Emprunt, condition suspensive, article 1178 du code civil et charge de la preuve (jeudi, 05 mars 2009)

Quelques arrêts sur cette question :

 

1er arrêt :

 

« Attendu, selon les énonciations des juges du fond (Paris, 29 octobre 1996), que, par un acte notarié du 1er octobre 1987, M. et Mme Y... ont consenti à M. et Mme X... une promesse unilatérale de vente portant sur une maison, l'acte précisant que la vente devrait intervenir au plus tard le 30 novembre suivant et qu'elle était soumise à l'obtention d'un prêt de 336 000 francs au taux maximum de 10 % pour une durée minimale de 15 ans ; qu'une somme de 40 000 francs a été versée en compte séquestre par les époux X... à titre d'indemnité d'immobilisation ; que, le 14 octobre 1987, le Crédit foncier a présenté à ceux-ci une offre de prêt de 336 000 francs pour une durée de dix ans au taux moyen de 9,70 % l'an, le taux effectif global devant être de 10,96 % ; que, le 20 octobre, M. X... a écrit au Crédit foncier pour l'informer qu'il avait, depuis sa demande, perdu son emploi et qu'il ne pouvait plus faire face à ses engagements, lui demandant de lui accorder un " refus de prêt " comme convenu, à la suite de quoi cet établissement de crédit a classé le dossier ; que les époux X... ont alors réclamé aux époux Y... le remboursement de l'indemnité d'immobilisation ;

 

 

Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leur demande, alors que, d'une première part, en déclarant accomplie la condition suspensive d'obtention du prêt après avoir constaté l'absence de concordance entre l'offre de l'organisme de crédit et les caractéristiques du financement stipulé dans la promesse de vente, la cour d'appel aurait violé les articles L. 312-15 et L. 312-16 du Code de la consommation ; que, d'une deuxième part, en privant les demandeurs du droit de se prévaloir de la non-réalisation de la condition par cela seul qu'ils ne produisaient pas aux débats leur demande de prêt, la cour d'appel aurait privé sa décision de base légale au regard des mêmes textes ; que d'une troisième part, en considérant qu'il appartenait aux acquéreurs obligés sous la condition suspensive d'obtention d'un prêt de prouver avoir présenté à l'organisme de crédit une demande conforme aux stipulations contractuelles, la cour d'appel aurait inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du Code civil ; alors que, d'une quatrième part, en décidant que la condition s'était réalisée alors que l'organisme de crédit avait annulé son offre après avoir appris le licenciement de l'un des emprunteurs, la cour d'appel aurait encore violé les articles L. 312-15 et L. 312-16 du Code de la consommation ; et alors que, enfin, en décidant que la conformité de l'offre de prêt à la demande des acquéreurs ayant entraîné la réalisation de la condition suspensive, le moyen tiré par les époux X... de leur motif légitime de refuser l'offre en raison du licenciement de l'un d'eux devenait sans objet, la cour d'appel aurait méconnu ses pouvoirs en violation des mêmes textes ;

 

 

Mais attendu, d'abord, qu'il appartient à l'emprunteur de démontrer qu'il a bien sollicité un prêt conforme aux caractéristiques définies dans la promesse de vente et que, faute d'avoir demandé l'octroi d'un tel prêt, la condition suspensive doit être réputée accomplie par application de l'article 1178 du Code civil ; qu'ayant relevé que les époux X... ne produisaient pas la demande de prêt faite à l'établissement de crédit ni aucun document permettant de démontrer que l'offre de prêt qu'ils avaient reçue ne correspondait pas à leur demande, c'est à bon droit et sans inverser la charge de la preuve que la cour d'appel a énoncé qu'ils ne pouvaient soutenir que la condition suspensive ne s'était pas réalisée ; qu'ensuite, l'arrêt énonce que M. X... n'a pas apporté la preuve de son licenciement ; qu'il s'ensuit que le moyen, mal fondé en ses trois premières branches, est inopérant en ses deux autres branches. »

 

2ème arrêt :

 

« Vu l'article 1178 du Code civil, ensemble l'article 1134 de ce Code ;

 

 

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 13 mars 1997), que, suivant un acte du 29 septembre 1992, les époux Y... ont vendu une maison d'habitation aux époux X..., sous la condition suspensive, à réaliser avant le 13 novembre 1992, de l'obtention d'un prêt d'un montant de 750 000 francs remboursable sur quinze années au taux d'intérêt maximum de 11 %, l'acte stipulant que les acquéreurs s'obligeaient à déposer leur demande de prêt dans les 10 jours et à en justifier au vendeur dans les 15 jours ; que, le 7 décembre 1992, les époux X... ont fait parvenir un courrier du Crédit lyonnais, en date du 2 décembre 1992, faisant état d'un refus de prêt ; que les époux Y... ont assigné les époux X... en paiement de la somme de 83 000 francs, versée à titre d'indemnité d'immobilisation, sur le fondement de l'article 1178 du Code civil ;

 

 

Attendu que pour débouter les époux Y... de cette demande, l'arrêt retient qu'il résulte des termes non ambigus de la lettre adressée le 2 décembre 1992 par le Crédit lyonnais à Mme X... que celle-ci avait bien fait une demande de crédit à laquelle la banque n'a pas donné suite et qu'il n'est pas prouvé par les époux Y... que la non-obtention du prêt a pour cause la faute des acquéreurs ;

 

 

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle relevait que les époux X... n'avaient pas justifié avoir déposé leur demande de prêt dans le délai de 10 jours stipulé à l'acte et sans rechercher si la demande de prêt était conforme aux caractéristiques prévues dans la promesse de vente, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. »

 

 

3ème arrêt :

 

« Attendu que les époux Y... ont promis de vendre une maison aux époux X... sous la condition suspensive de l'obtention d'un prêt de 700 000 francs sur une durée maximale de vingt ans ; que ces derniers ont, à cette occasion, versé entre les mains d'un tiers la somme de 50 000 francs ; qu'ayant remis aux vendeurs les attestations de quatre établissements de crédit refusant le prêt, les acquéreurs ont sollicité la restitution de la somme par eux versée, ce à quoi les vendeurs se sont opposés ;

 

 

Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt attaqué (Douai, 17 mai 1999) d'avoir fixé à 40 000 francs la somme susceptible de revenir aux époux Y... et décidé que la totalité du solde devait leur être restituée, alors que :

 

 

1° en retenant, pour refuser aux acquéreurs la restitution de l'acompte, que les attestations émanant des organismes bancaires ayant rejeté leurs demandes ne permettaient pas d'être renseigné sur les éléments d'information communiqués aux banques concernées et qui étaient à l'origine des rejets difficilement explicables en l'état de leurs ressources et que les époux X... ne mettaient pas les juges en mesure de s'assurer que leur demande était assortie de renseignements précis, complets et exacts quant à leur situation financière, la cour d'appel aurait violé les articles 17 de la loi du 13 juillet 1979, devenu l'article L. 312-16 du Code de la consommation, 1178 et 1315 du Code civil ;

 

 

2° en fixant à 40 000 francs la somme susceptible de revenir aux époux Y... et en décidant que la totalité de la somme restante devrait être restituée aux époux X..., sans tenir compte de la demande de restitution du 7 novembre 1995, la cour d'appel aurait violé l'article 17 de la loi du 13 juillet 1979, devenu l'article L. 312-16 du Code de la consommation ;

 

 

Mais attendu qu'il appartient à l'acquéreur de démontrer qu'il a bien sollicité un prêt conforme aux caractéristiques définies dans la promesse de vente et que faute d'avoir demandé l'octroi d'un tel prêt, la condition suspensive doit être réputée accomplie par application de l'article 1178 du Code civil ; qu'ayant relevé que les époux X... ne produisaient pas les demandes de prêt faites aux établissements de crédit, mais, outre des documents qui ne donnaient pas une vision exacte de leurs revenus à la date de la promesse comme s'appliquant à une période où seul le mari travaillait, des attestations des établissements bancaires qui avaient rejeté leurs demandes de crédit, ce qui ne permettait pas de connaître les éléments d'information qu'ils avaient communiqués à ces établissements et qui étaient à l'origine du rejet des demandes, c'est à bon droit, et sans inverser la charge de la preuve, que la cour d'appel a statué comme elle a fait ; que mal fondé en sa première branche, le moyen est inopérant en son second grief relatif au bénéfice d'intérêts majorés, le texte invoqué ne pouvant recevoir application dès lors que la condition résolutoire était réputée accomplie. »