix de vente de chacune des villas construites sur la parcelle cadastrée section [...] , appartenant à la société du Lac Bleu ; que contrairement à l'argumentation soutenue par Lucien Y..., qui n'hésite pas à dénaturer l'acte du 28 mai 1993 pour tenter de s'exonérer de la responsabilité qu'il encourt, il ne lui revenait pas de procéder au paiement direct fournisseurs de la société du Lac Bleu sur les prix de vente qu'il percevait, ce paiement devant être effectué, d'après le contrat, par la BNPG, à qui tous les prix de vente devaient être versés ; qu'il sera relevé que les motifs de l'arrêt prononcé par cette Cour, le 10 mars 2014, sont dénués de toute autorité de la chose jugée ; qu'à aucun moment, Lucien Y... n'a obtenu une autorisation de la BNPG avant de procéder au paiement des fournisseurs de la société du Lac Bleu ; qu'en ne versant pas à la BNPG la totalité des sommes représentant les prix de vente des villas, mais en payant directement des dettes de la société du Lac Bleu auprès de ses fournisseurs, sans avoir recueilli l'accord préalable de cette banque, Lucien Y... a méconnu les termes de son mandat, contenu dans l'acte du 28 mai 1993 ; qu'il a ainsi commis une faute contractuelle ; qu'il sera, par l'effet de la subrogation conventionnelle, tenu d'indemniser la SOGIG du préjudice que cette faute a causé à la BNPG ; que Lucien Y... a reçu, en règlement des prix de vente des villas, la somme totale de 1 282 409,56 euros que, sur cette somme, il a versé 446 856,74 euros à la BNPG ; qu'il a également versé des honoraires à des tiers, pour 48 173,99 euros, et réglé des frais d'acte, de 92 418,96 euros, ainsi que des frais de commercialisation à la SOGIG, pour 24 100,21 euros ; que l'authenticité qui s'attache à la comptabilité du notaire doit conduire la Cour à retenir les montant tels qu'ils apparaissent dans cette comptabilité, mais que cette authenticité ne légitime pas l'usage faits par le notaire, des fonds dont il est dépositaire et ne l'exonère d'aucune responsabilité à cet égard ; que si les versements qui viennent d'être évoqués pouvaient venir en déduction des prix de vente, car ils constituaient des frais liés à la régularisation des actes de vente, il en va autrement de la somme totale de 670 798,79 euros, correspondant au paiement, par Lucien Y..., sur les prix de vente qu'il devait verser à la BNPG, des fournisseurs de la société du Lac Bleu ; que par la faute de Lucien Y..., la BNPG a été irrégulièrement privée de cette somme, qui constitue un préjudice dont la SOGIG est fondée à obtenir l'indemnisation, par l'effet de la subrogation ; qu'il sera relevé que le notaire ne prouve en rien que la BNPG ait accepté que la somme totale de 670 798,79 euros, qui devait lui être réglée sur les prix de vente, ait été remise, par Lucien Y..., aux fournisseurs de la société du Lac Bleu ; qu'il suit de là que Lucien Y... sera condamné à payer, à la SOGIG, la somme de 670 798,79 euros correspondant au préjudice que sa faute a causé à la BNPG ;

1° ALORS QUE le subrogé ne peut entrer en concours avec le subrogeant tant que la créance de celui-ci n'est pas éteinte ; qu'en l'espèce, en se bornant à retenir que la SOGIG, subrogée dans les droits de la BNPG, agissait dans la limite de la somme qu'elle avait payée, sans rechercher si les sommes dont le notaire pouvait être redevable au titre de sa responsabilité n'étaient pas insuffisantes pour payer à la fois la banque et la SOGIG de sorte que le paiement de cette dernière pourrait priver la banque de ses droits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1252 ancien du code civil ;

2° ALORS QU'est seule source de responsabilité la faute qui a causé un dommage ; qu'en retenant, en l'espèce, que le préjudice causé à la banque par la faute du notaire consistait dans la perte des sommes versées par l'exposant aux fournisseurs, bien qu'elle ait constaté que, sans la faute invoquée, ces sommes, qui étaient destinées – au moins en partie – au paiement des fournisseurs, n'auraient pas été conservées par la banque, ou seulement partiellement, la cour d'appel a violé l'article 1147 ancien du code civil. Moyen produit au pourvoi incident par Me Balat, avocat aux Conseils, pour la Société générale immobilière de Guyane (SODIG)

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné Maître Y... à payer à la société SOGIG la somme de 670.798,79 € avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt, et rejeté les autres demandes de la société SOGIG ;

AUX MOTIFS QUE Lucien Y... a reçu, en règlement des prix de vente des villas, la somme totale de 1.282.409,56 € ; que, sur cette somme, il a versé 446.856,74 € à la BNPG ; qu'il a également versé des honoraires à des tiers, pour 48.173,99 €, et réglé des frais d'acte, de 92.418,96 €, ainsi que des frais de commercialisation à la SOGIG, pour 24.100,21 € ; que l'authenticité qui s'attache à la comptabilité du notaire doit conduire la cour à retenir les montants tels qu'ils apparaissent dans cette comptabilité ; que, cependant, cette authenticité ne légitime pas l'usage fait, par le notaire, des fonds dont il est dépositaire et ne l'exonère d'aucune responsabilité à cet égard ; que, si les versements qui viennent d'être évoqués pouvaient venir en déduction des prix de vente, car ils constituaient des frais liés à la régularisation des actes de vente, il en va autrement de la somme totale de 670.798,79 €, correspondant au paiement, par Lucien Y..., sur les prix de vente qu'il devait verser à la BNPG, des fournisseurs de la société du Lac Bleu ; que, par la faute de Lucien Y..., la BNPG a été irrégulièrement privée de la somme de 670.798,79 €, qui constitue un préjudice dont la SOGIG est fondée à obtenir l'indemnisation, par l'effet de la subrogation ; qu'il sera relevé que le notaire ne prouve en rien que la BNPG ait accepté que la somme totale de 670.798,79 €, qui devait lui être réglée sur les prix de vente, ait été remise, par Lucien Y..., aux fournisseurs de la société du Lac Bleu ; qu'il suit de là que Lucien Y... sera condamné à payer à la SOGIG la somme de 670.798,79 €, correspondant au préjudice que sa faute a causé à la BNPG ; que la somme à laquelle est condamnée Lucien Y... correspond à une dette indemnitaire qui portera intérêt au taux légal à compter du présent arrêt, qui consacre l'existence de la créance, par application de l'article 1153-1 du code civil ; que la SOGIG ne prouve pas que la somme de 1.240.934,09 € qu'elle réclame au titre des intérêts sur la somme qu'elle aurait versée à la BNPG corresponde à une quelconque réalité, compte tenu du caractère lacunaire, voire fantaisiste, du décompte qu'elle produit, le choix du taux d'intérêt n'étant pas justifié ; que, de plus, il n'apparaît pas que la somme ainsi demandée provienne d'un préjudice subi en raison d'une faute de Lucien Y... ; que les sommes réclamées par la SOGIG au titre d'une prétendue perte d'exploitation ne sont pas davantage justifiées par un calcul rigoureux ; qu'il n'est pas démontré par la SOGIG que l'attitude du notaire soit à l'origine d'une perte d'exploitation indemnisable ; que les réclamations présentées à ce titre seront donc rejetées ;

ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE seule la comptabilité établie par le notaire dans le respect des obligations imparties par l'article 16 du décret n° 45-0117 du 19 décembre 1945 pris pour l'application du statut du notariat, bénéficie d'une garantie d'authenticité qui s'impose au juge ; qu'en retenant que l'authenticité qui s'attachait à la comptabilité de Maître Y... devait la conduire à retenir les montants tels qu'ils apparaissaient en débit dans cette comptabilité, sans rechercher si, comme il était soutenu (conclusions de la société SOGIG, p. 14), en l'absence avérée de tout arrêté de compte et de tout état des paiements afférents aux ventes de l'opération immobilière objet de l'acte authentique du 28 mai 1993, la comptabilité sur laquelle elle se fondait n'était pas contraire aux exigences du texte susvisé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 16 du décret du 19 décembre 1945, et de l'article 1317, devenu 1369, du code civil ;

ALORS, EN DEUXIEME LIEU, QUE la subrogation conventionnelle, expressément consentie, en même temps que le paiement, par le créancier recevant ce paiement d'une tierce personne, transmet à celle-ci les droits et actions du créancier contre le débiteur ; que ce transfert est opposable au débiteur à la date du paiement subrogatoire ; que l'arrêt attaqué retient que, sur la somme totale de 1.282.409,56 € reçue par Maître Y... en règlement des prix de vente des villas, il a réglé 446.856,74 € à la BNPG, de sorte que celle-ci a été irrégulièrement privée d'une somme de 670.798,79 €, qui constitue un préjudice dont la société SOGIG est fondée à obtenir l'indemnisation par l'effet de la subrogation ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à établir que le paiement fait par Maître Y... au bénéfice de la BNPG pouvait être opposé à la société SOGIG, dont elle constatait qu'elle était, par l'effet de l'acte reçu le 13 avril 2012 par la SCP Y...E... , subrogée dans les droits de la BNPG, avec laquelle elle n'était pas en concours, pour la somme de 1.240.934,99 €, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1250 et 1252, devenus 1346-1 et 1346-3, du code civil ;

ALORS, EN TROISIEME LIEU, QUE la subrogation est à la mesure du paiement, et que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que l'arrêt attaqué retient que les versements réalisés par Maître Y... correspondant à des honoraires à des tiers, pour 48.173,99 €, des frais d'acte, pour 92.418,96 €, et des frais de commercialisation, pour 24.100,21 €, pouvaient venir valablement en déduction des prix de vente dès lors qu'ils constituaient des frais liés à la régularisation des actes de vente ; qu'en se déterminant ainsi, cependant qu'il ressortait de l'acte authentique reçu le 28 mai 1993 que « la totalité des prix de vente des villas devra être versée à la Banque », sans déduction prévue des frais liés à la régularisation des actes de vente, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1250, devenus 1103 et 1346-1, du code civil ;

ALORS, EN QUATRIEME LIEU, QUE la subrogation étant à la mesure du paiement, le subrogé peut prétendre aux intérêts produits au taux légal par la dette qu'il a acquittée, lesquels courent de plein droit à compter du jour où le notaire devait restituer les fonds qu'il a conservés indûment ; qu'en condamnant Maître Y... à payer à la société SOGIG, subrogée dans les droits de la BNPG, les intérêts au taux légal sur la somme au principal de 670.798,79 € à compter seulement du prononcé de l'arrêt, et non du jour où elle était due par le notaire en vertu de l'acte authentique reçu le 28 mai 1993, la cour d'appel a violé l'article 13, 5° du décret n° 45-0117 du 19 décembre 1945, ensemble les articles 1153-1, 1250 et 1252, devenus 1231-7, 1346-1 et 1346-3, du code civil ;

ALORS, EN CINQUIEME LIEU, QU'en tout état de cause, la subrogation étant à la mesure du paiement, le subrogé peut prétendre aux intérêts produits au taux légal par la dette qu'il a acquittée, lesquels courent de plein droit à compter du paiement ; qu'en condamnant Maître Y... à payer à la société SOGIG, subrogée dans les droits de la BNPG, les intérêts au taux légal sur la somme au principal de 670.798,79 € à compter seulement du prononcé de l'arrêt, et non du jour où elle avait été acquittée par la société SOGIG, la cour d'appel a violé les articles 1153-1, 1250 et 1252, devenus 1231-7, 1346-1 et 1346-3, du code civil ;

ET ALORS, EN DERNIER LIEU, QUE le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable n'avait pas eu lieu ; qu'en retenant que n'était pas démontré le lien causal entre la faute de Maître Y... et la perte d'exploitation dont il était demandé réparation, cependant que la société SOGIG réclamait l'indemnisation du préjudice né pour elle de la mainlevée tardive des inscriptions d'hypothèque qui grevaient les parcelles de terrain qu'elle avait données en garantie du remboursement des sommes dues à la BNPG selon acte reçu le 28 mai 1993, et de l'impossibilité pour elle de retirer un revenu de ces terrains qu'elle projetait de viabiliser et de lotir, tout en étant tenue de régler sur ses propres deniers à la BNPG la somme de 1.240.934,99 € que Maître Y... retenait indûment, la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil."