Vefa et constat d'achèvement de l'immeuble (dimanche, 16 décembre 2012)

La procédure prévue pour le constat de l'achèvement de l'immeuble vendu en Vefa doit être suivie par le vendeur :

 

"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 17 février 2011), statuant sur renvoi après cassation (Civile 2, 3 juillet 2008, n° 07-16.400), que, par acte du 17 mars 1990, la société civile immobilière Le Pivert Sénéchal (la SCI) a vendu en l'état futur d'achèvement un appartement aux époux X... ; que se prévalant de l'achèvement de l'immeuble, la SCI a assigné les époux X... en paiement de sommes dont le solde du prix de vente ;

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes en paiement, alors, selon le moyen :

1°/ que dans les ventes en l'état futur d'achèvement, l'achèvement de l'immeuble n'est soumis à aucune constatation formaliste ; que le vendeur peut toujours faire valoir en justice que l'immeuble est achevé au sens de l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation, peu important que la procédure de constat d'achèvement prévue au contrat n'ait pas été initiée ; que dès lors, en décidant que l'absence de mise en oeuvre de la procédure de constat d'achèvement – auquel le contrat conditionnait le paiement du solde du prix de vente – rendait irrecevables les demandes en paiement du vendeur, la cour d'appel a violé l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 1601-3 du code civil ;

2°/ qu'en cas de désaccord des parties sur l'achèvement des travaux, le vendeur peut toujours faire valoir en justice que l'immeuble est achevé au sens de l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation, peu important que la procédure de constat d'achèvement prévue au contrat n'ait pas été mise en oeuvre ; qu'en l'espèce, la SCI Le Pivert Sénéchal soulignait que les époux X... contestaient l'achèvement effectif de l'immeuble ; que dès lors, en décidant que l'absence de mise en oeuvre de la procédure de constat d'achèvement rendait irrecevables les demandes en paiement du vendeur, sans rechercher si les acquéreurs ne contestaient pas l'état d'achèvement ce qui aurait dispensé le vendeur de la procédure de constat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 1601-3 du code civil ;

3°/ que les juges ont l'interdiction de dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, la SCI Le Pivert Sénéchal n'invoquait la nullité de la clause prévoyant une procédure de constat d'achèvement qu'en raison de son caractère potestatif ; qu'en retenant que le vendeur arguait de la nullité d'une telle clause en ce qu'elle organisait une procédure non prévue à l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des conclusions du vendeur et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

4°/ qu''une clause purement potestative est nulle ; qu'en l'espèce, la clause prévoyant une procédure de constat d'achèvement des travaux faisait dépendre le paiement du solde du prix de vente de la seule volonté des époux X..., selon qu'ils acceptaient ou non de constater l'achèvement des travaux ; que dès lors, en refusant de prononcer la nullité de ladite clause, la cour d'appel a violé les articles 1170 et 1174 du code civil ;

5°/ que les conventions légalement formées peuvent être révoquées par consentement mutuel des parties ; que dès lors, en s'abstenant de rechercher, comme cela lui était demandé, si les acquéreurs n'avaient pas reçu et accepté les clefs, et si cette circonstance ne révélait pas un accord des parties pour constater l'achèvement de l'immeuble et se dispenser de la procédure de constat formel prévue à l'origine, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, ensemble l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation ;

6°/ qu'une clause contractuelle invoquée de mauvaise foi ne peut recevoir application ; que dès lors, en s'abstenant de rechercher, comme cela lui était demandé, si les époux X... n'avaient pas donné l'immeuble à bail, et si dans ces conditions ils ne faisaient pas preuve de mauvaise foi en invoquant l'absence de procès-verbal d'achèvement pour refuser de payer le solde du prix de vente, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1135 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que l'acte de vente instaurait une procédure relative à la constatation de l'achèvement des ouvrages vendus et retenu à bon droit que la SCI ne pouvait soutenir que cette clause présentait un caractère potestatif dès lors qu'il appartenait à la venderesse de mettre en application la procédure contractuellement prévue, la cour d'appel, qui, ayant constaté que cette procédure n'avait pas été mise en oeuvre, en a déduit, à bon droit, que la demande de la SCI était irrecevable, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la SCI Le Pivert Sénéchal aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SCI Le Pivert Sénéchal à payer aux époux X... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la SCI Le Pivert Sénéchal ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour la société Le Pivert Sénéchal.

PREMIER MOYEN DE CASSATION 

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré irrecevables les demandes en paiement formées par la SCI Le Pivert Sénéchal à l'encontre de Monsieur et de Madame X..., et D'AVOIR condamné la SCI Le Pivert Sénéchal à payer à Monsieur et Madame X... la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;

AUX MOTIFS PROPRES QUE l'article R 261-1 du Code de la construction et de l'urbanisme, auquel l'acte de vente en l'état futur d'achèvement du 17 mars 1990 liant les parties fait expressément référence pour définir la notion d'achèvement des travaux, sépare certes nettement cette notion d'achèvement des travaux de la notion de conformité ou de non-conformité de ces mêmes travaux avec les prévisions du contrat, ainsi que des notions de réception ou de livraison, et dispose que pour l'appréciation de l'achèvement les défauts de conformité ne sont pas pris en considération lorsqu'ils n'ont pas un caractère substantiel, ni les malfaçons qui ne rendent pas les ouvrages ou éléments d'équipement impropres à leur utilisation, la constatation de l'achèvement n'emportant par elle-même ni reconnaissance de la conformité aux prévisions du contrat ni renonciation aux droits que l'acquéreur tient de l'article 1642-1 du Code civil; qu'il n'en demeure pas moins que cet acte notarié, après la définition de l'achèvement des travaux par renvoi à la définition donnée par cet article, a instauré une procédure relative à la constatation de l'achèvement des ouvrages vendus dans les termes suivants: « L'exécution de l'obligation d'achever les travaux ci-dessus contractée sera constatée dans les conditions qui vont être ci-dessous précisée. La société Venderesse notifiera à la partie Acquéreur le certificat de l'architecte attestant l'achèvement au sens défini en l'article R 261-1 du Code de la construction et de l'habitation. Par même notification la société Venderesse invitera la partie Acquéreur à constater la réalité de cet achèvement à jour et à heure fixes. Au dit jour il sera procédé contradictoirement à cette notification et à l'établissement d'un procès-verbal. L'acquéreur aura la faculté d'insérer audit procès-verbal les réserves qu'il croira devoir formuler quant aux malfaçons et au défaut de conformité avec les prévisions du contrat. Les réserves de la partie Acquéreur seront acceptées ou contredites par la société venderesse. Si les parties sont d'accord pour constater l'achèvement, au sens ci-dessus défini, que des réserves aient été ou non formulées, II sera procédé à la remise des clés à la partie Acquéreur pour valoir livraison et prise de possession et la partie Acquéreur procédera à au versement du solde du prix payable lors de la mise des locaux à sa disposition. Le procès-verbal relatera ces constatations, réserves, contredits, remise des clés et paiement du solde du prix. » ; que la SCI Le pivert Sénéchal a argué de la nullité d'une telle clause en ce qu'elle organise une procédure non prévue à l'article susvisé sans toutefois expliciter sur quel fondement elle appuie ce moyen, alors que cette clause, insérée dans l'acte établi par Me Y... notaire à Piennes et librement acceptée par elle en sa qualité, ne pouvant être déniée, de professionnel de l'immobilier, doit au contraire être regardée comme faisant la loi des parties; qu'il ne peut valablement être soutenu que cette clause présente un caractère potestatif permettant aux débiteurs de retarder à l'infini le paiement du solde du prix, dès lors que la simple lecture de l'acte fait apparaître que c'est bien à la société Venderesse qu'il appartient d'initier et de mettre en application la procédure contractuellement prévue; qu'il ne résulte pas des pièces produites, et spécialement des courriers échangés entre les parties au litige, que cette procédure ait été mise en oeuvre par la société Venderesse, de sorte que pour ce motif la demande présentée par la SCI Le Pivert Sénéchal reste à ce jour irrecevable; qu'il y a lieu à infirmation du jugement dont appel en ce que cette décision a jugé la demande non fondée;

ET AUX MOTIFS éventuellement REPUTES ADOPTES QU'en l'espèce, le certificat d'achèvement délivré le 14 mai 1990 par l'architecte n'a jamais été accepté par les époux X... et aucun constat d'achèvement des travaux n'a été consigné contradictoirement entre les parties dans un procès-verbal;

1°) ALORS QUE dans les ventes en l'état futur d'achèvement, l'achèvement de l'immeuble n'est soumis à aucune constatation formaliste; que le vendeur peut toujours faire valoir en justice que l'immeuble est achevé au sens de l'article R 261-1 du Code de la construction et de l'habitation, peu important que la procédure de constat d'achèvement prévue au contrat n'ait pas été initiée; que dès lors, en décidant que l'absence de mise en oeuvre de la procédure de constat d'achèvement — auquel le contrat conditionnait le paiement du solde du prix de vente — rendait irrecevables les demandes en paiement du vendeur, la Cour d'appel a violé l'article R 261-1 du Code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 1601-3 du Code civil 

2°) ALORS, en tout état de cause, QU'en cas de désaccord des parties sur l'achèvement des travaux, le vendeur peut toujours faire valoir en justice que l'immeuble est achevé au sens de l'article R 261-1 du Code de la construction et de l'habitation, peu important que la procédure de constat d'achèvement prévue au contrat n'ait pas été mise en oeuvre; qu'en l'espèce, la SCI Le Pivert Sénéchal soulignait que les époux X... contestaient l'achèvement effectif de l'immeuble; que dès lors, en décidant que l'absence de mise en oeuvre de la procédure de constat d'achèvement rendait irrecevables les demandes en paiement du vendeur, sans rechercher si les acquéreurs ne contestaient pas l'état d'achèvement ce qui aurait dispensé le vendeur de la procédure de constat, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R 261-1 du Code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 1601-3 du Code civil 

3°) ALORS, EN OUTRE, QUE les juges ont l'interdiction de dénaturer les conclusions des parties; qu'en l'espèce, la SCI Le Pivert Sénéchal n'invoquait la nullité de la clause prévoyant une procédure de constat d'achèvement qu'en raison de son caractère potestatif (conclusions d'appel p. 10 § 1); qu'en retenant que le vendeur arguait de la nullité d'une telle clause en ce qu'elle organisait une procédure non prévue à l'article R 261-1 du Code de la construction et de l'habitation, la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des conclusions du vendeur et violé l'article 4 du Code de procédure civile;

4°) ALORS, à titre subsidiaire, QU'une clause purement potestative est nulle; qu'en l'espèce, la clause prévoyant une procédure de constat d'achèvement des travaux faisait dépendre le paiement du solde du prix de vente de la seule volonté des époux X..., selon qu'ils acceptaient ou non de constater l'achèvement des travaux; que dès lors, en refusant de prononcer la nullité de ladite clause, la Cour d'appel a violé les articles 1170 et 1174 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION 

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré irrecevables les demandes en paiement formées par la SCI Le Pivert Sénéchal à l'encontre de Monsieur et de Madame X..., et D'AVOIR condamné la SCI Le Pivert Sénéchal à payer à Monsieur et Madame X... la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;

AUX MOTIFS PROPRES ET éventuellement REPUTES ADOPTES ci-avant rappelés (p. 4-5);

1°) ALORS. D'UNE PART, QUE les conventions légalement formées peuvent être révoquées par consentement mutuel des parties; que dès lors, en s'abstenant de rechercher, comme cela lui était demandé, si les acquéreurs n'avaient pas reçu et accepté les clefs, et si cette circonstance ne révélait pas un accord des parties pour constater l'achèvement de l'immeuble et se dispenser de la procédure de constat formel prévue à l'origine, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil, ensemble l'article R 261-1 du Code de la construction et de l'habitation 

2°) ALORS, D'AUTRE PART. QU'une clause contractuelle invoquée de mauvaise foi ne peut recevoir application ; que dès lors, en s'abstenant de rechercher, comme cela lui était demandé, si les époux X... n'avaient pas donné l'immeuble à bail, et si dans ces conditions ils ne faisaient pas preuve de mauvaise foi en invoquant l'absence de procès-verbal d'achèvement pour refuser de payer le solde du prix de vente, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1135 du Code civil."