Un droit de passage ne peut être accordé par le titulaire d'un droit de passage (samedi, 31 mai 2014)

Un droit de passage ne peut être accordé par le titulaire d'un droit de passage, car seul le propriétaire peut accorder un droit de passage :

 

 

"Sur le pourvoi formé par M. Bernard Y..., demeurant ... (Charente-Maritime), en cassation d'un arrêt rendu le 16 juin 1993 par la cour d'appel de Poitiers (Chambre civile, 2e section), au profit de :

 

1 ) M. Yves Z..., demeurant ... (Charente-Maritime),

 

2 ) M. Pierre X..., demeurant ... (Charente-Maritime), défendeurs à la cassation ;

 

MM. Z... et X..., ont formé par un mémoire déposé au greffe le 21 mars 1994, un pourvoi incident contre le même arrêt ;

 

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

 

Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

 

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 21 mars 1995, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Douvreleur, conseiller doyen, M. Aydalot, conseiller rapporteur, M. Sodini, avocat général, Mme Pacanowski, greffier de chambre ;

 

Sur le rapport de M. le conseiller Aydalot, les observations de Me Blondel, avocat de M. Y..., de Me Garaud, avocat de MM. Z... et X..., les conclusions de M. Sodini, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

 

Sur le moyen unique du pourvoi principal, ci-après annexé :

 

Attendu que, statuant sur la demande de reconnaissance de la propriété commune d'un chemin, formée par M. Y..., la cour d'appel, appréciant la force probante des titres et autres éléments de preuve soumis à son examen, a, sans modifier l'objet du litige, légalement justifié sa décision de ce chef en retenant souverainement que M. Y... ne justifiait pas d'un droit de propriété sur le passage revendiqué ;

 

Mais sur le moyen unique du pourvoi incident :

 

Vu les articles 637 et 639 du Code civil ;

 

Attendu qu'une servitude est une charge imposée sur un héritage pour l'usage et l'utilité d'un héritage appartenant à un autre propriétaire ;

 

qu'elle dérive ou de la situation naturelle des lieux, ou des obligations imposées par la loi, ou des conventions entre les propriétaires ;

 

Attendu que, pour reconnaître à M. Y... personnellement le bénéfice d'un droit de passage sur un chemin, l'arrêt attaqué (Poitiers, 16 juin 1993) retient que MM. Z... et X... ont librement accepté de lui accorder un droit de passage limité à un usage purement privé ;

 

Qu'en statuant ainsi, tout en relevant que MM. Z... et X... n'étaient pas copropriétaires de ce même chemin, mais seulement titulaires d'un droit de passage, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a décidé que M. Y... personnellement bénéficiera sur le chemin d'un droit de passage limité à un simple usage privé et non commercial, l'arrêt rendu le 16 juin 1993, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;

 

remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;

 

Condamne M. Y... aux dépens des pourvois et aux frais d'exécution du présent arrêt ;

 

Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Poitiers, en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

 

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du dix mai mil neuf cent quatre-vingt-quinze."