Rescision pour lésion et surface cadastrale (jeudi, 10 janvier 2013)

En matère de rescision pour lésion c'est la surface indiquée à l'acte qui compte et non celle qui figure au cadastre :

 

"Vu l'article 1675 du code civil

Attendu que pour savoir s'il y a lésion de plus de sept douzièmes, il faut estimer l'immeuble suivant son état et sa valeur au moment de la vente ; 

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 18 avril 2011), que par acte du 22 juillet 1995, qualifié de vente immobilière, reçu par M. X..., notaire, les époux Y... ont vendu aux époux Z... un terrain au prix de 288 000 francs ; que par acte du 6 mars 1999, reçu par le même notaire, les époux Z... ont vendu ce terrain aux époux A... au prix de 500 000 francs ; que les époux Y... ont assigné les époux Z... en résolution de la cession du 22 juillet 1995 et les époux Z... et les époux A... en rescision pour lésion de la vente du 6 mars 1999, par la voie de l'action oblique ; que les époux Z... ont également demandé la rescision de l'acte du 6 mars 1999 pour lésion ; que par un arrêt du 23 octobre 2006, la cour d'appel de Basse-Terre a notamment déclaré recevable l'action oblique en rescision pour lésion des époux Y..., reçu l'action incidente des époux Z... en rescision pour lésion, les a autorisés à faire la preuve de la lésion et a ordonné une expertise confiée à un collège d'experts pour estimer la parcelle suivant son état et sa valeur au moment de la vente ; 

Attendu que pour débouter les consorts Z... et Y... de leurs demandes, l'arrêt retient que compte tenu des éléments fournis par les experts, il convient de retenir, au regard de ces références de vente un prix de 600 euros au mètre carré et qu'ainsi la valeur du terrain non bâti, constructible, peut être estimée en mars 1999 à la somme de 172 800 euros ; 

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui s'est fondée sur la surface mentionnée au cadastre et non sur celle stipulée à l'acte de vente, a violé le texte susvisé ; 

PAR CES MOTIFS : 

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation du rapport d'expertise, l'arrêt rendu le 18 avril 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, sur le surplus, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre, autrement composée ; 

Condamne les époux A..., M. X... et la SCP Robert et X..., notaires, représentée par M. Gael, es qualités, aux dépens des pourvois ; 

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les époux A..., M. X... et la SCP Robert et X..., notaires, représentée par M. Gael, es qualités, à payer aux consorts Z... la somme globale de 2 500 euros et aux consorts Y... la somme globale de 2 500 euros ; rejette les autres demandes ; 

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; 

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit au pourvoi n° H 11-21.026 par la SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, avocat aux Conseils pour les consorts Z... 

Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué D'AVOIR débouté les consorts Z... de leur demande de rescision pour lésion du prix de la vente immobilière intervenue le 6 mars 1999 entre eux et les époux A... ; 

AUX MOTIFS QUE les conclusions du collège d'experts désigné par la cour d'appel sont les suivantes : 1- la valeur de la donation du 22 juillet 1995 du terrain sis à Gustavia d'une superficie de 2 ares 88 ca, soit la somme de 288.000 francs ne correspond pas à la valeur vénale de ce bien à cette date ; que les experts retiennent pour ce bien la valeur vénale de 211.587,24 euros ; 2- la valeur de la vente du 6 mars 1999, du terrain situé sur le territoire de la commune de Saint-Barthélemy, au lieudit Gustavia, d'une superficie d'après titre de 310 mètres carrés mais porté au cadastre pour une contenance de 2 ares 88 centiares est de 263.500,00 € (Euros) soit en Francs 1.728.000,00 F ; 3- la valeur actuelle du terrain situé sur le territoire de la commune de Saint-Barthélemy, au lieudit Gustavia, d'une superficie d'après titre de 310 mètres carrés mais porté au cadastre pour une contenance de 2 ares 88 centiares vendu par M. et Mme Z..., moyennant le prix principal de 500.000 francs, par acte notarié en date du 6 mars 1999 reçu en l'étude de la société civile professionnelle de notaires Robert X... et Daniel X... par maître Daniel X..., notaire, à M. et Mme A... est de 940.225,66 euros soit pour une surface de 302 m² la valeur de 3.113,33 euros au m² ; que la valeur vénale, pour les terrains et immeubles bâtis, doit être déterminée par comparaison ; que cette méthode consiste à se référer aux prix constatés dans des transactions concernant un nombre suffisant d'immeubles similaires, qui constituent ainsi des termes de comparaison ; qu'au regard de ce principe essentiel, il apparaît que le rapport des experts ne respecte pas toujours ce principe puisqu'il prend en compte des éléments non comparables ; que par contre, le rapport de l'administration fiscale, rappelé par les experts, apparaît comme le plus sérieux dans cette approche comparative ; que l'expertise retient : « valeur de la vente du 6 mars 1999, du terrain situé sur le territoire de la commune de Saint-Barthélemy, au lieudit Gustavia, d'une superficie d'après titre de 310 mètres carrés mais porté au cadastre pour une contenance de 2 ares 88 centiares soit la somme de 263.500,00 € (euros) soit en Francs 1.728.000,00 F » ; que cet avis est basé sur la comparaison avec 6 ventes réalisées dans la zone cadastrée AL et pour une période allant du 4 août 1997 au 23 janvier 1999 ; que pour qu'il y ait lésion, il faute que le prix indiqué à l'acte soit inférieur aux cinq douzièmes de la valeur de l'immeuble au moment de la vente ; que certaines parties font valoir que des attestations d'experts immobiliers, réalisées par deux professionnels de la place ont été écartées par les experts ; que cependant la cour, suivant en cela l'avis des experts, doit relever qu'elles ne font référence à aucune vente et pouvaient de ce fait être écartées puisque les experts disposaient d'autres valeurs correspondant à des ventes réelles ; que la cour se réfère ici aux éléments relevés par les experts, figurant en page 2 de l'annexe de leur rapport, concernant des ventes de terrains entre le 4 août 1997 et le 23 janvier 1999 ; que compte tenu des caractéristiques particulières de chaque bien, on ne peut se contenter d'une simple somme arithmétique ; qu'en effet, ces cinq ventes, étalées sur deux années, concernent des terrains à bâtir situés dans la zone concernée, mais avec pour certains des caractéristiques particulières ; qu'ainsi, pour les références n° 15 et 18 il est mentionné que le terrain n'est exploitable qu'à 60 % de sa surface, « solde falaise abrupte » ; qu'en ce qui concerne la référence n° 19, il est précisé « parcelle en bordure de route très en pente » ; qu'enfin, les valeurs au m² doivent également être relativisées puisque, logiquement, il ressort de ces ventes que la parcelle la plu étroite (référence n° 16 : 135 m²) a la valeur la plus élevée de ces cinq références, soit 793,62 euros le m² ; que compte tenu des éléments fournis par les experts, il convient de retenir, au regard de ces références de vente, un prix de 600 euros au m² étant observé que même sans fixer un pourcentage précis de décote du fait de la servitude radioélectrique qui, effectivement est encore en vigueur en 1999, la simple proximité du fort militaire encore en activité à cette date, constitue une réalité de voisinage négative à prendre en compte ; qu'ainsi, la valeur du terrain non bâti, constructible, parcelle AL 329, lieudit Gustavia, peut être estimée en mars 1999 à la somme de 172.800 euros ; qu'en conséquence, la cour relève qu'il ne peut y avoir de rescision pour lésion (arrêt, pp. 12 à 14) ; 

ALORS QUE la consistance du bien immobilier à évaluer doit être déterminée par référence au contenu de l'acte de vente intervenu entre les parties ; que l'arrêt ayant constaté que le terrain vendu le 6 mars 1999 était d'une superficie d'après le titre de vente de 310 mètres carrés mais d'une contenance portée au cadastre de 2 ares 88 centiares, soit 288 mètres carrés, la cour d'appel qui, pour déterminer la valeur vénale du terrain à la date de la vente et en déduire la prétendue absence de lésion, s'est fondée sur la surface portée au cadastre et non sur celle stipulée entre les parties à l'acte authentique, a violé les articles 1674 et 1675 du code civil. Moyen produit au pourvoi n° H 11-22.912 par la SCP Roger et Sevaux, avocat aux Conseils pour les consorts Y... 

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les appelants de leur demande de rescision pour lésion du prix de la vente intervenue le 6 mars 1999 entre les époux Z... et les époux A..., et d'avoir condamné « les époux Y... » in solidum avec « la succession Z... » à payer aux époux A... la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et « les époux Y... » aux entiers dépens ; 

AUX MOTIFS QUE les conclusions du collège d'experts désigné par la cour d'appel sont les suivantes : 1- la valeur de la donation du 22 juillet 1995 du terrain sis à Gustavia d'une superficie de 2 ares 88 ca, soit la somme de 288.000 francs ne correspond pas à la valeur vénale de ce bien à cette date ; que les experts retiennent pour ce bien la valeur vénale de 211.587,24 euros ; 2- la valeur de la vente du 6 mars 1999, du terrain situé sur le territoire de la commune de Saint-Barthélemy, au lieudit Gustavia, d'une superficie d'après titre de 310 mètres carrés mais porté au cadastre pour une contenance de 2 ares 88 centiares est de 263.500,00 € (Euros) soit en Francs 1.728.000,00 F ; 3- la valeur actuelle du terrain situé sur le territoire de la commune de Saint-Barthélemy, au lieudit Gustavia, d'une superficie d'après titre de 310 mètres carrés mais porté au cadastre pour une contenance de 2 ares 88 centiares vendu par M. et Mme Z..., moyennant le prix principal de 500.000 francs, par acte notarié en date du 6 mars 1999 reçu en l'étude de la société civile professionnelle de notaires Robert X... et Daniel X... par maître Daniel X..., notaire, à M. et Mme A... est de 940.225,66 euros soit pour une surface de 302 m² la valeur de 3.113,33 euros au m² ; que la valeur vénale, pour les terrains et immeubles bâtis, doit être déterminée par comparaison ; que cette méthode consiste à se référer aux prix constatés dans des transactions concernant un nombre suffisant d'immeubles similaires, qui constituent ainsi des termes de comparaison ; qu'au regard de ce principe essentiel, il apparaît que le rapport des experts ne respecte pas toujours ce principe puisqu'il prend en compte des éléments non comparables ; que par contre, le rapport de l'administration fiscale, rappelé par les experts, apparaît comme le plus sérieux dans cette approche comparative ; que l'expertise retient : « valeur de la vente du 6 mars 1999, du terrain situé sur le territoire de la commune de Saint-Barthélemy, au lieudit Gustavia, d'une superficie d'après titre de 310 mètres carrés mais porté au cadastre pour une contenance de 2 ares 88 centiares soit la somme de 263.500,00 € (euros) soit en Francs 1.728.000,00 F » ; que cet avis est basé sur la comparaison avec 6 ventes réalisées dans la zone cadastrée AL et pour une période allant du 4 août 1997 au 23 janvier 1999 ; que pour qu'il y ait lésion, il faute que le prix indiqué à l'acte soit inférieur aux cinq douzièmes de la valeur de l'immeuble au moment de la vente ; que certaines parties font valoir que des attestations d'experts immobiliers, réalisées par deux professionnels de la place ont été écartées par les experts ; que cependant la cour, suivant en cela l'avis des experts, doit relever qu'elles ne font référence à aucune vente et pouvaient de ce fait être écartées puisque les experts disposaient d'autres valeurs correspondant à des ventes réelles ; que la cour se réfère ici aux éléments relevés par les experts, figurant en page 2 de l'annexe de leur rapport, concernant des ventes de terrains entre le 4 août 1997 et le 23 janvier 1999 ; que compte tenu des caractéristiques particulières de chaque bien, on ne peut se contenter d'une simple somme arithmétique ; qu'en effet, ces cinq ventes, étalées sur deux années, concernent des terrains à bâtir situés dans la zone concernée, mais avec pour certains des caractéristiques particulières ; qu'ainsi, pour les références n° 15 et 18 il est mentionné que le terrain n'est exploitable qu'à 60 % de sa surface, « solde falaise abrupte » ; qu'en ce qui concerne la référence n° 19, il est précisé « parcelle en bordure de route très en pente » ; qu'enfin, les valeurs au m² doivent également être relativisées puisque, logiquement, il ressort de ces ventes que la parcelle la plu étroite (référence n° 16 : 135 m²) a la valeur la plus élevée de ces cinq références, soit 793,62 euros le m² ; que compte tenu des éléments fournis par les experts, il convient de retenir, au regard de ces références de vente, un prix de 600 euros au m² étant observé que même sans fixer un pourcentage précis de décote du fait de la servitude radioélectrique qui, effectivement est encore en vigueur en 1999, la simple proximité du fort militaire encore en activité à cette date, constitue une réalité de voisinage négative à prendre en compte ; qu'ainsi, la valeur du terrain non bâti, constructible, parcelle AL 329, lieudit Gustavia, peut être estimée en mars 1999 à la somme de 172.800 euros ; qu'en conséquence, la cour relève qu'il ne peut y avoir de rescision pour lésion (arrêt, pp. 12 à 14) ; 

Alors, d'une part, que la consistance du bien immobilier à évaluer doit être déterminée par référence au contenu de l'acte de vente intervenu entre les parties ; que l'arrêt ayant constaté que le terrain vendu le 6 mars 1999 était d'une superficie d'après le titre de vente de 310 m² mais d'une contenance portée au cadastre de 2 ares 88 centiares, soit 288 m², la cour d'appel qui, pour déterminer la valeur vénale du terrain à la date de la vente et en déduire la prétendue absence de lésion, s'est fondée sur la surface portée au cadastre et non sur celle stipulée entre les parties à l'acte authentique, a violé les articles 1674 et 1675 du Code civil ; 

Et alors d'autre part, qu'en écartant de la sorte l'appréciation des experts qui avaient retenu pour leur part une surface de 302 m² en s'appuyant sur un relevé de géomètres, sans en justifier les raisons, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des mêmes dispositions."