Les acquéreurs ne demandent pas de prêts : ils doivent indemniser l'agent immobilier. (mardi, 27 mars 2018)

Dans cette affaire les acquéreurs n'avaient justifié d'aucune démarche complète et régulière à l'égard d'un organisme bancaire afin de satisfaire à la condition suspensive ainsi qu'à l'obtention de leur financement dans les conditions telles que convenues au « compromis », et les juges les condamnent à indemniser l'agence immobilière (la moitié de la commission).

"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 novembre 2015), que, par acte du 24 janvier 2012, MM. Adel X... et Mohamed X... (les consorts X...) ont acquis de la SCI PTEM (la SCI), par l'intermédiaire de la société SBS Immo, des lots de copropriété, sous condition suspensive de l'obtention d'un prêt, la réitération par acte authentique étant fixée au plus tard le 24 avril 2012 ; que, les consorts X... n'ayant pas signé l'acte authentique de vente, la SCI et la société SBS Immo les ont assignés en paiement du montant de la clause pénale et en dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt d'accueillir les demandes ;

Mais attendu qu'ayant retenu, sans inverser la charge de la preuve, que les acquéreurs n'avaient justifié d'aucune démarche complète et régulière à l'égard d'un organisme bancaire afin de satisfaire à la condition suspensive ainsi qu'à l'obtention de leur financement dans les conditions telles que convenues au « compromis », qu'ils étaient responsables de la défaillance de la condition suspensive et de l'échec de la vente et que la SCI s'était régulièrement déliée de tout engagement de vendre par l'envoi de deux lettres recommandées le 19 septembre 2012, et qu'il n'était pas démontré qu'elle aurait aliéné une partie de la chose ni renoncé aux droits de la promesse de vente, la cour d'appel a pu en déduire que les consorts X... devaient être condamnés au paiement du montant de la clause pénale et que le dépôt de garantie devait rester acquis à la SCI ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de les condamner à payer des dommages-intérêts ;

Mais attendu qu'ayant retenu, à bon droit, que, si l'agence immobilière ne pouvait solliciter le paiement de sa commission en l'absence de réalisation de la vente, elle était fondée, en raison de la faute des acquéreurs, à obtenir des dommages-intérêts dont elle a souverainement fixé le montant ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne MM. Adel X... et Mohamed X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de MM. Adel X... et Mohamed X... et les condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à la société PTEM ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour MM. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné in solidum M. Adel X... et M. Mohamed X... à verser à la SCI PTEM la somme de 85.020 € au titre de la clause pénale, d'avoir dit que la somme due au titre du dépôt de garantie reste acquise au vendeur sous réserve des frais et débours pouvant être dus au rédacteur de l'acte, et d'avoir condamné in solidum M. Adel X... et M. Mohamed X... à verser à Me Y... en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société SBS Immo, la somme de 12.500 € à titre de dommages et intérêt,

AUX MOTIFS QUE par acte du 24 janvier 2012, M. Adel X... et M. Mohamed X... ont passé un compromis de vente avec la société PTEM pour l'achat de divers lots dans un immeuble en copropriété au prix de 850.200 € ; que l'acte précise en page 7 que les parties reconnaissent que la vente a été négociée par l'agence Akerys société SBS Immo et que l'acquéreur qui en aura la charge s'engage à lui verser une rémunération de 25.000 € TVA incluse payée au jour où la vente sera définitivement conclue ; que l'acte prévoit également un certain nombre de conditions suspensives et notamment celle tenant à l'obtention d'un prêt outre une clause pénale d'un montant de 85.020 € et un dépôt de garantie de 24.600 € ; que la réitération authentique était prévue au plus tard le 24 avril 2012 ; qu'au titre de la condition suspensive relative à l'obtention du prêt de 975.000 €, le compromis prévoyait que les demandes devaient être déposées dans un délai de huit jours à compter du compromis et que la condition devait être réalisée au plus tard le 24 mars 2012 ; que le vendeur avait la faculté de demander à l'acquéreur par lettre recommandée avec accusé de réception, de justifier du dépôt du dossier de prêt et qu'à défaut de justification sous huitaine, le vendeur pourrait se prévaloir de la caducité du compromis ; que le vendeur affirme que rien n'ayant été fait quant au financement, il a proposé le 11 avril 2012, de proroger la vente au 24 juin sous condition de la justification du dépôt d'un prêt en banque, du versement d'un dépôt de garantie complémentaire et de la signature d'un avenant ; mais que le 24 avril 2012, l'agence immobilière l'informait du refus des vendeurs sur l'acceptation de ces conditions ; que le 30 mai 2012 (pièce 9 du dossier des intimés), le vendeur a de nouveau proposé un délai au 20 juin pour produire un justificatif de l'accord de prêt qui n'avait pas été obtenu à raison, selon son courrier, d'une pièce manquante pour la banque et au 15 juillet 2012 pour la signature de l'acte ; que le 13 juillet 2012 un mail du conseil financier des acquéreurs qui fait état qu'il est dans l'attente d'une réponse d'un établissement de cautionnement pour finaliser ce dossier, confirme donc que les consorts X... ne disposent toujours pas d'un prêt ; que suite à cet échange le vendeur a fait dresser un procès-verbal de carence à la date du 16 juillet 2012 suite à la délivrance d'une sommation de comparaitre pour cette date, dont il n'est pas contesté qu'elle a été reçue ; qu'enfin la société venderesse a fait valoir, par deux courriers recommandés dont elle justifie (pièce 4 de son dossier) en date du 19 septembre 2012 adressé pour l'un, à Adel X... et pour l'autre à Mohamed X... qu'elle n'entendait pas poursuivre la vente en se prévalant des dispositions de la clause « réitération authentique », annonçant alors qu'elle demanderait en justice la mise en oeuvre de la clause pénale et le versement à son profit du dépôt de garantie ; qu'il résulte des observations ci-dessus que les acquéreurs qui n'ont justifié d'aucune démarche complète et régulière à l'égard d'un organisme bancaire à fin de satisfaire à la condition suspensive ainsi qu'à l'obtention de leur financement dans les conditions telles que convenues au compromis sont ainsi responsables à raison d'un manque de diligence qui leur est imputable, de la défaillance de la condition suspensive et de l'échec de la vente dans les termes convenus, puis prorogés, étant à ce propos souligné que le vendeur rappelle, dans un de ses courriers (pièce 9 de son dossier), que postérieurement au délai fixé ils ont certes fait, les 18 et 27 avril 2012, deux dépôts de demande de prêt mais que la banque n'a « pu se prononcer car Messieurs X... ne lui ont pas fait retour d'un document qu'ils devaient compléter » et que cette relation des faits n'est nullement combattue par les consorts X... ; que le compromis prévoyait au titre de la clause « réitération authentique » que « si le défaut de réitération à la date prévue de réalisation dûment constatée provient de la défaillance de l'acquéreur, le vendeur pourra toujours renoncer à poursuivre l'exécution de la vente en informant l'acquéreur de sa renonciation par lettre recommandée avec accusé de réception, ce dernier faisant foi ou par exploit d'huissier. Les parties seront alors libérées de plein droit de tout engagement sauf à tenir compte de la responsabilité de l'acquéreur par la faute duquel le contrat n'a pu être exécuté, avec les conséquences financières y attachées, notamment la mise en oeuvre de la clause pénale, et des dommages et intérêts si le vendeur subit un préjudice direct, distinct de celui couvert par la clause » ; que l'acte stipule également que l'acquéreur pourra « recouvrer le dépôt de garantie versé sous déduction des frais et débours pouvant être dus au rédacteur que s'il justifie de la non réalisation hors sa responsabilité telle qu'elle est indiquée à l'article 1178 du code civil, de l'une des conditions suspensives…, et (que) dans le cas contraire, la somme restera acquise au vendeur sous déduction des frais et débours pouvant être dus au rédacteur des présentes » ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a jugé bien fondée la demande relative au dépôt de garantie sauf à préciser que la somme reste acquise au vendeur sous réserve des frais et débours pouvant être dus au rédacteur de l'acte ; que par ailleurs le compromis prévoyait une clause pénale ainsi rédigée : « au cas où toutes les conditions relatives à l'exécution des présentes étant remplies, l'une des parties après avoir été mise en demeure, ne régulariserait pas l'acte authentique et ne satisferait pas aux conditions exigibles, elle devra verser à l'autre partie la somme de 80.020 € à titre de clause pénale conformément aux dispositions des articles 1152 et 1226 du code civil, indépendamment de tous dommages et intérêts ; qu'il est ici expressément précisé convenu entre les parties que cette clause pénale a également pour objet de sanctionner le comportement de l'une des parties dans la mesure où il n'a pas permis de remplir toutes les conditions d'exécution de la vente » ; que la clause ayant ainsi pour objet de sanctionner le comportement de l'une des parties qui n'a pas permis de satisfaire aux conditions de la vente, la demande de ce chef est également bien fondée ; que pour soutenir leur appel les consorts X... prétendent que le compromis serait caduc par la faute du vendeur au motif d'une part qu'il aurait aliéné une partie de la chose en modifiant les éléments essentiels du contrat et d'autre part que les négociations qui ont repris entre les parties sur la modification du contrat n'ont pas abouti ; mais que le premier grief n'est pas démontré par les appelants et que le vendeur n'est pas contredit en ce qu'il fait à cet égard remarquer que la vente, qui est finalement intervenue, date du 20 juin 2013 ; que par ailleurs la SCI PTEM s'est régulièrement déliée de tout engagement de vendre du chef du compromis en litige avec l'envoi de ses deux courriers du 19 septembre 2012 ; qu'en outre quand bien même les parties ont continué à correspondre sur la période novembre 2012 – mars 2013, la lecture de leurs échanges permet de retenir qu'il s'agissait de nouveaux pourparlers, non susceptibles d'être rattachés à la convention du 24 janvier 2012, dans la mesure où l'objet de la vente et par suite, le prix n'étaient plus les mêmes, les négociations ne portant en effet plus que sur huit lots à usage d'aire de stationnement, (au lieu de 12) et 2 espaces bureaux (au lieu de 3), pour un prix de 500.000 € ; que par suite les observations faites sur le caractère non éclairé de leur consentement dans le cadre de ces nouvelles négociations est sans emport sur le contrat du 24 janvier 2012 ; qu'il n'est par ailleurs nullement démontré que le vendeur, qui a fait preuve de patience en acceptant de proroger les délais initialement convenus alors que ses interlocuteurs ne prouvent pas avoir veillé avec sérieux aux diligences nécessaires à leur financement aurait, de son côté, failli à son obligation de bonne foi ou de loyauté ou aurait commis un quelconque abus dans l'exécution dudit contrat ; qu'enfin à aucun moment de ces pourparlers, le vendeur n'a renoncé aux droits qu'il tenait du compromis tels qu'il les avait mis en oeuvre par ses courriers du 19 septembre 2012 ; qu'en toute hypothèse ni la caducité du compromis, ni la prétendue renonciation du vendeur à poursuivre la vente tels qu'invoqués par les appelants ne sont susceptibles d'anéantir le contrat, les clauses y contenues, destinées à régler les conséquences de la défaillance fautive d'une partie, continuant donc à produire effet ; qu'en ce qui concerne les demandes de l'agence immobilière, si à défaut de réitération de l'acte en la forme authentique, celle-ci ne peut solliciter le paiement de sa commission, elle est néanmoins bien fondée en une réclamation pécuniaire formée à titre de dommages et intérêts ; que la nécessité d'assumer son rôle d'intermédiaire sur environ 8 mois compte tenu des atermoiements des acquéreurs, pour une vente de lots de copropriété, multiples, justifie qu'il lui soit de ce chef alloué la somme de 12.500 € ;

1°) ALORS QU'il appartient au promettant de rapporter la preuve que le bénéficiaire d'une promesse de vente sous condition suspensive d'obtention d'un prêt a empêché l'accomplissement de la condition ; qu'en se bornant à constater que les acquéreurs n'ont justifié d'aucune démarche complète et régulière à l'égard d'un organisme bancaire à fin de satisfaire à la condition suspensive et que la relation des faits par le vendeur qui rappelle, dans un de ses courriers que postérieurement au délai fixé les acquéreurs ont fait, les 18 et 27 avril 2012, deux dépôts de demande de prêt mais que la banque n'a « pu se prononcer car Messieurs X... ne lui ont pas fait retour d'un document qu'ils devaient compléter » et que cette relation des faits n'est nullement combattue par les consorts X..., quand ces derniers ayant formellement contesté avoir fait échouer la réalisation de la condition d'obtention du prêt, c'est au vendeur qu'il incombait d'établir leur responsabilité à l'origine de la non obtention du prêt, la Cour d'appel a violé les articles 1178 et 1315 du code civil ;

2°) ALORS QU'en écartant la preuve de la vente à un tiers d'une partie des lots objets de la promesse de vente par la société PTEM au mépris de ses engagements résultant du compromis de vente litigieux, tout en admettant que dès le mois de novembre 2012 les parties ont commencé de nouveaux pourparlers, lesquels ne portaient plus que sur 8 lots à usage d'aire de stationnement (au lieu de 12) et 2 espaces bureaux (au lieu de 3), pour un prix également différent de 500.000 € ce dont il résulte que la société PTEM avait d'ores et déjà pris l'engagement de vendre et ce dès avant le mois de novembre 2012, une partie des lots et des aires de stationnement objets de la promesse à un tiers, peu important que la vente ait été comme le constate la Cour d'appel « finalement » conclue en juin 2013, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard des articles 1134 et 1315 du code civil qu'elle a violé ;

3°) ALORS QUE le vendeur qui manque à ses engagements contractuels en vendant une partie des lots objets du compromis à un tiers, ne saurait se prévaloir des clauses de ce compromis destinées à régler les conséquences de la défaillance de l'acquéreur ainsi délié de ses propres engagements ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles 1134 et 1184 du code civil ;

4°) ALORS QU'en poursuivant les négociations avec les consorts X... sur une partie des lots objets du compromis de vente après s'est délié de tout engagement de vendre du chef de ce compromis avec l'envoi du courrier du 19 septembre 2012, le vendeur a renoncé sans équivoque à se prévaloir de la réalisation de ce compromis, et partant des clauses de ce compromis destinées à régler les conséquences de la défaillance de l'acquéreur ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles 1134 et 1234 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné in solidum M. Adel X... et M. Mohamed X... à verser à Me Y..., en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société SBS Immo, la somme de 12.500 € à titre de dommages et intérêt,

AUX MOTIFS QU'en ce qui concerne les demandes de l'agence immobilière, si à défaut de réitération de l'acte en la forme authentique, celle-ci ne peut solliciter le paiement de sa commission, elle est néanmoins bien fondée en une réclamation pécuniaire formée à titre de dommages et intérêts ; que la nécessité d'assumer son rôle d'intermédiaire sur environ 8 mois compte tenu des atermoiements des acquéreurs, pour une vente de lots de copropriété, multiples, justifie qu'il lui soit de ce chef alloué la somme de 12.500 € ;

ALORS QU'aucune commission ni somme d'argent quelconque ne peut être exigée par l'agent immobilier ayant concouru à une opération qui n'a pas été effectivement conclue ; que dès lors la vente ne s'étant pas effectivement conclue, la société SBS Immo ne pouvait prétendre même sous couvert de prétendus atermoiements des acquéreurs, au paiement d'une indemnité compensatrice pour avoir assuré son rôle d'intermédiaire ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 6-1 de la loi du 2 janvier 1970 dans sa rédaction applicable à la cause."