Réclamations tardives des charges locatives (samedi, 14 mars 2015)

Cet arrêt casse la décision d'un juge de proximité qui avait considéré que le fait d'asséner à la locataire un rappel de charges brutal et des réparations démesurées caractérise une faute dans l'exécution du contrat :

 

"Vu l'article 1134 du code civil

 

Attendu selon l'arrêt attaqué (juridiction de proximité de Colmar, 2 juillet 2013) que Mme X..., a assigné M. Y... en restitution d'un dépôt de garantie versé au titre de la location d'une maison appartenant à ce dernier ; qu'à titre reconventionnel, M. Y... a demandé la condamnation de Mme X... au paiement de réparations locatives ; 

 

Attendu que pour accueillir la demande de Mme X... et rejeter la demande de M. Y..., la juridiction de proximité retient que le fait d'asséner à la locataire un rappel de charges brutal et des réparations démesurées, caractérise une faute dans l'exécution du contrat ; 

 

Qu'en statuant ainsi, alors que si la règle selon laquelle les conventions doivent être exécutées de bonne foi permet au juge de sanctionner l'usage déloyal d'une prérogative contractuelle, elle ne l'autorise pas à porter atteinte à la substance même des droits et obligations légalement convenus entre les parties, la juridiction de proximité a violé le texte susvisé ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 2 juillet 2013 par la juridiction de proximité de Colmar ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et les renvoie devant la juridiction de proximité de Mulhouse ;

 

Condamne Mme X... aux dépens ;

 

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

 

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

 

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux décembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

 

 

Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. Y.... 

 

 

Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR débouté M. Y... de ses demandes et de l'AVOIR condamné à payer à Mme X... la somme de 1.100 euros avec intérêts au taux légal à compter du 10 mai 2012 ;

 

AUX MOTIFS QUE conformément aux dispositions de l'article 22 de la loi du 6 juillet 1989, le dépôt de garantie doit être reversé au locataire dans un délai maximum de 2 mois à compter de la restitution des clefs ; qu'en l'espèce, la date de remise des clefs n'apparaît pas clairement ; que c'est donc celle du 9 mars 2012 qui sera retenue, ce qui rend les 1.1000 ¿ porteurs d'intérêts à compter du 10 mai 2012 ; que cette restitution s'entend néanmoins « déduction faite, le cas échéant, des sommes restant dues au bailleur et de sommes dont celui-ci pourrait être tenu, au lieu et place du locataire, sous réserve qu'elles soient dument justifiées » ; que la taxe relative à la collecte des ordures ménagères et l'indexation du loyer sont effectivement dues au bailleur, qui dispose d'un délai de 5 ans pour les réclamer ; que les montants de 442 ¿ pour la taxe et 211,56 ¿ pour l'indexation sont donc effectivement exigibles et leur montant exactement calculé ; que cependant, l'article 23 de la loi du 6 juillet 1989 fait obligation au bailleur de procéder à une revalorisation annuelle des charges ; que l'article 17 d quant à lui prévoit que la révision intervient chaque année de contrat ; qu'il convient de noter que M. Y... n'a respecté aucun de ces délais ; que, sur la recevabilité de l'état des lieux, il ressort des dispositions de l'article 3 de la loi du 6 juillet 1989 l'obligation d'établir un état des lieux lors de la remise et de la restitution des clefs ; que le détendeur prétend qu'il n'a pu être établi à cause du mobilier encore présent sur les lieux le 9 mars ; qu'il produit néanmoins des photos et un témoignage supposé corroborer le mauvais état des locaux, ce qui est pour le moins paradoxal ; que si l'on peut admettre que ce document délibérément non signé par M. Y... n'est pas contradictoire, c'est aussi le cas de celui qu'il a rédigé début avril et qui n'est pas plus recevable ; qu'il convient de rappeler que l'article 3 déjà cité permet à la partie la plus diligente de prendre l'initiative de mandater un huissier de justice, à frais partagés entre le bailleur et le locataire ; que faute de s'être conformé à cette disposition M. Y..., à qui il appartenait d'apporter la preuve des désordres allégués, sera réputé avoir récupéré les locaux en bon état, hormis une porte que le locataire a repeinte ; qu'il sera débouté en conséquence de l'intégralité des montants qu'il prétend mettre à la charge de Mme X... pour la remise en état de la maison ; que, sur la recevabilité des demandes et la compensation des créances, Mme X... est bien fondée à réclamer la restitution du dépôt garantie versé lors de la signature du bail, M. Y... étant néanmoins fondé à lui imputer le paiement de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères et le rappel concernant l'indexation des loyers pour un montant total de 653,56 ¿ ; que, cependant quoi qu'en dise le défendeur, l'avis de la commission départementale de conciliation, s'il ne fait pas autorité doit ici être pris en compte au regard du respect des obligations que la loi du 6 juillet 1989 (dont il convient de rappeler qu'elle n'est d'ordre public) met à la charge du bailleur ; que cette commission est également une émanation de cette loi et son fonctionnement comme ses prérogatives fait l'obligation de l'article 20 ; qu'or M. Y... le traite avec même désinvolture que les articles 3, 22, 23 et 17 d de sorte qu'il apparaît que seule Mme X... a satisfait à son obligation légale de payer le loyer, point qui n'est pas contesté, tout comme elle a tenté d'établir contradictoirement l'état des lieux puis de régler amiablement le litige dans le cadre de la loi ; que le bail est un contrat qui, comme tout autre, doit être exécuté de bonne foi ; qu'en l'espèce, seule la demanderesse a satisfait aux obligations relevant de l'article 1134 du code civil dont le défendeur a fait fi, assénant à sa locataire un rappel de charges brutal et des réparations démesurées qui caractérisent une faute dans l'exécution du contrat, telle que l'entendait la Cour de cassation dans son arrêt du 23 mars 2012 ; qu'en conséquence M. Y... sera débouté de l'ensemble de ses prétentions et condamné à verser à Mme X... la somme de 1.100 euros ;

 

1°) ALORS QU' en retenant qu'à défaut d'avoir mandaté un huissier de justice en vue d'établir l'état des lieux de sortie, le bailleur était réputé avoir récupéré les locaux en bon état, le juge de proximité a violé l'article 3 de la loi du 6 juillet 1989 ;

 

2°) ALORS QU' en refusant d'examiner les pièces produites par l'exposant en vue d'établir les dégradations des lieux imputables au preneur, le juge de proximité a violé l'article 3 de la loi du 6 juillet 1989, ensemble l'article 1353 du code civil ;

 

3°) ALORS QUE , sauf circonstances particulières, ne constitue pas une faute dans l'exécution du contrat la demande du bailleur au preneur de régler en fin de bail une somme au titre de la taxe relative à la collecte des ordures ménagères au titre de l'indexation du loyer ; que les circonstances, relevées par le jugement, dans lesquelles M. Y... avait réclamé le paiement des sommes litigieuses ne caractérisaient aucune faute à son encontre ; qu'en décidant le contraire, la juridiction de proximité a violé l'article 1147 du code civil ;

 

4°) ALORS QU' en tout état de cause l'éventuelle faute commise par le bailleur dans l'exécution du contrat engage sa responsabilité pour le dommage occasionné ; qu'en jugeant que la faute justifiait que le bailleur soit débouté de sa demande de paiement de la taxe relative à la collecte des ordures ménagères et d'une somme due au titre de l'indexation du loyer, quand la faute retenue ne pouvait que faire naître une dette de responsabilité du bailleur à hauteur du préjudice subi par la locataire, la juridiction de proximité a violé l'article 22 de la loi du 6 juillet 1989 ensemble l'article 1147 du code civil."