L'article 1720 du Code civil et les frais de ravalement (lundi, 22 avril 2013)

La Cour de Cassation pose le principe selon lequel les frais de ravalement sont à la charge du bailleur, sauf mention expresse contraire, et ceci en application de l'article 1720 du Code civil.

 

"Vu l'article 1720 du code civil

Attendu que le bailleur doit faire, pendant la durée du bail, toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires, autres que locatives ; 

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 1er juillet 2011), que la SCI de l'UH Le Corbusier, propriétaire de locaux commerciaux donnés à bail à la société Gestion de l'hôtel Le Corbusier, l'a assignée en paiement d'arriérés de loyers et de charges, comprenant notamment des frais de ravalement des façades de l'immeuble loué ; 

Attendu que, pour accueillir la demande relative à ces frais, l'arrêt retient, d'une part, que les parties, en précisant le caractère non limitatif de la clause sur les charges incombant au locataire, ont entendu faire supporter par celui-ci toutes les charges liées à l'entretien de la chose, cette clause ne faisant aucune restriction sur l'exigibilité des charges et n'étant pas ambiguë et, d'autre part, que la société Gestion de l'hôtel Le Corbusier, en acceptant sans équivoque et sans contestation de régler pendant quatre années le montant des provisions sur charges avait démontré son accord pour assumer les charges autres que celles liées à son usage de la chose louée ; 

Qu'en statuant ainsi , alors que les dépenses de ravalement, qui ne constituent pas des charges locatives, incombent, sauf stipulation expresse contraire, au bailleur et que le seul paiement de provisions ne suffisait pas à caractériser un accord du preneur pour les prendre à sa charge, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; 


PAR CES MOTIFS : 

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit la société Gestion de l'hôtel Le Corbusier tenue d'assumer les frais de réfection des façades, l'arrêt rendu le 1er juillet 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ; 

Condamne la SCI de l'UH Le Corbusier aux dépens ; 

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SCI de l'UH Le Corbusier à payer à la société Gestion de l'hôtel Le Corbusier la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la SCI de l'UH Le Corbusier ; 

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; 

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils pour la société Gestion de l'hôtel Le Corbusier 

MOYEN UNIQUE DE CASSATION 

LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué : 

D'AVOIR dit que les charges afférentes à l'entretien de la chose sont à la charge du locataire qui doit notamment assumer les frais de réfection des façades ; 

AUX MOTIFS PROPRES QUE « devant la Cour, les parties discutent sur les arriérés de charges, la société de gestion de l'Hôtel Le Corbusier estimant que seules les charges expressément visées par la clause du bail peuvent être supportées par le locataire ; que c'est à bon droit, par des motifs pertinents que la Cour adopte, que le Tribunal a estimé que les parties en précisant le caractère non limitatif de la clause sur les charges incombant au locataire ont entendu faire supporter par celui-ci, non seulement les charges relatives à l'usage de la chose stricto sensu, mais également toutes les charges liées à l'entretien de la chose, cette clause ne faisant aucune restriction sur l'exigibilité des charges et n'étant pas ambiguë ; qu'en outre, et ainsi que l'a dit avec raison le Tribunal la société de gestion de l'Hôtel Le Corbusier qui avait accepté sans équivoque et sans contestation de régler pendant quatre années le montant des provisions sur charges fixé à 2.380 € par mois la première année (le 26 juin 2003) a démontré son accord pour assumer les charges autres que celles liées à son usage de la chose louée ; qu'en conséquence, que les charges afférentes à l'entretien de la chose devant être supportées par la société de gestion de l'Hôtel Le Corbusier, cette société doit assumer les frais des travaux de réfection de façade pour sa quote part » ; 

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « les obligations du locataire se limitent au paiement en sus du loyer, des charges expressément prévues au contrat de bail ; que le litige est né suite à une demande en mars 2007, portant sur une somme de 22.415,69 € concernant des travaux de réfection de façade, travaux habituellement considérés comme des dépenses d'entretien récupérables ; que le locataire sollicite un trop perçu de charges depuis l'année 2003, en limitant sa participation aux charges résultant de services rendus liés à l'usage de la chose loué ; que la convention des parties définit les charges récupérables comme celles "afférentes au local et énumère les dépenses effectuées pour l'entretien et le fonctionnement de l'immeuble tels que chauffage, ascenseurs, eau, électricité, téléphone et dépenses d'entretien des parties communes, mais en y ajoutant expressément l'assurance de l'immeuble et les honoraires de gestion, dépenses habituellement assumées par le bailleur ; que cette clause du bail qui énumère des dépenses afférentes à l'usage de la chose mais comporte également des dépenses indépendantes de l'usage, ne permet pas de démontrer une volonté des parties de limiter les charges du locataire à celles correspondant à des services dont il a l'usage ; qu'il est manifeste que les parties, en précisant le caractère non limitatif de la clause, ont entendu faire supporter au locataire, non seulement les charges relatives à l'usage de la chose stricto sensu, mais également toutes celles liées à l'entretien de la chose ; que de surcroît, le bail prévoit que le règlement des charges se fera par versement d'une provision calculée annuellement par rapport aux charges réelles des années précédentes, la provision mensuelle étant fixée à 2.380 € pour la première année ; que la société de gestion de l'Hôtel Le Corbusier, qui a accepté sans équivoque et sans contestation de régler le montant des provisions durant quatre ans, a démontré son accord pour assumer les charges autres que celles uniquement liées à l'usage ; qu'à défaut, elle aurait dès la première année sollicité restitution du trop perçu et réajustement du montant des provisions mensuelles ; que la répartition définitive des charges résulte de la commune intention des parties exprimée lors de la fixation du montant des provisions ; que les charges afférentes à l'entretien de la chose sont à la charge du locataire qui doit assumer les frais de réfection des façades » ; 

1°/ ALORS, d'une part, QUE les travaux de ravalement de façade sont à la charge du bailleur, sauf stipulation expresse contraire concernant ces travaux ; qu'il ressort des propres constatations de l'arrêt que le paragraphe 2 du bail relatif aux charges stipule : « le preneur remboursera au bailleur tous les impôts et taxes de quelque nature que ce soit, présents ou futurs concernant les lieux loués dont y compris le foncier ; le preneur remboursera également toutes les charges et prestations afférentes à ces locaux, au prorata de son occupation, telles que chauffage, ascenseur, électricité, gaz, fournitures d'entretien des parties communes, assurance de l'immeuble, dépenses d'eau de l'immeuble (consommation et frais de compteurs) les honoraires de gérance, charges accessoires telles que le téléphone de l'immeuble ; cette liste étant simplement indicative et non limitative » ; qu'il ressort de cette stipulation que le bail litigieux ne contient pas une stipulation expresse mettant à la charge du preneur à bail les dépenses de ravalement de façade ; qu'en décidant cependant que le locataire, la société de gestion de l'Hôtel Le Corbusier, doit assumer les frais de réfection des façades de l'immeuble donné à bail, la Cour d'appel a violé les articles 1719, 2° et 1720, al. 2 du Code civil ; 

2°/ ALORS, d'autre part, QUE les travaux de ravalement de façade sont à la charge du bailleur, sauf stipulation expresse contraire concernant ces travaux ; que, pour décider que le locataire, la société de gestion de l'Hôtel Le Corbusier, doit assumer les frais de réfection des façades de l'immeuble donné à bail, la Cour d'appel, par motifs propres et adoptés, a retenu que la société de gestion de l'Hôtel Le Corbusier qui avait accepté sans équivoque et sans contestation de régler pendant quatre années le montant des provisions sur charges fixé à 2.380 € par mois la première année (le 26 juin 2003) a démontré son accord pour assumer les charges autres que celles liées à son usage de la chose louée ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser que la société de gestion de l'Hôtel Le Corbusier avait donné son accord pour assumer les frais des travaux de ravalement des façades, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des les articles 1719, 2° et 1720, al. 2 du Code civil."