Le locataire peut-il se prévaloir de la clause résolutoire du bail commercial ? (vendredi, 09 juin 2017)

Cet arrêt juge que seul le bailleur peut se prévaloir de la clause résolutoire qui a été prévue au bail commercial et que le locataire ne peut pas le faire.

"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 janvier 2016), statuant en référé, que la société Dar Beida II, propriétaire de locaux commerciaux donnés à bail à la société Air groupe, lui a délivré, le 4 décembre 2014, un commandement de payer visant la clause résolutoire pour avoir paiement d'un arriéré de loyer et, le 8 janvier 2015, l'a assignée en paiement d'une provision à valoir sur les loyers impayés ; que, reconventionnellement, la locataire a demandé la constatation de la résiliation du bail par l'effet de la clause résolutoire ;

Attendu que la société Air groupe fait grief à l'arrêt de dire que la clause résolutoire figurant au commandement n'a pas produit d'effet et que le bail liant les parties se poursuivrait jusqu'à l'expiration de la période triennale en cours, alors, selon le moyen :

1°/ que lorsque le bailleur a indiqué dans le commandement qu'il entendait se prévaloir de l'acquisition de la clause résolutoire, en cas de persistance de l'infraction, à l'expiration du délai d'un mois, la résiliation est acquise ; qu'il s'ensuit que le bailleur ne peut plus y renoncer et que le preneur peut se prévaloir de l'acquisition de la clause résolutoire ; qu'en décidant, pour dire que le bailleur avait conservé le droit de renoncer au bénéfice de la clause résolutoire, édictée à son seul profit, même après la délivrance de ce commandement, que la société Air groupe avait été mise en demeure de régulariser sa situation sans qu'il lui soit expressément notifié que la résiliation prendrait effet inéluctablement à l'expiration du délai d'un mois quand il ressortait du commandement de payer que la société Dar Beida II entendait « se prévaloir de la clause résolutoire contenue dans le bail » et que le bailleur avait reproduit la clause résolutoire contenue dans le bail qui disposait « qu'à défaut de paiement à son échéance exacte d'un seul terme de loyer ou de tout rappel de loyer consécutif à une augmentation de celui-ci, comme à défaut de remboursement de frais, taxe locatives, imposition, charge, ou frais de poursuite et prestations qui en constituent l'accessoire et notamment du commandement destiné à faire jouer la présente clause, ou enfin à défaut de l'exécution de l'une ou l'autre des clauses et conditions du présent bail ou du règlement de copropriété qui fait également la convention des parties, ou encore d'inexécution des obligation imposées aux locataires par la loi ou les règlements et un mois après commandement de payer ou une sommation d'exécuter restés sans effet, le présent bail sera résilié de plein droit », la cour d'appel a violé l'article L. 145-41 du code de commerce ;

2°/ que le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en énonçant que le preneur avait seulement été mis en demeure de régulariser sans qu'il lui soit expressément notifié que la résiliation prendrait effet inéluctablement à l'expiration du délai d'un mois cependant que la lecture du commandement de payer visant la clause résolutoire enseignait que le bailleur avait entendu se prévaloir de la clause résolutoire contenue dans le bail laquelle prévoyait « qu'à défaut de paiement à son échéance exacte d'un seul terme de loyer ou de tout rappel de loyer consécutif à une augmentation de celui-ci, comme à défaut de remboursement de frais, taxe locatives, imposition, charge, ou frais de poursuite et prestations qui en constituent l'accessoire et notamment du commandement destiné à faire jouer la présente clause, ou enfin à défaut de l'exécution de l'une ou l'autre des clauses et conditions du présent bail ou du règlement de copropriété qui fait également la convention des parties, ou encore d'inexécution des obligation imposées aux locataires par la loi ou les règlements et un mois après commandement de payer ou une sommation d'exécuter restés sans effet, le présent bail sera résilié de plein droit », la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

3°/ que lorsque le bailleur a indiqué dans le commandement qu'il entendait se prévaloir de l'acquisition de la clause résolutoire, en cas de persistance de l'infraction, à l'expiration du délai d'un mois, la résiliation est acquise, si le preneur a acquiescé ; qu'en décidant que le bailleur avait conservé le droit de renoncer au bénéfice de la clause résolutoire, édictée à son seul profit, même après la délivrance de ce commandement, sans même rechercher comme elle y était invitée, si le preneur n'avait pas acquiescé à l'acquisition de la clause résolutoire dont s'était prévalue la société Dar Beida II, dans la mesure où, selon procès-verbal de constat d'huissier du 13 janvier 2015, la société Air groupe avait procédé à un état des lieux et avait restitué les clés du local à un mandataire dument habilité à les recevoir en l'occurrence, la SCP Larrieu, Gensollen, Grosse, huissier de justice, mandaté par la SCI Dar Beida Il pour faire délivrer le commandement de payer visant la clause résolutoire, la cour d'appel a privé, en tout état de cause, sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que la clause résolutoire avait été stipulée au seul profit du bailleur et que celui-ci demandait la poursuite du bail, la cour d'appel a exactement déduit, de ces seuls motifs, sans dénaturation, que la locataire ne pouvait se prévaloir de l'acquisition de la clause ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Air groupe aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Air groupe et la condamne à payer à la société Dar Beida II la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept avril deux mille dix-sept.


Le conseiller referendaire rapporteur le president

 

 


Le greffier de chambre
MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Air groupe.

Le moyen fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'avoir dit que la clause résolutoire figurant au commandement n'avait pas produit d'effet et que le bail liant les parties se poursuivrait jusqu'à l'expiration de la période triennale en cours ;

AUX MOTIFS QUE le commandement de payer délivré le 4 décembre 2014 comporte les mentions suivantes : « Faute par vous de vous acquitter du montant des sommes susmentionnées vous pourrez y être contraint par toutes voies de droit et notamment la saisie conservatoire de vos biens meubles corporels garnissant les lieux loués. De plus, le demandeur entend se prévaloir de la clause résolutoire contenue dans le bail et ci-après reproduite ( …) » ; que le preneur a été donc mis en demeure de régulariser sans qu'il lui soit expressément notifié que la résiliation prendrait effet inéluctablement à l'expiration du délai d'un mois ; que le bailleur a conservé le droit de renoncer au bénéfice de la clause résolutoire, édictée à son seul profit, même après la délivrance de ce commandement ; que la SCI DAR BEIDA II a engagé ensuite une action aux fins d'obtenir le seul paiement du montant de l'arriéré des loyers lorsqu'elle a appris la solvabilité de la société Air groupe locataire ; que cette société ne saurait solliciter à titre reconventionnel de voir constater la résolution du contrat par l'effet de la clause pour prétendre être dégagée de l'exécution de ses obligations contractuelles jusqu'au terme de son engagement ; que la SCI DAR BEIDA II demande par ailleurs en cause d'appel la réactualisation des montants dus en sollicitant la condamnation de la locataire au paiement de sommes et non de provisions ; que cette demande ne peut dès lors prospérer en référé ; qu'il s'ensuit la réformation partielle de l'ordonnance déférée ;

1° ALORS QUE lorsque le bailleur a indiqué dans le commandement qu'il entendait se prévaloir de l'acquisition de la clause résolutoire, en cas de persistance de l'infraction, à l'expiration du délai d'un mois, la résiliation est acquise ; qu'il s'ensuit que le bailleur ne peut plus y renoncer et que le preneur peut se prévaloir de l'acquisition de la clause résolutoire ; qu'en décidant, pour dire que le bailleur avait conservé le droit de renoncer au bénéfice de la clause résolutoire, édictée à son seul profit, même après la délivrance de ce commandement, que la société AIR GROUPE avait été mise en demeure de régulariser sa situation sans qu'il lui soit expressément notifié que la résiliation prendrait effet inéluctablement à l'expiration du délai d'un mois quand il ressortait du commandement de payer que la société DAR BEIDA II entendait « se prévaloir de la clause résolutoire contenue dans le bail » et que le bailleur avait reproduit la clause résolutoire contenue dans le bail qui disposait « qu'à défaut de paiement à son échéance exacte d'un seul terme de loyer ou de tout rappel de loyer consécutif à une augmentation de celui-ci, comme à défaut de remboursement de frais, taxe locatives, imposition, charge, ou frais de poursuite et prestations qui en constituent l'accessoire et notamment du commandement destiné à faire jouer la présente clause, ou enfin à défaut de l'exécution de l'une ou l'autre des clauses et conditions du présent bail ou du règlement de copropriété qui fait également la convention des parties, ou encore d'inexécution des obligation imposées aux locataires par la loi ou les règlements et un mois après commandement de payer ou une sommation d'exécuter restés sans effet, le présent bail sera résilié de plein droit », la cour d'appel a violé l'article L. 145-41 du code de commerce ;

2° ALORS QUE le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en énonçant que le preneur avait seulement été mis en demeure de régulariser sans qu'il lui soit expressément notifié que la résiliation prendrait effet inéluctablement à l'expiration du délai d'un mois cependant que la lecture du commandement de payer visant la clause résolutoire enseignait que le bailleur avait entendu se prévaloir de la clause résolutoire contenue dans le bail laquelle prévoyait « qu'à défaut de paiement à son échéance exacte d'un seul terme de loyer ou de tout rappel de loyer consécutif à une augmentation de celui-ci, comme à défaut de remboursement de frais, taxe locatives, imposition, charge, ou frais de poursuite et prestations qui en constituent l'accessoire et notamment du commandement destiné à faire jouer la présente clause, ou enfin à défaut de l'exécution de l'une ou l'autre des clauses et conditions du présent bail ou du règlement de copropriété qui fait également la convention des parties, ou encore d'inexécution des obligation imposées aux locataires par la loi ou les règlements et un mois après commandement de payer ou une sommation d'exécuter restés sans effet, le présent bail sera résilié de plein droit », la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

3° ALORS QUE lorsque le bailleur a indiqué dans le commandement qu'il entendait se prévaloir de l'acquisition de la clause résolutoire, en cas de persistance de l'infraction, à l'expiration du délai d'un mois, la résiliation est acquise, si le preneur a acquiescé ; qu'en décidant que le bailleur avait conservé le droit de renoncer au bénéfice de la clause résolutoire, édictée à son seul profit, même après la délivrance de ce commandement, sans même rechercher comme elle y était invitée, si le preneur n'avait pas acquiescé à l'acquisition de la clause résolutoire dont s'était prévalue la société DAR BEIDA II, dans la mesure où, selon procès-verbal de constat d'huissier du 13 janvier 2015, la société AIR GROUPE avait procédé à un état des lieux et avait restitué les clés du local à un mandataire dument habilité à les recevoir en l'occurrence, la SCP LARRIEU, GENSOLLEN, GROSSE, huissier de justice, mandaté par la SCI DAR BEIDA Il pour faire délivrer le commandement de payer visant la clause résolutoire, la cour d'appel a privé, en tout état de cause, sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil."