Vente immobilière et amiante (lundi, 12 octobre 2009)

Cet arrêt pose comme principe que le vendeur doit faire réaliser un contrôle de la présence d'amiante mais qu'il n'est pas obligé de garantir l'absence d'amiante.

 


"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 décembre 2007), que les consorts X... ont vendu aux époux Y... une maison d'habitation, la promesse puis l'acte authentique de vente précisant qu'il résultait d'une attestation délivrée par le cabinet Bati Plans qu'il n'existait pas de produits susceptibles de contenir de l'amiante ; qu'ayant fait procéder à un nouveau diagnostic révélant la présence d'amiante, les époux Y... ont assigné les vendeurs, sur le fondement des articles 1604 et 1641 du code civil, et la société AR EX CO exerçant sous l'enseigne Bati Plans, ainsi que son assureur la société Axa France IARD venant aux droits de la société Axa courtage, sur le fondement de l'article 1382 du code civil, en paiement de diverses sommes, dont les frais de désamiantage et de reconstruction ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu que pour condamner les consorts X... au paiement des sommes réclamées, l'arrêt retient que ceux ci ont failli à leur obligation d'information et de sécurité en assurant à deux reprises que l'immeuble était exempt d'amiante, que si leur bonne foi n'est pas en cause, dès lors, d'une part, qu'il n'est pas établi qu'ils avaient une connaissance personnelle de l'existence d'amiante et que, d'autre part, ils avaient sollicité l'examen des lieux par un professionnel muni d'une attestation de compétence, ils sont néanmoins tenus de répondre de leur obligation envers leurs acquéreurs ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la législation relative à la protection de la population contre les risques sanitaires liés à une exposition à l'amiante dans les immeubles bâtis, n'oblige le propriétaire de l'immeuble qu'à transmettre à l'acquéreur l'état établi par le professionnel, sans constater l'existence d'un engagement spécifique des vendeurs de livrer un immeuble exempt d'amiante, la cour d'appel a violé le texte susvisé
;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen unique du pourvoi incident :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 décembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne les époux Y... aux dépens des pourvois ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les époux Y... à payer aux consorts X... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande des époux Y... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt.

Moyen produit AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour les consorts X....

Il est fait grief à l'arrêt d'AVOIR condamné les consorts X..., in solidum avec la société AR EX CO, à verser aux époux Y... la somme de 19. 728, 69 en réparation du coût des matériaux contenant de l'amiante et de reconstruction ainsi que la somme de 30. 000 en réparation de leur préjudice moral et leur trouble de jouissance ;

AUX MOTIFS QUE les époux Y... ont acquis des consorts X... une maison d'habitation ... à Bry sur Marne ; que la promesse de vente du 18 juin 2005 mentionnait « le promettant déclare avoir effectué les recherches en conformité avec ledit décret (du 3 mai 2002) ainsi qu'il résulte d'une attestation délivré par le cabinet Bati Plans le 7 mars 2003. Il résulte de cette recherche que toutes les parties du bien ont été visitées et qu'il n'existe pas de produits susceptibles de contenir de l'amiante » ; que cette mention a été reprise dans l'acte authentique du 16 septembre 2003 ; que l'article 5-69 du décret du 21 mai 2003 mentionne que les propriétaires des immeubles dont le permis de construire a été délivré avant le 1er juillet 1997 produisent, au plus tard à la date de toute promesse de vente ou d'achat, un constat précisant la présence ou, le cas échéant, l'absence de matériaux et produits contenant de l'amiante mentionnés à l'annexe 13. 9 ; que le repérage s'effectue vers des matériaux et produits accessibles et sans travaux destructifs ; qu'il est constant que l'immeuble objet de la vente était soumis par la date de son permis de construire à cette réglementation ; que le rapport de Bati Plans conclut à un repérage négatif après visite de toutes les parties, inspection visuelle, sondages et prélèvements ; qu'aux termes du rapport d'expertise de Monsieur Z..., la présence de matériaux contenant de l'amiante est avérée, pour ce qui concerne l'habitation proprement dite, dans les panneaux muraux, les conduits et gaines de chauffage, revêtements de sol ; que ces matériaux sont accessibles directement ou par trappe et dévissage de grille de soufflage ; que les consorts X... ont failli à leur obligation d'information et de sécurité en assurant à deux reprises que l'immeuble était exempt d'amiante ; que si leur bonne foi n'est pas en cause dès lors d'une part qu'il n'est pas établi qu'ils avaient une connaissance personnelle de l'existence d'amiante et que d'autre part ils avaient sollicité l'examen des lieux par un professionnel muni d'une attestation de compétence, ils sont néanmoins tenus de répondre de leur obligation envers les acquéreurs ;

1°) ALORS QU'à défaut d'engagement spécifique en ce sens, le vendeur d'un immeuble qui se borne à préciser qu'il s'est conformé à la législation applicable en matière d'amiante en annexant un rapport sur la présence d'amiante dans l'immeuble vendu, n'est pas tenu de garantir l'absence d'amiante ; qu'en retenant que les consorts X..., vendeurs d'un immeuble dans lequel des produits contenant de l'amiante avaient été détectés, avaient « failli à leur obligation d'information et de sécurité en assurant à deux reprises que l'immeuble était exempt d'amiante » de sorte qu'il devaient en répondre envers leurs acquéreurs (arrêt page 5, al. 4), quand aucune obligation de garantir l'absence d'amiante n'avait été stipulée au contrat, lequel se bornait à préciser que les vendeurs avaient fait un réaliser un rapport sur la présence d'amiante, conformément à la législation en vigueur, la Cour d'appel a violé les articles 1134 et 1604 du Code civil ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse, l'obligation de sécurité consistant, pour un vendeur, à ne livrer que des produits exempts de tout vice ou de tout défaut de fabrication de nature à créer un danger pour les personnes ou les biens, ne pèse que sur le seul vendeur professionnel ; qu'en retenant que les consorts X..., simples vendeurs profanes, avaient failli à leur obligation de sécurité en vendant un immeuble comportant de l'amiante, la Cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;

3°) ALORS QU'en toute hypothèse, les consorts X... faisaient valoir (conclusions signifiées le 3 mai 2007, page 6, al. 8 à 14 ; page 7, al. 6) que le contrat de vente litigieux contenait une clause d'exclusion de garantie des vices cachés ; qu'en condamnant les consorts X... à garantir leurs acquéreurs de la présence d'amiante dans l'immeuble vendu, sans répondre à ce moyen, la Cour d'appel, qui avait expressément relevé la bonne foi des consorts X... « dès lors qu'il n'était pas établi qu'ils avaient une connaissance personnelle de l'existence d'amiante » (arrêt page 5, al. 4), a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile. Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour les époux Y....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir limité à la somme de 19. 728, 69 le montant des dommages-intérêts alloués aux époux Y... au titre de la réparation de leur préjudice matériel

AUX MOTIFS QUE les époux Y..., dont le consentement n'a pas été pleinement éclairé, devront être remboursés in solidum du coût des travaux de retrait et de reconstitution suivant les devis soumis à l'examen de l'expert, à l'exclusion des devis majorés qui n'ont pu être appréciés par celui-ci ;

ALORS QUE le juge ne peut écarter les documents qui lui sont soumis au seul motif qu'ils n'ont pas été auparavant communiqués à l'expert ; qu'en se prononçant comme ci-dessus, sans examiner les éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1315 et 1353 du Code civil."