Décision définitive de l'assemblée générale et responsabilité du syndic (vendredi, 02 juin 2017)

Cette décision de la Cour de cassation suggère que la responsabilité du syndic ne peut être engagée dès lors que la décision de l'assemblée générale prétendument illégale est devenue définitive pour ne pas avoir été attaquée dans le délai de deux mois prévu par la loi du 10 juillet 1965.

"Vu les articles 1134, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, et 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l’article 42, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 ;


Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 11 mai 2015), qu’invoquant que l’autorisation permettant la présence de vélos dans la cour intérieure avait été votée par l’assemblée générale des copropriétaires du 22 juin 2007 sans modification préalable du règlement de la copropriété interdisant la dépose d’objet ou véhicule dans les cours intérieures, M. et Mme X..., copropriétaires, ont assigné le syndicat des copropriétaires du 5 rue du Maréchal Joffre (le syndicat) et la société Cabinet Hude-Noll de Valence, son syndic, en retrait de tout objet garnissant la cour et en indemnisation de leur préjudice de jouissance ;


Attendu que, pour accueillir ces demandes, l’arrêt retient que les stipulations du règlement s’imposent au syndicat comme aux copropriétaires aussi longtemps qu’elles n’ont pas été annulées ou abrogées et qu’en faisant voter une résolution qui contrevient à ses stipulations sans avoir au préalable fait procéder à la modification de ce règlement dans les termes prescrits par la loi du 10 juillet 1965 dans son article 26 et en ne faisant pas respecter ce règlement, le syndicat des copropriétaires et son syndic ont commis une faute de nature à engager leur responsabilité envers les copropriétaires qui ont subi un préjudice en découlant ;


Qu’en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si l’absence de contestation de la décision ayant autorisé la présence de vélos dans la cour intérieure de l’immeuble ne privait pas M. et Mme X... de leur action en responsabilité du fait du caractère définitif de cette décision à l’égard du syndicat et du syndic, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;


PAR CES MOTIFS :


CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 11 mai 2015, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles, autrement composée ;


Condamne M. et Mme X... aux dépens ;


Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme X... et les condamne à payer au syndicat du 5 rue du Maréchal Joffre et à la société Cabinet Hude-Noll de Valence la somme globale de 3 000 euros ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize mars deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt


Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour le syndicat des copropriétaires du 5 rue du Maréchal Joffre 78000 Versailles et la société Cabinet Hude-Noll de Valence.


Il est reproché à l’arrêt attaqué déclaré le syndicat des copropriétaires du 5 rue du Maréchal Joffre à Versailles et son syndic responsables du non-respect du règlement de copropriété s’agissant de la cour commune de l’immeuble, de les avoir condamné in solidum à verser à M. et Mme X... la somme de 1.500 € à titre de dommages et intérêts et d’avoir enjoint le syndicat des copropriétaires et le syndic de procéder à l’enlèvement de tous les objets se trouvant dans la cour commune intérieure A de cet immeuble en violation du point 3° du chapitre II du règlement de la copropriété, consacré à l’usage des parties communes ;


AUX MOTIFS QUE le syndicat des copropriétaires, personne morale, ne commet pas de faute personnelle mais qu’il est responsable des fautes commises par ses organes et, en particulier, de celles de son syndic à moins que celles-ci soient détachables de ses fonctions ce qui, en l’espèce, n’est ni allégué ni justifié ; qu’il revient au syndicat des copropriétaires, par l’intermédiaire de son syndic, de faire respecter le règlement de copropriété et que sa violation constitue une faute ; que le syndic, qui tolère une infraction au règlement de copropriété qu’il a le devoir de faire respecter, engage la responsabilité du syndicat envers les copropriétaires victimes d’un préjudice en découlant ; qu’en l’espèce, il n’est nullement contesté que le chapitre II du règlement de la copropriété, consacré à l’usage des parties communes, stipule sous un 3° qu’il « est interdit de déposer aucun objet ou véhicules dans les courettes intérieures A et B, il ne pourra y être fait aucuns travaux » ; qu’il résulte des différents éléments versés aux débats et de leur chronologie que, sur le fondement du règlement de copropriété et en raison de l’obligation de laisser libre en tout temps les parties communes, l’assemblée générale du 24 juin 2004 a, par une résolution n° 33, refusé aux époux X... de leur accorder l’autorisation de mettre des fleurs dans la cour et que, malgré les réserves de M. X... quant à cet aménagement, après avoir rappelé que la cour en question était une partie commune dont l’usage et la réglementation appartiennent au seul syndicat des copropriétaires, dans le respect des dispositions du règlement de copropriété relatives aux nuisances au sein de l’immeuble, par une résolution n° 25, l’assemblée générale du 22 juin 2007 a décidé, à la majorité des suffrages exprimés des copropriétaires présents ou représentés, soit à la majorité de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965, « l’aménagement d’un espace pour vélos dans la cour de gauche et donné mandat au syndic pour étudier et décider avec le conseil syndical les modalités de cet aménagement » ; qu’à ce stade, il est patent que cette résolution a été adoptée sans modification préalable du règlement de copropriété suivant les prescriptions de l’article 26, sous b, de la loi du 10 juillet 1965 ; que cette disposition précise que les clauses du règlement de copropriété relatives à la jouissance, l’usage et l’administration des parties communes peuvent être modifiées, mais seulement à la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix, donc conformément à une double majorité ; qu’en définitive, cette résolution 25 de l’assemblée générale du 22 juin 2007 a été adoptée au mépris des dispositions du règlement de copropriété qui interdisait cette dépose dans la courette commune et de l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 qui autorise la modification de celui-ci à certaines conditions qui en l’espèce n’ont pas été respectées ; qu’il résulte également des pièces versées aux débats que cette résolution est devenue effective très rapidement comme le démontre la résolution 23 adoptée par l’assemblée générale des copropriétaires du 10 décembre 2008 ; que cette résolution (soulignée par la cour) décide ainsi que « pour le moment il convient de différer à une date ultérieure toute éventuelle installation d’un auvent dans la cour, après constats des premiers effets de la pose récente du râtelier dans la cour commune » ; qu’il est donc bien établi que la cour commune a été encombrée de vélos en 2008, alors que le règlement de copropriété le prohibait toujours ce que, paradoxalement, le syndicat des copropriétaires ne manquait pas de rappeler lors de l’assemblée générale du 17 juin 2009 à la suite de l’intervention de Mme Y... qui se plaignait de voir déposer dans la courette divers objets dont des « encombrants » en plus des vélos ; que le syndicat des copropriétaires rappelait en effet à cette occasion, dans les questions diverses, sans vote, que « conformément aux dispositions du règlement de copropriété, les parties communes, dont la cour, doivent rester libres en tout temps » ; qu’il est également démontré que la décision de maintenir les râteliers en place dans la cour gauche pour le remisage des cycles a été adoptée par l’assemblée générale du 9 juin 2010 aux termes de la résolution 24 pérennisant ainsi la décision adoptée en 2007 ; que le procès-verbal ne précise pas les modalités du vote de cette résolution ; qu’il est seulement indiqué qu’elle était adoptée à « l’unanimité des présents et représenté » alors qu’il est également précisé dans le même paragraphe que les époux X... ont voté « contre » ; que le procès-verbal enseigne également que le quorum nécessaire à un vote dans les termes de l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 n’est pas atteint ; qu’à ce stade, il est patent que, malgré les protestations des époux X... et l’interdiction faite par le règlement de copropriété de déposer tout objet ou véhicule dans les courettes intérieures A et B, interdiction connue de tous et évidemment du syndicat des copropriétaires et de son syndic comme cela ressort des pièces versées aux débats, l’assemblée générale a été amenée à délibérer et à se prononcer sur l’adoption de résolutions qui contrevenaient de manière manifeste à ce règlement, sans qu’il ait été proposé aux copropriétaires de modifier préalablement le règlement de copropriété suivant les modalités de l’article 26, sous b, de la loi du 10 juillet 1965 ; qu’il ressort également des pièces communiquées que, conscient de la fragilité de la force obligatoire de ces résolutions face aux stipulations claires de la clause 3° du chapitre II du règlement de la copropriété, précité, demeurée inchangée, et postérieurement aux injonctions faites par les époux X... au syndic de faire respecter les clauses du règlement de copropriété, celui-ci a soumis au vote de l’assemblée générale des copropriétaires du 15 juin 2011 une résolution n° 21 visant la modification du règlement de copropriété quant à l’usage de la cour commune escalier gauche dans les termes prévus à l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 ; que cette résolution 21 libellée comme suit : « il est interdit de déposer aucun objet dans les courettes intérieures “A et B” à l’exception de cycles ou poussettes appartenant aux Résidants ; il ne pourra y être fait aucun travaux » n’a pas été adoptée ni soumise au vote, faute de quorum nécessaire ; qu’à l’occasion du vote de cette résolution, le syndic a présenté sa finalité comme visant à « modifier le règlement de copropriété pour le rendre cohérent avec les décisions prises par les assemblées générales antérieures et en dernier lieu celle du 9 juin 2010 (résolution 24) » ; que l’exposé de la finalité de ce vote constitue une preuve supplémentaire du fait que la clause litigieuse du règlement de copropriété n’a pas été modifiée et est toujours en vigueur ; que du reste, le syndicat des copropriétaires et le syndic ne le contestent pas sérieusement puisque dans leurs dernières écritures, ils indiquent « il ne peut être reproché au syndic d’avoir proposé de modifier le règlement de copropriété pour le rendre conforme aux décisions d’assemblées générales qui encore une fois peuvent le modifier. En effet, la modification du règlement permet, par sa publicité, l’opposabilité aux tiers des modifications ce que ne permet pas les décisions d’assemblées générales. C’est donc légitimement que le syndic a pu proposer cette régularisation qui n’a pas été votée par l’assemblée qui a peut-être jugé que la limitation aux seuls vélos ou poussettes était trop restrictive » ; qu’il découle de ces différents éléments que la clause litigieuse interdisant de manière générale et inconditionnelle la dépose dans la courette litigieuse de tout objet ou véhicule est demeurée inchangée et qu’elle a toujours force obligatoire ; qu’en outre, il convient de constater que le syndicat des copropriétaires et le syndic ne justifient pas que le règlement de copropriété a été modifié depuis 2011 quant à l’usage de la cour commune escalier gauche ; qu’il découle de l’ensemble des développements qui précèdent qu’en faisant voter une résolution qui contrevient de façon manifeste aux stipulations du règlement de copropriété sans avoir au préalable fait procéder à la modification de ce règlement dans les termes prescrits par la loi du 10 juillet 1965 dans son article 26, en ne faisant pas respecter ce règlement, le syndicat des copropriétaires et son syndic ont commis une faute de nature à engager leur responsabilité envers les copropriétaires qui ont subi un préjudice en découlant ; que les époux X... démontrent que l’autorisation accordée par le syndicat des copropriétaires à l’ensemble des copropriétaires de remiser les cycles dans la courette gauche, sous les fenêtres de leur appartement, a généré des passages fréquents dans la cour et des nuisances sonores, troublant ainsi la jouissance de leur bien ; que ce préjudice est la conséquence directe de la faute du syndicat des copropriétaires et de son syndic précédemment caractérisée ; qu’il a été justement indemnisé par les premiers juges par l’allocation de la somme de 1.500 € ; que comme il a été indiqué précédemment, le règlement de copropriété stipule expressément qu’il est interdit de déposer aucun objet ou véhicules dans la courette litigieuse et les parties elles-mêmes s’accordent pour dire qu’il n’a pas été modifié ; que dès lors que les stipulations du règlement de copropriété s’imposent au syndicat comme aux copropriétaires aussi longtemps qu’elles n’ont pas été annulées ou abrogées, les époux X... sont en droit de s’en prévaloir pour obtenir du syndicat des copropriétaires et de son syndic leur respect ; qu’il découle de ce qui précède que la demande des époux X... de faire injonction au syndicat des copropriétaires et au syndic de procéder à l’enlèvement de tous les objets se trouvant dans la cour de cet immeuble en violation du règlement de copropriété sera accueillie ;


ALORS, D’UNE PART, QU’ un copropriétaire ne peut solliciter l’indemnisation du dommage que lui aurait causé une assemblée générale qu’il n’a pas contestée en temps utile ; que dans leurs «écritures d’appel (conclusions signifiées le 20 août 2013, p. 4, alinéas 4 et 5), le syndicat des copropriétaires et le syndic faisaient valoir que, faute d’avoir été contestée dans le délai visé à l’article 42, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965, la résolution n° 25 s’imposait à tous, ce qui mettait un terme à tout débat relativement à une prétendue responsabilité des organes de la copropriété dans l’adoption de cette résolution ; qu’en retenant néanmoins une responsabilité du syndicat des copropriétaires et du syndic au motif « qu’en faisant voter une résolution qui contrevient de façon manifeste aux stipulations du règlement de copropriété sans avoir au préalable fait procéder à la modification de ce règlement dans les termes prescrits par la loi du 10 juillet 1965 dans son article 26, en ne faisant pas respecter ce règlement, le syndicat des copropriétaires et son syndic ont commis une faute de nature à engager leur responsabilité envers les copropriétaires qui ont subi un préjudice en découlant » (arrêt attaqué, p. 10, in fine), sans rechercher, comme elle y était invitée, si le fait que M. et Mme X... n’aient pas contesté la résolution n° 25 ne les privait pas de la possibilité de rechercher la responsabilité du syndicat des copropriétaires et du syndic au titre de l’adoption de cette résolution, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du code civil et de l’article 42, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 ;


ALORS, D’AUTRE PART, QU’ en toute hypothèse, le syndicat des copropriétaires et son syndic tiennent leurs pouvoirs de l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965, leur vocation étant de répondre à la volonté commune des copropriétaires ; qu’en reprochant en l’espèce au syndicat des copropriétaires de l’immeuble du 5 rue du Maréchal Joffre 78000 Versailles et à son syndic de ne pas avoir fait obstacle à la volonté commune des copropriétaires, qui était d’aménager un espace pour vélos dans la courette litigieuse, nonobstant les stipulations du règlement de copropriété, la cour d’appel a violé les articles 1382 du code civil et 14 de la loi du 10 juillet 1965. "